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Poch Thérapie méditative n°1 pour les haineux

Portrait de borniol

Ce billet fait suite au post de nical sur l'agressivité filmée de Mr Doc Gynéco. Derrière ce comportement agressif qui peut n'être que rare ou passager, se cache généralement la colère, parfois la haine et la vengeance. Merci donc nical de me tendre la perche, pour ébaucher une "poch' thérapie médidative pour les haineux". 

J'invite donc tout le monde à suivre cette méditation pour combattre plus généralement l'origine de la colère, l'agressivité, la haine et la vengeance...

Les visages hideux de la haine

La colère, précurseur de la haine, obéit à la pulsion d'écarter quiconque fait obstacle à ce qu'exige le moi, sans considération pour le  bien  être d'autrui...Elle s'enflamme dans la haine, qui est le désir et l'acte de nuire à quelqu'un, directement ou par des voies détournées, en détruisant les causes de son bonheur....

L'esprit obsédié par l'animosité et le ressentiment s'enferme dans l'illusion et se persuade que la source de son insatisfaction réside entièrement à l'extérieur de lui-même. En vérité, même si le ressentissement à été déclenché par un objet extérieur, il se trouve dans notre esprit.

Maitre Dilgo Khyensté Rinpoché (drôle de nom de poch) expliquait :

"La haine ou la colère que l'on peut ressentir pour une personne ne lui sont pas inhérentes, elles n'existent que dans notre esprit. Dès que nous voyons celui que nous considérons comme un ennemi, toute nos pensées se fixent sur le souvenir du mal qu'il nosu a fait, sur ses attaques présentes et celles qu'il pourrait entreprendre dans le futur. L'irritation, puis l'exaspération nous gagnent, au point que nous ne pouvons plus supporter d'entendre son nom.Plus nous laissons libre cours à ces pensés, plus la fureur nous envahit et, avec elle, l'envie irrésistible de saisir une pierre ou un bâton. C'est ainsi qu'une simple boufée de colère peut conduire au paroxysme de la haine !"

Le Dalaï Lama donne également une réponse :

"En cédant à la haine, nous ne faisons pas nécessairement du tort à notre ennemi, mais nous nuisons à coup sûr à nous-même. Nous perdons notre paix intérieure, nous ne faisons plus rien correctement, nous digérons mal, nous ne dormons plus, nous faisons fuir ceux qui viennent nous voir, nous lançons des regards furieux à ceux qui ont l'audace d'être sur notre passage. Nous rendons la vie impossible à ceux qui habitent avec nous et nous éloignons même nos amis les plus chers. Et comme ceux qui compatissent avec nous se font de moins en moins nombreux, nous sommes de plus en plus seuls. [...] A quoi bon ? Même si nous allons jusqu'au bout de notre rage, nous n'éliminerons jamais tous nos ennemis. Connaissez-vous quelqu'un qui y soit parvenu ?. Tant que nous hébergeons en nous cet ennemi intérieur qu'est la colère ou la haine, nous aurons beau détruire nos ennemis extérieurs aujourd'hui, d'autres surgiront demain".

Ainsi de toute évidence, la haine est novice, qu'elles que soient l'intensité et les circonstances qui la motivent. Une fois que la haine nous submerge, nous ne sommes plus maître de nous-même et il nous est impossible de penser en terms d'amour et de compassion. Nous suivons alors aveuglément nos penchants destructeurs. Pourtant la haine commence toujours par une simpke pensée. C'est à ce moment précis qu'il faut intervenir et recourrir à une des méthodes de dissolution des émotions négatives (techniques utilisées dans la pratique du bouddhisme)

 

Le désir de vengeance, sosie de la haine

Il est important de souligner que l'on peut éprouver une profonde aversion à l'égard de l'injustice, de la cruauté, de l'oprression, du fanatisme, des motivations et des actes nuissibles et faire tout son possible pour els contrecarrer, sans pour autant succomber à la haine.

Si l'on regarde un individu en proie à la haine, la colère et l'agressivité, à la lumière ciolenet et crue de tels débordement, on devrait le considérer davantage comme un malade qu'un ennemi. Un être qu'il faut guérir et non punir. [...] Si un malade pris de folie s'attaque au médecin, ce dernier doit le maîtriser et le soigner sans éprouver de haine en retour. On peut éprouver une répulsion sans bornes envers les méfaits commis par un individu ou groupe d'individus, ainsi qu'une profonde tristesse à l'égard des souffrances qu'ils ont engendrées, sans céder au désir de vengeance. La tristesse et la répulsion doient être associées à une profone compassion motivée par l'état misérable dans lequel est tombé le criminel. Il convient de distinguer le malade de sa maladie. 

Il est donc important de ne pas confondre le dégoût et la répulsion deans un acte abominable avec la condamnation irrévocable et perpétuelle d'une personne. Certes, l'acte ne s'est pas fait tout seul, mais même s'il pense et se comporte à présent de façon extrêmement nocive, le plus cruel des tortionnaires n'est pas né cruel, et qui sait ce qu'il sera dans vingt ans ? Qui peut affirmer qu'il ne changera pas ?

Voici le cas d'un prisonnier détenu dans une prison américaine pour criminels récidivistes qui continuent bien souvent de s'entre-tuer à l'intérieur même de leur géôle. L'un des caïdsde la maiso d'arrêt décida un jour, pour passer le temps, de participer aux sessions de méditation proposées aux prisonniers. Il témoigne :

"Un jour, il m'a semblé que jusque-là je n'avais pensé et agi qu'en terms de haine et de violence, dans un état semblable à la folie. Je me suis brusquement rendu compte de l'inhumanité de mes actes et j'ai commencé à envisager le monde et les autres sous un jour totalement différent".

Pendant un an, il s'est efforcé de fonctionner sur un mode plus altruiste et d'encourager ses compagnons à renoncer à la vioence. Puis on l'assassina avec une lame de verre dans les toilettes de la prison. Vengeance d'un crime passé. Ces transformations sont rares que parce qu'on ne fournit généralement pas aux prisonniers les conditions qui les rendent possibles.

Comme le dit le Dalaï Lama :

"Il peut être nécessaire de neutraliser un chien méchant qui mord tout le monde à la ronde, mais à quoi bon l'enchaîner ou lui loger une balle dans la tête lorsqu'il n'est plus qu'un vieux cabot édenté qui tient à peine sur ses pattes." 

 

Celui qui a perdu toute intention et tout pouvoir de nuire peut-être considéré comme une autre personne.

On pense communément que répondre au mal par la fureur et la violence constitue une réaction "humaine" dictée par la souffrance et le besoin de "justice". Mais une humanité véritable ne consiste t-elle pas à éviter de réagir par la haine ?  A la suite de l'attentat à la bombe qui fit plusieurs centaines de victimes à Oklaoma City en 1998, on demanda au père d'une petite fille de 3 ans qui périt dnas l'attentat q'il souhaitait que Timoty McVeigh, le responsable de cette tuerie, soit éxécuté. Il répondit : "Je n'ai pas besoin d'un mort de plsu pour adoucir ma douleur". Cette attitude n'a rien à voir avec la faiblesse, la lâcheté ou un quelconque compromis. Il est possible d'avoir une conscience aiguë du caractère intolérable d'une situation et de la nécessité d'y remédier, sasn pour autant être mû par la haine. On peut neutraliser un dangereux coupable par tous les moyens nécessaires (y compris la violence si aucun autre moyen n'est envisageable) , sans perdre de vue qu'il n'est qu'une victime de ses pulsions.

Un jour, le Dalaï-Lama reçut la visite d'un moine qui arrivait du Tibet après avoir passé 20 ans dans les camps de travaux forcés chinois. ses totionnaires l'avaient mené plusieurs fois aux limites de la mort. Le Dalaï-Lama s'entretint longuement avec lui, ému de voir ce moine si serein après avoit tant souffert. Il lui delmanda s'il lui était arrivé d'avoir peur. Le moine répondit : "J'ai eu souvent peu de haïr mes tortionnaires, car ce faisant, je me serais détruit moi-même".

"Je ne vois pas d'autres issue : que chacun de nous fasse un retour sur lui-même et extirpe et anéantisse en lui tout ce qu'il croit devoir anéantir chez les autres. Et soyons bien convaincus que le moindre atome de haine que nous ajoutons à ce monde nous le rend plus inhospitalier qu'il n'est déjà". Etty Hillesum

Une telle attitude est-elle concevable si un assassin s'introduit dans votre maison, viole votre femme, tue votre petit garçon et s'enfuit en emmenant votre fille de sieze ans ? Pour tragique, abominable et intolérable que soit une telle situation, la question qui se pose inévitablement est : "Que faire après cela ?" Dans tous les cas, la vengeance n'est pas la solution la plus appropriée. Pourquoi ? demanderont ceux qui se sentent irrésistiblement portés à exiger réparation par la violence. Par ce qu' a long terme,  elle est incapable de nous apporter un paix durable. Elle ne console de rien et exaspère la haine. Il n'y a pas si longtemps de cela, en Albanie, la tradition de la vendetta exigeait que l'on se venge d'un meurtre en tuant tous les membres mâles de la famille ennemie, même  si cela devait prendre des années, et en interdisant aux femmes de se marier, à la seule fin d'éradiquer la fatrie adverse.

Comme le disait Gandhi : "Si l'on pratique "oeil pour oeil, dent pour dent", le monde entier sera bientôt aveugle et édenté".

Généralement, notre compassion et notre amou dépendent de l'attitude bienveillante ou agressive dont les autres font preuve à notre égard et envers nos proches. C'est pourquoi il nous est extrêmement difficile d'éprouver un sentiment de compassion pour ceux qui nous nuisent. La compassion bouddhiste, pourtant revient à souhaiter de tout son coeur que tous les êtres sans distinction soient libérés de la la souffrance et de ses causes, en particulier la haine. On peut aussi aller plsu loin et, mû par l'amour altruiste, désirer que tous les êtres, le criminel y compris, trouvent les causes du bonheur.

[...]

On sait que la peine de mort  ne constitue même pas une dissuasion efficace. La supression de la peie de mort en Europe n'a pas donné lieu à une augmentation de la criminalité, et son rétablissement dans certains états d'Amérique du Nord ne l'a pas diminuée. La détention perpétuelle suffisant pour empêcher un meutrier de récidiver, la peine de mort n'est donc qu'une vengeance légalisée.

"Si le crime est une transgression de la loi, la vengeance est ce qui s'abrite derrière la loi pour commetre un crime", écrit Bertrand Vergely.

A la télévison Japonaise,  un homme politique disait à l'un de ses opposants en pleine session de l'assemblée nationale : " Puissiez-vous mourrir un million de fois !" Pour celui qui ne pense qu'a se venger, même si son ennemi pouvait mourrir un million de fois , cela ne suffirait toujours pas à le rendre heureux. La raison en est simple : le but de la vengeance n'est pas de soulager notre peine, mais d'infliger de la souffrance aux autres. 

Haïr la haine

Que reste t-il comme cible de notre ressentiment ? la haine elle-même. Comme le dit Khyentsé Rinpoché (sonne vraiment bien ce nom :) : "Il est temps de détourner le haine de ses cibles habituelles, vos prétendus ennemis, pour la diriger contre elle-même. En effet, c'est la haine votre véritable ennemie, et c'est elle que vous devez détruire".

Cela fait ainsi écho, 12 siècles plus tard, au poète bouddhiste indien, Shanditeva : "Combien tuerais-je de méchants ? Leur nombre est infini comme l'espace. Mais si je tue l'esprit de haine, tous mes ennemis sont tués en même temps".

Il n'existe d'autres remèdes que la prise de conscience personnelle, la transformation intérieure et la persévérance altruiste. Le mal est un état pathologique. Une société malade, en proie à une fureur aveugle à l'égard d'une autre partie de l'humanité, n'est qu'un ensemble d'individus aliénés par l'ignorance et la haine. En revanche, lorsqu'un nombre suffisant d'individus ont accompli ce changement altruiste, la société peut alors évoluer vers une attitude collective plus humaine, intégrer dans ses lois le refus de la haine et de la vengeance, abolir la peine de mort, promulguer le respect des droits de l'homme et le sens de la responsabilité universelle. Mais il ne faut jamais oublier qu'il ne peut y avoir de désarmement extérieur dans désarmement intérieur.

Pour terminer cette "poch' thérapie médidative pour les haineux", sachez que ceci n'est pas adressé en particulier à Mr Doc Gynéco, vous l'aurez compris mais à chacun d'entre nous et à tous ceux désireux d'adopter la Poch'Attitude dont parlais Nical .

Pour finir sur un belle note "L'amour est la seule chose qui double à chaque fois qu'on le partage". Albert Schweitzer.  

Méditons !...

Un peu de lecture :

Pour aller plus loin :

Embrasser sa colère , par Thich Nhat Hanh
Le discours sur les cinq façons de mettre fin à la colère
Apprenez à transformer la colère grâce à la compassion , par Lama Zopa Rinpoché

Avis de poch
(3 votes)

Commentaires

Portrait de fabou

Mise en pratique

Difficile de ressentir autre chose que de la haine vis à vis d'un individu qui se comporte à l'opposé de ce que j'estime être l'attitude "juste". 

Celui qui fait peser une vraie menace sur mes proches ou moi-même devrait provoquer ma haine d'instinct ( personne à date n'en ai arrivé là ).

Celui qui attente à la vie de mes proches s'expose à ma vengeance. Réaliser sa vengeance n'apaise pas, mais la vengeance n'a pas pour finalité l'apaisement ( qui ne viendra sans doute jamais ).

La haine comme l'amour nous accompagne tout au long de notre existence ( je crois ). Il est peut-être souhaitable de minimiser l'un pour maximiser l'autre. J'essaierais...

Ceci dit, ce n'est que confronter à des situations susceptibles de provoquer ma haine que je pourrais mesurer les progrés réaliser dans cette voie.

Portrait de borniol

Le bouddhisme "engagé" selon Maître Thich Nhat Hanh

Le bouddhisme "engagé" selon Maître Thich Nhat Hanh

Par Vincent Bardet

Vincent Bardet : Depuis toujours vous présentez la figure d’un bouddhisme engagé, vous étiez ami du pasteur Martin Luther King qui vous a proposé pour le prix Nobel de la paix. Et vous conduisiez la délégation des bouddhistes vietnamiens lors des pourparlers pour un accord de paix en 1972 à Paris. En lisant vos livres, je me demande si du fait que le Bouddha lui-même était issu de la caste des guerriers ksatriya, le bouddhisme n’apporte pas seulement un message de détachement, le Dharma peut nous aider aussi à vivre ensemble en société. Quelle est votre expérience au Village des Pruniers et d’une façon plus générale ?

Thich Nhat Hanh : Le Bouddha dit qu’il est possible de vivre heureux dans le moment présent, cela c’est déjà une base du bouddhisme engagé. La sagesse profonde c’est de prendre conscience que tout ce que nous avons c’est ce moment présent. Pendant la guerre du Vietnam nous avons vu la mort, la destruction, la colère, la discrimination, etc. Avec la méditation bouddhique et la compréhension de l’interdépendance, on constate que des deux côtés les gens souffrent, les communistes comme les anticommunistes, les soldats et les civils américains également. Pour tuer il faut devenir moins que des hommes, on a besoin de discrimination, de colère, de haine pour plonger la baïonnette dans le corps de l’autre. Et la machine de guerre nous conditionne, elle nous nourrit de colère, elle nous fait décrire l’autre comme un monstre, un danger à éliminer. Or l’autre est un être vivant comme nous, il a peur de mourir, il a une famille dont il doit prendre soin, c’est la machine de guerre qui l’a placé là pour tuer et pour être tué. Le bouddhisme aide à maintenir vivace cette vision de l’autre, c’est pourquoi les deux parties belligérantes nous attaquent pour notre pacifisme, pour notre fraternité et pour notre compassion. Nos écrits sont interdits par les deux gouvernements du Sud et du Nord, les poèmes et la littérature anti-guerre circulent dans la clandestinité, grâce au Dharma nous avons pu rester humains dans cette machine de guerre. Les bombes tombent sur nos villages, causant des morts et des blessés, on a dû alors sortir des monastères afin d’aider les gens. La méditation c’est aussi être là pour témoigner de ce qui se passe dans le moment présent. Nous voulons soulager la douleur et la souffrance de nos compatriotes, tout en continuant notre pratique, le bouddhisme engagé est né de la situation de guerre, c’est la méditation en action, la compassion en action, et non pas dans l’imagination. La réconciliation est l’unique chance d’arrêter la guerre mais le mot même est banni par les deux camps. Il nous reste à alerter l’opinion publique internationale, en Amérique et en Europe, en lui fournissant des informations sur la réalité de la guerre au Vietnam, sur les aspirations authentiques du peuple vietnamien, composé d’une majorité de paysans et de gens pauvres qui ne veulent pas de la victoire d’un camp mais l’arrêt de la destruction. Les bombes et les mortiers pleuvent, les mass-média appartiennent aux belligérants, le suicide par le feu devient une méthode de communication afin que le message parvienne, et soit compris, en Amérique et en Europe. Il faut beaucoup de courage, de compassion, de sens du sacrifice pour accomplir cet acte, ce n’est pas la colère de la protestation. Je suis sorti du pays pour témoigner auprès des communautés religieuses et intellectuelles, on m’empêche de retourner au pays. Dans l’exil, pour survivre et pour vivre tout simplement, j’ai dû rassembler une sangha. Je continue ainsi à pratiquer le Dharma et je suis amené à le partager avec les autres. Vis-à-vis de nos amis occidentaux notre intention n’est pas de déraciner les gens, car notre propre vécu nous montre qu’une personne déracinée ne peut être heureuse. Nous exhortons donc nos amis, surtout les jeunes, à revenir à leurs traditions, à leur culture, à pratiquer la non-dualité bouddhique pour réintégrer leurs familles, leur propre milieu.

Vincent Bardet : Justement, à propos de votre livre « Bouddha vivant, Christ vivant », je voudrais vous demander quand et comment vous avez personnellement rencontré le personnage du Christ dont vous parlez de manière extraordinaire dans ce livre ?

Thich Nhat Hanh : Grâce à des moines chrétiens qui ont su incarner l’esprit du christianisme, j’ai pu toucher Jésus comme un maître et cela était difficile au Vietnam à cause de l’Histoire du colonialisme. Dans le bouddhisme nous avons des clés telles que l’impermanence, l’interdépendance des êtres, le non-soi, qui permettent de comprendre Jésus, et d’ouvrir les portes ou les coffres, et de découvrir des joyaux, certains mêmes cachés à des chrétiens qui n’ont pas pu les identifier. Nous disons que « ceci étant, cela est », c’est une vérité universelle. Donc le Créateur, la créature et la création ne peuvent être dissociés. Le Père contient le Fils et le Saint Esprit, le Fils contient le Père et le Saint Esprit, tout comme Jésus est à la fois le fils de Dieu et le fils de l’Homme. Pour un méditant bouddhiste il est merveilleux d’entrer dans d’autres traditions en pratiquant le regard profond, il pourra faire des découvertes spectaculaires. Je pense qu’au 21e siècle la rencontre entre le bouddhisme et l’Occident sera particulièrement excitante si nous savons emprunter l’avenue de la contemplation profonde.

Vincent Bardet : Je m’adresse maintenant au poète et au romancier. J’ai apprécié votre souffle, votre talent, votre audace dans le roman « Sur les traces de Siddhartha ». Que s’est-il passé en vous en tant qu’écrivain, quel était le déclic pour vous lancer dans cette entreprise qui a finalement donné un très grand roman ?

Thich Nhat Hanh : J’ai constaté que les poèmes, les nouvelles, les romans communiquent mieux que les essais. Un poème dit des choses qu’un essai ne dit pas, c’est un meilleur véhicule pour exposer le Dharma, dans ma prose il y a toujours de la poésie insérée à l’intérieur. Quand je raconte la vie du Bouddha, j’ai dû utiliser mes propres expériences, mes propres douleurs, ma propre souffrance pour le comprendre intimement. J’ai écrit avec ma propre vie et ma propre pratique, et non pas avec mon intellect ni avec mes recherches. Nous devenons nous-mêmes un instrument, tel le microscope ou le télescope, pour examiner profondément les choses et découvrir ce qui reste invisible aux yeux d’autrui. C’était au Village des Pruniers, en 1987-1988, il n’y avait pas de chauffage central, c’était comme s’asseoir avec le Bouddha et prendre une tasse de café, non de thé, avec lui ! (éclats de rires) Il faut se comprendre et comprendre le Bouddha. Pour moi ce ne fut pas un dur labeur mais un bonheur d’écrire ce livre, j’espère que les lecteurs auront du plaisir à le lire. L’enseignement du Bouddha est extrêmement profond mais très simple aussi, on peut le vérifier en lisant le Digha-nikaya, le Majjhima-nikaya, l’Anguttara-nikaya. Ce n’est pas rendre service au bouddhisme ni à nous-mêmes que de vouloir le rendre compliqué. Et la sagesse du Bouddha après son illumination est vivante, elle se développe et grandit avec le temps. Comme nous, le Bouddha apprend aussi en enseignant.

Nguyên Huu Khoa : Maître, pouvez-vous nous évoquer quelques souvenirs de votre maître Chân Thiêt Thanh Quy et nous expliquer le nom qu’il vous a donné ? On vous connaît sous le nom de Trung Quang Nhât Hanh, que signifie-t-il et quel en est le symbole ?

Thich Nhat Hanh : J’ai beaucoup de chance d’avoir un maître comme lui, il était très gentil, très aimant. Une fois je suis sorti de la salle et je n’avais pas refermé la porte de manière correcte, elle a claqué. Il m’a rappelé et il m’a dit : « Novice, tu vas me refaire cela, tu ressors de nouveau et tu refermes la porte derrière toi avec la pleine conscience. » J’ai fait comme il me l’avait demandé et il n’a pas eu à répéter cette leçon une seconde fois. Pour toute ma vie je sais comment refermer une porte. Il m’aimait beaucoup mais il ne le disait pas en parole. Ce poème que vous voyez derrière moi est le poème de transmission. En 1966, avant de partir en Amérique apporter le message des victimes de la guerre, je suis revenu à la pagode pour dire au revoir à mon maître. J’ignorais alors que c’était la dernière fois que nous nous voyions. Je lui ai dit que j’allais m’absenter trois mois et cela fait trente ans que je suis loin du pays. Il a tenu à me garder quelques jours pour procéder à la cérémonie formelle de la transmission de la lampe. Après mon ordination je n’aimais pas le nom de Phùng Xuân, « la Rencontre avec le Printemps », qu’il m’avait donné, je le considérais comme un nom de fille mais plus tard j’ai compris son intention. Phùng Xuân est opposé à la méditation Khô Môc, « l’arbre desséché, mort », c’est une pratique rigide, sans âme, sans joie, destinée à détruire toutes sortes de désirs, même le désir du bodhisattva de revenir. On veut se détacher de tout et on déracine tous les plaisirs et tous les désirs. Phùng Xuân est exactement l’opposé, un poème dit : Une goutte de rosée tombant de la branche de saule que tient le Bodhisattva suffit à redonner vie à un arbre mort. Arroser l’arbre mort c’est comme faire revenir le printemps. Je comprends alors que mon maître veut que ma pratique amène la verdure, la joie aux gens. Nhât Hanh signifie « Une Action, Une Pratique ». Mon nom de lignage est Trung Quang, « la Lumière qui naît de la concentration, qui jaillit d’un point localisé ». Il y a trente ans je n’ai pas bien saisi le sens du poème de transmission, avec le temps il devient de plus en plus clair dans mon esprit. Les quatre vers sont écrits en caractères chinois, ils contiennent mes deux noms Phùng Xuân et Nhât Hanh.

Nhât huong Phùng Xuân dac kiên hành

Hanh duong vô niêm diêc vô tranh

Tâm quang nhuoc chiêu ky nguyên thê

Diêu Phap dông tây kha tu thành

La première phrase signifie : En se dirigeant vers la direction unique à la rencontre du printemps, on obtient la marche héroïque.

La deuxième phrase : Pendant l’action on doit être sans concept et sans concurrence, on doit pratiquer la non-pensée et la non-lutte, ne pas chercher le succès, la renommée.

La troisième phrase : Si la lampe du coeur, de l’esprit, se tourne vers elle-même et éclaire la vraie nature, la source originelle.

La quatrième phrase c’est la conclusion : Alors le Dharma merveilleux se réalise de lui-même à l’Est et à l’Ouest, dans le monde entier.

Par ce poème mon maître me donne une recommandation pour l’action et pour la pratique. Quand je donne à mon tour la transmission de la lampe à mes disciples, je procède de même pour que les disciples aient une direction claire en ce qui concerne leur pratique leur vie durant. Frère Doji et frère Sariputra sont les deux premiers moines occidentaux à avoir reçu la transmission de la lampe, des laïcs occidentaux et des moines vietnamiens l’ont également reçue et commencent à enseigner un peu partout dans le monde. En tout, une soixantaine de personnes ont ainsi reçu l’autorisation d’enseigner, c’est la continuité et j’en suis très heureux. Tous les deux ans nous organisons une retraite de vingt et un jours pour former de futurs instructeurs du Dharma, la prochaine aura lieu en septembre de cette année. Au Village des Pruniers c’est la sangha qui propose les personnes dignes et qui décide du moment de la transmission, ce n’est pas de ma seule décision souveraine. Nous avons véritablement confiance dans la sangha, ses membres pratiquent la pleine conscience en permanence, tous ensemble ils émettent des jugements pertinents et sûrs. La sangha est très importante, le roi de Vaiçali a dit un jour au Bouddha : « Quand je vois votre sangha, vos moines et vos nonnes, j’ai encore plus confiance en vous. » Pour moi un maître sans sangha ne peut pas faire grand chose, je mets donc beaucoup de temps et d’énergie à construire la sangha. Une centaine de personnes vivant ensemble 24 h sur 24, ce n’est pas facile en raison des diversités des gens venant d’horizons différents, mais nous pouvons confirmer qu’il y a de l’harmonie et du bonheur dans notre communauté. Des pratiques telles que « le traité de paix, le nouveau départ, etc. » ont été créées spécialement pour permettre la communication et la compréhension mutuelle, quoi qu’il arrive.

Je voudrais ajouter un mot sur notre voyage de trois mois en Asie l’année dernière. Nous avons visité Taiwan, le Japon, la Corée et la Chine, c’est une expérience très riche et nous avons pu vérifier que le bouddhisme a besoin d’être rénové, réactualisé dans ces pays mêmes. On cherche maintenant un langage nouveau pour transmettre le Dharma, les jeunes ne peuvent comprendre le langage archaïque du passé. En Chine Populaire nous avons offert l’enseignement à un total de 1200 moines et nonnes, avec de la vraie pratique lors des retraites et pas seulement par des conférences. Nous avons été très touchés par l’accueil des deux générations de moines chinois : il y a les plus de 70 ans et les 18-35 ans. Les premiers ont reconnu que nous apportions l’enseignement authentique du Bouddha et ont encouragé les jeunes à suivre cette voie-là. Nous avons passé des moments très heureux avec eux.

À notre époque il faut faire face à nos vrais problèmes actuels, l’objet de la contemplation doit être de résoudre nos problèmes personnels, de dénouer les noeuds constitués à l’intérieur de nous-mêmes. Il ne faut pas s’adonner à la théorie, au formalisme qui n’ont rien à voir avec notre douleur, avec notre souffrance, avec notre désespoir. C’est en s’attaquant aux difficultés de l’homme moderne que le bouddhisme pourra se renouveler, et le développement du bouddhisme en Occident pourra aider le bouddhisme à rajeunir en Orient pour redevenir encore plus vivant et encore plus vigoureux.

Octobre 2000 Vincent Bardet

 

 

-- Topette

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