
Action-CRItique-MEDias [Acrimed] est un Observatoire des médias. Acrimed intervient publiquement pour mettre en question la marchandisation de l'information, de la culture et du divertissement. Acrimed relève également les dérives du journalisme quand il est assujetti aux pouvoirs politiques et financiers et quand il véhicule le prêt-à-penser de la société de marché.
Mis à jour : il y a 36 minutes 31 secondes
mer, 2025-12-03 19:17
img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L150xH79/binetduhamel-60640.png?1764782256' class='spip_logo spip_logo_right' width='150' height='79' alt="" /
div class='rss_chapo'pMardi 2 décembre, la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet est l'invitée de 8h20 sur France Inter, pour la première fois depuis la rentrée. L'occasion d'entendre les revendications des travailleurs ? Ou, pour les deux intervieweurs, de se faire les porte-voix du grand patronat./p/div
div class='rss_texte'pUne fois n'est pas coutume, commençons par la fin de l'entretien. La journaliste Florence Paracuellos, remplaçante temporaire de Nicolas Demorand, lance Sophie Binet sur sa mise en examen pour « injure publique », à la suite d'une plainte déposée par un syndicat patronal :/p
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pstrongFlorence Paracuellos :/strong Un mot sur les grands groupes, et un grand groupe en particulier, Sophie Binet, c'est LVMH, puisque vous voulez revenir ce matin sur votre mise en examen à la suite de propos que vous avez tenus sur Bernard Arnault et d'autres grands patrons. En janvier dernier, ils ont protesté, ces patrons, contre une surtaxe de l'impôt sur les sociétés qui « pousse à la délocalisation », c'est justement ce que disait Bernard Arnault, et vous avez réagi en disant la chose suivante : « les rats quittent le navire » [Elle insiste sur le mot « rat », NDLR]. C'est cette phrase qui vous vaut d'être poursuivie en justice aujourd'hui par le mouvement patronal ETHIC./p
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pFlorence Paracuellos avait à ce stade plusieurs possibilités devant elle : rappeler aux auditeurs que la mise en examen est automatique dans ce type de procédure ; resituer le a href="https://www.humanite.fr/social-et-economie/sophie-de-menthon/ethic-cest-la-pratique-amorale-et-decomplexee-du-liberalisme" class="spip_out" rel="external"lobby patronal en question/a, dirigé par l'ex-Grande gueule a href="https://rapportsdeforce.fr/pas-de-cote/qui-est-sophie-de-menthon-a-lorigine-de-la-plainte-contre-sophie-binet-120226260" class="spip_out" rel="external"Sophie de Menthon/a, « ientremetteuse entre l'extrême droite […] et les milieux d'affaires/i »span class="spip_note_ref" [a href="#nb1" class="spip_note" rel="appendix" title="D'après Laurent Mauduit, dans L'Humanité (9/09/25)." id="nh1"1/a]/span ; ou encore s'étonner que l'on puisse être poursuivie pour avoir employé une expression aussi banale de la langue française. Voire – mais il était peut-être optimiste de l'espérer – dénoncer ce qui s'apparente assez manifestement à une procédure-bâillon. La matinalière ne va choisir aucune de ces options : « iEst-ce que vous la regrettez, cette phrase ?/i »/p
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h3 class='article_intertitres'Du prêt-à-penser patronal…/h3
p/brS'en suit un échange mémorable avec Benjamin Duhamel, formé au moule BFM-TV et qui en reproduit a href="https://www.acrimed.org/Quand-BFM-TV-exige-l-eloge-du-mecene-Bernard"les pires pratiques sur le service public/a :/p
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pstrongBenjamin Duhamel :/strong [Cette] expression « les rats quittent le navire » […] donnait l'impression que Bernard Arnault, LVMH, était sur le point de quitter la France. […] LVMH paie un peu plus de 2,3 milliards d'euros d'impôts en France, fait travailler directement et indirectement 200 000 salariés. Est-ce que tout cela justifie de faire de Bernard Arnault l'ennemi de l'économie française ? C'est une entreprise qui paye des impôts, c'est une entreprise qui crée de l'emploi. Là, il n'y a pas de rat qui quitte le navire…/p
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pCe n'était là que la première d'une longue série de sommations, adressées à la récalcitrante par l'attaché de presse de LVMH : « iMais vous reconnaissez l'apport de LVMH à l'économie française, ou pas ?/i » ; « iMais c'est un point fort de l'économie française LVMH, ou pas ?/i » « iC'est difficile à dire que c'est un point fort de l'économie française…/i » ; « iDonc un fleuron du luxe comme LVMH, c'est un handicap pour l'économie française ?/i » ; « iDonc LVMH, handicap pour l'économie française ?/i »/p
pBref, pas moins de cinq relances pour tenter d'arracher à la secrétaire de la CGT des louanges à propos du premier groupe capitaliste français. Sophie Binet aura bien l'occasion de dire, dans sa dernière réponse, qu'il s'agit selon elle d'une procédure-bâillon (« iJe trouve que c'est grave qu'on ne puisse plus tenir ces propos dans les médias sans être attaqué et avoir une procédure en justice, il est là le souci !/i »). Mais ça ne sera jamais un angle pour Benjamin Duhamel, qui ose en revanche se vanter : « iVous avez eu l'occasion ce matin, Sophie Binet, de vous expliquer sur cette mise en examen pour injure…/i »/p
pSi cette séquence finale a constitué l'apothéose de l'entretien, les vingt premières minutes n'étaient pas bien meilleures… Un simple florilège des questions posées par les deux intervieweurs suffit à donner le ton et l'orientation de celles-ci :/p
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pstrong- Florence Paracuellos :/strong Vous appelez aujourd'hui à une journée de grève, sans les autres grandes centrales syndicales […]. Elle sert à quoi, Sophie Binet, cette journée ? Vous ne vous sentez pas un peu seule ce matin ?/p
p- La mobilisation s'annonce assez faible […] comment faire croire que cette mobilisation va marcher aujourd'hui ?/p
pstrong- Benjamin Duhamel :/strong Mais justement Sophie Binet […], en fait, est-ce que vous ne criez pas avant d'avoir mal ? […] En fait, vous vous mobilisez contre quoi ?/p
p- Quand le Parti socialiste et les responsables du Parti socialiste sortent hier de Matignon en disant « il y a la possibilité d'un compromis », […] est-ce que c'est bon pour l'économie ? Et est-ce que si c'est bon pour l'économie, la patronne de la CGT s'en félicite ?/p
p- Et donc la suspension de la réforme des retraites, des augmentations d'impôts comme vous les demandiez… Ça ne suffit pas à donner un début de quitus à ce budget ?/p
pstrong- Florence Paracuellos :/strong Mais Sophie Binet, l'optimisme des socialistes, ça vous rassure pas, ça ?/p
pstrong- Benjamin Duhamel :/strong Si une entreprise a le choix entre un pays qui propose une augmentation d'impôts et un pays comme l'Italie, pourquoi une entreprise choisirait d'investir en France plutôt qu'en Italie ?/p
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pN'en jetez plus !/p
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h3 class='article_intertitres'… aux « évidences » militaires/h3
p/brCette longue série de questions sans concessions intervient après un épisode dans a href="https://www.acrimed.org/Guerre-et-service-militaire-les-medias-sonnent-le"l'air (militariste) du temps/a, au cours duquel Benjamin Duhamel s'offusqua du manque d'entrain patriotique de Sophie Binet :/p
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pstrongBenjamin Duhamel :/strong Dans la foulée de l'annonce d'Emmanuel Macron d'un service militaire volontaire, vous avez dit : « La seule perspective que nous ouvre ce gouvernement – sur ce budget donc –, c'est la guerre. » Et vous rajoutiez : « On ferme des lits d'hôpitaux pour fabriquer des obus ». Euh… si on vous suit, ça veut dire que le réarmement, les 6 milliards supplémentaires sur le budget de la défense, c'est inutile ?/p
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pL'invitée ayant de surcroît l'outrecuidance de dénoncer un « iparallélisme […] troublant/i » entre le fait « iqu'on augmente le budget de la défense de 6 milliards et qu'on baisse le budget des hôpitaux de 6 milliards/i », Duhamel ne se tient plus : « iOn ne baisse pas le budget des hôpitaux de 6 milliards./i » Refusant de se laisser conter les éléments de langage gouvernementaux par son hôte, Sophie Binet est alors obligée de prendre une minute de son temps de parole pour expliquer au jeune Duhamel les mécanismes basiques de l'inflation : « iPour ne pas baisser, le budget des hôpitaux […] doit augmenter de 4%. S'il augmente de moins de 4%, ça veut dire qu'il baisse./i » Un camouflet pour l'intervieweur, qui ne perturbe pas sa consœur. Loin de faire amende honorable, Florence Paracuellos trouve au contraire dans ce développement matière à une nouvelle réplique à charge : « iMais c'est pas un peu simpliste ou démagogique d'opposer les dépenses de la défense aux dépenses de la santé, Sophie Binet, dans le moment qu'on traverse ?/i »/p
pInsistons-y : loin de relever de la « contradiction » journalistique, ce type de réactions vise à disqualifier l'invitée. Ce matin-là, les deux intervieweurs auront encore mis beaucoup de cœur à l'ouvrage !/p
p/brstrongJérémie Younes/strong/p/div
hr /
div class='rss_notes'div id="nb1"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh1" class="spip_note" title="Notes 1" rev="appendix"1/a] /spanD'après Laurent Mauduit, a href="https://www.humanite.fr/politique/extreme-droite/laurent-mauduit-lextreme-droite-nest-jamais-arrivee-au-pouvoir-sans-lappui-des-milieux-daffaires" class="spip_out" rel="external"dans iL'Humanité/i/a (9/09/25)./p
/div/div
lun, 2025-12-01 15:31
img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L150xH80/20h_salame-f2747.png?1764595879' class='spip_logo spip_logo_right' width='150' height='80' alt="" /
div class='rss_chapo'pL'arrivée de Léa Salamé au 20h de France 2 a été annoncée en grande pompe. Publicité, a href="https://www.acrimed.org/Starification-des-journalistes-le-cas-Lea-Salame"portraits à sa gloire/a : impossible de passer à côté. Plusieurs mois après son arrivée, quel bilan tirer de ce changement au sein de ce qui est parfois présenté comme le « vaisseau amiral » de la chaîne publique ? Au-delà des « bourdes » et autres « moments gênants » largement commentés par ailleursspan class="spip_note_ref" [a href="#nb1" class="spip_note" rel="appendix" title="Voir notamment ça, ça ou encore ça." id="nh1"1/a]/span, que nous raconte le 20h de Léa Salamé ? Et comment ?/p/div
div class='rss_texte'pNous avons regardé les 20h présentés par Léa Salamé entre le 1er septembre et le 31 octobre 2025, soit 31 JTspan class="spip_note_ref" [a href="#nb2" class="spip_note" rel="appendix" title="Autrement dit les 20h du lundi, mardi, mercredi et jeudi. Les 20h présentés (…)" id="nh2"2/a]/span. L'analyse porte sur les reportages, les interventions de journalistes en plateau, les duplex, les interviews et les brèvesspan class="spip_note_ref" [a href="#nb3" class="spip_note" rel="appendix" title="Les titres du journal ne sont pas inclus dans les décomptes, tout comme les (…)" id="nh3"3/a]/span. Cela équivaut à 482 sujets (auxquels il faut ajouter les brèves) soit environ 23h30 d'informationspan class="spip_note_ref" [a href="#nb4" class="spip_note" rel="appendix" title="Nous avons utilisé 3 sources pour les décomptes : (1) nos propres minutages, (…)" id="nh4"4/a]/span./p
pPrès de 50% des sujets (brèves exclues) durent moins de 2 minutes. Très courts, ceux-ci sont principalement diffusés dans la première moitié du 20h, qui dure au total environ 50 minutes. La deuxième moitié du JT est souvent consacrée à un « grand format », qui consiste soit en une série de petits sujets sur la même thématique, soit en un ou deux reportages plus longs. Ainsi, 54 sujets (soit environ 11% des 482 contenus) font plus de 5 minutes et seulement 11 (environ 2%) dépassent les 8 minutes. Le 16 septembre par exemple, un reportage de 10'31 est consacré au trafic de cocaïne. Mais la majorité de ces très grands formats (6 sur 11) sont en fait… des interviews de personnalités politiques./p
pLe 20h a ainsi consacré une part non négligeable de son temps à des interviews. En durée cumulée, il s'agit même de la première catégorie de sujets : environ 4h30, réparties sur 26 JT (soit environ 19% de la durée totale des contenus). Au total, ce sont 36 personnes qui ont été interviewées : des politiques (12), des artistes (6), des patrons (2), des économistes (3). Notons aussi la présence d'une syndicaliste (CFDT), d'une scientifique de l'institut Pasteur et de a href="https://www.acrimed.org/Jerome-Fourquet-faux-sociologue-mais-vrai"l'omniprésent Jérôme Fourquet/aspan class="spip_note_ref" [a href="#nb5" class="spip_note" rel="appendix" title="Les interviewés restants sont, par ordre de passage : Anne-Charlène Bezzina, (…)" id="nh5"5/a]/span. Les durées d'interviews varient énormément : de 3'44 (entretien avec Gabriel Zucman le 10/09) à 27'30 pour l'interview avec Sébastien Lecornu le 08/10./p
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h3 class='article_intertitres'L'« actualité » selon France 2 : un grand zapping/h3
p/brUn premier constat s'impose : « l'actualité » consiste en une suite décousue de reportages sans qu'aucune logique de hiérarchisation de l'information ne se dégage. Ce constat est particulièrement vrai pour la première partie du JT, où les formats très courts s'enchaînent. Cette impression de zapping est accentuée par le choix régulier de la rédaction de saucissonner certaines thématiques : le 16 octobre, la problématique de l'IA est abordée en première partie du journal… puis à nouveau à la fin du JT. De même le 7 octobre : le journal commence avec l'actualité politique française, enchaîne avec Israël, quelques sujets « magazine » (dont la sortie l'album de Taylor Swift)… avant d'entamer une nouvelle boucle : actualité politique française d'abord, Israël ensuite./p
pAu-delà de cette discontinuité, un autre aspect du 20h interpelle : l'appétence pour les sujets « magazine » et les « actus insolites ». Assurément, le 20h de Léa Salamé en contient (presque) chaque soir : « Chute libre : un couple à 280 km/h » (1/09) ; « Vol Paris‑Ajaccio : le contrôleur s'endort, l'avion tourne en rond » (17/09) ; « Pêche : le chant des coques » (20/09) ; « Piment : le gout de l'extrême » (30/09) ; etc. Ces sujets, qui représentent un peu moins de 8% de la durée totale des contenus, sont caractéristiques d'un traitement par le prisme du « fait divers » : décontextualisation et déconnexion des aspects sociaux, économiques et historiques, dépolitisation et sensationnalisme. Ils n'en répondent pas moins à la consigne qu'avait fixée la PDG de France Télévisions Delphine Ernotte à Léa Salamé : un 20h « i"plus accessible", "moins anxiogène" et [qui] perce sur les réseaux sociaux/i », selon des propos rapportés par iTélérama/i (1/09)./p
pLe procès Jubillar est un exemple parfait de ce mode de traitement de l'actualité. Si les sujets qui lui sont consacrés sont tous de courte duréespan class="spip_note_ref" [a href="#nb6" class="spip_note" rel="appendix" title="9 reportages durant entre 1'16 et 2'09 ; un reportage de 2'55 et un autre de (…)" id="nh6"6/a]/span, le procès est l'un des rares « événements » déconnectés de l'actualité politique et internationale à bénéficier d'un traitement régulier : entre le 22 septembre et le 16 novembre, il a été abordé dans 9 des 16 JT observés, pour une durée totale d'environ 24 minutes. L'approche « fait-diversière » domine partout : loin de couvrir cette actualité sous l'angle des féminicides, du travail de la police criminelle ou de celui des juges par exemple, le JT a opté pour un mode de traitement de l'information façon « chaîne en continu » : au menu, détails morbides et « péripéties ». Le 6 octobre, par exemple, le JT relate les « rebondissements » liés au bornage du téléphone de l'amant de Delphine Jubillar. Et le 1er octobre, Léa Salamé s'enorgueillit de diffuser « ien exclusivité/i » un enregistrement de Cédric Jubillar : « iVous n'aviez pas entendu sa voix. Dans un enregistrement audio que nous vous diffusons en exclusivité, Cédric Jubillar se confie quelques heures seulement après la disparition de sa femme, et, fait troublant, il parle déjà d'elle à l'imparfait./i » De fait, le 20h de Léa Salamé a presque systématiquement privilégié les angles sensationnalistes pour rendre compte de ce procès./p
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h3 class='article_intertitres'Insécurité, trafic de drogue et violences : France 2 a peur/h3
p/br36 reportages ont été consacrés aux questions d'insécurité au sens large : agressions, drogue et délinquance routière. Répartis sur 20 JT – soit presque 2 soirs sur 3 ! –, ces sujets sont très souvent construits de la même manière : un « rappel des faits » accompagné d'images « choc », le témoignage des victimes, de proches et/ou des riverains, Léa Salamé accentuant souvent le caractère impressionnant ou « exceptionnel » des faits – « iCes images saisissantes cet après-midi à Marseille/i » (2/09). Le journalisme de préfecture n'est évidemment jamais très loin : la proximité avec les sources policières est criante… et se révèle d'ailleurs au grand jour dans le cadre de reportages « embedded » – le 17 septembre par exemple, à l'occasion d'un sujet titré « Violences familiales : des policiers en première ligne »./p
pLa combinaison quasi systématique de trois biais – absence de contextualisation, mise en scène spectaculaire et dépendance aux sources policières et/ou judicaires – contribue à imposer un cadrage largement sécuritaire de ce type d'« actualités », lequel prédomine également dans la couverture des mobilisations sociales. Sur les 26 sujets consacrés aux manifestations de septembre-octobre, 14 (soit un peu plus de la moitié) commencent par là : « Mouvement bloquons tout : un dispositif policier XXL » (9/09) ; « "Bloquons tout" : Rennes sous tension » (10/09) ; « 80 0000 policiers mobilisés : le risque des casseurs » (17/09) ; etc. Si les témoignages de manifestants ne sont pas absents (12 reportages), ils prennent la forme de l'inévitable micro-trottoir : comme ailleurs, la dépolitisation fait loi. Quant à la question des violences policières, elle est inexistante, ou tout comme, dans les 20h de Léa Salamé. Ainsi, suite aux manifestations du 18 septembre, elle annonce qu'un correspondant de France TV à Lyon a été blessé mais préfère renvoyer manifestants et policiers dos à dos plutôt que de pointer la responsabilité des policiers : « iUne pensée ce soir pour notre collègue correspondant à Lyon qui a été blessé au dos lors de heurts entre les forces de l'ordre et un groupe de jeunes en marge des manifestations. Il a été pris en charge et transporté à l'hôpital. Nous pensons à lui ce soir./i »span class="spip_note_ref" [a href="#nb7" class="spip_note" rel="appendix" title="De manière plus générale, la question des violences policières est largement (…)" id="nh7"7/a]/span/p
pLes enjeux politiques et économiques, en revanche, y occupent une place prépondérante : combinés, ils représentent 134 reportages (soit environ 28% du nombre total de sujets et un peu moins de 23% de la durée totale des contenus étudiés)./p
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h3 class='article_intertitres'La politique entre course de petits chevaux et suivisme gouvernemental/h3
p/brCes deux mois ont d'ailleurs confirmé une tendance qui préexistait évidemment à l'arrivée de Léa Salamé : l'amour du 20h pour la politique politicienne. « Le pouvoir dans l'impasse : une journée sous tension » (7/10) ; « Crise politique : la journée de la dernière chance » (8/10) ; etc. Les sujets relatant les dernières péripéties de l'exécutif, à coups de citations de députés, de conseillers de l'Élysée ou de Matignon, de « proches » de personnalités politiques, souvent anonymes, ne manquent pas. « iLes pronostics vont bon train et les noms qui circulent… on va vous les donner maintenant. Les coulisses, aussi, d'une journée de tractations dans les partis. C'est le feuilleton politique du jour !/i », annonce par exemple Léa Salamé le 10 octobre : une belle synthèse du mode de traitement de l'actualité politique dans les médias dominants ! En réduisant ainsi les événements aux calculs politiciens de couloir, en reprenant – souvent sans le moindre recul – la communication du personnel politique, le 20h participe activement à la dépolitisation de la politique./p
pLe suivisme à l'égard du pouvoir continue lui aussi d'aller bon train. Concernant les débats autour du budget par exemple, seule la vision de l'exécutif a eu droit de cité. Le projet politique porté par le gouvernement Lecornu a ainsi bénéficié de plusieurs reportages : « Pouvoir d'achat : serez-vous les gagnants du prochain budget ? » (13/10) ; « Impôts, retraites : que prévoit le budget 2026 » (14/10) ; « Médicaments, arrêts maladies : coup de rabot sur la santé » (15/10) ; « Pouvoir d'achat : les mauvaises surprises du budget » (16/10). Si des critiques voient le jour ici ou là, le cadrage de l'exécutif n'est pas remis en question : « il-faut-baisser-les-dépenses ». Dans le même temps, les contre-projets des oppositions, mais aussi ceux des syndicats ou des ONG, sont maintenus totalement hors-champ dans le 20h, qui se contente de médiatiser certaines propositions débattues à l'Assemblée nationale et/ou très discutées dans le débat public (la taxe Zucman par exemple)./p
pBref, le message est simple : « il n'y a pas d'alternative ». Et si cet agenda à sens unique n'avait pas clarifié les choses, les interviews sont là pour enfoncer le clou. On y observe en effet un quasi-monopole pour le gouvernement et ses alliés : Gérard Larcher (2/09), François Bayrou (4/09), Bruno Retailleau (8/09 et 7/10), Yaël Braun-Pivet (2/10), Sébastien Lecornu (8/10), Jean-Pierre Farandou (14/10). Ajoutons à cela deux figures du PS, alors en négociation avec le gouvernement : Olivier Faure (7/10) et François Hollande (13/10). Restent quatre interviews, distribuées entre Jean-Luc Mélenchon (8/09), Dominique de Villepin (22/09), Henri Guaino (25/09) et Jordan Bardella (13/10)./p
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h3 class='article_intertitres'Économie, social : le triomphe de l'orthodoxie/h3
p/brS'agissant des enjeux économiques non plus, le pluralisme n'est pas au rendez-vous. Les thèmes sont, certes, variés : coût de la vie (« Voitures d'occasion : le temps des bonnes affaires », 23/09) ; actualité des entreprises (« Petit bateau : la marque bientôt sous pavillon américain », 04/09) ; emploi (« Mécaniciens, carrossiers : les embauches accélèrent », 4/09) ; impôt (« Impôt : le ras le bol des contribuables ? », 9/09) ; ou encore santé (« Arrêt maladie : vos congés pourront être reportés », 11/09) ; etc. Mais la quasi-totalité d'entre eux s'inscrit dans une même perspective « micro-économique », au détriment de tout un pan de la macro-économie et des enjeux sociaux. Comme nous le décrivions dans a href="https://www.acrimed.org/Journalisme-economique-40-ans-de-catechisme"un épisode de « 4e pouvoir »/a, « l'objet est moins d'informer des citoyens sur le système économique capitaliste dans lequel ils vivent que de donner à des individus les recettes pour évoluer au mieux à l'intérieur de ce système. »/p
pLa question du coût de la vie, typiquement, est presque uniquement abordée sous cet angle : « Fournitures scolaires : comment payer moins cher » (1/09) – 9'23 de reportage ! – ; « Pommes de terre : bientôt moins chères ? » (2/09) ; « Pouvoir d'achat : leur fin de mois arrive le 15 » (16/09) ; etc. Si certains reportages se veulent davantage « analytiques » (« Hausse des frais bancaires : pourquoi payez-vous si cher ? », 7/10), un grand nombre se contente de « donner la parole aux Français », sous couvert de « proximité » avec le public. Le 1er septembre par exemple, on suit plusieurs familles qui font leurs courses dans un supermarché et le 16 septembre, d'autres qui ont du mal à finir leur fin de mois. Si ce type de reportage visibilise des catégories socioprofessionnelles traditionnellement sous-médiatisées, les conditions de prise de parole restent particulièrement médiocres. Ces reportages privilégiant en outre un point de vue très individuel sur les difficultés vécues par ces familles, ils permettent surtout de décontextualiser et de dépolitiser les enjeux économiques et sociaux. C'est d'ailleurs une constante au 20h de Léa Salamé. Si la pauvreté est évoquée ici ou là (de manière superficielle), elle est surtout « naturalisée » : les sujets en question ne portent jamais sur les causes de ces problèmes et s'accompagnent encore moins d'une remise en question des acteurs et des politiques qui en sont responsables./p
pÀ cet égard, le monde économique – très souvent réduit au témoignage de quelques chefs d'entreprise, parfois accompagné de celui de quelques salariés – apparaît la plupart du temps comme un spectateur passif, quand il n'est pas décrit en victime de l'instabilité politique : « Instabilité politique : ces patrons qui gèlent leur embauche » (11/09) ; « Le pays dans l'impasse : inquiétude dans les entreprises » (8/10) ; « Crise politique : le coût de l'instabilité » (8/10) ; etc. Un récit dominant à front renversé, là encore : a href="https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/050925/la-source-de-l-impasse-politique-la-crise-economique" class="spip_out" rel="external"de l'impact du patronat et des forces économiques sur le champ politique/a, il ne sera jamais question. Cette vision unilatérale des interactions entre instabilité politique et crise économique est représentative d'un JT qui, comme nous le disions précédemment, n'aborde que peu les questions macroéconomiques, bien souvent focalisées sur la croissance, elle-même traitée de manière prédictive – « les prévisions de croissance », qui n'ont fait l'objet que d'une brève le 11/09. Ajoutons qu'au 20h de Salamé, la question du chômage est, à peu de chose près, un non-sujet./p
pCes biais se couplent à une vision unilatérale de la question de la dette et de la réduction des déficits publics. Le nombre de reportages consacrés à la dette et au budget est assez limité : 7 reportages pour une durée d'environ 18 minutes. Le sujet est néanmoins évoqué à travers les interviews d'hommes et femmes politiques, d'« experts » et de patrons ainsi que dans certains sujets internationaux (concernant l'Italie, par exemple). Reprenant le leitmotiv médiatico-politique d'une dette insoutenable qu'il faut à tout prix baisser, le 20h ne questionne jamais cette vision du monde. Certains reportages ont beau souligner les difficultés auxquelles sont confrontés certains acteurs – économiques, généralement… – face à la réduction des budgets, les journalistes n'en tirent aucune conclusion. La dette apparaît ainsi comme le principal (si ce n'est le seul) indicateur utilisé pour évaluer les politiques publiques. Le reportage consacré à la réforme des retraites en Italie – « Italie : travailler plus pour réduire la dette » (29/09) – fournit un bon exemple de ce cadrage général passablement orienté, résumé par la journaliste de France 2 en fin de sujet : « iUne loi difficile pour les travailleurs, mais indispensable pour les finances publiques italiennes./i »/p
pLes conditions de travail de ces travailleurs ne sont pas, quant à elles, considérées comme un indicateur pertinent pour évaluer une politique publique. Aucun responsable politique n'est d'ailleurs questionné sur cet enjeu dans le 20h de Salamé. À l'exception d'un reportage consacré à des travailleurs saisonniers au Maroc (1/10), cette question est reléguée aux marges et le temps de parole des travailleurs excède rarement la dizaine de secondes. Le 8 octobre par exemple, les conditions de travail d'un conducteur de travaux sont très rapidement évoquées dans un sujet consacré à ladite « suspension » de la réforme des retraites – « Qu'en pensent les futurs retraités ? » L'exception qui confirme la règle. Laquelle consiste, pour le 20h, à davantage traiter les débats sur la réforme des retraites au prisme du financement du régime par répartition plutôt qu'en informant sur les impacts concrets de cette réforme (et des modifications attenantes) sur les conditions de vie en bonne santé ou sur les accidents du travail, par exemple./p
pQuel que soit l'angle par lequel on observe le traitement des questions économiques et sociales, un seul constat s'impose : sans grande surprise, le prêt-à-penser néolibéral triomphe dans la grand'messe du 20h, qui n'hésite pas à recourir aux pires clichés de l'idéologie dominante. Le « grand format » du 20 octobre en a donné un exemple caricatural. Sobrement intitulé « Bienvenue en Absurdistan »span class="spip_note_ref" [a href="#nb8" class="spip_note" rel="appendix" title="Le grand format est aussi à plusieurs reprises appelé « Grand travaux : le (…)" id="nh8"8/a]/span, l'annonce lors des titres par Léa Salamé donne le ton : « iOn vous emmène ce soir au pays de l'absurde : et malheureusement, c'est chez nous. On a enquêté sur ces normes qui rendent fous les chefs d'entreprise, sur ces ponts construits pour rien, sur ces documents administratifs qu'on met des heures à remplir./i » Composée de 4 reportagesspan class="spip_note_ref" [a href="#nb9" class="spip_note" rel="appendix" title="« Argent public : des ponts construits pour rien » ; « Administration : (…)" id="nh9"9/a]/span, cette « page spéciale » reprend à son compte une obsession historique de la droite traditionnelle et de l'extrême droite – le poids des « normes » et le carcan de l'État « mammouth » – sur un ton sensationnaliste et tapageur que ne renierait sans doute ni RMC, ni Europe 1span class="spip_note_ref" [a href="#nb10" class="spip_note" rel="appendix" title="Où la chronique d'Emmanuelle Ducros (journaliste à L'Opinion) s'intitule (…)" id="nh10"10/a]/span. Elle n'en témoigne pas moins de la force que peut impulser un cadrage biaisé – et rabâché depuis des décennies. Si les voix discordantes ne sont pas absentes, elles sont complétement écrasées par l'angle et le registre choisis par les journalistes de France 2 : la dénonciation de normes jugées absurdes. Les aspects environnementaux et sociaux sont quant à eux absents de cette page spéciale./p
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h3 class='article_intertitres'L'écologie, grande oubliée/h3
p/brAvec un peu moins de 25 minutes cumulées réparties sur 9 jours, les sujets liés à l'écologie n'ont pas fait l'objet d'une couverture supérieure à celle du procès Jubillar (environ 24 minutes cumulées)span class="spip_note_ref" [a href="#nb11" class="spip_note" rel="appendix" title="Un constat d'autant plus accablant que nous avons compté dans « écologie » (…)" id="nh11"11/a]/span ! Cette invisibilisation se mesure également au fait qu'aucun responsable politique n'a été interrogé sur des enjeux environnementaux, et encore moins sur l'impact écologique de son programme économique. Au 20h, l'impact environnemental n'est d'ailleurs jamais considéré comme un indicateur pertinent lorsqu'il s'agit de discuter d'une mesure économique : il en va, là encore, d'a href="https://www.acrimed.org/Les-journalistes-l-ecologie-et-le-capitalisme"un angle mort structurant dans les grands médias/a./p
p« Pire » : dans les reportages liés à l'environnement, la part consacrée plus spécifiquement au réchauffement climatique est... quasi nulle : un unique et court reportage (1'42) vulgarise une étude scientifique sur l'impact du réchauffement climatique sur les coraux (« Disparition des coraux : une menace pour l'humanité », 13/10). À cela, il faut ajouter quelques mentions qui, au gré des reportages, évoquent ici ou là des phénomènes météorologiques (« Tornade meurtrière dans le Val-d'Oise : ces phénomènes sont-ils prévisibles en France ? », 21/10). Le 20h réussit même l'exploit d'invisibiliser le réchauffement climatique à l'occasion d'un grand format pourtant consacré aux « iévénements climatiques extrêmes/i », diffusé le 15 octobre. « i[Ils] se multiplient mais sommes-nous prêts à les affronter ?/i » se demande Léa Salamé. En guise de réponse : 4 reportages pour près de 13 minutesspan class="spip_note_ref" [a href="#nb12" class="spip_note" rel="appendix" title="Pour être précis : « Inondations : les naufragés du Giers » (3'58) ; « (…)" id="nh12"12/a]/span… mais l'impact du réchauffement climatique n'est évoqué qu'à une seule reprise ! Bref, comme le veut le mode de traitement dominant des enjeux environnementaux, les causes sont systématiquement éludées au profit de la télégénie des catastrophes et de la description des conséquences, notamment économiques./p
/br
h3 class='article_intertitres'L'information internationale en courant alternatif/h3
p/brAvec 92 reportages pour environ 3h48 (brèves inclues), on pourrait considérer que l'information internationale est traitée en longueur (environ 16% des contenus). Il s'agit d'un constat en trompe l'œil. Tout d'abord, la durée varie énormément en fonction des jours : 50% des éditions y ont par exemple dédié moins de 6 minutes et demi. À l'inverse, certains 20h ont pu y consacrer une part significative, notamment lorsque le sujet fait l'objet de la deuxième partie du journal (le « grand format »). Ce fut le cas le 3 septembre, lorsqu'un grand format sur l'Ukraine a occupé près de la moitié du JT (47%). Ce fut également le cas un mois plus tard, le 1er octobre, avec la diffusion d'une page spéciale sur le Maroc (55% du 20h). Mais en moyenne, l'information internationale n'a le droit qu'à 7'30 par JT, c'est-à-dire environ 17% de la durée totale d'un journal./p
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div class='spip_document_16295 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" a href='https://www.acrimed.org/IMG/png/20h_graphique1.png' class="spip_doc_lien mediabox" type="image/png" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH239/20h_graphique1-5cf8b.png?1764595879' width='500' height='239' alt='' //a
/figure
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p/brDans le détail, on constate par ailleurs que les pays ayant retenu l'attention du 20h sont peu nombreux : 26 sur près de 200span class="spip_note_ref" [a href="#nb13" class="spip_note" rel="appendix" title="Afghanistan, Chine, Corée du Nord, Inde, Iran, Taïwan, Albanie, Danemark, (…)" id="nh13"13/a]/span. Des régions entières sont donc quasiment absentes : l'Océanie (aucune mention), l'Amérique du Sud (1 reportage sur le Venezuela), l'Afrique (une page spéciale de 4 reportages sur le Maroc ainsi qu'une brève sur Madagascar), le Proche et Moyen-Orient (seul Israël et la Palestine sont abordés – nous y reviendrons) et l'Asie du Sud-Est (1 reportage et 1 mention sur Taïwan). L'Inde n'est quant à elle abordée qu'à une reprise (et mentionnée une fois). Quant à la Chine, elle fait l'objet de 3 sujets et apparaît dans un reportage plus général sur l'Asie./p
pConcernant les pays évoqués, ils n'ont en fait bénéficié que d'une médiatisation ponctuelle. C'est d'ailleurs l'une des caractéristiques du traitement de « l'international » par le 20h : à quelques exceptions près (sur lesquelles nous reviendrons), il n'y a aucun suivi sur le long terme. Ainsi, sur la période étudiée (deux mois), 46% des pays n'ont été traités que lors d'un unique JT et 62% lors de deux JT ou moinsspan class="spip_note_ref" [a href="#nb14" class="spip_note" rel="appendix" title="Sur les 10 pays ayant bénéficié de reportages sur plus de 2 JT, 5 sont (…)" id="nh14"14/a]/span./p
pIl n'est pas étonnant, dans de telles conditions et face à une telle rareté de l'information, que le 20h braque son regard sur tel ou tel pays uniquement dans le contexte d'une actualité dite « chaude » : catastrophe naturelle et/ou humaine (« Tremblement de terre : près de 1000 morts en Afghanistan », 1/09 ; « Jamaïque : les images d'un pays dévasté », 30/10 ; « Accident du funiculaire : le Portugal en deuil », 4/09) ; tensions géopolitiques et conflits internationaux (« Donald Trump : le Venezuela dans sa ligne de mire », 16/10) ; élections (« Ingérence russe : les élections moldaves sous surveillance », 25/09) ; mouvements sociaux (« Maroc : une jeunesse en colère », 1/10). En disparaissant aussi rapidement qu'elles sont venues, les caméras du 20h sont vouées à livrer de ces événements une approche superficielle et/ou par le haut, qui invisibilise largement le vécu des habitants – et rend évidemment difficile, pour ne pas dire impossible, une fine compréhension des enjeux./p
pTrois sujets bénéficient cependant d'une médiatisation sur la durée : Israël et la Palestine d'abord (24 reportages pour un total de près de 54 minutes), l'actualité liée à la Russie (8 reportages sur les ingérences russes et 11 reportages liés à la guerre avec l'Ukraine, pour un total d'environ 56 minutes) et enfin, les États-Unis (8 reportages pour environ 18 minutes)./p
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h3 class='article_intertitres'Israël-Palestine : un suivi en trompe l'œil/h3
p/brLe traitement d'Israël et du génocide à Gaza mérite qu'on s'y arrête. Si le nombre de reportages et leur durée totale n'est pas négligeable (même si elle ne représente même pas 4% de la durée totale des reportages), ils sont très inégalement répartis dans le temps :/p
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div class='spip_document_16296 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" a href='https://www.acrimed.org/IMG/png/20h_graphique2.png' class="spip_doc_lien mediabox" type="image/png" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH292/20h_graphique2-e8ab3.png?1764595879' width='500' height='292' alt='' //a
/figure
/div
p/brLe traitement est surtout disparate. Ainsi, le quotidien des Palestiniens de Gaza n'a bénéficié que de 4 reportages en 31 JT (pour un total d'environ 7'30), répartis sur 4 soirées. Quant à la Cisjordanie, elle n'a été abordée qu'à une unique reprise, au cours d'un reportage certes plus long que la moyenne (7'25). À cela, on peut ajouter quelques mentions superficielles, disséminées dans des reportages plus généraux sur la situation de la région./p
pCette invisibilisation du quotidien vécu par les Palestiniens prend d'autres formes. À l'instar de ce qui s'observe a href="https://www.acrimed.org/Liberations-en-Israel-Palestine-le-deux-poids"ailleurs dans les médias dominants/a, le phénomène du deux poids, deux mesures donne le ton. Là où les otages israéliens ont bénéficié de portraits à part entière et de témoignages de leurs prochesspan class="spip_note_ref" [a href="#nb15" class="spip_note" rel="appendix" title="« Gaza : l'espoir des familles d'otages » (7/10) ; « Document : les (…)" id="nh15"15/a]/span, la libération de prisonniers palestiniens est effleurée – et à une seule reprise –, reléguée à la toute fin d'un reportage largement consacré aux otages israéliens (13/10). Le titre parle d'une « ijournée historique/i »… mais seulement d'un certain point de vue : sur près de 3 minutes, seules 34 secondes sont consacrées aux Palestiniens. Aucun nom n'est donné, aucun portrait n'est fait d'eux./p
pCette invisibilisation passe par d'autres angles morts pour le moins problématiques. La qualification de génocide est ainsi totalement ignorée : ni l'avis de l'Association internationale des chercheurs sur le génocide, ni les conclusions de la Commission d'enquête de l'ONU n'ont fait l'objet de reportage ! Et lorsque Dominique de Villepin évoque la question le 22 septembre, Léa Salamé évacue le sujet :/p
blockquote class="spip"
pstrong- Dominique De Villepin :/strong La communauté internationale, elle est là pour rappeler Benjamin Netanyahou à ses devoirs, à sa responsabilité à un moment où un génocide se déroule à Gaza./p
pstrong- Léa Salamé :/strong Vous employez le mot de génocide, qui n'a pas été pour l'instant qualifié par la justice internationale…/p
pstrong- Dominique de Villepin :/strong Elle a parlé de risque plausible de génocide. Dans la convention de 1948, il est prévu que c'est une nécessité de prévention et de répression…/p
pstrong- Léa Salamé :/strong Oui, mais…/p
pstrong- Dominique De Villepin :/strong … c'est-à-dire que tous les États sont obligés de prendre des mesures conservatoires pour empêcher ce risque génocidaire de se produire./p
pstrong- Léa Salamé :/strong Oui, mais pour l'instant, la Cour internationale de justice n'a pas jugé sur le fond de cette affaire-là. strongLes mots ont un sens/strong, mais au-delà de Benjamin Netanyahou, que répondez-vous ?/p
/blockquote
pVerrouillage, encore et toujours./p
/br
centerstrong***/strong/center
p/brDisons-le : le 20h de France 2 n'a pas attendu Léa Salamé pour manifester les biais ici passés en revue. Du a href="https://www.acrimed.org/JO-au-JT-de-France-2-la-celebration-plutot-que-l"traitement pour le moins questionnable des JO/a au a href="https://www.acrimed.org/La-presidentielle-dans-le-20h-de-France-2-le"traitement largement biaisé de la présidentielle/a en passant par a href="https://www.acrimed.org/Retraites-50-nuances-de-galeres-au-20h-de-France"la couverture désastreuse des mobilisations sociales/a ou de a href="https://www.acrimed.org/Palestine-la-desinformation-au-20h-de-France-2"la question palestinienne/a, les archives d'Acrimed sont là pour en témoigner. Faut-il en déduire que ces errements sont intrinsèques au format du 20h ? Si les contraintes pèsent lourd, la « mal-information » n'est pourtant pas une fatalité. Pour s'en convaincre, il suffit de se tourner… vers le 20h./p
pCar parmi les 482 reportages, tous ne témoignent pas d'une faillite journalistique. On a pu mesurer, par exemple, la plus-value (et les bienfaits) d'un long reportage international lorsque celui-ci n'est pas préalablement verrouillé par la direction parisienne. Ce fut le cas lors du grand format consacré au Maroc (1/10). C'est d'ailleurs à l'occasion de cette page spéciale qu'a été diffusé l'un des rares reportages principalement axés sur les conditions de travail. De même, le JT a montré qu'il était possible, dans une certaine mesure, de faire de la vulgarisation scientifique (« Pesticides : les riverains des vignes contaminés », 15/09 ; interview de la directrice de l'institut Pasteur, 9/10). Enfin, citons le reportage « Mineurs délinquants : au cœur d'un tribunal pour enfant » (2/09). D'une durée de près de 13 minutes, ce sujet montre qu'un traitement de fond est possible (et même souhaitable) et qu'il permet, dans une certaine mesure, de contourner les réflexes simplistes et immédiats du cadrage sécuritaire traditionnel de ces questions. Ces reportages ne sont pas exempts de défaut. Cependant, leur existence montre à quel point la médiocrité d'ensemble du 20h est d'abord et avant tout la conséquence… de choix éditoriaux : oui, un autre JT est possible !/p
p/brstrongArnaud Galliere/strong/p/div
hr /
div class='rss_notes'div id="nb1"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh1" class="spip_note" title="Notes 1" rev="appendix"1/a] /spanVoir notamment a href="https://www.arretsurimages.net/chroniques/les-enerve-es/salame-cotillard-un-malaise-journalistique-avant-tout" class="spip_out" rel="external"ça/a, a href="https://www.telerama.fr/television/dominique-bernard-et-samuel-paty-confondus-dans-les-jt-de-france-2-une-double-erreur-qui-interroge-7027831.php" class="spip_out" rel="external"ça/a ou encore a href="https://www.20minutes.fr/arts-stars/insolite/4175472-20250926-oh-pardon-quand-lea-salame-confond-henri-guaino-claude-gueant-plateau-jt-france-2" class="spip_out" rel="external"ça/a./p
/divdiv id="nb2"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh2" class="spip_note" title="Notes 2" rev="appendix"2/a] /spanAutrement dit les 20h du lundi, mardi, mercredi et jeudi. Les 20h présentés par Laurent Delahousse et Sonia Chironi, le vendredi, samedi et dimanche, n'ont pas été inclus dans cet article ; de même que ceux présentés par Jean-Baptiste Marteau les 22, 23, 27, 28 et 29 octobre./p
/divdiv id="nb3"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh3" class="spip_note" title="Notes 3" rev="appendix"3/a] /spanLes titres du journal ne sont pas inclus dans les décomptes, tout comme les lancements des reportages, sauf dans certains cas (lorsqu'ils apportent une information supplémentaire et quand ils sont particulièrement longs). Les titres et lancements peuvent cependant être mentionnés dans le cadre d'une analyse plus qualitative./p
/divdiv id="nb4"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh4" class="spip_note" title="Notes 4" rev="appendix"4/a] /spanNous avons utilisé 3 sources pour les décomptes : (1) nos propres minutages, (2) les durées indiquées sur a href="https://www.franceinfo.fr/replay-jt/france-2/20-heures/" class="spip_out" rel="external"le site de France 2/a, (3) les durées indiquées sur a href="https://www.inatheque.fr/index.html" class="spip_out" rel="external"le site de l'INA/a. Nous avons noté quelques légères différences ici et là entre les chiffres de l'INA et ceux du site de France 2. Dans la mesure du possible, nous avons privilégié nos chiffres et ceux du site de France 2./p
/divdiv id="nb5"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh5" class="spip_note" title="Notes 5" rev="appendix"5/a] /spanLes interviewés restants sont, par ordre de passage : Anne-Charlène Bezzina, le cardinal François Bustillo, Anastasia Fomitchova, le général Patrick Dutartre, l'avocat Christophe Ingrain, Delphine Horvilleur, Gaëlle Paty, Alexis et Félix Lebrun, Cédric Sapin-Defour./p
/divdiv id="nb6"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh6" class="spip_note" title="Notes 6" rev="appendix"6/a] /span9 reportages durant entre 1'16 et 2'09 ; un reportage de 2'55 et un autre de 4'27./p
/divdiv id="nb7"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh7" class="spip_note" title="Notes 7" rev="appendix"7/a] /spanDe manière plus générale, la question des violences policières est largement absente des 20h de France 2. Parmi les quelques rares reportages consacrés à cette question, on peut citer le 20h du 7/09 présenté par Laurent Delahousse : « Vidéo d'un jeune giflé : enquête ouverte contre des policiers »./p
/divdiv id="nb8"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh8" class="spip_note" title="Notes 8" rev="appendix"8/a] /spanLe grand format est aussi à plusieurs reprises appelé « Grand travaux : le tour de France de l'absurde »./p
/divdiv id="nb9"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh9" class="spip_note" title="Notes 9" rev="appendix"9/a] /span« Argent public : des ponts construits pour rien » ; « Administration : l'enfer des formulaires Cerfa » ; « Normes : à quand la simplification » ; « Inde : des morts pourtant bien vivants »./p
/divdiv id="nb10"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh10" class="spip_note" title="Notes 10" rev="appendix"10/a] /spanOù la chronique d'Emmanuelle Ducros (journaliste à iL'Opinion/i) s'intitule d'ailleurs… « Voyage en absurdie »./p
/divdiv id="nb11"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh11" class="spip_note" title="Notes 11" rev="appendix"11/a] /spanUn constat d'autant plus accablant que nous avons compté dans « écologie » des sujets qui auraient pu être classés ailleurs. C'est le cas par exemple d'un reportage consacré à un éboueur-influenceur : « Réseaux sociaux : l'éboueur star des ados » (23/09)./p
/divdiv id="nb12"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh12" class="spip_note" title="Notes 12" rev="appendix"12/a] /spanPour être précis : « Inondations : les naufragés du Giers » (3'58) ; « Inondations : des travaux XXL pour y échapper » (3'29) ; « Tempête de grêle : quand la facture s'alourdit » (3'48) ; « Vallée d'Aspe : un an après retour sur des inondations dévastatrices » (1'38)./p
/divdiv id="nb13"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh13" class="spip_note" title="Notes 13" rev="appendix"13/a] /spanAfghanistan, Chine, Corée du Nord, Inde, Iran, Taïwan, Albanie, Danemark, Espagne, Finlande, Grèce, Italie, Moldavie, Pologne, Portugal, Royaume-Uni, Ukraine, Russie, Israël, Palestine, États-Unis, Jamaïque, Haïti, Venezuela, Madagascar, Maroc./p
/divdiv id="nb14"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh14" class="spip_note" title="Notes 14" rev="appendix"14/a] /spanSur les 10 pays ayant bénéficié de reportages sur plus de 2 JT, 5 sont européens : Danemark, Espagne, Italie, Ukraine, Royaume-Uni. Les 5 autres pays sont : Chine, États-Unis, Israël, Palestine, Russie./p
/divdiv id="nb15"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh15" class="spip_note" title="Notes 15" rev="appendix"15/a] /span« Gaza : l'espoir des familles d'otages » (7/10) ; « Document : les retrouvailles d'une famille après 738 jours » (13/10) ; « Otages israéliens : révélations sur leur détention » (14/10)./p
/div/div
ven, 2025-11-28 19:35
img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L150xH80/tocsin-0d6d9.png?1764351325' class='spip_logo spip_logo_right' width='150' height='80' alt="" /
div class='rss_chapo'pMercredi 19 novembre, devant le Congrès des maires de France, le chef d'état-major des armées, le général Fabien Mandon, a estimé que la France était « ien risque/i » face à la « iRussie de Vladimir Poutine/i » si le pays n'avait pas la « iforce d'âme/i » d'accepter « ide perdre ses enfants/i » à la guerre. Sans attendre, de nombreux médias se sont emparés de cette déclaration pour décréter la mobilisation générale…/p/div
div class='rss_texte'p« iÀ quoi nous prépare le général Mandon ?/i » demande inquiet Maxime Switek, sur BFM-TV. Il est 21h08 ce mercredi 19 novembre quand le présentateur prend connaissance des « ipropos chocs/i » du chef d'état-major des armées. Un bandeau accompagne sa lecture de la déclaration : « iSi notre pays flanche – écoutez-bien/i, insiste Maxime Switek –, isi notre pays flanche parce qu'il n'est pas prêt à accepter de perdre ses enfants, alors on est en risque/i ». Léger moment de sidération sur le plateau – qui jusqu'ici parlait de la neige. La mine grave, la journaliste maison Elsa Vidal lui répond : « iUne guerre, c'est finalement la confrontation de deux volontés, et il est important que "l'arrière", les civils, soient disposés à ce que cette guerre ait lieu ! Mais la formulation du chef d'état-major est quand même… j'ai envie de le dire… malheureuse./i »/p
pLes déclarations « ichocs/i » de Fabien Mandon vont en effet, dans un premier temps, provoquer un « itollé/i » dans la classe politique. Les politiciens de presque tous les bords s'en indignent, et les premiers articles, publiés dans la foulée de la dépêche AFP rapportant le discours du général, portent presque tous sur ces réactions politiques assez univoques. À peine prononcés, voilà en tout cas les mots du chef d'état-major des armées propulsés à la Une de l'actualité. Le lendemain, le ton change, avec la ministre des Armées Catherine Vautrin qui « ivole au secours/i » (iJDD/i, 20/11) du général Mandon, expliquant (sur X) que ses propos ont été « isortis de leur contexte/i » et qu'il était parfaitement fondé à les tenir./p
/br
h3 class='article_intertitres'« Faut-il préparer les Français à la guerre ? »/h3
p/brLa machine médiatique se met en branle à toute vitesse, et les réactions des politiciens sont rapidement recouvertes par le commentariat des éditorialistes, qui ont reçu l'incitation de la ministre et se font les exégètes du général Mandon. « iVous voyez bien que la guerre est revenue en Europe et que la menace existe/i, justifie Didier François, « éditorialiste défense BFM-TV », à peine une heure après les déclarations du chef d'état-major : ice qui est important c'est de dissuader l'ennemi […] pour cela, il faut que nos adversaires soient persuadés qu'on est prêts, qu'on sera prêts à se battre et qu'on acceptera la bagarre/i ». « iÇa fait peur !/i » réagit la présentatrice Julie Hammett, avant de se tourner vers un nouvel éditorialiste, Ulysse Gosset : « iEffectivement, les mots sont très forts et ils sont inquiétants, et quand les Français les entendent, ils se disent, "est-ce que la guerre est pour demain ?"/i » Selon l'éditorialiste, qui se demande à voix haute si « iles Français sont prêts à entrer en guerre/i », ce n'est pas encore « iun appel à la mobilisation générale, mais c'est un appel à la prise de conscience/i ». Les Français ne sont d'ailleurs pas les seuls inquiets, ajoute Gosset, « iles services allemands, les services britanniques, disent tous la même chose/i ». Didier François rebondit : « iPour ceux qui croient que c'est politique…/i » « iÇa c'est un message à Jean-Luc Mélenchon/i », relève la présentatrice./p
pLe lendemain matin (20/11), sans doute prise de court par l'actualité, BFM-TV déploie un procédé pour le moins surprenant : l'invité de la matinale de Laurent Neumann n'est nul autre que… Didier François, « l'éditorialiste défense » maison, encore lui. BFM-TV interviewe BFM-TV, et cette fois, la fonction d'exégète du général Mandon que remplissait symboliquement la veille au soir l'éditorialiste est explicitée littéralement sur le bandeau : « Chef des armées : que voulait-il dire vraiment ? » Didier François va nous le dire : « iOn a cru pendant des années, enfin pendant les 30 dernières années, que la parenthèse exceptionnelle de paix que nous avons vécue était la norme ! Bah on est en train de se réveiller… Alors c'est évidemment difficile pour l'autruche de sortir la tête du sable, parce que c'est désagréable… honnêtement ça gratte. Mais la vérité c'est ça, c'est qu'on revient à un monde normal tel qu'on le connaissait avant/i ». Un monde « inormal/i » est celui où la guerre plane sur chaque enfant./p
pSur RTL, dans l'émission d'Anne-Sophie Lapix (20/11), le ton est moins familier, mais le fond n'est pas bien différent : « iLa Russie de Vladimir Poutine, manifestement, nous considère comme un adversaire/i », avance son invitée Muriel Domenach, ancienne ambassadrice de France à l'OTAN. « iNous sommes déjà en guerre/i », explique quant à lui l'immanquable Michel Goya, ancien colonel et « expert en stratégie militaire », qui explique qu'il fulmine en entendant les pacifistes s'insurger des déclarations du chef d'état-major : « iSi la nation n'est pas prête à cela, si elle considère que ce sacrifice n'est pas utile ou nécessaire, et bah c'est pas la peine quoi… on perd, en réalité, la vraie force… la vraie force des nations c'est dans cette volonté en réalité, de prendre des risques, pour essayer d'obtenir quelque chose…/i » Anne-Sophie Lapix passe ensuite la parole à Jean-Marie Bockel – ex-ministre sous Mitterrand et sous Sarkozy dont le fils, militaire, a été tué au Mali. Puis à Michel Duclos, ancien diplomate, qui parle de la « imenace russe aux portes de l'Europe/i » et explique qu'il y a un vrai « ibesoin de pédagogie/i » à ce sujet. Anne-Sophie Lapix constate que son plateau est à sens unique et le verbalise : « iOn va parler dans un instant des réactions […] qui ne sont pas forcément très positives ou aussi unanimes que sur ce plateau…/i » Ce sera après la pub, et ce qui fera office de contradictoire est un petit « sonore » de Jean-Luc Mélenchon. La même unanimité se retrouve sur le plateau de LCI, dans l'émission « 24h Pujadas » (20/11) : « iJ'ai d'abord envie d'entendre le colonel, le colonel de réserve Servent, Pierre, est-ce que c'est alarmiste ou est-ce que c'est indispensable cette déclaration du chef d'état-major ?/i » « iIndispensable/i », répond sans hésiter son invité, qui est éditorialiste sur la chaîne. Jean-Dominique Merchet introduit une petite nuance et trouve que ce discours « idoloriste/i » est une « iformidable erreur de communication/i », même s'il n'en conteste pas le fond (« iJe ne suis pas un pacifiste/i », dira-t-il) À ses côtés, Isabelle Lasserre du iFigaro/i est beaucoup plus enthousiaste : « iPour qu'un bâtardspan class="spip_note_ref" [a href="#nb1" class="spip_note" rel="appendix" title="Isabelle Lasserre rebondit ici sur la prise de parole antérieure de (…)" id="nh1"1/a]/span puisse être tué, il faut que la dissuasion de la France soit rétablie ! La guerre étant un affrontement des volontés, il faut rétablir la volonté des Français et des Européens, qui pour moi, fait complètement défaut./i » La journaliste du iFigaro/i va plus loin :/p
blockquote class="spip"
pstrong- Isabelle Lasserre :/strong Ce qui me choque moi en fait dans toute cette histoire, c'est qu'on a l'impression que la France sort lentement du déni qui était le sien depuis le début des années 1990 […]. Donc on se réveille depuis 2014, et surtout depuis 2022, mais tout le monde ne se réveille pas ! Alors effectivement, le chef d'état-major, lui, a pris pleinement conscience de la menace russe… strongc'est la Russie qui nous a déclaré la guerre !/strong C'est pas la France qui a déclaré la guerre…/p
pstrong- David Pujadas :/strong Qui inous/i a déclaré la guerre ?/p
pstrong- Isabelle Lasserre :/strong C'est la Russie, c'est Poutine…/p
pstrong- David Pujadas :/strong … Qui a déclaré la guerre à l'Ukraine…/p
pstrong- Isabelle Lasserre :/strong Non, non, à nous aussi ! Non, Vladimir Poutine considère qu'il est en guerre contre l'Union Européenne. Il lance tous les jours des actes de guerre hybride contre les pays d'Europe occidentale. […] Les extrêmes droite et gauche qui protestent contre ces propos sont celles qui depuis le début sont complètement pro-russes et défendent la…/p
pstrong- David Pujadas :/strong Attendez y'a pas que les extrêmes ! Y'a pas que les extrêmes…/p
pstrong- Isabelle Lasserre :/strong C'est surtout les extrêmes […]/p
pstrong- David Pujadas :/strong C'est du défaitisme ?/p
pstrong- Isabelle Lasserre :/strong C'est une tentation de l'apaisement, une tentation munichoise […]. C'est pas comme ça qu'on va protéger les enfants de la France./p
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pEn face, Jean Quatremer parle lui aussi de Munich, de 1940 et de « idésarmement moral/i », et se réjouit des déclarations du chef d'état-major : « iC'est très bien que ça choque/i ». Ces tirades inspirent une question à David Pujadas : « iPour refamiliariser [les jeunes] avec l'idée de guerre, est-ce qu'il faut d'abord mettre l'accent sur la mort ?/i »/p
pLes « experts militaires » ou les militaires tout court vont ainsi se succéder sur les plateaux et dans les colonnes des journaux. L'amiral Nicolas Vaujour, chef d'état-major de la Marine, est sur RTL (20/11) dès le lendemain matin des déclarations du général Mandon. Le général Vincent Desportes pointe sur RTL (20/11), RMC (21/11), Europe 1 (27/11) et iMarianne/i (26/11). Michel Goya est lui sur RTL (20/11), BFM-TV (21/11), France 5 (22/11), ainsi que dans iLe Point/i (21/11). L'ancien chef d'état-major de l'Armée de l'air Jean-Paul Paloméros est sur France Info (21/11), BFM-TV (21/11), CNews (21/11, une journée chargée !), ou RMC (24/11). Pierre Servent passe lui presque tous les jours sur les chaînes de son employeur, TF1 ou LCI, mais aussi occasionnellement sur France Inter (27/11). Le général Mandon sera lui-même invité dans « C à Vous » (France 5, 22/11), pour réitérer ses propos tout en s'excusant d'avoir pu heurter. Bref, un véritable « journalisme de caserne » au service, pendant toute une semaine, de l'objectif admis par Pujadas : refamiliariser la population avec l'idée de guerre./p
/br
h3 class='article_intertitres'Préparer les esprits à la guerre/h3
p/brLa séquence éditoriale déclenchée par le discours du chef d'état-major est massive, et il est quasiment impossible d'en faire une revue exhaustive. On peut néanmoins en dégager le message de fond, qu'une dépêche AFP, reprise telle quelle ici et là, résume lapidairement : « Les autorités françaises tentent de préparer les esprits à la guerre » (20/11). La dépêche note que le gouvernement français a, le même jour, publié en ligne « un guide de survie » en cas de catastrophe ou de conflits armés. « iLes autorités tentent, depuis des mois, de préparer les esprits des Français à des sacrifices en cas de guerre. Mais le message peine à infuser/i », regrette ainsi iLe Télégramme/i (21/11), dans un article titré « Pourquoi la France doit se préparer à la guerre ». « iLe message passe mal/i », confirme un autre titre régional, iLe Maine Libre/i (21/11). « iDepuis qu'il est devenu chef d'état-major des armées, le 1er septembre, [Fabien Mandon] n'a de cesse de frapper les esprits, afin que la population civile se prépare à "un conflit de haute intensité" contre la Russie/i » retrace iLe Parisien/i (21/11). « Menace russe : l'opinion, la première bataille », rappelle le bien nommé iL'Opinion/i (21/11)./p
pDans iLibération/i, les papiers oscillent entre les reproductions de dépêches sur la classe politique qui « bondit » (20/11), les « débats » lancée à la cantonade par la directrice adjointe de la rédaction Alexandra Schwartzbrod (« Faut-il accepter de perdre nos enfants, comme l'a dit le chef d'état-major des armées ? », 21/11), et les critiques très mesurées contenues dans les éditos de Thomas Legrand, qui eux non plus ne contestent pas le fond : « iL'Europe est devenue un îlot de démocratie libérale assiégée. Si l'on est attaché à la préservation de ce modèle, qui a fait de notre continent le petit bout de terre le plus libre du monde, il faut effectivement se préparer à se battre et, sans doute, à faire des sacrifices./i ». Mais l'on trouve aussi, dans les pages de iLibé/i, des papiers beaucoup plus ouvertement favorables aux déclarations du général Mandon, comme celui de Jean Quatremer (20/11) : « iUn appel à la mobilisation morale et économique de la nation absolument nécessaire pour que l'industrie de la défense française passe enfin en mode "économie de guerre" et que l'opinion publique comprenne enfin qu'il va falloir faire des choix budgétaires douloureux pour permettre la montée en puissance de l'armée française. Afin de décourager les nuisibles d'attaquer nos démocraties./i »/p
pDans un long papier, titré « Derrière les polémiques stériles, ce qu'a vraiment dit le chef d'état-major des armées » (21/11), le magazine iChallenges/i estime que le discours de Fabien Mandon « in'a rien d'une sortie de route/i », et que ceux qui le condamnent font preuve « ide déni ou d'angélisme/i » : « iOui, la guerre fait des morts/i, écrit le journaliste Vincent Lamigeon, ifaire comme si cette réalité n'existait pas, comme si ce sacrifice n'était pas consubstantiel à toute intervention armée, comme si un chef d'état-major n'avait pas le droit de la rappeler, c'est faire preuve d'un déni étrange, ou d'un angélisme qui ne peut que faire les affaires de Moscou/i ». Le constat est le même dans les colonnes de iOuest-France/i (23/05), où c'est le général Daniel Brûlé qui donne son point de vue : « iL'hypothèse d'une guerre impliquant la France n'est pas un objet de débat mais une réalité./i » iLe Monde/i se lance lui sur le terrain de la comparaison internationale (« Les propos du général Mandon, une position partagée en Europe », 24/11) puis regrette dans un autre papier que « ila pédagogie de l'effort de défense/i » se déroule « ien terrain miné/i » (25/11) : « iS'exprimer sur le rapport que la nation peut entretenir à sa défense est un exercice extrêmement sensible, voire périlleux. Le chef d'état-major des armées, Fabien Mandon, en a fait l'expérience […]/i », écrit le journal de référence. iLe Point/i, qui n'aime rien tant que la guerre, est bien sûr au rendez-vous. C'est d'abord Sophie Coignard qui s'y colle, avec un angle que son titre résume bien : « Royal, Mélenchon, Roussel : derrière le pacifisme, le carriérisme » (21/11). Puis c'est Kamel Daoud qui se laisse aller dans sa chronique à un lyrisme guerrier : « iLa France est-elle prête à envoyer ses enfants se faire tuer à la guerre ? Cette question lancée par le chef d'état-major est cruciale : c'est celle par laquelle s'affirme une nation./i » Le registre de l'humour est aussi employé : c'est par exemple Sophia Aram qui fustige sur France Inter (25/11) les « ipatriotes en carton/i » et proclame toute sa confiance au général Mandon. iLes Échos/i, enfin, par l'intermédiaire de son chroniqueur « philosophe » Gaspard Koenig, s'avance sur la question morale : « Au nom de quoi perdre ses enfants ? » (27/11) Bonne question./p
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h3 class='article_intertitres'Macron chef de guerre, le retour/h3
p/brAu fil de la semaine et des commentaires qui ont suivi les déclarations du général Mandon, la presse a commencé à bruisser d'une rumeur : le chef d'état-major était-il en « iservice commandé/i » (iLibération/i, 21/11) pour le véritable chef des armées, le président de la République ? A-t-il pu faire des déclarations de ce type sans l'aval d'Emmanuel Macron, dont il est notoirement proche, puisqu'il fut l'un de ses conseillers ? La question est posée dans le 20h de Léa Salamé du 20 novembre. Dans le sujet diffusé, France 2 cite anonymement « un conseiller de l'Élysée », qui affirme que Macron n'avait pas supervisé le discours du général, mais qu'il en validait le fond : « iLa phrase isolée est angoissante bien sûr mais il faut prendre le propos dans son ensemble. Une prise de conscience est nécessaire/i », cite le JT. Un autre sujet est lancé dans la foulée par Salamé, pour faire « il'état précis de la menace russe/i ». Dans celui-ci, on peut entendre « l'expert » de l'IFRI, Thierry Gomart, dire que « ila Russie a déclaré la guerre à l'Europe, d'une certaine manière/i ». Mais nous n'en saurons pas plus sur la « icertaine manière/i » avec laquelle la Russie a « idéclaré la guerre à l'Europe/i ». Dans le même JT est évoquée une rumeur qui va être, tout au long de la semaine, la deuxième jambe de la marche médiatique vers la guerre : « iSelon nos informations, le président de la République doit faire des annonces dans les prochaines semaines sur la création d'un service militaire volontaire./i »/p
pLes uns après les autres, les journaux font part de leurs informations exclusives en provenance de l'Élysée et très vite le calendrier se précise : ce ne sera pas « idans les prochaines semaines/i », comme initialement annoncé par le JT de France 2, mais dès ce jeudi 27. Lundi 24 novembre, depuis un déplacement en Angola, Emmanuel Macron accorde un entretien à RTL et M6, diffusé le lendemain sur les deux antennes, dans lequel le président de la République apporte son soutien à son chef d'état-major – « iSon propos a été déformé/i » – et confirme « ila transformation du Service national universel vers une nouvelle forme/i »./p
pDébats de plateaux, tribunes, entretiens, éditos, comparaisons internationales, sondages, le « retour du service militaire » ouvre illico une nouvelle page de cette séquence militaro-médiatique. L'idée est chaudement accueillie par une très large partie de la presse./p
pJeudi 27 novembre, depuis Varces (Isère), Emmanuel Macron annonce donc le retour du service « volontaire » et « purement militaire » de 10 mois que la presse avait iteasé/i depuis une semaine. Sur LCI, Renaud Pila ne sait plus comment contenir son enthousiasme :/p
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pstrong- Éric Brunet :/strong Nous avons Renaud Pila qui lève le doigt comme un enfant sage, il veut prendre la parole. Dès qu'il y a la chose militaire, je le vois extrêmement mobilisé./p
pstrong- Renaud Pila :/strong Moi, je suis discipliné hein ! J'ai fait mes classes !/p
pstrong- Éric Brunet :/strong Très bien. On vous écoute./p
pstrong- Renaud Pila :/strong […] Il va y avoir dans les jours qui viennent énormément de débats sur : « Oui mais ça ne sert à rien de faire un service national si on ne fait pas nation, s'il n'y a pas un but collectif du pays et si l'armement moral n'est pas sur l'économique et le social, mais vous comprenez… » Mais enfin ! Ça, c'est des questions, franchement… Ça, c'est des questions pour prendre le thé le dimanche à 17h ! Mais avant de prendre le thé le dimanche à 17h et de se poser dix milliards de questions philosophiques […], on met son treillis, on s'engage si on est volontaire, on s'engage ! Le cœur de cible, 18 ans, 19 ans, on s'engage pour dix mois. […] Lorsqu'on était dans les années 70, 80, 90, on ne se posait pas toutes ces questions ! On avait le service militaire obligatoire et […] on ne se disait pas « Mais oui, mais non, mais est-ce que je vais faire mon service parce que, la France, où sont les fondamentaux ? » Mais non ! À un moment donné, il y a une menace. […] [Macron], c'est le chef des armées. Lorsque le chef de l'État quel qu'il soit dit « Il y a une menace » – on la voit tous les jours, sur LCI on informe tous les jours, depuis des années il y a eu 800 morts français sur les théâtres africains ou en Afghanistan, il y a tous les jours des soldats qui risquent leur vie –, eh bien aujourd'hui, il y a une menace, il y a une menace claire, il faut demander aux Baltes, il faut demander aux Polonais, eh bien, on s'engage ! Et les débats philosophico-philosophiques, on pourra les faire le dimanche à 17h ! Là il y a quelque chose qui est clair et il y a un besoin du pays !/p
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pCaricatural chez Renaud Pila, l'enthousiasme éditorial pour cette idée macroniste va être très largement partagé, sous diverses modalités, par la quasi-totalité du paysage audiovisuel. « iC'est une très bonne chose/i, réagit dans la foulée le général Dutartre sur BFM-TV, imoi je pense que ça va faire l'unanimité !/i ». « iQuand vous êtes volontaire pour dix mois/i, ajoute le chef du service international, Patrick Sauce, ià moins d'une très mauvaise expérience, en fait vous êtes, je dirais non pas fana-mili [sic], mais un ami de la famille militaire pour la vie !/i »/p
pMême euphorie sur CNews, dans l'émission de Laurence Ferrari : « iMoi, je trouve que c'est une initiative formidable que de remettre quelques jeunes sous les drapeaux ! On est d'accord ?/i » « iAbsolument, on peut terminer le débat/i », acquiesce son invité, le général Bruno Clermont. Éric Naulleau y est aussi « ifavorable dans l'ensemble/i », mais regrette que le service ne soit que volontaire : « iSi c'est sur la base du volontariat, ce n'est pas ceux qui ont le plus besoin d'être remis d'équerre qui iront/i ». « iCe n'est qu'une première étape/i, le rassure le lieutenant-colonel Vincent Arbarétier sur France Info, iles Allemands ne sont pas dupes : leur service militaire volontaire va se transformer tôt où tard en service militaire obligatoire/i ». Sur LCI, Ruth Elkrief exulte : « iIl y a une dimension de réarmement moral, et elle est bienvenue parce qu'il y a une demande en fait ! […] Il y a une sorte de vide et un besoin existentiel de but dans la vie, d'objectif, de beauté en quelque sorte, d'idéal ! Et là on en offre un, qui est cadré, qui est clair, et qui est pour la France avec ses valeurs. Quoi de mieux ?/i »/p
pLe soir de l'annonce, le journal de Léa Salamé se charge du service après-vente. La présentatrice reçoit la ministre des Armées, Catherine Vautrin, et consacre une grande partie de son interview… à expliquer aux jeunes concernés comment candidater à ce nouveau service militaire volontaire : « iSi y'a des gens qui nous regardent là, s'il y a des jeunes de 17-18 ou 19 ans qui nous regardent… ils veulent s'inscrire, qu'est-ce qu'ils doivent faire concrètement ?/i ». « iEt on sera rémunéré 800 euros ?/i », relance Salamé. « iRémunéré, nourri, logé, blanchi, et avec une carte de réduction SNCF de 75% !/i » répond la ministre. Léa Salamé s'inquiète : « iSi dans les prochains jours vous recevez des milliers de candidatures – imaginons – comment vous allez les sélectionner ?/i » Les questions de Salamé sur la réalité de la « imenace russe/i » arriveront bien après cette séquence « numéro vert », mais là encore, elles ne seront pas bien déstabilisantes pour la ministre : « iIl avait raison [le général Mandon] de le dire ? C'est ça dire la vérité aux Français ?/i » ; « iLa menace elle est sérieuse ? Elle est là, elle est sérieuse ?/i » ; Certaines de ses relances ne sont même pas des questions : « iIl faut se préparer à sacrifier nos enfants dans les prochaines années… On ne pourra pas échapper à une confrontation avec la Russie d'ici 3 ou 4 ans…/i »/p
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centerstrong***/strong/center
p/brL'unanimisme éditorial que nous documentons sur de nombreux sujets s'est donc donné à voir dans un nouvel épisode fort impressionnant. Et on le sait : face à la propagande de guerre, les médias a href="https://www.acrimed.org/Propagande-de-guerre-les-medias-au-garde-a-vous"se mettent au garde-à-vous/a./p
p/brstrongJérémie Younes/strong/p/div
hr /
div class='rss_notes'div id="nb1"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh1" class="spip_note" title="Notes 1" rev="appendix"1/a] /spanIsabelle Lasserre rebondit ici sur la prise de parole antérieure de Jean-Dominique Merchet : « Moi j'admire le général George Patton qui disait à ses soldats : "L'objet de la guerre ce n'est pas de mourir pour son pays, c'est de faire que le bâtard d'en face meurt pour le sien". »/p
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mar, 2025-11-25 16:29
img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L150xH83/morandini2-e455a.png?1764080976' class='spip_logo spip_logo_right' width='150' height='83' alt="" /
div class='rss_chapo'pCNews, 18 novembre 2025./p/div
div class='rss_texte'p« iJ'ai quitté le plateau de Morandini sur CNews ce matin. Un sondage sur l'Islam de France, commandé par Le Figaro à l'Ifop, basé sur un échantillon de 1 000 sondés, ne peut résumer la position des jeunes musulmans de France/i », a href="https://x.com/rkaaout/status/1990763429796417942" class="spip_out" rel="external"tweete/a, ce 18 novembre, la conseillère municipale d'Ivry-sur-Seine (et macroniste) Rachida Kaaout. Au programme du plateau ce jour-là : un sondage de l'Ifop sur les « musulmans de France » – celui-là même qui sera démonté a href="https://www.mediapart.fr/journal/france/201125/musulmans-de-france-les-failles-d-un-sondage-choc" class="spip_out" rel="external"par Mediapart deux jours plus tard/a. Ce n'était, ô surprise, pas l'angle d'attaque du jour. Au contraire même, puisque la prise de distance avec ce sondage, tentée par Rachida Kaaout, va lui valoir les foudres de Jean-Marc Morandini, animateur a href="https://lesjours.fr/tags/jean-marc-morandini/" class="spip_out" rel="external"au sinistre pedigree/a./p
/br
h3 class='article_intertitres'Acte 1 : « iC'est comme ça que ça se fait un sondage, vous dites n'importe quoi !/i »/h3
p/brAu départ, il y a cette question : « iRachida Kaaout, votre regard sur ces trois chiffres ? Je voudrais juste qu'on se concentre sur ces trois chiffres, parce que pour moi ils sont très significatifs sur les jeunes de moins de 25 ans./i »/p
/br
div class='spip_document_16287 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" a href='https://www.acrimed.org/IMG/png/morandini1.png' class="spip_doc_lien mediabox" type="image/png" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH278/morandini1-b1759.png?1764080390' width='500' height='278' alt='' //a
/figure
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p/brMais, problème, la conseillère municipale n'apporte pas la réponse attendue : « iMoi, ce qui me pose problème, c'est la radicalisation. Après, maintenant, si je dois commenter votre sondage, je vais vous dire, sur un échantillon de 1 000 personnes, c'est ça ? Pour moi, il n'est pas représentatif de la réalité…/i » C'en est (déjà) trop pour Morandini, qui va recouvrir la voix de son invitée par des invectives et une même question, serinée à l'infini : « iUn sondage politique, ça se fait sur combien de personnes ?/i »/p
pPrécisons-le d'emblée : les échanges qui suivent se basent sur une intox : si l'échantillon du sondage ien général/i est bien de 1 005 « personnes musulmanes », celui sur les moins de 25 ans est en fait de 291 personnesspan class="spip_note_ref" [a href="#nb1" class="spip_note" rel="appendix" title="« Sur les 1 005 personnes musulmanes interrogées par l'Ifop, 291 ont été (…)" id="nh1"1/a]/span./p
pNi Morandini, ni personne d'autre sur le plateau, ne le précisera. L'animateur était semble-t-il trop occupé à rabrouer son invitée : « iQuand le thermomètre dit de mauvaises choses, on casse le thermomètre en fait./i » ; « iSoyons sérieux !/i » ; « iVous pouvez pas dire le sondage vaut rien parce qu'il vous plaît pas !/i » ; « iLà, c'est un sondage énorme, qui a été fait sur des centaines de personnes et on a retenu 1 000, qui étaient musulmanes en plus !/i » ; « iMais enfin, c'est les sondages, c'est comme ça que ça se fait un sondage, vous dites n'importe quoi !/i » ; « iArrêtez, vous répétez la même chose, vous êtes une machine à répéter la même chose !/i » ; « iAlors, je [ne] vous interroge plus. Je ne vous interroge plus. Je-ne-vous-interroge-plus !/i » ; « iRachida Kaaout, essayez de répondre à ma question, autrement vous arrêtez de parler./i » ; « iArrêtez, ça n'a aucun intérêt ce que vous dites…/i » ; « iArrêtez !/i » ; « iC'est pas parce que vous répétez 25 fois la même chose que c'est une vérité !/i » ; « iVous répétez 25 fois n'importe quoi !/i » ; « iStop !/i » ; « iÇa suffit !/i »/p
pEt de conclure ce premier acte avec un aveu… cristallin : « iÇa m'intéresse pas de parler avec vous./i »/p
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div class='spip_document_16288 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" a href='https://www.acrimed.org/IMG/png/morandini2.png' class="spip_doc_lien mediabox" type="image/png" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH278/morandini2-e5ebf.png?1764080390' width='500' height='278' alt='' //a
/figure
/div/br
h3 class='article_intertitres'Acte 2 : « iVous faites du bruit avec votre bouche, c'est tout ce que vous faites./i »/h3
p/br15 minutes plus tard, c'est le feu d'artifice. Alors que Rachida Kaaout tente à nouveau de participer au débat, Morandini s'interpose : « iNon, non, non, non, non ! Je ne vous donne pas la parole sur ce sujet !/i »/p
pEt de recouvrir, une nouvelle fois, son invitée : « iRachida, vous n'avez pas la parole. Ce sondage ne vous intéresse pas, il ne vaut rien, je ne vous donne pas la parole sur ce sujet !/i » ; « iVous m'entendez ou pas ? Est-ce que vous m'entendez, Rachida ?/i » ; « iMoi, je vous le dis, je ne vous donne pas la parole ! Je ne vous donne pas la parole sur ce sujet !/i » ; « iMais vous [ne] constatez rien !/i » (4 fois) ; « iVous faites de l'intox./i » (3 fois) ; « iJe vous donne pas la parole./i » ; « iVous faites du vent./i » ; « iVous faites du bruit avec votre bouche, c'est tout ce que vous faites./i » (2 fois) ; « iCe que vous dites ne sert à rien./i » « iNon, parce que vous n'avez pas de solution, vous faites du vent./i » ; « iC'est du vent./i » ; « iVous n'avez pas la parole…/i » ; « iEst-ce que vous m'entendez ? Est-ce que vous m'entendez ou vous avez un problème d'audition ?/i » (2 fois) ; « iJe veux que vous répondiez aux questions ou alors que vous ne parliez pas !/i » ; « iAlors répondez aux questions !/i » ; « iNon ! Non, non, vous ne répondez jamais aux questions. Vous n'avez pas la parole, ça vous l'entendez ?/i » ; « iEst-ce que vous entendez que vous n'avez pas la parole ?/i » ; « iEst-ce que vous entendez que vous n'avez pas la parole ?/i »/p
pEt une troisième fois, fatale :/p
blockquote class="spip"
pstrong- Jean-Marc Morandini :/strong Est-ce que vous entendez que vous n'avez pas la parole ?/p
pstrong- Rachida Kaaout :/strong Alors, je m'en vais./p
pstrong- Jean-Marc Morandini :/strong Eh ben au revoir !/p
pstrong- Rachida Kaaout :/strong Et bien, au revoir, très bien…/p
pstrong- Jean-Marc Morandini :/strong Au revoir, merci d'être venue./p
pstrong- Rachida Kaaout :/strong Je ferai [inaudible] mon commentaire, merci…/p
pstrong- Jean-Marc Morandini :/strong Vous ferez votre commentaire toute seule puisque vous parlez toute seule de toute façon./p
pstrong- Rachida Kaaout :/strong Vous ne voulez pas de solution !/p
pstrong- Jean-Marc Morandini :/strong Non, je veux avoir des gens qui répondent aux questions, et pas des gens qui font du bruit avec leur bouche juste histoire d'occuper le terrain. Merci, au revoir !/p
/blockquote/br
div class='spip_document_16289 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" a href='https://www.acrimed.org/IMG/png/morandini3.png' class="spip_doc_lien mediabox" type="image/png" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH278/morandini3-98fd5.png?1764080390' width='500' height='278' alt='' //a
/figure
/div/br
centerstrong***/strong/center
p/brOn est certainement là face à un chef d'œuvre d'interrogatoire journalistique – un de plus a href="https://www.blast-info.fr/articles/2025/cher-jean-marc-morandini-boxing-day-26-SidThlujRTOS7eMwylREfA" class="spip_out" rel="external"dans le (long) palmarès de Jean-Marc Morandini/a. D'où cette question, lancinante : que fait-il encore sur un plateau de télévision ? Et, qui plus est, sur une chaîne qui bénéficie d'une fréquence publique ? Allô l'Arcom ?/p
p/brstrongMaxime Friot/strong/p/div
hr /
div class='rss_notes'div id="nb1"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh1" class="spip_note" title="Notes 1" rev="appendix"1/a] /span« iSur les 1 005 personnes musulmanes interrogées par l'Ifop, 291 ont été identifiées comme faisant partie de la catégorie des "/i15-24 ansi". C'est sur ces jeunes personnes que se sont focalisés un grand nombre de médias, reprenant le cadrage de l'Ifop, qui propose un "/izoom sur les musulmans âgés de 15-25 ansi"/i » (a href="https://www.mediapart.fr/journal/france/201125/musulmans-de-france-les-failles-d-un-sondage-choc" class="spip_out" rel="external"Mediapart/a, 20/11)./p
/div/div
ven, 2025-11-21 14:58
img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L150xH146/erner-e7fcf.png?1763730187' class='spip_logo spip_logo_right' width='150' height='146' alt="" /
div class='rss_chapo'pMardi 18 novembre, Guillaume Erner reçoit dans la matinale de France Culture Francesca Albanese, rapporteuse spéciale de l'ONU sur les droits humains dans les territoires palestiniens occupés. L'occasion d'un très grand moment de journalisme face à cette voix qui fut si peu présente dans les grands médias français au cours des deux dernières années…/p/div
div class='rss_texte'p« iEt je reçois ce matin une voix propalestinienne majeure ! Francesca Albanese, bonjour…/i » Il est 7h42 sur France Culture et l'interview de Guillaume Erner s'ouvre sur une confusion majeure dans la présentation de son invitée. Francesca Albanese est la rapporteuse de l'ONU sur les droits humains dans les territoires palestiniens occupés. Le choix de la présenter comme « ipropalestinienne/i » et d'entretenir la confusion en la désignant d'emblée comme une partie prenante au conflit est tout sauf anodin, pour ne pas dire ouvertement malveillant : les accusations de « imilitantisme/i » qui cherchent à discréditer son mandat sont en général l'apanage de ses « idétracteurs/i » (iLe Monde/i, 15/09) – quand bien même l'étiquette en elle-même ne devrait rien avoir d'infâmant. « iTout d'abord bonjour la France et laissez-moi éclaircir : je ne suis pas du tout une voix propalestinienne, […] je suis pro-droits humains/i », corrige d'ailleurs Albanese, qui laisse échapper un premier soupir d'exaspération. Ce ne sera pas le dernier…/p
pD'autant que là n'était pas le seul biais dans la présentation d'Erner, qui avait décidément choisi, ce jour-là, de soigner son portrait :/p
blockquote class="spip"
pstrongGuillaume Erner :/strong Pour les uns, vous êtes une héroïne. Aymeric Caron, député de La France insoumise, a ainsi expliqué que vous étiez l'une des personnes les plus importantes de ce siècle […]. Et puis, de l'autre côté, des organisations juives se sont émues d'un certain nombre de vos propos. L'organisation Golem en France, une organisation juive de gauche, a jugé votre invitation problématique. strongNous allons donc proposer à nos auditeurs et à nos auditrices de se faire une opinion sur vous/strong, Francesca Albanese./p
/blockquote
pEt non pas de s'informer sur l'actualité de la Palestine occupéespan class="spip_note_ref" [a href="#nb1" class="spip_note" rel="appendix" title="Quel(le) autre invité(e) est présenté(e) de la sorte dans « Les Matins » ? (…)" id="nh1"1/a]/span …/p
/br
h3 class='article_intertitres'« iDonc en fait, le plan Albanese, c'est quoi ?/i »/h3
p/brLa première question de Guillaume Erner porte sur « icette réaction de Donald Trump, qui se réjouit du vote par le conseil de sécurité de l'ONU d'une force internationale pour Gaza/i ». Francesca Albanese se dit « iinquiète/i » de cette résolution qui ne « i[prend] pas en considération […] le droit international/i ». Son manque d'enthousiasme déçoit le matinalier : « iMais d'un point de vue humanitaire, déjà, est-ce qu'on ne pourrait pas se réjouir du cessez-le-feu tel qu'il est adopté aujourd'hui ?/i » La rapporteuse des Nations Unies rappelle alors que « i300 personnes ont été tuées/i » depuis la signature dudit « cessez-le-feu », portant le total estimé de victimes à « i70 000 personnes tuées/i », dont « i20 000 enfants/i ». « iMais Donald Trump/i, qui est décidément un formidable pourvoyeur d'angles journalistiques pour Guillaume Erner, iconsidère qu'il faut mettre en place ce comité de la paix […]/i », relance l'intervieweur. « iLa fin des combats ne signifie pas la paix/i, lui retourne calmement son invitée : iQu'est-ce qui se passe pour les Palestiniens qui vivent sous occupation militaire israélienne ?/i » La réponse fuse et Erner s'agace déjà :/p
blockquote class="spip"
pstrong- Guillaume Erner :/strong Donc en fait, le plan Albanese, c'est quoi ? C'est le fait qu'il n'y ait plus de soldats israéliens où exactement ? Puisque, comme vous le savez Francesca Albanese, chaque partie de la géographie de la région est politique [sic], donc vous demandez que les soldats israéliens se retirent d'où ? De Gaza, de la Cisjordanie ? De quelle portion du territoire ?/p
pstrong- Francesca Albanese :/strong … Ah je… je ne dirais pas « le plan Albanese », ça c'est ce que la Cour de justice internationale a décidé, a ordonné le 19 juillet 2024 : de se retirer du territoire palestinien occupé en totalité ! Oui : retirer les soldats, démanteler les colonies et arrêter de les épanouir [sic], et arrêter d'exploiter les ressources naturelles des territoires palestiniens occupés. La cour, je le rappelle, a aussi dit que la présence d'Israël dans ce qu'il reste de la Palestine historique vise à garder un régime qui viole les dispositions sur la prohibition de la discrimination raciale et de l'apartheid./p
/blockquote
pC'est la première occurrence du terme « apartheid » dans l'émission. Erner ne laissera pas passer la seconde… Reste qu'une nouvelle fois, le matinalier est pris en a href="https://www.acrimed.org/Gaza-Guillaume-Erner-face-a-deux-visions-de-la"flagrant délit de confusion, pour ne pas dire de confusionnisme/a : le droit international n'est pas une opinion. Quel échec du « journalisme » que de devoir encore le rappeler./p
/br
h3 class='article_intertitres'« iVous condamnez le Hamas ?/i »/h3
p/brL'entretien se poursuit et Guillaume Erner change de fournisseur. De Trump, on passe ainsi au gouvernement israélien : « iEst-ce que vous regrettez, Francesca Albanese, que le Hamas n'ait pas libéré les otages israéliens plus tôt, ce qui d'après le gouvernement israélien, aurait permis d'avoir un cessez-le-feu rapide ?/i » L'on reconnaît ici un biais caractéristique des intervieweurs du soir ou du matin, qui confondent, par paresse ou par commodité, le procédé du « contradictoire » avec le fait de répéter sans les vérifier les arguments des « idétracteurs/i » de son invité./p
pPeu importe la véracité ou non du propos ; peu importe le statut des uns et des autres, les intérêts qu'ils ont (ou non) en jeu et leur place dans les rapports de force : tout se vaut, tout est mis sur le même plan. À Manuel Bompard, l'on présentera les arguments du RN ; face à Gabriel Zucman, l'on se fera le relais des déclarations du Medef ou de Michel-Édouard Leclerc ; face à Francesca Albanese, l'on présente donc les arguments du gouvernement israélien. Mais l'intervieweur se mange encore un mur : « iJe regrette que le gouvernement israélien n'ait rien fait pour libérer les otages/i, répond à revers Albanese, iles otages n'auraient jamais dû être pris en otage…/i » Erner l'interrompt alors : « iDonc vous condamnez la prise d'otages ?/i » « iBien sûr !/i s'esclaffe Albanese, un rien étonnée de la question : « iJe condamne fermement tout crime contre les civils/i », se voit-elle obligée de rappeler. On avait compris qu'Erner n'en était pas certain, mais le journaliste tient à signifier plus « explicitement » pourquoi :/p
blockquote class="spip"
pstrongGuillaume Erner :/strong Si je vous pose cette question, c'est parce que vous avez fait un tweet après le 7 octobre qui a été largement commenté […], expliquant en substance que ce qui s'était passé le 7 octobre n'avait pas de caractère antisémite et était le produit des événements passés […]./p
/blockquote
pErner fait « comme si », mais le lien entre sa question initiale et sa relance n'a pourtant rien d'évident : on comprend mal, en effet, en quoi les réflexions d'Albanese pointées ici mettraient ia priori/i en doute le fait que cette dernière puisse condamner le crime de guerre que constitue la prise en otage de civils… Francesca Albanese est en tout cas sommée de se justifier pour ce tweet. Elle dit alors s'être « iappuyée sur une partie très importante du monde académique israélien, à savoir les professeurs Amos Goldberg et Alon Confino, qui critiquaient la prise de position de certains en Europe qui continuaient d'insister sur la matrice antisémite des attaques du 7 octobre/i », avant d'entamer une longue démonstration à propos de ces positions./p
pOr, sur la « chaîne du savoir », si on aime bien le savoir, on aime aussi le prêt-à-penser. On ne renie d'ailleurs aucun de ses automatismes, en particulier lorsque l'invité(e) a le mauvais goût de ne pas aller assez droit au but (préalablement requis) : « iFrancesca Albanese, pour être sûr de ce que vous voulez dire […] : vous condamnez le Hamas ?/i » La rapporteuse de l'ONU semble une nouvelle fois atterrée par la question de son hôte : « iMais… Écoutez, moi j'ai travaillé à Gaza […]. Le Hamas a régné sur Gaza, sur les Palestiniens, avec une poignée de fer on dirait en italien. Il n'y a rien à soutenir dans un mouvement religieux, forcément ça s'impose sur les droits humains […]./i » Pas convaincu, Guillaume Erner reprend :/p
blockquote class="spip"
pstrongGuillaume Erner :/strong La gauche à laquelle vous appartenez, Francesca Albanese, ne dénie pas, par exemple, le racisme anti-noir […]. Or, un certain nombre d'actes qui semblent évidemment relever de l'antisémitisme ne sont pas qualifiés comme tels par une partie de la gauche… Et vous avez pu donner l'impression, parfois, Francesca Albanese, que vous minimisiez l'antisémitisme./p
/blockquote
pCette fois, ce n'était pas une question. De quels actes – si « iévidemment/i » antisémites qu'ils « isemblent/i » l'être – parle-t-on ? On ne saura pas. De quelle « ipartie de la gauche/i » parle-t-on ? On ne saura pas non plus. À quelle occasion la rapporteuse de l'ONU a-t-elle « donné l'impression » de « minimiser l'antisémitisme » ? Erner ne le précise pas. Quels sont les acteurs à avoir fait part de cette « impression » ? La matinalier se dispense là encore de tout exemple. Bref : une question tout en « on-dit » et en procès d'intention. Ce journalisme de sous-entendus en fait d'ailleurs presque perdre ses mots à l'invitée : « iJe… C'est pas du tout vrai… Non !/i », répond Albanese, de plus en plus consternée./p
/br
h3 class='article_intertitres'De la propagande israélienne…/h3
p/brLe journal de 8h est passé, et nous sommes de retour avec l'invitée des « Matins ». Guillaume Erner évoque le livre de Francesca Albanese, iQuand le monde dort/ispan class="spip_note_ref" [a href="#nb2" class="spip_note" rel="appendix" title="Mémoire d'Encrier, 2025." id="nh2"2/a]/span, et l'histoire épouvantable de Hind qui y est racontée : une petite fille palestinienne de 5 ans, dont les derniers instants ont été gravés dans un enregistrement de la Croix-Rouge, qu'elle avait appelé à l'aide. Comme le rappelle Francesca Albanese, son corps sera retrouvé avec ceux de sa famille et des soignants de l'ONG venus les secourir, dans une voiture criblée de 350 balles par l'armée israélienne./p
pUn crime effroyable, qui inspire une question au matinalier : « iQuand on lit cette histoire et d'autres histoires que vous racontez, Francesca Albanese, on se demande pourquoi l'ONU n'a pas autorisé, n'a pas construit un corridor humanitaire ? L'une des particularités de la guerre à Gaza, c'est une guerre urbaine, avec des civils, des femmes, des enfants, et ça rappelle par exemple la Tchétchénie ou la Yougoslavie, il y avait des corridors humanitaires qui ont été faits là-bas… Pourquoi n'a-t-on pas fait de corridor humanitaire ?/i » La voix encore alourdie par l'émotion, la rapporteuse administre une leçon de journalisme à l'intervieweur : « iJ'ai une autre question, Guillaume : pourquoi les Nations Unies ne sont pas arrivées à bloquer ce que vous appelez une guerre ? Parce que la guerre, on la fait entre les États, on la fait entre la Russie et l'Ukraine, et d'autres pays. Contre une population qui est sous occupation, on ne fait pas une guerre. […]/i »/p
pÀ nouveau, Erner se réfugie dans l'automatisme journalistique qui consiste à confondre « contradictoire » et porte-parolat du gouvernement israélien : « iJe vais vous répondre la même chose que tout à l'heure, je vais vous dire que le Hamas aurait pu, aurait dû relâcher les otages immédiatement et qu'Israël aurait cessé la guerre – si l'on en croit évidemment les déclarations de Netanyahou./i » Et visiblement, Guillaume Erner croit les déclarations de Netanyahou. D'ailleurs, lorsqu'il a posé la question sur les « icorridors humanitaires/i », l'intervieweur avait en réalité une arrière-pensée… et une réponse attendue. Celle-ci n'étant pas venue de la bouche de son invitée, il la formule à sa place :/p
blockquote class="spip"
pstrongGuillaume Erner :/strong Ce qu'on pourrait dire aussi, Francesca Albanese, c'est que la population palestinienne était aussi otage du Hamas, qui l'utilisait comme bouclier humain, et que le fait de ne pas organiser de corridors humanitaires, de refuser qu'il y ait des corridors humanitaires, c'était aussi une manière pour le Hamas de conserver ces civils […], d'utiliser certains hôpitaux, d'utiliser un certain nombre de lieux pour également construire des lieux de combat./p
/blockquote
pCe n'était toujours pas une question… mais une manière pour le moins cavalière de recycler un (nouvel) élément de la propagande militaire israélienne, lequel vise à justifier les meurtres de civils ou les bombardements d'hôpitaux./p
/br
h3 class='article_intertitres'… à la relativisation de l'apartheid/h3
p/brAlbanese y répond quand même, avant de conclure : « iPour réduire la violence, il faut arrêter les moyens que sont l'occupation et l'apartheid israélien./i » Cette fois, Erner ne laisse pas passer :/p
blockquote class="spip"
pstrongGuillaume Erner :/strong Je suis obligé de faire un petit détour à propos de ce mot, « apartheid ». Parce que si on prend le régime d'apartheid sud-africain, il y avait une absence de citoyenneté, une interdiction de vote, des services publics séparés… trois caractéristiques qui n'existent pas du tout en Israël… Les arabes israéliens siègent à la Knesset, il y a les mêmes services publics, les mariages mixtes existent… Peut-on parler d'apartheid dans ce cas-là ?/p
/blockquote
pLes éléments de langage sont encore tragiquement classiques et l'on ne peut que déplorer, à nouveau, que France Culture tolère une telle dévaluation du droit international sur son antenne. Loin d'être réductible au cas sud-africain – et encore moins à la définition que s'invente Erner sur la base de sa propre sélection de « trois caractéristiques » –, l'apartheid est un concept encadré en droit internationalspan class="spip_note_ref" [a href="#nb3" class="spip_note" rel="appendix" title="Comme le rappelle Amnesty international, « trois grands traités (…)" id="nh3"3/a]/span. Droit international sur lequel s'est notamment appuyée l'ONG Amnesty International pour a href="https://www.amnesty.org/fr/documents/mde15/5141/2022/fr/" class="spip_out" rel="external"conclure à un apartheid, en 2022, au terme de quatre ans d'enquête/a, et démontrer ainsi qu'« iIsraël impose un système d'oppression et de domination aux Palestiniens et Palestiniennes dans toutes les situations où il contrôle la jouissance de leurs droits, c'est-à-dire dans tout Israël, dans les TPO [territoires palestiniens occupés, NDLR], et pour ce qui concerne les réfugié·e·s palestiniens./i »span class="spip_note_ref" [a href="#nb4" class="spip_note" rel="appendix" title="À l'instar, avant elle, de nombreuses organisations palestiniennes de (…)" id="nh4"4/a]/span/p
pRefusant d'outrepasser son mandat en s'exprimant sur autre chose que les territoires occupés depuis 1967, Francesca Albanese parle à leur propos d'« iune forme de dictature militaire/i » : « iLes Palestiniens de Cisjordanie vivent sous des ordres militaires écrits par des soldats, mis en œuvre par des soldats, revus dans des cours martiales par-des-sol-dats ! […] Avoir deux systèmes légaux, la loi civile pour les colons qui ne devraient pas être là, et la loi militaire pour les Palestiniens, c'est le "backbone" [la colonne vertébrale, NDLR] de l'apartheid. Oui./i »/p
pLa réponse assomme Guillaume Erner, qui juge ce discours « iradical/i ». Loin de proposer à son invitée d'apporter des informations supplémentaires sur ce système à deux vitesses invisibilisé partout ailleurs dans les grands médias, il verse de nouveau dans la disqualification :/p
blockquote class="spip"
pstrongGuillaume Erner :/strong Quand vous avez des expressions très radicales, je ne vais pas faire la liste des expressions radicales que vous avez eues, Francesca Albanese, est-ce que vous ne vous coupez pas de cette gauche israélienne qui, du coup, vous considère comme étant une ennemie, non pas de Netanyahou et de sa politique, mais une ennemie de l'existence même d'Israël ?/p
/blockquote
p« iJe ne vois pas pourquoi on doit se focaliser sur ce que la gauche israélienne pense dès qu'on a l'opportunité de parler de la situation des Palestiniens/i [elle souligne le terme, NDLR] isous l'occupation israélienne, qui est en fait la cause de toute violence/i », cingle la rapporteuse. On ne saurait mieux dire d'un tel cadrage…/p
pAlbanese note ensuite qu'il y a « iune campagne de destruction de [s]a réputation qui est incroyable !/i » « iC'est pour ça que je vous invite d'ailleurs/i », répond Erner – comme s'il n'y prêtait pas lui-même le flanc depuis une demi-heure… Manifestement pas pour parler de l'actualité en Palestine, en tout cas, qui, après quelques minutes expédiées au début, n'est plus du tout le sujet de l'entretien. Aiguillé sur le sujet, le présentateur égraine alors les accusations portées contre Albanese : « iAccusation d'antisémitisme, accusation de compassion à double standard si j'ose dire/i ». Ce double standard qu'Erner Guillaume ne veut pas voir a href="https://www.acrimed.org/Guillaume-Erner-et-la-critique-des-medias"s'agissant du traitement médiatique du génocide/a./p
/br
h3 class='article_intertitres'« iJ'imagine et j'espère que vous êtes sioniste vous aussi/i »/h3
p/brS'ensuit un court chapitre sur la peur des juifs en France, avant une page plus « politicienne », au cours de laquelle Guillaume Erner s'attache, encore une fois, à faire passer son invitée pour une militante de gauche : « iVous êtes devenue une figure extrêmement importante de la gauche mondiale et certains aimeraient que vous jouiez un rôle politique, Francesca Albanese […]. Est-ce que vous avez envie de vous engager en politique ?/i » « iNon, je suis engagée pour la défense du droit/i », répond en substance la rapporteuse de l'ONU. Nonobstant, Erner poursuit son fil et relance même les hostilités en sous-entendant que son interlocutrice incarnerait une rupture dans « il'alliance entre les juifs italiens et la gauche/i » :/p
blockquote class="spip"
pstrongGuillaume Erner :/strong Est-ce que vous n'avez pas peur que votre attitude, qu'un discours radical, pas sur le droit des Palestiniens […] mais sur la délégitimation d'Israël eh bien aient écarté… il n'y a plus de juifs engagés en politique en Italie autour de vous./p
/blockquote
pD'où Guillaume Erner tire-t-il une telle affirmation ? Francesca Albanese ne cache plus du tout sa consternation – « iMais c'est pas vrai… c'est pas vrai !/i » – et développe son propos en invitant son interlocuteur à « idistinguer le sionisme de ce qu'est le judaïsme/i ». Pour compléter son bingo, Guillaume Erner cède à la provocation :/p
blockquote class="spip"
pstrong- Guillaume Erner :/strong J'imagine et j'espère que vous êtes sioniste vous aussi, Francesca Albanese. Le sionisme, c'est l'autodétermination du peuple juif. Vous êtes sioniste comme vous êtes kurdiste, j'imagine que vous êtes pour l'autodétermination des Kurdes…/p
pstrong- Francesca Albanese :/strong Non, non, je ne trouve pas que… alors je ne suis d'aucune idéologie, et là c'est vous qui dites : « Vous êtes de gauche, vous êtes de gauche ». Est-ce que vous m'avez jamais entendue dire que « je suis de gauche » ? Non…/p
pstrong- Guillaume Erner :/strong Oh alors là… Vous citez Edward Saïd, vous citez toutes les références…/p
pstrong- Francesca Albanese :/strong … et Antonio Gramsci, et Primo Levi… mais parce que c'est très intéressant !/p
pstrong- Guillaume Erner :/strong Mais c'est pas un crime d'être de gauche hein, Francesca Albanese !/p
pstrong- Francesca Albanese :/strong C'est une question à se poser : pourquoi les plus grands intellectuels qui constituent des inspirations à travers l'histoire sont de gauche ?/p
/blockquote
pAu terme des cinq dernières minutes consacrées à de a href="https://www.courrierinternational.com/article/verbatim-en-italie-les-declarations-de-la-ministre-roccella-sur-auschwitz-et-le-fascisme-font-polemique_236162" class="spip_out" rel="external"récentes déclarations de la ministre Eugenia Roccella/a, ministre italienne de l'Égalité des chances et de la Famille, Erner conclut : « iMerci beaucoup Francesca Albanese, d'avoir été avec nous ce matin [pour votre livre]/i Quand le monde dort. » Le sous-titre de ce livre ? « Récits, voix et blessures de la Palestine ». Guillaume Erner aurait voulu faire taire les trois qu'il ne s'y serait guère pris autrement./p
/br
centerstrong***/strong/center
p/brAlors que la rapporteuse de l'ONU sur les droits humains dans les territoires palestiniens occupés n'est pas une invitée que l'on entend tous les jours, ni sur France Culturespan class="spip_note_ref" [a href="#nb5" class="spip_note" rel="appendix" title="Le site de France Culture indique que c'était son tout premier passage en (…)" id="nh5"5/a]/span, ni ailleurs, l'émission n'aura que peu porté sur… l'actualité de la Palestine occupée. Dès ses premiers mots, Guillaume Erner s'est attaché à faire passer son invitée, une juriste exerçant un mandat des Nations Unies, pour une militante « ipropalestinienne/i ». « iL'interview de Francesca Albanese sur France Culture ce matin montre à quel point certains médias peinent à comprendre que défendre le droit international n'est pas un "parti pris"/i », a href="https://bsky.app/profile/jsoufi.bsky.social/post/3m5vn2octas2u" class="spip_out" rel="external"a réagi Johann Soufi/a, que nous avons a href="https://www.acrimed.org/Palestine-Des-victimes-sans-visages-des-crimes"récemment interviewé à ce propos/a. Le « parti pris », ce matin-là, était en effet plutôt à trouver dans le choix des mots, dans les cadrages et les invectives passives agressives de Guillaume Erner. Mais il faut aussi le dire – et même s'en réjouir : pour une fois, et malgré la détermination du présentateur à saboter son entretien et à délégitimer son invitée, cette dernière aura spectaculairement déjoué de nombreuses questions piégées./p
p/brstrongJérémie Younes/strong, avec strongPauline Perrenot/strong/p/div
hr /
div class='rss_notes'div id="nb1"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh1" class="spip_note" title="Notes 1" rev="appendix"1/a] /spanQuel(le) autre invité(e) est présenté(e) de la sorte dans « Les Matins » ? Un portrait que l'on peut par exemple comparer à celui de Josep Borrell, a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/l-invite-e-des-matins/l-invite-e-des-matins-emission-du-vendredi-14-novembre-2025-1346968" class="spip_out" rel="external"interviewé quatre jours plus tôt/a./p
/divdiv id="nb2"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh2" class="spip_note" title="Notes 2" rev="appendix"2/a] /spanMémoire d'Encrier, 2025./p
/divdiv id="nb3"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh3" class="spip_note" title="Notes 3" rev="appendix"3/a] /spanComme le rappelle a href="https://www.amnesty.org/fr/documents/mde15/5141/2022/fr/" class="spip_out" rel="external"Amnesty international/a, « itrois grands traités internationaux […] interdisent et/ou érigent explicitement en infraction l'apartheid : la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, la Convention internationale sur l'élimination et la répression du crime d'apartheid (Convention sur l'apartheid) et le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (Statut de Rome)./i »/p
/divdiv id="nb4"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh4" class="spip_note" title="Notes 4" rev="appendix"4/a] /spanÀ l'instar, avant elle, de nombreuses organisations palestiniennes de défense des droits humains, mais aussi de l'ONG israélienne B'Tselem, qui parvenait aux mêmes conclusions dans un rapport paru en janvier 2021 : a href="https://www.btselem.org/publications/fulltext/202101_this_is_apartheid" class="spip_out" rel="external"« A regime of Jewish supremacy from the Jordan River to the Mediterranean Sea : This is apartheid »/a./p
/divdiv id="nb5"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh5" class="spip_note" title="Notes 5" rev="appendix"5/a] /spanLe site de France Culture indique que c'était son tout premier passage en plateau./p
/div/div
mar, 2025-11-18 12:37
img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L150xH150/katapult-c70bf.png?1763462247' class='spip_logo spip_logo_right' width='150' height='150' alt="" /
div class='rss_chapo'pLes effets de la concentration des médias, en Allemagne comme ailleurs, ce sont des licenciements en séries, la réduction de l'indépendance et du pluralisme, le conformisme éditorial. Des résolutions de l'après-guerre, il ne reste plus grand-chose./p/div
div class='rss_texte'/br
h3 class='article_intertitres'Licenciements/h3
p/brEn 2009, suite à une concentration interne, 300 postes de rédacteurs sont supprimés au sein des journaux du groupe Funke, début d'une a href="https://publik-verdi-de.translate.goog/ausgabe-2019-02/funke-mediengruppe-baut-ab/?_x_tr_sl=de_x_tr_tl=fr_x_tr_hl=fr_x_tr_pto=sc" class="spip_out" rel="external"longue série/a. En 2012, le iFrankfurter Rundschau/i et le iFinancial Times Deutschland/i, déficitaire depuis sa création, sont en liquidation, avec a href="https://www-spiegel-de.translate.goog/kultur/gesellschaft/gruner-jahr-verkuendet-aus-fuer-financial-times-deutschland-a-868371.html?_x_tr_sl=de_x_tr_tl=fr_x_tr_hl=fr_x_tr_pto=sc" class="spip_out" rel="external"nombre de licenciements à la clé/a. En 2014, la plus longue grève du secteur des médias, 117 jours, du service client de Madsack s'est soldée par le a href="https://www.verdi.de/presse/pressemitteilungen/++co++dd0d8d28-01cd-11e4-9f77-52540059119e" class="spip_out" rel="external"licenciement des 90 salariés concernés/aspan class="spip_note_ref" [a href="#nb1" class="spip_note" rel="appendix" title="Pour rappel, le Parti socialiste (SPD) est l'actionnaire principal de Madsack." id="nh1"1/a]/span. En 2020, le a href="https://www.ccfi.asso.fr/bauer-ferme-des-magazines-et-licencie-140-personnes/" class="spip_out" rel="external"groupe Bauer licencie 140 salariés/a, le iSüddeutsche Zeitung/i, 50 journalistes. En 2023, à la crise s'ajoutent les effets du Covid, iBild Zeitung/i décide de licencier 200 journalistes a href="https://www.courrierinternational.com/article/allemagne-des-journalistes-du-tabloid-bild-bientot-remplaces-par-de-l-intelligence-artificielle" class="spip_out" rel="external"remplacés, dit-elle, par l'intelligence artificielle/a. La même année, Bertelsmann annonce la suppression de a href="https://www.lesechos.fr/tech-medias/medias/bertelsmann-va-supprimer-plus-dun-tiers-des-equipes-de-son-pole-edition-1904325" class="spip_out" rel="external"700 emplois dans la presse/a. Toujours la même année, a href="https://www.lefigaro.fr/medias/le-groupe-allemand-de-medias-prosiebensat-1-supprime-400-emplois-d-ici-fin-2023-20230718" class="spip_out" rel="external"P7S1 supprime 400 emplois/a. Liste non exhaustive./p
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h3 class='article_intertitres'Indépendance et pluralisme/h3
p/brOn imagine facilement que, dans un tel contexte, les journalistes ne font pas preuve d'une indépendance excessive et veillent plutôt à conserver leur emploi. Et ce d'autant plus que, malgré des syndicats puissants, ils sont écartés de la cogestion « à l'allemande » et n'ont pas leur mot à dire pour s'opposer aux vagues de licenciement. Ni d'ailleurs en matière éditoriale qui est l'apanage des directionsspan class="spip_note_ref" [a href="#nb2" class="spip_note" rel="appendix" title="Les journalistes ont toutefois un rôle décisif au sein du premier magazine, (…)" id="nh2"2/a]/span./p
pEn plus des licenciements, les concentrations produisent du conformisme pour ainsi dire structurel. Le processus d'homogénéisation des contenus, appelé par euphémisme « synergies » ou « mutualisation », et qui consiste à produire des articles à partir d'une rédaction centrale et à les diffuser à l'ensemble des journaux possédés par le groupe, peut prendre des dimensions alarmantes. Le dernier rapport de la KEKspan class="spip_note_ref" [a href="#nb3" class="spip_note" rel="appendix" title="Kommission zur Ermittlung der Konzentration im Medienbereich - Commission de (…)" id="nh3"3/a]/span évoque ainsi « iun exemple marquant de diffusion de contenu [ :] le RedaktionsNetzwerk Deutschland (RND) du groupe Madsack Media, qui fournit désormais du contenu national à plus de 90 marques de médias/i » (rapport KEK, 2025). En fait de pluralisme, il reste surtout les informations locales, diverses par définition./p
pEn rassemblant dans un petit nombre de mains de plus en plus de médias, les concentrations confortent l'intégration de leurs richissimes propriétaires aux cercles dirigeants de la société. Dès lors, même si les médias sont juridiquement et économiquement indépendants de l'État et des groupes industriels, rien n'empêche qu'une coopération s'établisse entre eux dès lors qu'ils partagent les mêmes intérêts et une commune idéologie. Une idéologie dans laquelle, en Allemagne comme ailleurs, se confondent la droite et la gauche de gouvernement dans un ensemble qui penche de plus en plus vers l'extrême droitespan class="spip_note_ref" [a href="#nb4" class="spip_note" rel="appendix" title="Lire à ce propos le reportage d'Olivier Cyran « En Allemagne, la mémoire (…)" id="nh4"4/a]/span./p
pDu côté de la connexion entre médias et milieu politique, on a vu que le SPD possédait un important groupe de presse sur lequel il pouvait faire pression, et que les partis politiques influençaient fortement les organes de décision de l'audiovisuel public. Les deux plus gros groupes de médias, Bertelsmann et Springer, sont à ce propos parfaitement exemplaires./p
pLe principal actionnaire du groupe Bertelsmann, la fondation éponyme, a fait une campagne très soutenue pour l'adoption par le Bundestag des lois Hartz (2003-2005) promues par le chancelier Schröder (SPD), lois qui démantelaient le droit du travail et condamnaient les chômeurs à la misère. « iL'œuvre "philanthropique" du groupe de médias et d'édition le plus influent d'Allemagne a été au cœur du processus d'élaboration de l'Agenda 2010span class="spip_note_ref" [a href="#nb5" class="spip_note" rel="appendix" title="Ensemble de réformes, dont les lois Hartz" id="nh5"5/a]/span : financement d'expertises et de conférences, diffusion d'argumentaires auprès des journalistes, mise en réseau des "bonnes volontés ". "Sans le travail de préparation, d'accompagnement et d'après-vente déployé à tous les niveaux par la Fondation Bertelsmann, les propositions de la commission Hartz et leur traduction législative n'auraient jamais pu voir le jour", observe Helga Spindler, professeure en droit public à l'université de Duisburg./i » (Olivier Cyran, « a href="https://www.monde-diplomatique.fr/2017/09/CYRAN/57833" class="spip_out" rel="external"L'enfer du miracle allemand/a », iLe Monde diplomatique/i, septembre 2017)./p
pPrécurseur, en quelque sorte, de la situation actuelle, le magnat de la presse Axel Springer, armé de son quotidien à sensation iBild Zeitung/i, s'est toujours situé bien à droite de l'échiquier politique. Cumulant successivement des a href="https://www.monde-diplomatique.fr/1968/05/ABOSCH/28420" class="spip_out" rel="external"attaques féroces contre des étudiants en 1968/a, un sexisme décomplexé avec a href="https://www.slate.fr/lien/51247/bild-seins-nus" class="spip_out" rel="external"les femmes nues en première page/a, les a href="https://www.monde-diplomatique.fr/2017/08/RIMBERT/57801" class="spip_out" rel="external"pratiques de délation de manifestants à la police/a, les atteintes à la déontologie journalistique : il est le journal le plus sanctionné par le Conseil allemand de la Presse, a href="https://de.statista.com/infografik/2588/publikationen-mit-den-meisten-ruegen-durch-den-deutschen-presserat/" class="spip_out" rel="external"avec 219 sanctions/a prononcées à son encontre depuis 1986. Le deuxième, iBZ/i (iBerliner Zeitung/i), est très loin derrière (21 sanctions) et appartient aussi à Springer ! Tout journaliste travaillant pour Springer doit signer un contrat de travail où il s'engage à défendre Israël et l'entente de l'Allemagne avec les États-Unisspan class="spip_note_ref" [a href="#nb6" class="spip_note" rel="appendix" title="« Nous défendons la liberté, l'État de droit, la démocratie et une Europe (…)" id="nh6"6/a]/span. Un journaliste a href="https://theintercept.com/2023/10/26/axel-springer-fires-employee-israel/" class="spip_out" rel="external"vient d'être licencié pour n'avoir pas respecté cette clause/a. Mais le soutien à Israël n'est pas seulement idéologique, car le groupe Springer participe directement depuis 2014 à la vente de biens immobiliers situés sur les territoires de Cisjordanie illégalement occupés par Israël, a href="https://www.courrierinternational.com/article/enquete-le-groupe-axel-springer-accuse-de-tirer-profit-des-colonies-israeliennes-illegales?" class="spip_out" rel="external"par le biais de sa société Yad2/a, qui est revenue au a href="https://www.lefigaro.fr/musique/accuse-de-soutien-a-israel-le-festival-sonar-de-barcelone-fait-face-au-boycott-de-70-artistes-20250527" class="spip_out" rel="external"fonds d'investissement KKR/a, au début 2025, avec la division des activités du groupe. Malgré son journalisme de caniveau, iBild/i était et reste fort courtisé par les responsables politiques, chancelière et chancelier compris ; c'est qu'il s'est vendu longtemps à plusieurs millions d'exemplaires et, malgré une baisse sensible de son tirage, demeure de loin le premier quotidien allemand./p
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h3 class='article_intertitres'Conformisme éditorial/h3
p/brPar contraste, mais pas seulement, les autres journaux et médias paraissaient beaucoup plus consistants, et ils furent longtemps estimés comme ce que l'on faisait de mieux en matière d'information, avec des magazines d'investigation comme le iSpiegel/i, ou de grande qualité d'information et de culture, comme iDie Zeit/i, iDie Frankfurter allgemeine Zeitung/i, ou plus à gauche, mais pas trop, iDie Süddeutsche Zeitung/i, quelles que soient leurs orientations politiques, quoique toujours libérales. Pareil pour l'information dans le service public de radio et de télévision. Un changement s'opère dans l'audiovisuel vers les années 1990, suite à l'arrivée des groupes privés et de leurs méthodes commerciales racoleuses, qui déteignent sur le service public, comme en témoigne le gouvernement fédéral dans son « Rapport annuel sur la télévision » de 1995 : « iTendance au sensationnalisme et au voyeurisme, avec présentation croissante d'images d'horreur, tendance au négativisme avec présentation très pauvre en contexte et en arrière plan de délinquance et d'accident, tendance à produire du scandale avec un penchant à interpréter l'actualité politique en termes de crises et de culpabilité, tendance à une représentation ritualisée de la politique avec un penchant à présenter sans distance les apparences de la mise en scène politique./i »span class="spip_note_ref" [a href="#nb7" class="spip_note" rel="appendix" title="Cité par Klaus Wenger dans « La radio, une contribution à la culture (…)" id="nh7"7/a]/span./p
pPlus récemment, comme l'expose Fabian Scheidler dans a href="https://www.monde-diplomatique.fr/2024/03/SCHEIDLER/66637" class="spip_out" rel="external"un article du iMonde diplomatique/i/a, les médias dominants ont fait preuve d'un alarmant suivisme des options politiques gouvernementales en matière de militarisme, d'atlantismespan class="spip_note_ref" [a href="#nb8" class="spip_note" rel="appendix" title="Il cite notamment l'Atlantik Brücke (Pont atlantique), véritable rendez-vous (…)" id="nh8"8/a]/span, de traitement de la pandémie du Covid, de la guerre en Ukraine et du massacre de Gaza./p
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centerstrong***/strong/center
p/brNul doute, après ce tour d'horizon, qu'en termes de structures et réglementations favorisant le pluralisme et la démocratie dans les médias, le système allemand est nettement plus élaboré que le français./p
pLa décentralisation des instances de contrôle des médias audiovisuels, publics et privés, composées de représentants de la société civile, la gestion et la production de l'audiovisuel public par les Länder et là encore par des représentants de la société civile, le dispositif du « tiers indépendant », la place prépondérante donnée à l'audiovisuel public soutenu par une redevance importante et animé de fortes préoccupations démocratiques et pluralistes, une information détaillée, accessible et mise à jour sur les médias et les groupes de médias, une méthode mesurant le pouvoir global des groupes incluant leur audience numérique, autant d'éléments constitutifs d'un ensemble peut-être unique au monde, si on y ajoute l'indépendance des médias vis-à-vis de l'État et des groupes industriels, indépendance qui, même imparfaite, a une effectivité certaine./p
pRien de tel en France, qui a supprimé la redevance et sous-finance le service public, dont elle a vendu le meilleur morceau et qu'elle se prépare à unifier a href="https://www.acrimed.org/Greve-et-motion-de-rejet-contre-la-reforme-de-l"sous une holding contrôlée à 100 % par l'État/a. Aucun contrôle citoyen n'y est institutionnalisé, ni sur le plan local, ni sur le plan national. Quant à l'indépendance vis-à-vis de l'État et des industriels…/p
pCela dit, on ne peut que constater que le « modèle allemand » souffre de nombre de porosités et que l'État et les puissances d'argent y gardent un rôle déterminant, avec les conséquences désastreuses que nous avons évoquées./p
pSi l'on s'en tient aux dispositifs anti-concentrations, on observe une législation plus laxiste en France, qui n'empêche quasiment aucune concentration, tandis que la loi allemande peut fluctuer au gré des politiques de l'État fédéral qui, par exemple, a fortement favorisé les concentrations au cours des vingt dernières années. Même plus démocratiques qu'en France, les contrôles de ces concentrations n'ont pas dû être d'une rigueur extrême pour que l'on ait constaté en 2009 que plus de la moitié des régions et des villes allemandes étaient désormais sous monopole de presse, et la télévision privée largement dominée par deux acteurs, pour qu'une dizaine de groupes fort prospères se maintiennent à travers le temps en tête des médias dominants. Et que, finalement, on se retrouve dans tout le secteur privé (hors radio) avec une concentration du même ordre que celle du système français, même si, du fait de la dimension beaucoup plus importante de la configuration allemande, un certain pluralisme y subsiste jusqu'à présent./p
pAinsi, malgré l'originalité de son dispositif et son souci affirmé d'indépendance et de pluralisme, l'Allemagne n'échappe pas à la règle commune des concentrations des médias. C'est à croire que le capitalisme médiatique se moque des particularismes régionaux./p
p/brstrongJean Pérès/strong/p
hr class="spip" /
p/brstrongAnnexe : a href="https://katapult-magazin.de/de/karten/artikel/ich-weiss-wer-deine-nachrichten-macht/deutsche-pressekonzerne-und-ihre-groessten-marken-ausschnitt-knicker.png" class="spip_out" rel="external"Infographie réalisée par Katapult/a (2019)/strong/p
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div class='spip_document_16283 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" a href='https://www.acrimed.org/IMG/png/katapult.png' class="spip_doc_lien mediabox" type="image/png" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH500/katapult-422ef.png?1763454263' width='500' height='500' alt='' //a
/figure
/div/div
hr /
div class='rss_notes'div id="nb1"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh1" class="spip_note" title="Notes 1" rev="appendix"1/a] /spanPour rappel, le Parti socialiste (SPD) est l'actionnaire principal de Madsack./p
/divdiv id="nb2"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh2" class="spip_note" title="Notes 2" rev="appendix"2/a] /spanLes journalistes ont toutefois un rôle décisif au sein du premier magazine, a href="https://www.lemonde.fr/archives/article/1970/01/02/l-application-de-la-cogestion-a-l-hebdomadaire-allemand-der-spiegel-marque-une-date-importante_2653797_1819218.html" class="spip_out" rel="external"iLe Spiegel/i, dont ils sont copropriétaires (50 % des parts)/a, et également au iTageszeitung/i (iTAZ/i), a href="https://basta.media/comment-un-quotidien-ecolo-et-alternatif-allemand-resiste-a-la-crise-de-la" class="spip_out" rel="external"seul quotidien de la gauche radicale et écologiste pendant 46 ans/a, désormais en ligne et hebdomadaire papier. Sous le statut de coopérative, le iTAZ/i est contrôlé par ses journalistes qui élisent leur directeur de rédaction. Il édite notamment la version allemande du iMonde diplomatique/i. À un degré moindre, mais significatif, a href="https://www.lemonde.fr/archives/article/1969/05/30/la-redaction-de-l-hebdomadaire-allemand-stern-acquiert-un-droit-de-veto-sur-l-orientation-du-magazine_2425676_1819218.html" class="spip_out" rel="external"iLe Stern/i/a et a href="https://www-sueddeutsche-de.translate.goog/kolumne/sueddeutsche-zeitung-chronik-77-jahre-1.5665041?_x_tr_sl=de_x_tr_tl=fr_x_tr_hl=fr_x_tr_pto=sc" class="spip_out" rel="external"le iSüddeutsche Zeintung/i/a, accordent une place importante aux journalistes./p
/divdiv id="nb3"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh3" class="spip_note" title="Notes 3" rev="appendix"3/a] /spanKommission zur Ermittlung der Konzentration im Medienbereich - Commission de contrôle de la concentration dans le domaine des médias./p
/divdiv id="nb4"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh4" class="spip_note" title="Notes 4" rev="appendix"4/a] /spanLire à ce propos le reportage d'Olivier Cyran a href="https://orientxxi.info/longforms/en-allemagne-la-memoire-s-estompe-et-l-afd-donne-le-tempo/" class="spip_out" rel="external"« En Allemagne, la mémoire s'estompe et l'Afd donne le tempo »/a (Orient XXI, 29/09/25) dont une partie traite de l'implication des médias./p
/divdiv id="nb5"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh5" class="spip_note" title="Notes 5" rev="appendix"5/a] /spanEnsemble de réformes, dont les lois Hartz/p
/divdiv id="nb6"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh6" class="spip_note" title="Notes 6" rev="appendix"6/a] /span« iNous défendons la liberté, l'État de droit, la démocratie et une Europe unie. Nous soutenons le peuple juif et le droit à l'existence de l'État d'Israël. Nous soutenons l'alliance transatlantique entre les États-Unis d'Amérique et l'Europe. Nous nous engageons en faveur d'une économie de marché libre et sociale. Nous rejetons l'extrémisme politique et religieux ainsi que toutes les formes de racisme et de discrimination sexuelle./i »/p
/divdiv id="nb7"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh7" class="spip_note" title="Notes 7" rev="appendix"7/a] /spanCité par Klaus Wenger dans « a href="https://www.persee.fr/doc/mat_0769-3206_1999_num_55_1_405735" class="spip_out" rel="external"La radio, une contribution à la culture politique/a », in iMatériaux pour l'histoire de notre temps/i, n°55-56, 1999, p. 82/p
/divdiv id="nb8"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh8" class="spip_note" title="Notes 8" rev="appendix"8/a] /spanIl cite notamment l'Atlantik Brücke (Pont atlantique), véritable rendez-vous pro-américain de la classe dominante (banque, affaires, politique, université, etc.) auquel participent une quarantaine de cadres du journalisme, et dont le président fut de 2009 à 2019 l'actuel chancelier Friedrich Merz./p
/div/div
ven, 2025-11-14 11:21
img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L150xH147/allemagne_logo-ff2b9.png?1763112119' class='spip_logo spip_logo_right' width='150' height='147' alt="" /
div class='rss_chapo'pDécentralisation, indépendance vis-à-vis des groupes industriels et de l'État : le paysage médiatique allemand permet, par comparaison, de montrer que la situation française n'est pas une fatalité. Mais est-ce pour autant un modèle à suivre ? On fait le point. Cette troisième partie se focalise sur le cas de l'audiovisuel./p/div
div class='rss_texte'pImpossible de parler des concentrations dans l'audiovisuel allemand sans évoquer le service public, qu'il s'agisse de la radio ou de la télévision, qui capte plus de la moitié de l'audience. Mais il s'agit d'un service public décentralisé, à l'opposé de la centralisation à la française. Quant au secteur privé, il est dominé par deux groupes, RTL et P7S1, autrement dit Bertelsmann et Berlusconi./p
pIntroduite en 1923 en Allemagne, la radio fut l'instrument-roi de la propagande nazie. En 1933, Goebbels, le ministre nazi de la propagande, déclarait que « ila mobilisation générale des esprits […] est l'une des principales missions de la radiodiffusion/i » et que celle-ci est « ile plus moderne et le plus important des instruments pour influencer les masses/i »span class="spip_note_ref" [a href="#nb1" class="spip_note" rel="appendix" title="Cité dans Isabelle Bourgeois, « La télévision allemande, une indépendance (…)" id="nh1"1/a]/span. Elle est alors écoutée à travers 4 millions de récepteurs (Volksempfänger, soit Récepteur du peuple, qui fut à la radio ce que la Volkswagen fut à l'automobile), puis 16 millions en 1943 (récepteur encore plus performant et moins onéreux, le DKE38, appelé ironiquement par la population a href="https://www.dw.com/fr/90-ans-radio-volksempfaenger-hitler-allemagne-etudiants-inflation/audio-66608889" class="spip_out" rel="external"« La gueule de Goebbels »/a, qu'on y entendait très souvent). Seul média à même de s'adresser à l'ensemble de la population (la télévision est alors balbutiante), la radio est contrôlée et utilisée par les forces d'occupation de 1945 à 1955. Elle est animée par de jeunes journalistes, mais aussi, faute de personnel qualifié, par d'anciens partisans du nazisme. Le modèle, inspiré de la BBC, dessinait une radio indépendante de l'État et des partis politiquesspan class="spip_note_ref" [a href="#nb2" class="spip_note" rel="appendix" title="Klaus Wenger, « La radio, une contribution à la culture politique », in (…)" id="nh2"2/a]/span – alors qu'en France, dès la Libération et malgré le projet du CNR, la radio et la télévision furent sous monopole d'État (jusqu'en 1986)./p
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h3 class='article_intertitres'Un audiovisuel public fort, décentralisé et indépendant/h3
p/brEn fait, c'est aux Länder que les Alliés vont confier le monopole de la diffusion radiophonique. Dès 1950, la création de l'ARDspan class="spip_note_ref" [a href="#nb3" class="spip_note" rel="appendix" title="Arbeitsgemeinschaft der Rundfunkanstalten der BRD - Communauté de travail (…)" id="nh3"3/a]/span définissait pour la radio un statut de droit public régional indépendant de l'État fédéral. En 1955, sept ans après les journaux, la radio passe à son tour sous souveraineté allemande, et y restera, de même que la télévision par la suite, sous cette forme de service public régional où chaque Land apporte sa contribution à la conception et la réalisation des programmes et émissions diffusés. Même les programmes à diffusion nationale sont assurés par les 9 instituts régionaux de l'audiovisuel qui produisent aussi des programmes régionaux (appelés Troisième chaîne : Dritten Programme). Cette structuration fut confirmée en 1961, a href="https://www.lemonde.fr/archives/article/1961/03/02/la-cour-de-carlsruhe-affirme-que-le-projet-d-une-seconde-chaine-de-television-concu-par-m-adenauer-est-contraire-a-la-constitution_2287846_1819218.html" class="spip_out" rel="external"par le jugement du Tribunal constitutionnel fédéral/a sur le projet de « télévision Adenauer ». C'est à la suite de ce jugement que fut créée la deuxième chaîne publique, ZDFspan class="spip_note_ref" [a href="#nb4" class="spip_note" rel="appendix" title="Zweites Deutsches Fernsehen." id="nh4"4/a]/span, gérée et contrôlée de la même façon que l'ARD, par les régions, mais sans la radio et centralisée./p
pAinsi, « ipendant plus de vingt ans/i [en fait, 30 ans, ndlr]i, la télévision et la radio furent exclusivement organisées par des institutions de droit public. Il n'y avait de place ni pour une radio privée – comme par exemple Radio Luxembourg ou les chaînes de télévision anglaises –, ni pour une radio contrôlée par l'État ou le gouvernement comme en France ou en Italie./i »span class="spip_note_ref" [a href="#nb5" class="spip_note" rel="appendix" title="Klaus Wenger, op. cit." id="nh5"5/a]/span/p
pJusqu'en 1986, les auditeurs et téléspectateurs allemands ne connurent que les télévisions et radios publiques gérées au niveau des Länder. Pendant la même période, en Allemagne de l'est, la radio de propagande nazie était devenue la radio de propagande du SED, le parti communiste unique au pouvoir./p
pContrairement à la France qui a vendu, scandale unique au monde, sa première chaîne publique au privé (au bétonneur Bouygues), les deux premiers groupes audiovisuels allemands (ARD-La Première pour la radio et la télévision, ZDF-La Deuxième pour la seule télévision) sont demeurés publics jusqu'à aujourd'hui. Bénéficiant d'une redevance due par chaque habitant et parmi les plus élevées au mondespan class="spip_note_ref" [a href="#nb6" class="spip_note" rel="appendix" title="220 euros par an ; France : 138 euros en 2021." id="nh6"6/a]/span, l'audiovisuel public allemand capte une part d'audience record : 50,5 % pour la radio ARD contre 31,9 % pour Radio France, 55,4 % pour les chaînes de télévision publiques allemandes, contre 29 % pour France Télévisions (chiffres 2024)span class="spip_note_ref" [a href="#nb7" class="spip_note" rel="appendix" title="Pour l'Allemagne : Medienvielfaltsmonitor ; pour la France : Médiamétrie." id="nh7"7/a]/span. La redevance est révisée tous les quatre ans par les Länder réunis. Elle contribue pour 85 % du budget des deux chaînes, la publicité pour autour de 6 %span class="spip_note_ref" [a href="#nb8" class="spip_note" rel="appendix" title="La publicité est interdite sur les chaînes publiques à partir de 20h, ainsi (…)" id="nh8"8/a]/span./p
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h3 class='article_intertitres'Une mission démocratique/h3
p/brDans son jugement de rejet de la « télévision Adenauer », le Tribunal constitutionnel fédéral déclare que la télévision « iest plus qu'un simple "medium" dans la formation de l'opinion publique ; elle en est bien plutôt un "facteur" éminent/i », et pas seulement dans les émissions politiques, car « ila formation de l'opinion se fait également par le biais des pièces radiophoniques, des concerts, des retransmissions de spectacles de café-concert et de chansonniers, jusqu'à la mise en forme même d'une émission/i »span class="spip_note_ref" [a href="#nb9" class="spip_note" rel="appendix" title="Isabelle Bourgeois, op. cit., p. 31." id="nh9"9/a]/span. On ne saurait mieux dire. La radio et la télévision publiques se trouvent ainsi investies d'une véritable mission démocratique et doivent pour cela demeurer à bonne distance de l'État et des partis politiques. C'est du moins ce qu'affirme le Tribunal constitutionnel : « iL'art. 5 […] exige que cet instrument moderne de la formation de l'opinion ne soit livré ni à l'Etat, ni à un seul groupe social./i »/p
pDès lors, chaque Land dispose d'un système public de diffusion – qui doit rester indépendant de l'État fédéral et être administré par des conseils de l'audiovisuel (Rundfunkrat) où siègent des représentants des « groupes importants pour la société » dont les principaux partis politiques, syndicats, fédérations professionnelles, églises, associations, etc., choisis par les parlements des Länderspan class="spip_note_ref" [a href="#nb10" class="spip_note" rel="appendix" title="Par exemple, le mouvement LGBTQI est représenté dans plusieurs conseils." id="nh10"10/a]/span. Ces représentants sont élus ou nommés par leur organisme. Ce système s'est également peu à peu imposé dans les Länder issus de la RDA./p
pAinsi par rapport à la France, l'Allemagne possède un audiovisuel public fort (en termes de financement et d'audience), décentralisé (la législation sur l'audiovisuel étant de la compétence exclusive des Länder) et en principe « indépendant » ou « distant » de l'État par un financement sous forme de redevance fixée par les Länder réunis, et une gestion assurée par la société civile. La presse allemande use d'ailleurs du terme plutôt péjoratif Staatsrundfunk (« audiovisuel d'État ») pour désigner les médias publics d'autres pays du monde, dont la France, perçus comme plus dépendants de l'État./p
pHélas, la pratique n'a pas été à la hauteur de ces beaux principes. On se doute que les acteurs politiques n'ont pas apprécié d'être mis à l'écart par les Alliés des instances de décision de l'audiovisuel public. Ils n'eurent de cesse de chercher à influencer, à noyauter les organes de décision, c'est-à-dire les conseils de l'audiovisuel de l'ARD et le conseil de télévision de ZDF. Les partis politiques dominants, SPD et CDU-CSU, les représentants du gouvernement ou du parlement des Länder (considérés comme partie de l'État) et même l'État fédéral prennent une place prépondérante au sein des conseils de l'audiovisuel, au point qu'un arrêt du Tribunal constitutionnel de 2014 limite la place des partis à un maximum d'un tiers des membres des conseils. Mais il ne semble pas que cela ait suffi à résoudre le problème, car les autres représentants de la société civile aux conseils sont souvent associés aux partis politiques. Le système rôdé des « proporz » perdure, où le SPD et la CDU/CSU se partagent les sièges de direction, ce qui a pour effet de réduire considérablement l'influence de la société civile en tant que telle, et de marginaliser l'influence des autres forces politiques. Sans parler d'une certaine a href="https://uebermedien-de.translate.goog/74777/wen-vertreten-eigentlich-die-rundfunkraete-von-ard-und-zdf/?_x_tr_sl=de_x_tr_tl=fr_x_tr_hl=fr_x_tr_pto=sc" class="spip_out" rel="external"sélectivité dans le choix par les parlements des « groupes importants pour la société »/a. Le schéma d'indépendance vis-à-vis des partis et de l'État serait plutôt, selon Valérie Robert, un mythe professionnelspan class="spip_note_ref" [a href="#nb11" class="spip_note" rel="appendix" title="Valérie Robert, La presse en France et en Allemagne. Une comparaison des (…)" id="nh11"11/a]/span./p
pIl n'empêche que le succès des chaînes publiques est constant et suscite bien des convoitises. L'Alternative für Deutschland (AfD), parti d'extrême droite en pleine ascension, souhaite leur privatisation (tout comme le RN en France) et le parti libéral Freie Demokratische Partei (FDP), celle de la seule deuxième chaîne. Une certaine usure d'un service public de quelque 70 ans, et quelques scandales aidant, notamment sur le montant des salaires et les abus de pouvoir des dirigeants, une réforme importante est en cours depuis plusieurs années : rationalisation, modernisation, numérisation, coopération, mais sa mise en œuvre est assez laborieuse, étant donné le succès persistant des chaînes publiques et la résistance des Länder, peu tentés de céder sur leur compétence médiatique./p
/br
h3 class='article_intertitres'Des médias privés indépendants de l'État mais régulés/h3
p/brLes médias audiovisuels privés allemands sont également sous la surveillance d'une autorité de régulation (Landesmedienanstalten) dans chaque Land, également composée de représentants de la société civile (de 30 à 60 personnes) qui sont élus par le parlement du Land. Bien que ce soit souvent à la majorité des deux tiers, le rôle des partis peut être ici important, comme dans le cas des conseils de l'audiovisuel. L'autorité de régulation élit son président qui est son représentant légal pendant six ans. Au total, il existe 14 autorités régulatrices qui veillent au respect du pluralisme, à l'affectation des stations de radio et des chaînes de télévision, à la protection des jeunes, etc. Ces autorités sont néanmoins regroupées dans des commissions centrales, dont une est chargée spécifiquement du contrôle des concentrations : la KEKspan class="spip_note_ref" [a href="#nb12" class="spip_note" rel="appendix" title="Kommission zur Ermittlung der Konzentration im Medienbereich - Commission de (…)" id="nh12"12/a]/span, qui s'ajoute à l'autorité de la concurrence qui intervient en cas de rachats dans le secteur des médias. Ces commissions centrales réunissent 6 présidents des autorités régionales des médias élus par leurs pairs, et 6 experts des médias, souvent des juristes, choisis par les présidents des Länder. iA priori/i, elles semblent très différentes d'une institution comme l'Arcom française, organisme de composition très politiquespan class="spip_note_ref" [a href="#nb13" class="spip_note" rel="appendix" title="Le collège de l'Arcom comprend neuf membres : trois désignés par le (…)" id="nh13"13/a]/span, chargée notamment du contrôle des concentrations des médias audiovisuels./p
pL'ouverture des ondes au secteur privé, en 1986, a provoqué une forte mobilisation des groupes de presse très intéressés à l'idée de se faire une place dans l'audiovisuel. Ceux qui éditent surtout de la presse quotidienne, déjà fortement implantés localement, ont investi les entreprises radiophoniques à vocation locale, tandis que les groupes de presse à dominante de magazines, à vocation nationale et plus sensibles à l'image, ont plutôt investi la télévisionspan class="spip_note_ref" [a href="#nb14" class="spip_note" rel="appendix" title="Isabelle Bourgeois, « Les médias dans l'Allemagne unie. De l'unification (…)" id="nh14"14/a]/span./p
/br
h3 class='article_intertitres'Le dispositif de contrôle des concentrations : le « pouvoir d'opinion »/h3
p/brComme pour la presse écrite, la concentration des médias audiovisuels allemands est limitée. Depuis 1976, des contrôles interviennent pour des opérations de concentration dont les parties ont un chiffre d'affaires cumulé inférieur au 1/8e du plafond de 500 millions d'euros appliqué aux autres entreprises, soit 62,5 millions d'euros (2021). C'est moitié moins de ce qui est exigé pour les opérations des entreprises de presse. Cette disposition, plus restrictive que pour la presse écrite, s'inscrit dans une évaluation de ce que les Allemands appellent le « pouvoir d'opinion », plus important selon eux dans les médias audiovisuels que dans la presse, et de ce fait à contrôler davantage./p
pLa loi française prévoit des seuils de concentration par type de média, presse, radio, télévision. Ces seuils ne sont pas très contraignants, a href="https://www.acrimed.org/Une-legislation-contre-ou-pour-la-concentration"c'est le moins qu'on puisse dire/a. Par exemple, un seul propriétaire ne peut posséder que 49 % maximum d'une chaîne de télévision dont l'audience dépasse 8 %, sans limite supérieure. En Allemagne c'est la limite de 30 % d'audience qu'un seul propriétaire de chaîne de télévision ne peut pas dépasser. Mais de plus, et c'est là toute l'originalité du système allemand, cette audience est calculée sur l'ensemble des intérêts médiatiques dudit propriétaire, tous types confondus./p
pPar exemple, en 2006, lorsque le groupe Springer a voulu acquérir le groupe audiovisuel P7S1, la KEK a refusé le rachat : en additionnant les parts d'audience du groupe Springer dans la presse écrite (notamment le iBild/i) et les parts d'audience télévisuelles du groupe P7S1, la fusion des deux groupes aurait représenté une part d'audience de 42%, supérieure au seuil maximal de 30 % défini dans l'accord entre les Länder. La KEK a ainsi évalué le « pouvoir d'opinion » total du groupe en prenant en compte les différents types de médias détenus, ici presse et TV (concentration horizontale)span class="spip_note_ref" [a href="#nb15" class="spip_note" rel="appendix" title="« La concentration des médias », Étude de législation comparée n°302, (…)" id="nh15"15/a]/span. Mais elle peut aussi, du fait de l'importante marge d'appréciation qui lui est laissée, prendre en compte tout « marché lié aux médias » y compris en amont et en aval de la chaîne de production ou de distribution de programmes (concentration verticale) ou encore ses éventuelles participations dans des sociétés avec lesquelles elle n'a pas de relations client-fournisseur (concentration diagonale). En France, en revanche, aucune loi n'aurait empêché une telle fusion : la seule qui règlemente les concentrations horizontales pluri-médias (la règle dite des « deux sur trois ») définit des seuils tellement élevés qu'elle n'empêche aucune concentrationspan class="spip_note_ref" [a href="#nb16" class="spip_note" rel="appendix" title="Le rachat de M6 par TF1 aurait porté l'audience cumulée des deux chaînes à (…)" id="nh16"16/a]/span./p
pUne autre disposition originale de la loi allemande en faveur du pluralisme : la règle des « tiers indépendants » (Drittanbieter). Lorsqu'une entreprise de médias détenant une chaîne généraliste ou spécialisée détient une part d'audience annuelle de plus de 10 %, elle doit accorder, à ses frais, un temps d'antenne à des tiers indépendants, c'est-à-dire d'autres groupes audiovisuels qui ont une audience faible. Cette « fenêtre » ne peut être inférieure à 260 minutes dont 75 à une heure de grande écoute (entre 19h et 23h30). Des programmes régionaux sont éligibles à ces fenêtres à raison de 150 minutes par semaine. Actuellement, ces fenêtres sont ouvertes par RTL, P7S1, et Vox (filiale de RTL). Bien sûr, cette disposition a fait l'objet de vives protestations, mais elle a fonctionné et fonctionne toujours, même si on peut trouver contestable que RTL diffuse ainsi Spiegel.tv, alors que le propriétaire de RTL, Bertelsmann, l'est aussi en partie (à 25 %) de Spiegel.tv. Il n'empêche que le dispositif permet à des programmes de petites chaînes et de chaînes régionales de toucher un large public./p
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h3 class='article_intertitres'Transparence sur la concentration des médias/h3
p/brLes autorités régulatrices des Länder publient conjointement, tous les trois ans, un rapport sur le développement de la concentration dans les médias et sur les mesures visant à assurer le pluralisme dans l'audiovisuel privé. Pour ce faire, elles tracent précisément les structures de propriété des groupes de médias dans une a href="https://www.kek-online.de/mediendatenbank#/" class="spip_out" rel="external"base de données publique/a – tout changement devant obligatoirement leur être notifié – puis elles calculent un « pouvoir d'opinion » pour chaque groupe en agrégeant les parts d'audience des différents médias détenus, pondérées par le poids du support (TV, radio, presse…) dans l'influence sur l'opinionspan class="spip_note_ref" [a href="#nb17" class="spip_note" rel="appendix" title="Ce poids est évalué chaque année par la KEK sur la base de questionnaires et (…)" id="nh17"17/a]/span. Enfin, un a href="https://medienvielfaltsmonitor.de/" class="spip_out" rel="external"tableau de bord de la concentration des médias/a est mis à jour régulièrement pour permettre à quiconque de suivre graphiquement la plupart des groupes et des médias, leurs détenteurs, leurs pouvoirs d'opinion respectifs... Bref, un travail comparable, moins beau graphiquement mais plus détaillé, à celui que font iLe Monde diplomatique/i et Acrimed avec la carte a href="https://www.acrimed.org/Medias-francais-qui-possede-quoi"« Médias français, qui possède quoi ? »/a, est réalisé outre-Rhin par des autorités publiques mandatées pour cela./p
pOn notera que l'évaluation du « pouvoir d'opinion », même si son calcul est relativement complexe, est tout à fait pertinente pour mesurer l'influence, non pas d'un ou plusieurs médias, mais d'un groupe médiatique entier, avec toutes ses ramifications. Ce que le dispositif français ne permet de toute évidence pas./p
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div class='spip_document_16267 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" a href='https://www.acrimed.org/IMG/png/allemagne1.png' class="spip_doc_lien mediabox" type="image/png" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH172/allemagne1-e0362.png?1763021363' width='500' height='172' alt='' //a
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div class='spip_document_16266 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH489/allemagne2-25727.png?1763021363' width='500' height='489' alt='' /
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p/brSelon le critère du « pouvoir d'opinion », tous médias confondus, les dix plus gros groupes de médias concourent pour 64,8 % à la formation de l'opinion allemande. Dans l'ordre : ARD (20,3%), Bertelsmann (11 %), ZDF (7,4%), Springer (6,8%), P7S1 (5,1%), Burda (3,5%), Funke (3,1 %), Madsack (2,9%), Medien Union (2,4%) et Bauer (2,3). Soit 27,7 % pour le public et 37,1 pour le privé. Ainsi, les médias hors des dix groupes majeurs contribuent-ils pour 35,2 % à la formation de l'opinion./p
pEn résumé, la concentration des médias privés est du même ordre en Allemagne qu'en France dans le domaine de la presse, c'est-à-dire très forte ; elle est inférieure en Allemagne dans l'audiovisuel, surtout dans la radio, où elle est relativement faible, et aussi dans la télévision, à un degré moindre, alors que le service public de la radio et de la télévision attire plus de la moitié de l'audience./p
p/brstrongJean Pérès/strong/p
hr class="spip" /
p/brstrongAnnexe : Panorama des concentrations/strong/p
p/br- Concentrations dans la radiospan class="spip_note_ref" [a href="#nb18" class="spip_note" rel="appendix" title="Cf. Medienvielfaltsmonitor (Moniteur du pluralisme des médias)." id="nh18"18/a]/span/p
pCela donne, pour la radio, un grand éparpillement des unités de diffusion et des propriétaires, parmi lesquels on retrouve les Springer, Madsack, Funke, SWMH (Südwestdeutsche Medien Holding), etc., mais chacun pour un pourcentage minime de la diffusion (entre 0,8 et 2%) dominée, rappelons-le, à plus de 50 % par le groupe public régional ARD./p
pLe plus gros propriétaire privé à ce jour est le groupe Regiocast (6,5 %), qui possède 4 radios et participe à une douzaine d'autres dans divers Länder. Ses principaux actionnaires viennent du iNouveau journal d'Osnabrück/i (Basse Saxe) et sont accompagnés d'une flopée de petits actionnaires parmi lesquels on retrouve les grands groupes de presse ou leurs propriétaires à titre individuel. Le deuxième groupe est Bertelsmann (5,1 %), et le troisième Müller Medien (4,7 %), groupe familial fortement implanté en Bavière et en Autriche./p
pLa radio la plus importante est Radio NRW de la Rhénanie du Nord-Westphalie (6 % de l'audience), qui alimente 45 stations de radio du Land. Son actionnaire principal à 59 % est Pressefunk Nordrhein Westfalie, lui-même possédé par le groupe Funke (21,7 %) suivi de Springer (12,4 %) suivi de DuMont Schauberg (9,9 %), et parmi les petits actionnaires, on retrouve la société d'édition du SPD ; son deuxième actionnaire est RTL, c'est-à-dire Bertelsmann, à 12,6 %. Radio NRW possède aussi, avec Antenne NRW, elle-même filiale à 100 % d'Antenne Bayern Gmbh, société bavaroise, une radio privée diffusée sur tout le pays : NRW1./p
pDans la partie privée du paysage radiophonique allemand, les 4 premiers groupes (Regiocast, Bertelsmann, Müller, Nordwest Medien) occupent 19,2 % de l'audience, soit bien moins que les 4 premiers français qui en recueillent 46 %. Le paysage radiophonique privé allemand, relativement peu concentré en lui-même, peut être considéré comme une extension des groupes de presse, surtout quotidienne, dont la présence se manifeste par une véritable toile d'araignée de participations croisées./p
p/br- Concentrations dans la télévisionspan class="spip_note_ref" [a href="#nb19" class="spip_note" rel="appendix" title="Cf. pour les données d'audience : Medienvielfaltsmonitor (Moniteur du (…)" id="nh19"19/a]/span/p
pPour ce qui est de la télévision, le 1er janvier 1984, sous l'impulsion de la CDU (parti démocrate chrétien) et du chancelier Kohl, la première télévision privée, SAT1, est créée par une association d'une dizaine de groupes de presse, et surnommée pour cela « La chaîne des patrons de presse »span class="spip_note_ref" [a href="#nb20" class="spip_note" rel="appendix" title="Jacques Mousseau, « La télévision en République fédérale d'Allemagne », (…)" id="nh20"20/a]/span. On y reconnaît, entre autres, Springer, Burda, Holzbrinck, Bauer, Funke. Mais le SPD, partisan du monopole public, bloque la chaîne dans les Länder où il domine. En retour, la CDU bloque la perception de la redevance dans ses Länder. Situation pour le moins tendue, d'autant plus qu'à la concurrence public-privé et SPD-CDU s'ajoute celle entre groupes privés avec la diffusion dès le 2 janvier 1984 (lendemain du lancement de la première), d'une deuxième chaine privée, RTL+, chaîne luxembourgeoise émettant en Allemagne, dont Bertelsmann possède 40 % des actions./p
pLes deux chaînes privées, SAT1 et RTL+, très déficitaires dans les premiers temps, se disputent farouchement les canaux analogiques distribués par la Bundespost, et les opportunités ouvertes par le satellite et le plan câble, alors que les foyers allemands s'équipent en récepteurs de télévision. La Convention d'État pour la réorganisation des médias, signée en 1986 par les représentants des 11 Länder apaise les tensions en répartissant les canaux entre les chaînesspan class="spip_note_ref" [a href="#nb21" class="spip_note" rel="appendix" title="Jaques Mousseau, op. cit., p. 97." id="nh21"21/a]/span. Mais la guerre continue de faire rage dans le secteur privé, principalement entre les deux dominants, Bertelsmann et Springer./p
pLa période de 1987 à 2002 où sera mise en place la télévision que nous connaissons aujourd'hui, sera dominée par l'ascension et la chute de Léo Kirch, surnommé le « nouvel Hugenberg », que nous avons évoquées a href="https://www.acrimed.org/De-Kirch-a-Springer-Partie-de-bonneteau-dans-les-medias-allemands"dans un article précédent/a, en raison de l'immensité de son empire médiatique./p
pLes années qui suivent sont marquées par l'échec de Springer, qui rêvait d'un groupe de médias associant presse et télévision. Sa tentative de racheter la deuxième chaîne privée, ProSiebenSat1, ex propriété de Kirch, a été retoquée par la Commission de contrôle des concentrations (KEK) en 2005 pour la raison que cette chaîne lui aurait conféré une position dominante. Par la suite, cette deuxième chaîne privée, après un parcours chaotique entre fonds d'investissement anglais et américains, tombe en 2014 dans les bras de Berlusconi et sa société Mediaset. Laquelle, rebaptisée MediaForEurope (MFE) en 2021, devient l'actionnaire principal de la chaîne avec 29,9 % du capital. MFE ambitionne de devenir un acteur européen capable d'affronter les Gafam, notamment Netflix et Amazon. Avec 7 041 salariés (2024), P7S1 affiche un CA de 3,9 milliards d'euros (2024)./p
pQuant au groupe Bertelsmann, après son a href="https://www.acrimed.org/Le-groupe-Bertelsmann-659"développement dans plusieurs domaines/a, édition, librairie (France Loisirs), musique (Ariola), presse magazine et quotidienne (Grüner + Jahr), cinéma (UFA), en 1997 il fusionne sa filiale l'UFA Film avec la Compagnie Luxembourgeoise de Télédiffusion (CLT), dont il est devenu l'actionnaire principal. Ensuite, la fusion de CLT-UFA avec l'anglais Pearson TV en 2000 marque le début de RTL Group. Malgré la crise d'endettement qui frappe les entreprises de médias au début des années 2000 (pour rappel, Vivendi et Kirch se sont effondrés en 2002), Bertelsmann, alors qu'il prend des a href="https://www.acrimed.org/Bertelsmann-recentrages-de-2003-2004"mesures de sauvegarde de son empire/a, continue de monter au capital de RTL Group. En 2013, ses parts s'élèvent à 75,1 %./p
pDurant l'exercice 2019, RTL Group a réalisé un chiffre d'affaires de 6,7 milliards d'euros pour un bénéfice de 1,1 milliard d'euros. Les recettes proviennent essentiellement de la publicité (44 % télévision, 4 % radio), des productions audiovisuelles (22 %), des activités numériques (16 %) et des plateformes (6 %). RTL Group a réalisé 32 % de son chiffre d'affaires en Allemagne, 22 % en France, 16 % aux États-Unis, 8 % aux Pays-Bas, 4 % en Grande-Bretagne et 3 % en Belgique./p
pSpringer doit se contenter de deux chaînes de télévision, Welt et N24 réalisant respectivement 0,1 et 0,3 % d'audience, alors que Bertelsmann et Berlusconi dominent largement la télévision privée./p
pLes deux groupes publics ARD et ZDF, ainsi que les groupes privés Bertelsmann (RTL) et P7S1 sont les principaux groupes de télévision du pays. À eux quatre, ils détiennent 88 % des parts d'audience de la télévision./p
pLes deux groupes privés, Bertelsmann-RTL et P7S1 détiennent à eux seuls 36,9 % de l'audience TV (contre 39,6 % en France pour Bouygues et Bertelsmann-M6). Tandis qu'en Allemagne, 5 groupes privés détiennent 45,4 % des audiences des chaînes généralistes, ils en détiennent 56,2 % en France. On constate donc une forte concentration des médias audiovisuels privés dans les deux pays, et plus accentuée en France./p/div
hr /
div class='rss_notes'div id="nb1"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh1" class="spip_note" title="Notes 1" rev="appendix"1/a] /spanCité dans Isabelle Bourgeois, « a href="https://shs.cairn.info/revue-le-temps-des-medias-2009-2-page-29" class="spip_out" rel="external"La télévision allemande, une indépendance structurelle/a », iLe Temps des Médias/i, n°13, hiver 2009-2010, p. 29./p
/divdiv id="nb2"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh2" class="spip_note" title="Notes 2" rev="appendix"2/a] /spanKlaus Wenger, a href="https://www.persee.fr/doc/mat_0769-3206_1999_num_55_1_405735" class="spip_out" rel="external"« La radio, une contribution à la culture politique »/a, in iMatériaux pour l'histoire de notre temps/i, n°55-56, 1999, p. 78-82./p
/divdiv id="nb3"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh3" class="spip_note" title="Notes 3" rev="appendix"3/a] /spanArbeitsgemeinschaft der Rundfunkanstalten der BRD - Communauté de travail des organismes radiophoniques de la RFA./p
/divdiv id="nb4"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh4" class="spip_note" title="Notes 4" rev="appendix"4/a] /spanZweites Deutsches Fernsehen./p
/divdiv id="nb5"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh5" class="spip_note" title="Notes 5" rev="appendix"5/a] /spanKlaus Wenger, op. cit./p
/divdiv id="nb6"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh6" class="spip_note" title="Notes 6" rev="appendix"6/a] /span220 euros par an ; France : 138 euros en 2021./p
/divdiv id="nb7"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh7" class="spip_note" title="Notes 7" rev="appendix"7/a] /spanPour l'Allemagne : a href="https://medienvielfaltsmonitor.de/" class="spip_out" rel="external"Medienvielfaltsmonitor/a ; pour la France : a href="https://www.mediametrie.fr/system/files/2024-12/2024%2012%2030%20M%C3%A9diamat%20annuel%202024.pdf" class="spip_out" rel="external"Médiamétrie/a./p
/divdiv id="nb8"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh8" class="spip_note" title="Notes 8" rev="appendix"8/a] /spanLa publicité est interdite sur les chaînes publiques à partir de 20h, ainsi que les dimanches et jours fériés, et limitée à 20 minutes par jour. Contrairement à la pratique française, les parrainages sont également interdits./p
/divdiv id="nb9"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh9" class="spip_note" title="Notes 9" rev="appendix"9/a] /spanIsabelle Bourgeois, op. cit., p. 31./p
/divdiv id="nb10"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh10" class="spip_note" title="Notes 10" rev="appendix"10/a] /spanPar exemple, le mouvement a href="https://www-lsvd-de.translate.goog/de/ct/4742-Sitz-fuer-LSBTIQ-in-Rundfunkraeten-und-Medienanstalten?_x_tr_sl=de_x_tr_tl=fr_x_tr_hl=fr_x_tr_pto=sc" class="spip_out" rel="external"LGBTQI est représenté dans plusieurs conseils/a./p
/divdiv id="nb11"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh11" class="spip_note" title="Notes 11" rev="appendix"11/a] /spanValérie Robert, iLa presse en France et en Allemagne. Une comparaison des systèmes/i, Presses de la Sorbonne Nouvelle, 2011./p
/divdiv id="nb12"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh12" class="spip_note" title="Notes 12" rev="appendix"12/a] /spanKommission zur Ermittlung der Konzentration im Medienbereich - Commission de contrôle de la concentration dans le domaine des médias./p
/divdiv id="nb13"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh13" class="spip_note" title="Notes 13" rev="appendix"13/a] /spanLe collège de l'Arcom comprend neuf membres : trois désignés par le président du Sénat, trois par le président de l'Assemblée nationale, deux respectivement par le Conseil d'État et la Cour de cassation, tandis que son président est nommé directement par le président de la République./p
/divdiv id="nb14"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh14" class="spip_note" title="Notes 14" rev="appendix"14/a] /spanIsabelle Bourgeois, « a href='https://www.acrimed.org/journals.openedition.org/rea/4191'Les médias dans l'Allemagne unie. De l'unification démocratique à la normalisation du marché/a », iRegards sur l'économie allemande/i, n°98-99, 2010, p. 63-78./p
/divdiv id="nb15"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh15" class="spip_note" title="Notes 15" rev="appendix"15/a] /span« a href="https://www.senat.fr/lc/lc302/lc3022.html" class="spip_out" rel="external"La concentration des médias/a », Étude de législation comparée n°302, juillet 2022, Sénat./p
/divdiv id="nb16"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh16" class="spip_note" title="Notes 16" rev="appendix"16/a] /spanLe rachat de M6 par TF1 aurait porté l'audience cumulée des deux chaînes à 37,5 %, et encore davantage en comptant les autres chaînes des deux groupes sur la TNT. Mais du moment que le nouveau propriétaire, TF1, n'eut possédé que moins de 49 % du capital de la nouvelle chaîne, l'Arcom n'aurait rien eu à dire. C'est l'Autorité de la concurrence qui a opposé son véto pour entrave à la concurrence sur le terrain publicitaire./p
/divdiv id="nb17"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh17" class="spip_note" title="Notes 17" rev="appendix"17/a] /spanCe poids est évalué chaque année par la KEK sur la base de questionnaires et fait l'objet d'un rapport dédié. En 2024, il est évalué à l'échelle nationale à : 35 % pour les sites d'informations en ligne, 28 % pour la télévision, 17 % pour la radio, 16 % pour la presse quotidienne, et 4 % pour les magazines (chiffres arrondis au plus proche)./p
/divdiv id="nb18"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh18" class="spip_note" title="Notes 18" rev="appendix"18/a] /spanCf. a href="https://medienvielfaltsmonitor.de/" class="spip_out" rel="external"Medienvielfaltsmonitor (Moniteur du pluralisme des médias)/a./p
/divdiv id="nb19"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh19" class="spip_note" title="Notes 19" rev="appendix"19/a] /spanCf. pour les données d'audience : a href="https://medienvielfaltsmonitor.de/" class="spip_out" rel="external"Medienvielfaltsmonitor (Moniteur du pluralisme des médias)/a pour l'Allemagne et a href="https://www.mediametrie.fr/system/files/2024-12/2024%2012%2030%20M%C3%A9diamat%20annuel%202024.pdf" class="spip_out" rel="external"Médiamétrie/a pour la France./p
/divdiv id="nb20"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh20" class="spip_note" title="Notes 20" rev="appendix"20/a] /spanJacques Mousseau, « a href="https://www.persee.fr/doc/colan_0336-1500_1988_num_77_1_1058" class="spip_out" rel="external"La télévision en République fédérale d'Allemagne/a », iCommunication et langages/i, n°77, 3ème trimestre 1988, p. 94./p
/divdiv id="nb21"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh21" class="spip_note" title="Notes 21" rev="appendix"21/a] /spanJaques Mousseau, op. cit., p. 97./p
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mer, 2025-11-12 11:00
img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L119xH150/entrismeiranparisien-dc762.png?1762938049' class='spip_logo spip_logo_right' width='119' height='150' alt="" /
div class='rss_chapo'pEn mai, nous revenions sur la a href="https://www.acrimed.org/Entrisme-freriste-saturation-mediatique"saturation médiatique autour d'un rapport sur « l'entrisme frériste »/a. Six mois plus tard, c'est un nouveau rapport sur « l'entrisme iranien » qui est mis à l'agenda. Avec, pour le moment, un peu moins de succès…/p/div
div class='rss_texte'pLes rapports sur « l'entrisme islamiste » se suivent et se ressemblent. Leur promotion médiatique également ! Souvenez-vous : il y a quelques mois, un rapport catastrophiste sur « l'entrisme des Frères musulmans » nous prévenait, à la Une du iFigaro/i, que l'organisation islamique avait infiltré les moindres aspects de notre société afin « id'imposer la charia en France/i ». Rebelote ces derniers jours avec un nouveau rapport, cette fois sur « il'infiltration en France de la République islamique d'Iran/i ». Décidément… À nouveau, c'est iLe Figaro/i qui se charge de la promotion de l'œuvre (29/10) : « Espions, agents d'influence, proxies... Ce rapport alarmant qui dénonce l'entrisme iranien en France »./p
pCe nouveau rapport, pas plus scientifique que le précédent, est coordonné par un journaliste, le franco-iranien Emmanuel Razavi, qui collabore avec iValeurs Actuelles/i, iFranc-Tireur/i, iParis Match/i, Atlantico, et intervient régulièrement sur CNews, Europe 1 et Sud Radio. La commande du rapport est elle aussi bien située : l'exposé de 85 pages a été produit à la demande de « France2050 », un tout nouveau think tank présidé par un maire LR, a href="https://www.ldh-france.org/gilles-platret-apres-les-atteintes-aux-libertes-fondamentales-les-injures/" class="spip_out" rel="external"Gilles Platret/a : « iLe premier rapport du think-tank France2050 est un véritable pavé dans la mare politique et diplomatique/i », explique ainsi iLe Figaro/i./p
pHélas, le pavé va faire « plouf ». Contrairement à son équivalent fonctionnel sur les Frères musulmans, qui s'était retrouvé partout dans la presse en un instant, le « rapport » sur l'infiltration de la République islamique d'Iran ne va pas connaître un immense succès médiatique, et seule la presse de droite et d'extrême droite va s'en faire l'écho. C'est d'abord iL'Express/i (29/10), qui nous apprend que les mollahs « ivisent particulièrement le milieu étudiant/i », puis le iJDD/i (30/10), qui évoque un « irapport choc/i » et une infiltration « id'ampleur qu'on ne veut pas voir/i ». Dans son papier, le iJDD/i mentionne notamment le président du centre Franco-Iranien de Paris, qui dirigerait selon le rapport un « iréseau d'influence/i » afin de « irecruter des agents/i »span class="spip_note_ref" [a href="#nb1" class="spip_note" rel="appendix" title="Mais commet une erreur dans son prénom..." id="nh1"1/a]/span. iValeurs Actuelles/i entre dans la danse le lendemain (31/10) : « "La mécanique du chaos" : l'entrisme iranien en France dévoilé dans un rapport alarmant ». Europe 1 parle elle d'un rapport « iextrêmement inquiétant/i » et invite son auteur Emmanuel Razavi (31/10), quelques jours après son passage sur le plateau de CNews (29/10). Mais nous sommes deux jours après la publication du « rapport », et l'information est déjà en voie d'extinction./p
pC'était sans compter iLe Parisien/i, qui, le 3 novembre, propulse le sujet en Une./p
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div class='spip_document_16277 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L462xH581/entrismeiranparisien-6abf7.png?1762937400' width='462' height='581' alt='' /
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p/brDans son papier, le journaliste Thomas Poupeau amalgame dans le même élan le rapport sur « l'entrisme frériste », le dernier rapport sur l'entrisme des mollahs, et la commission parlementaire « isur de potentiels liens entre organisations politiques et réseaux islamistes/i », pour parler d'une menace globale : « L'islam radical à l'assaut de la France ? » À défaut d'éléments probants, le journaliste est quand même obligé d'indiquer dès le chapô que « ila menace est difficile à jauger/i »…/p
pComment un obscur rapport d'un obscur think tank a-t-il pu faire la Une du iParisien/i ? Le curriculum du journaliste et coordinateur du rapport donne sans doute une piste ; les synergies idéologiques entre les médias Bolloré et les médias Arnault en suggèrent une autre. Quoi qu'il en soit, le pouvoir de prescription du iParisien/i sur les autres médias va jouer à plein… et « l'actualité » connaît une deuxième vie./p
pCNews en remet une couche le jour même (3/11) : « Islam radical : un rapport alerte sur l'"infiltration" de l'Iran en France pour "exporter la révolution islamique" ». LCI n'est pas en reste, et c'est sa chroniqueuse Abnousse Shalmani qui se charge de nous dire « ila vérité sur l'infiltration de l'Iran en France/i » dans l'émission « 24h Pujadas » (3/11)./p
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div class='spip_document_16279 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" a href='https://www.acrimed.org/IMG/png/entrismeiranlci.png' class="spip_doc_lien mediabox" type="image/png" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH281/entrismeiranlci-d9a98.png?1762937777' width='500' height='281' alt='' //a
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p/briLe Point/i est au rendez-vous le lendemain (4/11), avec un article signé Bartolomé Simon et Erwan Seznec : « L'inquiétante stratégie d'influence iranienne en France dévoilée dans un rapport ». Le papier parle d'« iune "pieuvre" iranienne déployant ses tentacules via des réseaux d'influence/i », mais là encore, les journalistes sont obligés de modérer dès le chapô : « iUne mission d'enquête […] alerte sur les ingérences iraniennes. Elles sont difficiles à mesurer./i » Peu importe, BFM-TV pose aussi sa pierre à l'édifice en recevant Gilles Kepel. Dans sa première question, Apolline de Malherbe n'indique pas aux téléspectateurs la provenance du rapport, commandé par un think tank de droite à un journaliste de droite, et se contente de dire « iqu'il a été remis ce matin au Premier ministre et au président du Sénat/i » – ce qui, on le comprend, confère à ce travail une forme d'officialité./p
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figure class="spip_doc_inner" a href='https://www.acrimed.org/IMG/png/entrismeiranbfm.png' class="spip_doc_lien mediabox" type="image/png" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH275/entrismeiranbfm-9d064.png?1762937400' width='500' height='275' alt='' //a
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p/brAu bout de quelques minutes, l'interview dérive sur « il'islamo-gauchisme/i », qui serait né en Iran : « iC'est quoi l'islamo-gauchisme, qu'est-ce que vous appelez l'islamo-gauchisme ?/i » relance Apolline de Malherbe, intéressée : « iC'est l'alliance entre l'extrême gauche et les militants islamistes. C'est ce qui s'est créé en Iran […]/i », répond Kepel. Et Malherbe de résumer : « i[…] les islamistes chercheraient un peu comme les coucous à utiliser les nids politiques pour y mettre leurs propres œufs…/i » Sur CNews (4/11), c'est le chroniqueur Gilles-William Goldnadel qui complète le tableau : « iOn connaissait les liens de LFI avec le Hamas et la dictature algérienne, maintenant on accuse certains de ses membres d'être des agents de l'Iran./i » L'avocat ne se risquera toutefois pas à lâcher de noms…/p
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centerstrong***/strong/center
p/brOn l'a vu, si le « rapport » sur l'entrisme iranien n'a pas réussi à « percer » la bulle médiatique droite-extrême droite, il a tout de même connu une belle floraison éditoriale dans celle-ci, et avec elle, son lot de commentaires outranciers. Il est intéressant d'observer sur ce cas les synergies entre les différents titres de la presse des milliardaires : l'actualité fut forgée par la presse Dassault (iLe Figaro/i), martelée par la presse Bolloré (iJDD/i, Europe 1, CNews), puis réanimée par la presse Arnault (iLe Parisien/i) alors qu'elle était en train de s'éteindre, sans avoir réussi à se répandre. Les rapports sur « l'entrisme islamiste » se suivent et se ressemblent, mais leur succès varie en fonction du reste de l'actualité ou du sérieux que peuvent leur conférer les journalistes…/p
p/brstrongJérémie Younes/strong/p/div
hr /
div class='rss_notes'div id="nb1"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh1" class="spip_note" title="Notes 1" rev="appendix"1/a] /spanMais commet une erreur dans son prénom.../p
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lun, 2025-11-10 13:21
img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L150xH101/concentrationallemagne-24772.png?1762773686' class='spip_logo spip_logo_right' width='150' height='101' alt="" /
div class='rss_chapo'pDécentralisation, indépendance vis-à-vis des groupes industriels et de l'État : le paysage médiatique allemand permet, par comparaison, de montrer que la situation française n'est pas une fatalité. Mais est-ce pour autant un modèle à suivre ? On fait le point. Cette deuxième partie se focalise sur le cas de la presse écrite./p/div
div class='rss_texte'pLe marché de la presse allemande est à tous points de vue beaucoup plus important que le marché français. Il est le cinquième mondial et le premier européen. On y compte 319 journaux quotidiens (78 en France) avec un tirage de 12 millions d'exemplaires (7 millions en France). Le réseau de distribution est le plus dense du monde avec 116 000 points de vente (20 000 en France)span class="spip_note_ref" [a href="#nb1" class="spip_note" rel="appendix" title="Valérie Robert, La presse en France et en Allemagne. Une comparaison des (…)" id="nh1"1/a]/span. Les cinq plus gros groupes de presse figurent parmi les plus prospères du monde avec des chiffres d'affaires dépassant le milliard d'euros, alors que le premier groupe français, le groupe Sipa Ouest-France, affiche en 2022 un CA de 560 millions d'euros. Les magazines allemands ne sont pas en reste, plus nombreux, plus lus et plus rentables que leurs homologues français, surtout en matière d'information politique et générale, avec des publications comme iDer Spiegel/i ou iDie Zeit/ispan class="spip_note_ref" [a href="#nb2" class="spip_note" rel="appendix" title="Valérie Robert, op. cit., p. 103-110." id="nh2"2/a]/span./p
pLes journaux allemands bénéficient d'une forte adhésion de la population à la presse papier et aux informations régionales. De plus, la grande majorité des lecteurs sont abonnés (91 % contre 46 % en France) et reçoivent leur quotidien à domicile par portage, ce qui assure une grande souplesse de gestion aux entreprises de presse et un glissement plus facile vers un abonnement à la version numérique lorsque celui-ci est proposé. Ainsi, sur de telles bases, si la presse allemande connaît, comme les autres, une crise très importante depuis deux décennies, elle résiste mieux. Bien que les ventes de journaux aient été a href="https://www.media-perspektiven.de/fileadmin/user_upload/media-perspektiven/pdf/2022/2206_Roeper.pdf" class="spip_out" rel="external"divisées par deux en 27 ans (1995-2022)/a, elles restent très supérieures à celles des autres pays européens./p
/br
h3 class='article_intertitres'L'après-guerre et le retour des collaborateurs/h3
p/brÀ l'issue de la Deuxième Guerre mondiale, les journaux français qui avaient collaboré, c'est-à-dire la grande majorité d'entre eux, furent mis sous séquestre et remplacés par les journaux de la Résistance. Le programme allemand était comparable : « iQuiconque s'était politiquement compromis depuis 1933 ne devait plus jouer de rôle dans la presse et, en règle générale, même les noms de journaux en usage avant 1933 ne furent pas réadmis. On voulait voir agir des noms entièrement nouveaux et des hommes neufs./i »span class="spip_note_ref" [a href="#nb3" class="spip_note" rel="appendix" title="Erhard Becker, « La presse allemande depuis 1945 » in Henri Ménudier, (…)" id="nh3"3/a]/span Sous séquestre également, les journaux allemands furent attribués par les puissances occupantes sous forme de licences accordées à des individus non compromis avec le nazisme. Les Alliés contrôlaient, chacun à leur façon, les publications, tout en éditant aussi leurs propres journaux, dont certains continuèrent de paraître par la suite (iDie Welt/i, notamment, créé par les Britanniques). À la fin 1948, il y avait ainsi 140 journaux tirés à 14 millions d'exemplairesspan class="spip_note_ref" [a href="#nb4" class="spip_note" rel="appendix" title="Erhard Becker, op. cit." id="nh4"4/a]/span./p
pEn 1949, les contrôles cessèrent et la liberté de la presse fut rétablie, ouvrant la voie à 400 publications supplémentairesspan class="spip_note_ref" [a href="#nb5" class="spip_note" rel="appendix" title="Erhard Becker, op. cit." id="nh5"5/a]/span. Parmi elles, nombre de journaux d'avant-guerre, compromis avec le nazisme, refirent surface. Certains d'entre eux avaient survécu à la fin de la guerre, grâce notamment aux lucratives petites annonces, mais surtout la plupart des imprimeries demeuraient leur propriété, leur conférant, en ces temps de fortes difficultés économiques, un avantage substantiel sur leurs concurrents. D'autant qu'à la fin des années 1940, la lutte contre les résidus du nazisme cédait peu à peu le pas, sur le plan idéologique, à la lutte contre le communisme soviétique, inaugurant la guerre froidespan class="spip_note_ref" [a href="#nb6" class="spip_note" rel="appendix" title="« Allemagne de l'ouest : naissance d'une presse "alternative" contre les (…)" id="nh6"6/a]/span. D'où un certain laxisme vis-à-vis des ex-collaborateurs. Quant à la zone occupée par les soviétiques, le contrôle centralisé de la presse passa sans transition des nazis aux nouvelles autorités./p
p80 ans après, on constate que les détenteurs des 10 plus importants groupes de presse furent (eux-mêmes ou leurs aïeux) membres du NSDAP, le parti nazi, parfois à des postes importantsspan class="spip_note_ref" [a href="#nb7" class="spip_note" rel="appendix" title="Axel Springer, qui passe pour un des moins compromis, et qui fut un des (…)" id="nh7"7/a]/span ou bien ont participé à la propagande du régimespan class="spip_note_ref" [a href="#nb8" class="spip_note" rel="appendix" title="Pareillement en France : on pense à Prouvost, au trust Hachette, et surtout (…)" id="nh8"8/a]/span. En 2006, la plus vieille maison d'édition allemande, DuMont Schauberg, a défrayé la chronique en devenant actionnaire du journal israélien iHaaretz/i, le propriétaire du groupe étant le fils d'un zélé nazi. On constate ainsi, à partir de 1949, un retour en force des a href="https://de-m-wikipedia-org.translate.goog/wiki/Altverleger?_x_tr_sl=de_x_tr_tl=fr_x_tr_hl=fr_x_tr_pto=sc" class="spip_out" rel="external"anciens propriétaires de journaux/a, voire anciens partisans des nazis, par un de ces retournements dont la classe dominante a le secret./p
pDans les années suivantes, les concentrations dans la presse, comme dans l'ensemble de l'économie allemande (au cours de ce que l'on a appelé « le miracle économique »), se feront à un rythme quasi continu jusqu'à l'année 1976. Selon Manfred Kötterheinrichspan class="spip_note_ref" [a href="#nb9" class="spip_note" rel="appendix" title="Manfred Kötterheinrich, « Die Konzentration in der deutschen Presse », in (…)" id="nh9"9/a]/span, déjà entre 1954 et 1964 le nombre de quotidiens passe de 1 500 à 1 409 et celui des rédactions autonomes de 225 à 185./p
/br
h3 class='article_intertitres'Les rédactions autonomes de moins en moins nombreuses/h3
p/brUne bonne mesure de la concentration des journaux et de ses effets sur le pluralisme réside dans l'évaluation du nombre de rédactions autonomes. Par « rédaction autonome », on entend une rédaction qui couvre par ses propres journalistes l'ensemble des rubriques d'un journal. Les journaux achetés sont la plupart du temps privés de la couverture des questions de politique nationale et internationale, qui leur est livrée pour ainsi dire « clé en main » par le groupe propriétairespan class="spip_note_ref" [a href="#nb10" class="spip_note" rel="appendix" title="C'est ce qu'on appelle la « matrice » dans les années 1950 ou le « manteau » (…)" id="nh10"10/a]/span, et se voient cantonnés aux actualités locales, avec nombre de licenciements à la cléspan class="spip_note_ref" [a href="#nb11" class="spip_note" rel="appendix" title="Cas limite de cette tendance, le Westfalische Rundschau a vu sa rédaction (…)" id="nh11"11/a]/span. Même indépendants économiquement, de nombreux journaux achètent à d'autres les articles de politique générale, ne gardant qu'une rédaction locale. Un pluralisme de façade peut ainsi cacher de fortes concentrations internesspan class="spip_note_ref" [a href="#nb12" class="spip_note" rel="appendix" title="Andrea Czepek définit les différentes modalités de cette perte d'autonomie (…)" id="nh12"12/a]/span./p
pLe nombre de rédactions autonomes en Allemagne a chuté de moitié entre 1954 et 1976, période de fortes concentrationsspan class="spip_note_ref" [a href="#nb13" class="spip_note" rel="appendix" title="« Allemagne de l'ouest : naissance d'une presse "alternative" contre les (…)" id="nh13"13/a]/span. En 1976, pour y mettre un frein, notamment dans la Ruhr où le iWestdeutsche allgemeine Zeitung/i (WAZ) venait d'acheter de nombreux journaux, le gouvernement social-démocrate modifie la loi sur les concentrations./p
pLes règles anti-concentration dans la presse allemande sont, comme en France, celles du droit commun de la concurrence. Dans les deux pays, l'autorité de la concurrence n'intervient que si les chiffres d'affaires cumulés des entreprises concernées sont supérieurs à un certain plafond : 150 millions d'euros pour la France, 500 millions pour l'Allemagne. Au-dessus de ce chiffre, c'est l'office des cartels (Bundeskartellamt) qui vérifie que le projet d'achat ne met pas une entreprise de presse en position dominante, voire de monopole, dans la ville ou la région concernée./p
pMais la loi allemande contient depuis 1976 une disposition spécifique à la presse : le plafond de chiffre d'affaires pris en compte, pour les entreprises de presse, est divisé par 20. D'où une multiplication des contrôles à partir de cette date et une baisse sensible des concentrations pendant les années 1980 et 1990, à l'exception notoire de la phase de réunification, au cours de laquelle les groupes de presse de l'ouest achetèrent la plupart de ceux de l'est. On notera au passage que la régulation par le plafond de chiffre d'affaires est un puissant moyen de contrôle des concentrations./p
pAinsi, en 1981, le projet de rachat du plus important groupe du pays (Springer) par le deuxième (Burda), qui aurait conduit ce dernier à une position ultra-dominante, a été retoqué par le Kartellamtspan class="spip_note_ref" [a href="#nb14" class="spip_note" rel="appendix" title="Valérie Robert, op.cit., p. 60." id="nh14"14/a]/span. Pour la même raison, le projet de vente, en 2004, du iBerliner Verlag/i à Holzbrinck, un très important groupe de presse, a href="https://de-wikipedia-org.translate.goog/wiki/Berliner_Verlag?_x_tr_sl=de_x_tr_tl=fr_x_tr_hl=fr_x_tr_pto=sc" class="spip_out" rel="external"a été refusé/a. Exceptionnellement, si l'existence de l'entreprise rachetée est menacée, l'achat peut être autorisé, même s'il met l'acheteur en position dominante. C'est ainsi que la iFrankfurter Allgemeine Zeitung/i (FAZ) a href="https://de-wikipedia-org.translate.goog/wiki/Frankfurter_Rundschau?_x_tr_sl=de_x_tr_tl=fr_x_tr_hl=fr_x_tr_pto=sc" class="spip_out" rel="external"a pu racheter/a le iFrankfurter Rundschau/i en 2013, bien que cela l'ait placée en position dominante dans le Land de Hesse./p
pSuite aux mesures anti-concentrations, la baisse du nombre de rédactions autonomes a ralenti. Mais la crise économique que subit la presse dans les années 2000, notamment sur le terrain publicitaire, va provoquer, sous la pression des gros éditeurs, une libéralisation croissante des concentrations. Le plafond de CA n'est plus divisé que par 10 en 2005, puis 8 en 2013, et enfin 4 en 2021. C'est à cette période que, selon Valérie Robert, « iles groupes de journaux qui changent de mains sont de plus en plus gros, et [que] la presse suprarégionale n'est plus épargnée/i ».span class="spip_note_ref" [a href="#nb15" class="spip_note" rel="appendix" title="Valérie Robert, op. cit., p. 65." id="nh15"15/a]/span/p
/br
h3 class='article_intertitres'Une presse fortement concentrée/h3
p/brBeaucoup plus prospère que la française, la presse allemande était paradoxalement moins concentrée jusqu'à une période récente. Selon une évaluation de Valérie Robertspan class="spip_note_ref" [a href="#nb16" class="spip_note" rel="appendix" title="Op. cit., p. 61-63 et 72-73." id="nh16"16/a]/span portant sur l'année 2010, les dix premiers groupes de presse quotidienne allemands réalisaient 59 % de la diffusion totale, contre 84 % pour les dix premiers français. Ces dix premiers groupes détenaient 37 % des titres de presse en Allemagne, contre 76 % en France. Pour les magazines, la chercheuse compte, en 2010, que les 5 premiers groupes de presse représentent dans les deux pays 65 % de la diffusion totale, avec une concentration plus intense en France, puisqu'il y a deux fois moins de titres qu'en Allemagne. Mais, selon le Medienvielfalt monitorspan class="spip_note_ref" [a href="#nb17" class="spip_note" rel="appendix" title="Observatoire du pluralisme, qui publie chaque année des données actualisées (…)" id="nh17"17/a]/span, entre 2010 et 2024 la presse allemande a continué de se concentrer pour atteindre 87 % de la diffusion totale pour les 10 premiers groupes, et 73,5 % pour les 5 premiers groupes de magazines. Bien que plus diverse, la presse allemande est désormais aussi concentrée que la française./p
pEffet de cette concentration, la presse quotidienne allemande est en position de monopole dans un nombre de plus en plus important de villes et de Länderspan class="spip_note_ref" [a href="#nb18" class="spip_note" rel="appendix" title="Pour rappel, en France, le monopole régional est la règle, à de rares (…)" id="nh18"18/a]/span. Particulièrement dans l'ancienne RDA, où les journaux du parti socialiste unifié (SED) furent achetés dans les premières années 1990 par les groupes de presse de l'ouest, perpétuant ainsi un monopole… devenu capitaliste. Comme le dit Michael Haller, journaliste et chercheur : « iC'est l'une des négligences des hommes politiques ayant mené la réunification à bien de ne pas avoir pluralisé les structures monopolistiques de l'époque de la RDA, les confirmant au contraire en appliquant les conditions de l'économie de marché. La conséquence est que, aujourd'hui, presque tous les journaux régionaux des nouveaux Länder sont des monopoles./i »span class="spip_note_ref" [a href="#nb19" class="spip_note" rel="appendix" title="Michael Haller, « La presse en Allemagne », Communication Langages, (…)" id="nh19"19/a]/span Ce faisant, les journaux de l'est se greffaient sur une tendance déjà à l'œuvre à l'ouest depuis de longues années. Car dans l'économie de marché endogame de la presse allemande, la seule solution, toute relative, à la crise de la presse réside dans les concentrations, qui permettent de réduire les coûts par des économies d'échelle et des licenciements, au prix du pluralisme. Une carte dressée par Andrea Czepekspan class="spip_note_ref" [a href="#nb20" class="spip_note" rel="appendix" title="Andrea Czepek, op. cit., p. 143." id="nh20"20/a]/span des zones de monopole et des zones pluralistes prenant en compte les rédactions autonomes fait apparaître pour l'année 2009 une partition en à peu près deux parties, soit plus de la moitié de l'Allemagne sous monopole, et une partie où les habitants ont deux ou plusieurs sources d'information dans la presse quotidienne. Tendance qui s'est poursuivie avec la progression des concentrations./p
/br
div class='spip_document_16274 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" a href='https://www.acrimed.org/IMG/png/concentrationallemagne.png' class="spip_doc_lien mediabox" type="image/png" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH336/concentrationallemagne-d947c.png?1762773647' width='500' height='336' alt='' //a
/figure
/div
centersmallAndrea Czepek, op. cit., p. 143./small/center
p/brstrongJean Pérès/strong/p
hr class="spip" /
p/brstrongAnnexe : Petit panorama de groupes de presse/strongspan class="spip_note_ref" [a href="#nb21" class="spip_note" rel="appendix" title="La plupart des informations sur les groupes de presse sont issues de leurs (…)" id="nh21"21/a]/span/p
p/brAssez représentatif des processus de concentration dans la presse, le groupe Madsack s'est construit autour du principal quotidien de Hanovre, le iHannover Anzeiger/i, fondé en 1893. En 1937, Erich Madsack, propriétaire du groupe, adhère au parti nazi, le NSDAP. En 1943, le gouvernement national-socialiste fait fusionner le iHannover Anzeiger/i avec le iQuotidien de Basse Saxe/i (iNiedersächsischen Tageszeitung/i), si bien qu'au moment du retour aux affaires de Madsack, en août 1949, il est le premier quotidien de la région. En 1973, deux autres journaux de Basse Saxe sont acquis. Ainsi, pendant 80 années, le groupe Madsack s'étend sur le seul Land de Basse Saxe par achats successifs de plusieurs quotidiens./p
pAprès la chute du mur cependant, Erich Madsack achète à d'autres groupes de presse (Springer, FAZ, Bertelsmann) des quotidiens importants dans le Schleswig Holstein, et aussi dans les Länder d'ex-RDA de Saxe et du Brandebourg. Enfin et surtout, en 2009, il achète la presse quotidienne de Springer (iLeipziger Volkes Zeitung/i, iLübecker Nachrichten/i, iKieler Nachrichten/i, iSegeberger Zeitung/i), devenant ainsi un acteur majeur de la presse également dans le Land de Schleswig Holstein. Il poursuit encore son extension en 2011 en pénétrant le Land de Brandebourg par le rachat du iMärkische Allgemeine/i, quotidien le plus lu de la région, au iFrankfurter Allgemeine Zeitung/i. Et in fine, Madsack achète à Bertelsmann en 2024 le DDV Medien Gruppe, avec notamment le iSächsische Zeitung/i et le iMorgenpost Sachsen/i, lui assurant une position dominante en Saxe. Une vingtaine de quotidiens répartis sur cinq Länder lui appartiennent désormais. Parallèlement, Madsack a acheté des journaux d'annonces, fait développer des applications numériques, fait produire des films et des reportages pour la télévision, proposé des services : portage, logistique, centres d'appel, publicité, et même du co-voiturage. En 2024, il compte 900 000 abonnés aux quotidiens pour un chiffre d'affaires de 780 millions d'euros (2022). Un des principaux actionnaires du groupe Madsack, pour 23,5 %, est la Deutsche Druck und Verlagsgesellschaft (DDVG), groupe de presse dont le propriétaire se trouve être le SPD, parti socialiste allemand. La DDVG, 8e groupe de presse du pays, possède aussi ses propres journaux et imprimeries. En 2004, son rachat du iFrankfurter Rundschau/i, quotidien d'audience nationale, fit grand bruit. Le SPD se défend de toute intervention sur la ligne éditoriale de ses publications, mais, en 2005, certains de ses membres auraient incité le iFrankfurter Rundschau/i à une critique plus féroce de son concurrent de la gauche radicale, Die Linke./p
pLe groupe Funke (Funke Medien Gruppe) a une évolution très comparable à celle de Madsack à partir d'un autre land, la Rhénanie du Nord Westphalie. Journaliste, Jakob Funke adhère au NDSAP en 1941, et devient chef de bureau à l'agence de presse nazie. En 1948, à Essen, naît le quotidien iWestdeutsche Allgemeine Zeitung/i (WAZ), qui demeure aujourd'hui le deuxième quotidien allemand, après iBild/i, avec 20 éditions régionales. Erich Prost, journaliste résistant allemand est son premier propriétaire avec Jakob Funke. Dans les années 1970, quatre autres quotidiens de la même région seront acquis. Après la chute du mur, Funke récupère plusieurs quotidiens de Thuringe qu'il associe dans le iFunke Medien Thuringen/i, un des plus gros groupes de presse dans l'ex-RDA. Sa plus importante opération est l'achat en 2013 à Springer, pour 920 millions d'euros, de deux nouveaux quotidiens, le iBerliner Morgenpost/i, un des principaux quotidiens de la capitale, et le iHamburger Abendblat/i, ainsi que des magazines de télévision et des féminins. Si bien qu'en 2024, le groupe compte une vingtaine de quotidiens répartis sur cinq Länder. Le groupe Funke dispose également d'un pôle magazines et de prises de participation à l'étranger. Il compte aujourd'hui une quarantaine de magazines dans les domaines de la télévision, du style de vie, de la féminité, de la cuisine, etc., ce qui fait de lui un des premiers groupes européens en la matière. Il s'étend à l'étranger à partir de 1987, lorsqu'il prend 50 % du premier quotidien autrichien, iDie Krone/i (810 000 exemplaires en 2012) et en 1988, 49,4 % dans le iKurier/i (108 000 exemplaires en 2019), également autrichien. Il est également actif en Hongrie, Albanie, Croatie, et Russie. Comme le groupe Madsack, il s'étend aux marchés connexes des petites annonces et des offres digitales à l'intention des femmes, dans les domaines de la santé et de l'habitat, et anime en outre des stations de radio dans la Westphalie du Nord et un portail de vidéos à la demande (VOD). Avec 5 400 salariés et 1 700 journalistes (et 14 000 livreurs) pour un chiffre d'affaires de 1,13 milliards d'euros (2022), Funke Medien Gruppe ambitionne rien de moins que de devenir le premier groupe de médias allemand./p
pD'autres groupes de presse se sont constitués à partir de magazines comme le groupe Bauer, né de l'imprimerie à la fin du XIXe siècle. Pendant la guerre, son propriétaire, Alfred Bauer, fut membre du parti nazi, qui lui a permis d'augmenter la diffusion de ses magazines. Le groupe a cumulé au fil du temps quelque 60 magazines en Allemagne, et plus de 500 dans d'autres pays à partir de la fin des années 1980. Par exemple, il achète en 2007 le groupe britannique Emap (magazines et radios) pour 1,58 milliard d'euros, ou encore, pour 407 millions d'euros, le plus important détenteur de magazines en Australie. Il possède également les deux principaux quotidiens de Saxe Anhalt. C'est l'un des plus grands groupes de presse européen, avec 15 000 salariés dans 12 pays et 2,3 milliards d'euros de chiffre d'affaires. En France, Bauer possède quelques publications (iTélécâble Sat Hebdo/i, les magazines féminins iMaxi/i, iMaxi Cuisine/i, iJeux de Maxi/i)./p
pLe groupe Burda est également issu de l'imprimerie à Offenburg (Bade Wurtemberg), au début du XXe siècle. Il prospère dans l'acquisition de magazines, notamment sous le nazisme, dont Hubert Burda est membre du parti. Actionnaire de Springer en 1983 (25 %), il bénéficie de dividendes très importants, mais échoue à en prendre le contrôle en 1988. Dès lors, il se rabat sur les magazines à forte diffusion (iBunte/i, iPlayboy/i-édition allemande, iElle/i-édition allemande), et crée iFocus/i, grand concurrent du premier magazine d'information iDer Spiegel/i. À partir des années 2000, le groupe étend son domaine aux activités digitales, dont il tire aujourd'hui plus de la moitié de ses revenus. Comme le groupe Bauer, il développe son activité dans 12 pays, dont la France avec iLe Nouveau détective/i, et 6 autres magazines de la filiale Burda Bleu. Il emploie 12 000 salariés, édite 444 magazines pour un chiffre d'affaires de 2,7 milliards d'euros (2023)./p
pUnique en son genre, le groupe Axel Springer doit l'essentiel de sa prospérité au quotidien à sensation iBild Zeitung/i, premier journal européen en tirage. Il tire encore, malgré une baisse constante, à presque un million d'exemplaires. Son édition du dimanche (iBild am Sonntag/i) est le deuxième magazine allemand, et celui dédié aux femmes (iBild der Frau/i) le 5e, au sport, le 6e. En outre, le groupe Springer possède iDie Welt/i, un des plus importants quotidiens d'information. Après avoir vendu une partie de sa presse à Funke, Springer reste détenteur d'une trentaine de magazines, et de sites comme l'américain Politico (son plus gros investissement, un milliard d'euros) ou le français Marmiton. Le fonds d'investissement KKR (pour « Kohlberg Kravis Roberts Co »), l'un des plus importants du monde, est devenu en 2019 l'actionnaire majoritaire du groupe qui, en septembre 2024, se divise en deux entités autonomes : KKR récupère les sites d'annonces et Springer reprend toute la partie presse. Il conduit depuis quelques années une conversion de son empire de presse vers le numérique – en particulier les sites d'information en ligne – qui constitue la plus grande part de ses recettes et de ses bénéfices, respectivement de 3,9 milliards et 750 millions d'euros (2023), pour un effectif de 18 000 salariés./p
pQuant au géant allemand des médias et de l'édition, Bertelsmann (145 000 salariés, CA de 13,8 milliards d'euros en 2021), il est d'abord une maison d'édition née en 1835. Le groupe s'est fortement enrichi au cours de la Deuxième Guerre mondiale grâce à une coopération étroite avec le régime nazi. « iBertelsmann s'était spécialisé dans la publication d'ouvrages à la gloire de la Wehrmacht. Une cinquantaine d'ouvrages littéraires (sur 1 200 publiés à l'époque) contenaient des attaques antisémites massives/i »span class="spip_note_ref" [a href="#nb22" class="spip_note" rel="appendix" title="« Le passé nazi de Bertelsmann avéré », Libération, 10 octobre 2002." id="nh22"22/a]/span. Son activité dans la presse débute en 1970, alors qu'il est déjà un des plus gros groupes de communication du monde. En achetant l'éditeur Grüner+Jahr, il acquiert un certain nombre de magazines, parmi lesquels on compte l'un des plus importants, iStern/i, dans l'information politique et générale, et iBrigitte/i, magazine féminin qui était alors le plus fort tirage en Allemagne (800 000 exemplaires), ainsi que de nombreux magazines dans d'autres pays. Il devient ainsi un des plus importants groupes de presse magazine d'Allemagne. Il possédait en France le groupe Prisma Presse, une quarantaine de titres (iGeo/i, iGala/i, iFemme actuelle/i, iVoici/i, iCapital/i…) qu'il a vendus à Bolloré en 2021. D'une manière générale, le groupe veut faire le ménage dans sa presse magazine en ne gardant que les titres les plus importants. En février 2023, Bertelsmann annonce la suppression de 700 emplois dans le pôle magazine, soit le tiers des effectifs./p
pOn aura remarqué la notable quantité d'investissements des groupes allemands dans des entreprises étrangères, y compris en France, alors que les médias français restent, à de rares exceptions près, centrés sur l'hexagone. Une question de capacité capitalistique, sans doute, mais aussi le fait que les médias français qui sont aux mains d'industriels se soucient peu d'exercer une influence politique dans des pays étrangers, alors que les allemands y voient une occasion d'étendre leur empire et d'augmenter leurs profits sans enfreindre les lois allemandes anti-concentrations./p/div
hr /
div class='rss_notes'div id="nb1"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh1" class="spip_note" title="Notes 1" rev="appendix"1/a] /spanValérie Robert, iLa presse en France et en Allemagne. Une comparaison des systèmes/i, Presses de la Sorbonne Nouvelle, 2011, p. 52-53./p
/divdiv id="nb2"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh2" class="spip_note" title="Notes 2" rev="appendix"2/a] /spanValérie Robert, op. cit., p. 103-110./p
/divdiv id="nb3"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh3" class="spip_note" title="Notes 3" rev="appendix"3/a] /spanErhard Becker, « La presse allemande depuis 1945 » iin/i Henri Ménudier, iL'Allemagne occupée 1945-1949/i, Presses Sorbonne Nouvelle, 1989, p. 97-103./p
/divdiv id="nb4"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh4" class="spip_note" title="Notes 4" rev="appendix"4/a] /spanErhard Becker, op. cit./p
/divdiv id="nb5"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh5" class="spip_note" title="Notes 5" rev="appendix"5/a] /spanErhard Becker, op. cit./p
/divdiv id="nb6"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh6" class="spip_note" title="Notes 6" rev="appendix"6/a] /span« Allemagne de l'ouest : naissance d'une presse "alternative" contre les géants », a href="https://www.monde-diplomatique.fr/1977/05/BECKER/34244" class="spip_out" rel="external"iLe Monde diplomatique/i, mai 1977/a./p
/divdiv id="nb7"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh7" class="spip_note" title="Notes 7" rev="appendix"7/a] /spanAxel Springer, qui passe pour un des moins compromis, et qui fut un des premiers à recevoir une licence des puissances occupantes, n'était pas membre du NSDAP, mais il était tout de même membre, à partir de 1934, de la NSKK, organisme paramilitaire qui recrutait ses membres sur la preuve de leur origine aryenne, et qui participa à la déportation de juifs./p
/divdiv id="nb8"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh8" class="spip_note" title="Notes 8" rev="appendix"8/a] /spanPareillement en France : on pense à Prouvost, au trust Hachette, et surtout à Robert Hersant, a href="https://www.acrimed.org/Petite-histoire-des-ordonnances-de-1944-sur-la"collaborateurs notoires devenus des magnats de la presse/a./p
/divdiv id="nb9"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh9" class="spip_note" title="Notes 9" rev="appendix"9/a] /spanManfred Kötterheinrich, « Die Konzentration in der deutschen Presse », iin/i Harry Pross (dir.), iDeutsche Presse seit 1945/i, 1965, p. 78-79./p
/divdiv id="nb10"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh10" class="spip_note" title="Notes 10" rev="appendix"10/a] /spanC'est ce qu'on appelle la « matrice » dans les années 1950 ou le « manteau » plus tard. Cette politique est a href="https://www.acrimed.org/La-mutualisation-en-marche-dans-le-groupe-EBRA"également suivie en France par le groupe EBRA/a./p
/divdiv id="nb11"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh11" class="spip_note" title="Notes 11" rev="appendix"11/a] /spanCas limite de cette tendance, le iWestfalische Rundschau/i a vu sa rédaction centrale et ses rédactions locales supprimées en 2013 par le groupe Funke, et ses 120 journalistes licenciés. Seul le titre perdure, alimenté par d'autres instances du groupe et d'anciens concurrents locaux./p
/divdiv id="nb12"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh12" class="spip_note" title="Notes 12" rev="appendix"12/a] /spanAndrea Czepek définit les différentes modalités de cette perte d'autonomie des rédactions : br class='autobr' /
1. Un journal distribue plusieurs « éditions locales » qui ne diffèrent que par le contenu de leurs actualités locales.br class='autobr' /
2. Une entreprise de presse possède plusieurs journaux portant des noms distincts, mais une salle de rédaction centrale produit les actualités nationales et internationales pour l'ensemble des titres. Seule la couverture des actualités locales est effectuée séparément.br class='autobr' /
3. Les journaux sont indépendants les uns des autres sur le plan économique, mais ceux de plus petite taille achètent leurs actualités nationales et internationales à un plus grand journal et n'exploitent qu'une salle de rédaction locale.br class='autobr' /
Andrea Czepek, « La concentration de la presse écrite et le pluralisme en Allemagne », in Franck Rebillard et Marlène Loicq (dir.), « Pluralisme de l'information et imedia diversity/i », iCulture communication/i, 2013, p. 139./p
/divdiv id="nb13"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh13" class="spip_note" title="Notes 13" rev="appendix"13/a] /span« Allemagne de l'ouest : naissance d'une presse "alternative" contre les géants », a href="https://www.monde-diplomatique.fr/1977/05/BECKER/34244" class="spip_out" rel="external"iLe Monde diplomatique/i, mai 1977/a./p
/divdiv id="nb14"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh14" class="spip_note" title="Notes 14" rev="appendix"14/a] /spanValérie Robert, op.cit., p. 60./p
/divdiv id="nb15"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh15" class="spip_note" title="Notes 15" rev="appendix"15/a] /spanValérie Robert, op. cit., p. 65./p
/divdiv id="nb16"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh16" class="spip_note" title="Notes 16" rev="appendix"16/a] /spanOp. cit., p. 61-63 et 72-73./p
/divdiv id="nb17"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh17" class="spip_note" title="Notes 17" rev="appendix"17/a] /spanObservatoire du pluralisme, qui publie chaque année des a href="https://medienvielfaltsmonitor.de/" class="spip_out" rel="external"données actualisées sur les médias/a./p
/divdiv id="nb18"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh18" class="spip_note" title="Notes 18" rev="appendix"18/a] /spanPour rappel, en France, le monopole régional est la règle, à de rares exceptions près./p
/divdiv id="nb19"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh19" class="spip_note" title="Notes 19" rev="appendix"19/a] /spanMichael Haller, « a href="https://www.persee.fr/doc/colan_0336-1500_1999_num_121_1_2940" class="spip_out" rel="external"La presse en Allemagne/a », iCommunication Langages/i, n°121, 1999, p. 15-26./p
/divdiv id="nb20"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh20" class="spip_note" title="Notes 20" rev="appendix"20/a] /spanAndrea Czepek, op. cit., p. 143./p
/divdiv id="nb21"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh21" class="spip_note" title="Notes 21" rev="appendix"21/a] /spanLa plupart des informations sur les groupes de presse sont issues de leurs sites ou des sites des journaux associés et de leurs fiches Wikipédia./p
/divdiv id="nb22"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh22" class="spip_note" title="Notes 22" rev="appendix"22/a] /span« a href="https://www.liberation.fr/culture/2002/10/10/le-passe-nazi-de-bertelsmann-avere_418043/" class="spip_out" rel="external"Le passé nazi de Bertelsmann avéré/a », iLibération/i, 10 octobre 2002./p
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ven, 2025-11-07 11:24
img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L150xH80/mamdani-e34f4.png?1762507500' class='spip_logo spip_logo_right' width='150' height='80' alt="" /
div class='rss_chapo'pMardi 4 novembre, le candidat démocrate Zohran Mamdani a été élu maire de New York. Un socialiste, qui plus est musulman, à la tête de la première place financière du monde ? Vent de panique dans l'éditocratie !/p/div
div class='rss_texte'pLes mines sont défaites sur le plateau de Pascal Praud, mercredi 5 novembre (CNews, Europe 1). Le bandeau affiche « Un maire pro-palestinien élu à New-York » et le présentateur se lance dans le petit édito qui introduit chacune de ses émissions : « iL'élection de Zohran Mamdani à New York n'est pas une surprise…/i » soupire Praud, manifestement dépité, « ielle consacre un candidat socialiste […]. Mamdani est musulman, il se présente comme tel. […] Il condamne le 7 octobre du bout des lèvres, mais condamne aussi Israël, qu'il accuse d'apartheid…/i » Passée cette présentation sommaire, qui coche méthodiquement toutes les cases de la diabolisation, Praud tente, avec la même finesse d'analyse, une lecture sociologique de l'événement politique : « iLes bobos de New York ressemblent aux bobos de Paris/i » avance l'animateur, qui estime que cette « ijeunesse diplômée mais appauvrie […] est prête à tout, y compris la violence, pour faire changer les choses/i ». L'auditeur inattentif a peut-être perdu le fil à ce stade : la « iviolence/i » dont il est question ici est en réalité la victoire électorale d'un candidat démocrate dans une des villes les plus riches du monde./p
/br
h3 class='article_intertitres'« iUn candidat quasi-ouvertement antisémite/i »/h3
p/brLa suite de l'émission est à l'avenant : l'ancien député RN et chroniqueur Gilbert Collard affirme que « ic'est un vote qui va vers un candidat affiché comme antisémite/i ». « iOui, bien sûr/i, confirme Pascal Praud, iparce qu'il y a aussi ce vote communautaire !/i » Voilà l'analyse du vote « ibobo/i » complétée par un vote « icommunautaire/i » [des New-Yorkais musulmans, NDLR] que Pascal Praud relie tout naturellement à la question de l'antisémitisme. Le « ivote communautaire/i » et « iantisémite/i » attribué aux musulmans est un tel « ça va de soi » sur le plateau de CNews que personne ne le conteste : « iComme en France, l'antisémitisme est devenu un outil de conquête du pouvoir/i », abonde plutôt Éric Naulleau, qui voit deux visages chez Mamdani, l'un « isémillant/i » et l'autre « iinquiétant/i ». Mamdani est à la fois « ile représentant du communautarisme radical musulman/i », selon Gilbert Collard, et un militant pour les droits des personnes trans. Une contradiction apparente que Naulleau résout, comme d'habitude, par le soupçon de dissimulation de sa vraie nature, qu'il est devenu commun de prêter à n'importe quel musulman : « iIl y a de la taqiya chez cet homme, il faut bien le dire…/i »/p
p« Un maire antisémite à New York ? », se demandait déjà Bernard-Henri Lévy dans son « bloc-notes », quelques jours plus tôt (iLe Point/i, 29/10). Le point d'interrogation ne portait pas sur l'antisémitisme de Zohran Mamdani, qui ne fait aucun doute dans son papier, mais plutôt sur l'éventualité de sa victoire : « iLes jeux, bien sûr, ne sont pas faits/i, écrit le « philosophe », mais « ice serait une date noire pour les Juifs de New York/i ». « iSa victoire serait un signal d'alerte pour les juifs new-yorkais ?/i », demande le journaliste Steve Nadjar sur Radio J (3/11). « iBien sûr, bien sûr,/i lui répond Christophe Barbier, imais d'ailleurs, une partie de la communauté juive est favorable à ce candidat, parce qu'ils voient le démocrate, avant de voir l'antisioniste soupçonné, et soupçonné à juste titre !/i » Soupçonné de quoi ? Barbier ne le dira même pas, puisque c'est un autre « ça va de soi ». Dans iLe Point/i, Frantz-Olivier Giesbert explose de rage (5/11) :/p
blockquote class="spip"
pL'ignardise et le panurgisme sont devenus les deux mamelles de notre époque. C'est ainsi que, selon les sondages, 16 % des Juifs de New York s'apprêtaient, avant le vote de mardi, à voter pour Zohran Mamdani, candidat quasi ouvertement antisémite à la mairie de la ville. Si ce n'est pas de l'inconscience ou de la haine de soi, c'est de la bêtise./p
/blockquote
pL'éditorialiste du iPoint/i, qui pense voir un candidat « iquasi ouvertement antisémite/i », se croit donc autorisé à prescrire un comportement électoral en fonction d'une appartenance religieuse, et parle de « ihaine de soi/i » pour les juifs qui ne s'y conformeraient pas. Des esprits taquins pourraient voir dans cette mobilisation de la figure du « juif honteux » un trope antisémite classique. Mais FOG n'est pas le seul à se permettre cette audace. Dans un trop long (et laborieux) portrait, iCauseur/i prévient : « iSi beaucoup de juifs de New York […] partagent certaines positions progressistes, l'élection de Zohran Mamdani à la mairie, [aura] des conséquences inévitables au sein, et peut-être à l'encontre, de cette communauté./i » Le magazine d'extrême droite décrit Mamdani comme un « imarxiste-léniniste/i », « iun narcissique déraciné de naissance/i », « iqui n'est chez lui nulle part/i »… Et les esprits les plus taquins pourraient voir ici un autre trope raciste, d'ailleurs souvent dirigé contre les juifs. Le journal iFranc-Tireur/i cotise également (29/10), avec un « portrait qui fâche », dans lequel Mamdani est décrit comme un « iproche des mouvements fréristes/i », qui « iaffiche fièrement son islamogauchisme/i », « iprototype chimiquement pur de la gauche woke et pastèque/i », et « icandidat intifada/i », rien que ça. Des éléments qui seront recyclés à l'antenne de LCI par Abnousse Shalmani (5/11), qui parle elle aussi d'un « iproche des frères musulmans/i », qui « iporte avec morgue le discours antisioniste et antisémite/i », derrière une façade sympathique : « iEn résumé, Mamdani ratisse large tout en sourire et en volonté de faire payer les riches pour assurer une vie paradisiaque aux pauvres… Je rappelle pour les distraits que cette grande idée a souvent fini dans des charniers…/i »/p
p« iFrériste/i », « iquasi ouvertement antisémite/i », « iislamogauchiste/i », « imusulman/i » : la chroniqueuse Céline Pina en avait assez pour conclure et va décrocher haut la main, et en un seul tweet, la palme de l'ignominie raciste : « iNew-York s'est donné à un islamiste/i », écrit-elle en partageant un montage qui rapproche une photo de Mamdani et les attentats du World Trade Center, surmonté de ce commentaire : « 2001, n'oublions jamais – 2025, nous avons oublié ». Un dérapage authentiquement raciste, qui consiste (parce qu'il est musulman) à assimiler Mamdani à un terroriste./p
/br
div class='spip_document_16271 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" a href='https://www.acrimed.org/IMG/png/celinepina.png' class="spip_doc_lien mediabox" type="image/png" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH593/celinepina-402f1.png?1762505959' width='500' height='593' alt='' //a
/figure
/div
p/brL'œuvre a eu l'air de plaire à sa consœur, Tristane Banon, chroniqueuse régulière sur France Info et membre de la clique iFranc-Tireur/i, qui s'est empressée de la repartager… avant de la retirer face au tollé, tout en réitérant son amalgame raciste : « iJ'ai retiré mon post, car si l'image est trop forte, et choque même ceux qui savent parfaitement les accointances de Zohran Mamdani avec l'islamisme, c'est qu'elle est mauvaise. Il faut savoir admettre ses erreurs…/i » La petite sphère printaniste s'était visiblement repassé le motspan class="spip_note_ref" [a href="#nb1" class="spip_note" rel="appendix" title="Caroline Fourest étant également de la partie. Lire « En France aussi, la (…)" id="nh1"1/a]/span, puisque l'inénarrable Florence Bergeaud-Blackler ira aussi de sa comparaison avec le 11 septembre : « iLa victoire de Zohran Mamdani est celle de la vision d'Edward Said, du postcolonialisme et de l'antisionisme. Certains s'en réjouissent, les tours jumelles retombent./i »/p
/br
h3 class='article_intertitres'« iCe serait un jour noir pour les juifs de New York./i »/h3
p/brMais « l'antisémitisme » de Mamdani n'est pas une évidence que dans les éditos bourrins des chaînes d'infos, dans les blocs-notes des magazines réactionnaires de milieu de semaine, ou dans les tweets de fin de soirée d'une éditorialiste d'extrême droite. C'est un lieu commun que l'on peut également entendre dans des salons plus feutrés, comme dans « C ce soir », l'émission de France 5 présentée ce soir-là par Camille Diao (4/11). La séquence vaut le coup d'être citée en longueur, puisqu'elle déplie (et démonte, pour une fois) l'un des petits arrangements avec la vérité sur lesquels s'appuie l'éditocratie pour peindre Mamdani en candidat « quasi ouvertement antisémite » :/p
blockquote class="spip"
pstrong- Laure Adler :/strong Il a dit des choses très ambiguës quand même sur Israël, il a fait des déclarations quand même absolument consternantes…/p
pstrong- Lumir Lapray/strong (« activiste ») strong :/strong Lesquelles ?/p
pstrong- Laure Adler :/strong Ben, quand il a parlé du « talon de la police de New York qui était lacée par l'État d'Israël », je ne sais pas comment il faut comprendre ça si ce n'est comme une remarque antisémite ! En tout cas plus qu'ambiguë…/p
pstrong- Lumir Lapray :/strong Alors j'avoue que je n'ai pas…/p
pstrong- Laure Adler :/strong Si si, ben alors j'vous montrerai, mais ça a été dans tous les journaux, à la Une de tous les journaux…/p
pstrong- Gallagher Fenwick/strong (journaliste américain) strong :/strong La citation exacte c'est « iQuand le pied de la NYPD est sur votre cou, la chaussure qui est sur ce pied est lacée par l'armée israélienne…/i »/p
pstrong- Laure Adler :/strong Et ben vous appelez ça comment ?/p
pstrong- Gallagher Fenwick :/strong C'est une réalité. C'est qu'il y a une coopération entre la police new-yorkaise, qui fait des entraînements avec l'armée israélienne. Ils collaborent ensemble régulièrement sur des exercices, ce sont des faits, qui sont documentés, qui sont connus… Il s'est expliqué à de multiples reprises sur cette citation…/p
/blockquote
pLa réponse installe un silence sur le plateau : les « iUnes des journaux/i » qui qualifiaient Mamdani d'antisémite sur la base de cette affirmation étaient apparemment parvenues jusqu'à Laure Adler… mais pas les multiples explications de l'intéressé à propos de cette citation reprise à l'envi, qui se fondait donc sur des faits a href="https://documentedny.com/2018/09/12/report-criticizes-nypd-collaboration-with-israel/" class="spip_out" rel="external"parfaitement établis/a./p
pCe qui n'empêchera pas BHL de répéter ce demi-mensonge à l'antenne de RTL (5/11) : « iVous dites que Zohran Mamdani est un antisémite, qu'est-ce qui vous fait dire ça ?/i », lui demande Anne-Sophie Lapix. « iSes propres déclarations !/i » répond BHL en étouffant un sourire, « ipar exemple, […] quand il déclare que lorsqu'un New-Yorkais sent sur la nuque la botte d'un policier du NYPD, cette botte a été lacée par l'armée israélienne/i ». Cette fois, l'interprétation fallacieuse ne rencontrera pas de contradiction./p
pDans un salon encore plus feutré, la matinale de France Culture, une autre intox venue d'Amérique est arrivée aux oreilles de Guillaume Erner, qui la reprend à son compte dans sa première question à son invitée, la chercheuse Ludivine Gilly (5/11) : « iLe communiste Mamdani, je dis communiste, parce que c'est comme ça que le qualifie Trump…/i » – et que c'est donc une raison suffisante pour le répéter. Erner se fait ensuite l'écho d'autres « icritiques virulentes/i » portées contre Mamdani par ses adversaires : « ianti-police/i », « iantisémite supposé/i ». Où l'on remarque que l'assaut éditorial contre le nouveau maire de New York n'est en fait qu'un pâle décalque de celui qu'a pratiqué pendant des mois la presse américaine, où le « isurnom de communiste [est une insulte]/i », rappelle iLe Monde/i (5/11)./p
p« iMême le très démocrate "New York Times" a publié des articles peu flatteurs et n'a pas endossé sa candidature/i », résume sobrement Solveig Godeluck dans iLes Échos/i (3/11), qui rappelle que le tabloïd de Rupert Murdoch iThe New York Post/i « ia appelé à voter contre "le socialiste radical, antisémite"/i » et « ia pilonné le candidat avec des couvertures/i ». Le jour de la victoire du candidat socialiste, le tabloïd ne s'est d'ailleurs pas embarrassé de subtilités et a titré « The Red Apple », en plaçant une faucille et un marteau entre les mains de Zohran Mamdani dans un montage grossier./p
/br
div class='spip_document_16270 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" a href='https://www.acrimed.org/IMG/png/newyorkpost.png' class="spip_doc_lien mediabox" type="image/png" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH553/newyorkpost-b1348.png?1762505959' width='500' height='553' alt='' //a
/figure
/div
centersmalliNew York Post/i, 5 novembre 2025./small/center
p/brQuelques jours plus tôt, le iWall Street journal/i avait publié une tribune de BHL (29/10), qui y avait répété son adage : « iCe serait un jour noir pour les juifs de New-York./i »/p
/br
centerstrong***/strong/center
p/brLe torrent de boue qui a déferlé dès que l'élection du candidat socialiste à la mairie de New York a semblé se préciser n'était pas inédit. En juillet déjà, alors que Mamdani remportait la primaire démocrate, le magazine iRolling Stones/i, remarquait (2/07) : « iPour obtenir l'investiture démocrate à la mairie de New York, le jeune musulman progressiste a été confronté à une déferlante de désinformation haineuse./i » L'article du magazine new-yorkais, connu pour son top 100 du rock'n'roll, était sobrement a href="https://www.rollingstone.com/politics/politics-features/zohran-mamdani-misinformation-antisemitism-1235376681/" class="spip_out" rel="external"titré/a : « Démontage de toutes les con*eries concernant Zohran Mamdani ». Il est amusant d'y retrouver toutes celles entendues dans le débat français : « iMamdani n'est pas un communiste/i », « iMamdani n'a aucun lien avec le 11 septembre ni avec le terrorisme/i », « iMamdani n'a jamais rien dit ou fait d'antisémite/i » liste le magazine, en repartageant son enquête (4/11). De la même façon, le service Checknews de iLibération/i (6/11) a href="https://www.liberation.fr/checknews/le-nouveau-maire-de-new-york-zohran-mamdani-est-il-proche-des-freres-musulmans-20251105_JVS5EX4ENBF7RPMLTPJ3KYJTMA/" class="spip_out" rel="external"s'est attelé au démontage/a du « portrait qui fâche » de iFranc-Tireur/i et aux rumeurs de proximité avec « les frères musulmans » qui étaient, surprise, le résultat d'amalgames et d'approximations. Une nouvelle fois, on a pu constater que le « débunk », s'il était salutaire sur le fond, était cependant impuissant pour empêcher une nouvelle déferlante. Nous le savons à force de le documenter : ce n'est pas le « bullshit » qui arrête l'éditocratie./p
p/brstrongJérémie Younes/strong/p/div
hr /
div class='rss_notes'div id="nb1"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh1" class="spip_note" title="Notes 1" rev="appendix"1/a] /spanCaroline Fourest étant également de la partie. Lire « a href="https://www.mediapart.fr/journal/politique/061125/en-france-aussi-la-peur-du-grand-mechant-mamdani" class="spip_out" rel="external"En France aussi, la peur du grand méchant Mamdani/a », Mediapart, 6/11./p
/div/div
jeu, 2025-11-06 11:36
img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L150xH75/tsedek-9fc85.png?1762421806' class='spip_logo spip_logo_right' width='150' height='75' alt="" /
div class='rss_chapo'pEntretien avec Elie Duprey, porte-parole du collectif Tsedek./p/div
div class='rss_texte'p/brstrongAcrimed : Qu'est-ce qui a motivé la création de Tsedek en juin 2023 ? Peux-tu nous parler de ses objectifs et des grands principes de a href="https://tsedek.fr/" class="spip_out" rel="external"son manifeste/a ?/strong/i/p
pstrongElie Duprey :/strong Tsedek naît après une décennie 2010 qui a connu d'importants bouleversements aussi bien dans le mouvement de soutien à la Palestine que dans l'antiracisme politique. Est apparue une critique radicale de ce qu'avaient été les principales organisations de l'antiracisme en France, incarnées notamment par SOS Racisme. Au cours de cette décennie, la seule organisation juive à avoir participé à ces mobilisations a été l'Union juive française pour la paix, dans la continuité de laquelle on s'inscrit. La plupart de nos fondatrices et fondateurs sont d'ailleurs d'anciens militants de l'UJFP. Pourquoi a-t-on décidé de créer un nouveau collectif ? Il y a des raisons générationnelles et aussi parce qu'à nos yeux, l'UJFP était avant tout un mouvement antisioniste tandis que nous, on se pense avant tout comme un mouvement antiraciste. Il y a une autre distinction entre nous et l'UJFP, qui tient à la logique communautaire que nous revendiquons, l'UJFP étant une organisation beaucoup plus laïque. Comme on s'est constitués peu de temps avant le 7 octobre 2023, on a été amenés à beaucoup intervenir sur l'actualité en Palestine, mais l'idée est qu'on porte aussi des combats qui aillent au-delà de la seule dénonciation du sionisme./p
p/brstrongVotre collectif est beaucoup intervenu publiquement sur la Palestine depuis deux ans mais les grands médias n'ont pas beaucoup – voire pas du tout – fait connaître vos positions. Est-ce que tu peux nous en dire plus sur vos rapports aux rédactions et sur cette quasi-absence de médiatisation ?/strong/p
pIl faut déjà différencier selon les différents types de médias. Pour ce qui est des grands médias mainstream, les grandes chaînes d'info ou les grands journaux, on fait l'objet d'une invisibilisation quasi complète, à l'image de la gauche radicale et du mouvement de soutien à la Palestine de manière générale, qui ne sont évoqués que pour être diabolisés, criminalisés. Sauf erreur de ma part, je crois qu'on n'a eu qu'une seule invitation de notre porte-parole sur BFM-TV. C'était en visio, il a parlé 30 secondes, il a été coupé et pour finir, son micro a été baissé. Ceci dit, au vu de la radicalité du discours qu'on porte, qui n'a tout simplement pas droit de cité, on n'attend pas grand-chose des grands médias. L'antisionisme y est quasiment absent et on voit bien que des positions comme celles de La France insoumise, qu'on peut juger satisfaisantes sur la dénonciation du génocide, mais assez modérées sur l'antisionisme, sont déjà très criminalisées dans ces espaces-là. Donc nous qui portons des positions plus radicales, ce n'est pas surprenant qu'on soit invisibilisés. On a aussi reçu plusieurs invitations sur i24News, auxquelles on n'a pas donné suite parce qu'on estimait que le dispositif ne serait sans doute pas propice à ce qu'on avait envie d'exprimer... Pour ce qui est des « gros » médias indépendants, ça dépend un peu des cas, certains nous invitent régulièrement comme Blast et Le Média. Mais pour ce qui est de Mediapart ou d'Arrêt sur images, c'est plus ponctuel et c'est toujours dans des dispositifs de débat contradictoire : on ne va jamais nous laisser la parole pour exprimer nos positions, on est toujours face à des voix juives qu'on qualifierait de « sionistes de gauche ». Enfin, on a quand même accès à des médias indépendants « de niche » : on est par exemple très proches de Paroles d'honneur sur Twitch. Enfin, j'insiste sur le fait que si Tsedek est invisibilisé, c'est quand même peu de choses au regard de l'invisibilisation d'autres collectifs, au premier rang desquels Urgence Palestine. Le fait que Mediapart – dont je parle singulièrement parce que j'en attends plus que de BFM-TV – n'ait pas une seule fois invité le porte-parole d'Urgence Palestine est, par exemple, très significatif. Surtout quand dans le même temps, ils produisent quantité d'émissions et d'articles sur « la solitude des juifs de gauche ». C'est aussi quelque chose qui participe du racisme anti-palestinien et de l'invisibilisation des Palestiniens./p
p/brstrongComment vous l'expliquez ?/strong/p
pLes Palestiniens ne sont généralement perçus que comme une cause humanitaire, c'est-à-dire comme des gens dont on peut déplorer le fait qu'ils soient affamés, mais qu'on ne considère pas comme des acteurs à part entière, dotés d'une agentivité propre. Quand on pense au degré de haine que suscite Rima Hassan dans les médias, alors que c'est une juriste en droit international, d'un calme olympien, modérée, ça nous donne une idée de la perception qu'ils peuvent avoir d'un mouvement comme Urgence Palestine, qui incarne une position plus radicale. Il n'en reste pas moins que c'est le principal mouvement au cœur des mobilisations en faveur de la Palestine en France, créé et animé par des membres de la diaspora palestinienne. Le fait qu'on ne les voie nulle part, y compris dans des médias de gauche, c'est un vrai problème politique. Et le fait qu'on parle plus de Tsedek que d'Urgence Palestine l'est également./p
p/brstrongPeux-tu nous en dire un peu plus sur vos rapports avec les « gros » médias indépendants et ce que vous reprochez aux dispositifs dans lesquels vous êtes parfois intervenus ?/strong/p
pSur Mediapart, le dispositif était très défavorable. C'était une émission qui s'est tenue pas très longtemps après le 7 octobre 2023 et l'un de nos camarades est tombé dans un traquenard si j'ose dire : un « quatre contre un », avec des personnes très hostiles face à nous. Mediapart est un média important au sein de la gauche et pour nous, il y a un enjeu à y aller, donc c'était tout à fait logique qu'on réponde favorablement à cette émission. Mais on n'avait pas conscience que le dispositif serait aussi déséquilibré. D'après ce qu'on sait et de ce qu'on comprend, il y a quand même des différences de ligne au sein de la rédaction dans la manière dont ils nous perçoivent. Certains sont en accord avec ce qu'on porte, tandis que d'autres sont beaucoup plus réservés, davantage sur une ligne « sioniste de gauche ». Il y a eu, ensuite, un article qui présentait les différentes facettes des « juifs de gauche », une catégorie confuse de notre point de vue, qui n'a pas grand sens, mais que Mediapart affectionne tout particulièrement. On avait accepté de répondre aux questions pour un premier papier là-dessus. Dernièrement par contre, Mediapart nous a de nouveau sollicité pour répondre à des questions sur « le sentiment d'abandon des juifs de gauche », dont je parlais précédemment, et on leur a dit que le cadrage ne nous convenait pas, mais qu'on était prêts à s'exprimer sur un cadrage plus pertinent. Ils n'ont pas donné suite./p
p/brstrongEt s'agissant d'Arrêt sur images ?/strong/p
pL'émission qu'on a faite était plus équilibrée. On était face au rabbin Émile Ackermann, qui ne partage pas nos positions, et Paul Aveline, le journaliste en plateau. Mais on a aussi eu des petites tensions avec ce média à la suite de a href="https://www.arretsurimages.net/emissions/arret-sur-images/antisemitisme-analyse-dun-deni-a-gauche" class="spip_out" rel="external"leur émission sur l'antisémitisme à gauche/a, qu'on a jugée problématique eu égard au cadrage, à la composition du plateau, et qui a donné lieu à a href="https://www.youtube.com/watch?v=F_qt3E3LxmI" class="spip_out" rel="external"une réaction de notre part dans une émission sur le média Paroles d'honneur/a. Et par ailleurs, c'est vrai que nous n'avons pas eu de dispositif comparable à celui dont a bénéficié Arié Alimi, un des membres fondateurs de Golemspan class="spip_note_ref" [a href="#nb1" class="spip_note" rel="appendix" title="Un collectif créé au lendemain du 7 octobre 2023, qui se définit comme un « (…)" id="nh1"1/a]/span, qui incarne le sionisme de gauche, c'est-à-dire un entretien seul en plateau face à un journaliste, comme ce qu'on a pu avoir sur Le Média./p
p/brstrongPour en revenir aux médias mainstream, si vous n'y avez pas la parole, en revanche, on parle régulièrement de vous… et en général de manière assez péjorative./strong/p
pAprès une première phase d'invisibilisation, il y a eu effectivement toute une séquence où on nous a consacré un certain nombre de papiers dans iMarianne/i, iL'Obs/i, iFranc-Tireur/i, notamment lorsqu'on a organisé avec les camarades de l'UJFP un colloque à l'occasion des 80 ans de la libération d'Auschwitz sur le fait génocidaire à travers l'histoirespan class="spip_note_ref" [a href="#nb2" class="spip_note" rel="appendix" title="On peut retrouver la retransmission de ce colloque sur la chaîne YouTube de (…)" id="nh2"2/a]/span. Ce colloque a donné lieu à beaucoup d'articles en très peu de temps, comme un article assez ignoble dans iMarianne/i signé Rachel Binhas, qui travaille aussi pour iValeurs actuelles/i et CNewsspan class="spip_note_ref" [a href="#nb3" class="spip_note" rel="appendix" title="« "Gaza va supplanter Auschwitz en termes de cruauté absolue" : quand des (…)" id="nh3"3/a]/span. Dans iL'Obs/i, il y avait eu auparavant un article de Brigitte Stora et une interview de Jonas Pardo et Samuel Delorspan class="spip_note_ref" [a href="#nb4" class="spip_note" rel="appendix" title="« Des juifs "innocents" ou la caution juive des antisémites, par Brigitte (…)" id="nh4"4/a]/span, tous deux membres de Golem. On a demandé à iL'Obs/i a href="https://tsedek.fr/2024/12/14/droit-de-reponse-a-jonas-pardo-paru-le-14-decembre-2024/" class="spip_out" rel="external"un droit de réponse, qu'on a obtenu/a, et un autre à iMarianne/i, qui ne nous l'a pas accordé. Dans toute cette séquence médiatique, soit on a nié notre judéité – iFranc-Tireur/i a titré « Juifs mais pas trop ! » à notre propos, ce qui est à nos yeux un titre antisémite –, soit on nous a accusés d'être des « cautions juives des antisémites », des « Juifs de service », des « Juifs d'exception », etc. Suite à ça, on a publié a href="https://www.lemediatv.fr/articles/2025/les-juifs-antisionistes-sont-ils-encore-des-juifs-mise-au-point-sur-la-campagne-antisemite-qui-nous-vise-K2b5tUlRTtqO-OrKub43Aw" class="spip_out" rel="external"une tribune dans Le Média/a et iL'Humanité/i, dont l'enjeu était de faire apparaître ce qu'on appelle l'arc sioniste, qui va du « sionisme de gauche » jusqu'au suprémacisme assumé en passant par le sionisme plus institutionnel comme peut l'incarner le Crif./p
p/brstrongEt à part publier des papiers pour vous attaquer, est-ce que les grands médias ont rendu compte du colloque en question sur les 80 ans de la libération d'Auschwitz, de ce qui y a été dit, des intervenants ?/strong/p
pNon, effectivement. La seule intervention du colloque qui a suscité un commentaire de leur part était un échange entre Eyal Sivan et Rony Brauman autour de leur documentaire sur Eichmann, qu'on avait projeté en introduction du colloque. Au cours de cet échange, Rony Brauman a prononcé une phrase qui a été coupée, montée, etc., et reprise partout pour montrer à quel point on était des négationnistes. C'est notamment le cœur du papier de iMarianne/i que de dire que Rony Brauman salit la mémoire d'Auschwitz. Mais je ne pense pas qu'ils se soient embêtés à regarder ce qui s'est dit dans le reste du colloque, et de fait, ils n'en ont pas parlé. Ils ont juste pris cet extrait qui a tourné sur les réseaux sociaux et ils l'ont commenté, comme ils font généralement./p
p/brstrongOn a aussi remarqué que vous étiez régulièrement cités dans des articles évoquant des « polémiques », souvent outranciers et confus, portant sur le mouvement de solidarité avec la Palestine. On pense à ces titres de pseudo enquêtes sur « les réseaux à l'œuvre derrière les mobilisations propalestiniennes » ou « la nébuleuse qui défie la République ». Qu'est-ce que vous pensez de ce type de cadrage et de la couverture qui vous y est réservée ?/strong/p
pÇa illustre assez bien la manière dont la question palestinienne est abordée dans les médias dominants depuis le 7 octobre 2023, en termes de « choc des civilisations », de lutte du « bien » contre le « mal », de « la seule démocratie de la région contre les terroristes du Hamas ». Cette vision de la situation en Palestine est vraiment liée aux dynamiques propres au champ politique français. Ce sont des dynamiques qui sont antérieures mais qui se sont accélérées depuis le 7 octobre 2023. On assiste à une recomposition du champ politique avec, d'un côté, l'exclusion de la gauche du champ républicain, LFI étant qualifiée de « premier parti antisémite de France », notamment en raison de son soutien à la Palestine et plus généralement, de sa lutte contre l'islamophobie, et, de l'autre côté, la réinscription de l'extrême droite dans cet arc républicain « raisonnable ». C'est comparable à ce qui est arrivé autour de Corbyn au Royaume-Uni : une campagne qui a permis de délégitimer la gauche et, au contraire, de légitimer l'extrême droitespan class="spip_note_ref" [a href="#nb5" class="spip_note" rel="appendix" title="Lire « Du Labour de Corbyn à LFI de Mélenchon, les médias contre la gauche (…)" id="nh5"5/a]/span. Tout le traitement de la question palestinienne est informé par ces enjeux intérieurs de recomposition du champ politique français, même s'il y a eu différentes phases. Dans les mois qui ont suivi le 7 octobre 2023, qui a été présenté comme un « pogrom antisémite » et comme « le plus grand massacre de Juifs depuis la Shoah », prévalait uniquement la condamnation du Hamas et le refus de toute politisation, de rappel du contexte, de réinscription de cet événement dans l'histoire plus large de la colonisation de la Palestine. Et puis, au fur et à mesure que la monstruosité des crimes israéliens était de plus en plus évidente, qu'il était de plus en plus difficile de nier qu'un génocide est mené par Israël, il y a quand même eu une évolution./p
p/brstrongPar bien des aspects, le changement est très relatif et finalement assez cosmétique…/strong/p
pOui, oui, quand je dis « évolution », je ne dis pas qu'il y a une amélioration ! La question de la colonisation reste notamment le grand impensé du cadrage médiatique. Mais en tout cas, j'ai l'impression que les arguments moraux qui étaient très présents au début sur « le droit d'Israël à se défendre » sont quand même moins systématiquement rabâchés comme des évidences. On est passés d'« Israël démocratie attaquée par l'hydre terroriste » à « la vilaine extrême droite israélienne qui commet des exactions très regrettables ». Aujourd'hui, le soutien inconditionnel à Israël, qui était une exigence pour l'intégralité des champs politique et médiatique français à l'exception de LFI le 8 octobre, ne peut plus être affirmé en ces termes. Il y a quand même la critique de Netanyahou, la dénonciation de l'extrême droite israélienne avec la mise en lumière, à mon avis très excessive, des mouvements de contestation de Netanyahou au sein même de la société israélienne./p
p/brstrong« Très excessive » en quel sens ? Peux-tu développer un peu plus cette question de la médiatisation des mobilisations au sein de la société israélienne ?/strong/p
pElles sont mal médiatisées ! Régulièrement, les manifestations contre Netanyahou sont présentées comme la preuve que la société israélienne n'est pas réductible à sa politique criminelle alors qu'en réalité, la plupart de ces manifestations sont des protestations contre la manière dont Netanyahou mène la guerre, pas contre la légitimité de la guerre, et encore moins contre la colonisation de la Palestine ou le sort réservé aux Palestiniens. Ce qui est beaucoup reproché à Netanyahou par ceux qui manifestent – parfois massivement – en Israël, c'est de ne pas avoir su protéger Israël, d'avoir laissé commettre le 7 octobre 2023 et de ne pas avoir été en mesure de faire revenir les otages israéliens vivants. Les médias en France évoquent « les gentils » qui sont pour la paix d'un côté contre « les méchants suprémacistes » (Netanyahou, Smotrich et Ben Gvir) de l'autre./p
p/brstrongComment expliques-tu cette déformation du réel, alors qu'il existe des interlocuteurs très au fait des réalités de terrain au sein de la société israélienne ? Des chercheuses comme Karine Lamarche et Nitzan Perelman-Becker par exemple, mais aussi des journalistes comme Sylvain Cypel, qui a été rédacteur en chef du iMonde/i, pour ne citer qu'eux : autant d'interlocuteurs accessibles, qui s'expriment, écrivent des livres, interviennent publiquement et tiennent un discours alternatif…/strong/p
pJe pense que le cœur de cet aveuglement médiatique, c'est le refus de penser la question palestinienne comme une question coloniale. Pas colonial dans le sens où la Cisjordanie et Gaza sont des territoires colonisés, mais au sens où l'intégralité d'Israël et du processus sioniste sont des projets coloniaux. Ça n'est dit dans aucun média mainstream. Or, c'est impossible de penser la situation si on ne garde pas ça à l'esprit. Et c'est pour ça que les positions antisionistes n'ont droit de cité nulle part : la position acceptable la plus radicale, c'est celle qui est en faveur de la solution à deux États, donc qui déplore les excès de la colonisation en Cisjordanie et à Gaza, mais qui ne touche pas au cœur du projet israélien, qui est la constitution d'un État suprémaciste juif sur une partie de la Palestine historique. La personnalité qui a les positions les plus radicales et qui est de temps en temps invitée dans les médias, c'est Rony Braumanspan class="spip_note_ref" [a href="#nb6" class="spip_note" rel="appendix" title="Lire « Israël-Palestine : "Le plus révoltant, c'est la différence de (…)" id="nh6"6/a]/span. D'ailleurs, il y a quelques jours, quand il a mis sur le même plan le Hamas et le gouvernement israélien sur un plateau télé, ça a provoqué un scandale instantané et les journalistes en plateau étaient traumatisés de ce culot./p
p/brstrongOn voulait aussi connaître votre point de vue sur le concept de « civilisation judéo-chrétienne », qui a été beaucoup mobilisé à l'appui du récit médiatique dominant, dans la même veine que le « choc des civilisations » que tu évoquais un peu plus tôt./strong/p
pPour le comprendre, il faut faire un détour par le concept de « philosémitisme », très pertinent pour percevoir ce qui se joue en France et en Occident de manière plus générale. Ce qu'on entend par philosémitisme, c'est une forme d'altérisation des Juifs qui est inverse de celle de l'antisémitisme traditionnel. Alors que l'antisémitisme construit une figure du Juif dangereux, qui menace les valeurs de la blanchité et de la chrétienté, le philosémitisme construit une figure du Juif comme compatible avec les valeurs de la blanchité. C'est un mécanisme que l'on peut voir à l'œuvre dans d'autres formes de racisme, par exemple lorsqu'on qualifie les populations asiatiques de « travailleuses » et « discrètes » par rapport à d'autres : c'est aussi une forme de racisme. Le fait de constituer des minorités modèles, c'est même un classique du racisme. Le philosémitisme a existé avant la seconde guerre mondiale de manière ponctuelle, avec notamment le décret Crémieux [promulgué en 1870, NDLR] qui a accordé la nationalité française aux Juifs d'Algérie, tout en maintenant les Algériens musulmans sous le régime de l'indigénat, avec l'idée de diviser pour mieux régner. Mais c'est vraiment devenu le mode de relation privilégié de l'Occident à la question juive après la seconde guerre mondiale pour qu'il parvienne à digérer sa participation au génocide des Juifs. Et sur un plan géopolitique, ça s'est exprimé par un fort soutien à Israël, jusqu'à aujourd'hui, et, pour en revenir à votre question, par la mise en avant de « la civilisation judéo-chrétienne », alors même que c'est l'Occident qui, pendant des siècles, a minorisé, racialisé, persécuté et génocidé les Juifs. Dans cette « civilisation judéo-chrétienne », les Juifs se trouvent donc ralliés à l'Occident face à un nouvel ennemi commun, qui est évidemment le monde musulman./p
p/brstrongDans les grands médias, on entend aussi beaucoup parler du « nouvel antisémitisme ». Qu'est-ce que ça signifie et même si tu viens d'esquisser un début de réponse, peux-tu expliquer davantage comment ça s'imbrique avec le concept de philosémitisme ?/strong/p
pC'est absolument central dans le traitement de l'antisémitisme, au point qu'il en efface toute autre forme. Le « nouvel antisémitisme », c'est une théorie raciste qui avance l'idée que l'antisémitisme traditionnel porté par l'extrême droite et les nationalistes n'existerait plus et qu'aujourd'hui, la principale menace qui pèserait sur les Juifs serait le fait de l'immigration post-coloniale et de ceux qui les défendent, c'est-à-dire globalement la gauche et les mouvements antiracistes. C'est un concept qu'Israël met en avant depuis les années 1970, mais ça a été largement popularisé depuis les années 2000 au niveau international, et notamment en France par des intellectuels réactionnaires comme Taguieff, Finkielkraut, etc. Et là, on a vu que depuis le 7 octobre 2023, la question de l'antisémitisme, qui est devenue absolument centrale dans le débat médiatique, est intégralement informée par l'idée de ce « nouvel antisémitisme ». Je pense par exemple à une réaction très saisissante il y a quelques jours : quand l'arbre planté en hommage à Ilan Halimi à Épinay-sur-Seine a été abattu, alors qu'on n'avait aucune information sur qui avait commis cet acte, ni dans quel esprit, plein de personnalités ont fait d'emblée le lien avec la question palestinienne, en disant que les droits des Palestiniens ne pouvaient justifier un tel acte. La mise en avant de ce « nouvel antisémitisme » permet de totalement passer sous silence la persistance de l'antisémitisme traditionnel de l'extrême droite./p
p/brstrongTu évoquais à l'instant la centralité de la question de l'antisémitisme dans les médias, alors venons-y justement. C'est difficile d'en parler comme d'un tout parce qu'au cours des deux dernières années, moult événements ont propulsé cette question à la Une de l'agenda, mais globalement, quel regard portez-vous sur la couverture journalistique de cette thématique ?/strong/p
pDu point de vue du traitement médiatique, un problème réside dans le fait qu'on manque de données fiables pour mesurer l'antisémitisme. Dans le même temps, tous les médias parlent « d'explosion » de l'antisémitisme. Les chiffres qui circulent dans la presse sont issus du ministère de l'Intérieur, qui reprend lui-même les données du SPCJ, le Service de protection de la communauté juive. Or, quand on regarde un peu dans le détail, ces statistiques ne sont vraiment pas fiables. Un tag « Free Palestine » est considéré comme un acte antisémite par exemple. Donc de ce point de vue, je ne dirais pas qu'on parle « dans le vide » mais en tout cas, c'est difficile d'avoir un discours très informé sur cette question. Ensuite, il y a un problème essentiel dans la manière dont les médias présentent l'antisémitisme. D'une part, en le distinguant systématiquement du racisme alors que pour nous, militants antiracistes, l'antisémitisme est un racisme spécifique comme l'est la négrophobie, l'islamophobie, la romophobie, etc., et, d'autre part, en produisant quasi systématiquement un discours moral et dépolitisé à ce sujet. L'antisémitisme n'est jamais pensé en termes de structures qui produisent des comportements. On en est bien souvent réduit, dans le discours médiatique mainstream, à dénoncer des tropes, des figures, l'emploi de idog whistles/ispan class="spip_note_ref" [a href="#nb7" class="spip_note" rel="appendix" title="Selon la définition qu'en donne Wikipédia, l'expression désigne « des propos (…)" id="nh7"7/a]/span, et à mettre tout et n'importe quoi sur le même plan : par exemple, l'assassinat d'Ilan Halimi ou les meurtres de Mohammed Merah d'un côté, et le fait de dire « camper à Tel-Aviv » à propos d'un déplacement de Yaël Braun-Pivet en Israël de l'autre./p
p/brstrongVous avez régulièrement tenu des positions totalement à contre-courant du discours ambiant et des « polémiques » permanentes sur le sujet. Y compris au moment de l'emballement médiatique autour du visuel avec Cyril Hanouna, produit par La France insoumise pour appeler à la manifestation antiraciste du 22 juin 2025./strong/p
pDe notre point de vue, cette séquence a été un naufrage médiatique catastrophique. Tout et n'importe quoi a été dit. Sur LFI, dans une sorte d'acmé de la campagne de délégitimation qui vise ce mouvement, et sur l'antisémitisme lui-même. Tous les médias ont en effet raconté que le visuel de Cyril Hanouna était la reprise d'une affiche nazie, sans jamais interroger le contexte d'énonciation. Or, de quoi parle-t-on ? D'un côté, d'un visuel appelant à une manifestation contre l'extrême droite et ses relais ; de l'autre, d'une affiche du « Juif éternel » qui avait iin fine/i pour objet de génocider les Juifs. Convenons que les deux n'ont donc rien à voir ! L'objectif fondamental de ce type de séquence médiatique, ce n'est pas de parler de l'antisémitisme, c'est de criminaliser la gauche./p
p/brstrongDans et par des médias qui sont eux-mêmes producteurs et/ou diffuseurs de représentations antisémites. On peut penser par exemple à a href="https://www.acrimed.org/Polemique-de-Villepin-la-fabrique-mediatique-de-l"« l'affaire » de Villepin/a, au traitement complaisant de Yann Moix, etc. Mais plus généralement, au fait que se consolide au sein du champ journalistique un pôle d'extrême droite extrêmement puissant – des médias Bolloré à iValeurs actuelles/i, hebdomadaire où se sont d'ailleurs historiquement « recyclées » plusieurs personnalités qui a href="https://www.acrimed.org/Valeurs-actuelles-une-legitimation-mediatique-de"travaillaient auparavant… à iMinute/i/aspan class="spip_note_ref" [a href="#nb8" class="spip_note" rel="appendix" title="On se rappelle également le pamphlet contre l'historien Benjamin Stora." id="nh8"8/a]/span./strong/p
pOui, on peut aussi penser au salut nazi d'Elon Musk, qui n'a pas du tout été traité comme tel. Dans la lignée de ce que vous décrivez du paysage médiatique, il faut souligner l'invisibilisation totale de l'antisémitisme d'extrême droite dans les médias. À l'occasion des dernières législatives, quelques médias avaient creusé dans le passé des candidats RN et on a assisté à des choses folles, comme une déclaration selon laquelle « ile gaz a rendu justice aux victimes de la Shoah/i »span class="spip_note_ref" [a href="#nb9" class="spip_note" rel="appendix" title="Voir « Législatives : le Rassemblement national et ses candidats racistes, (…)" id="nh9"9/a]/span. Autre fait notable dans le même registre : l'invisibilisation des enquêtes de Streetpress ou d'Arte Radio qui ont révélé des propos antisémites abjects (parmi d'innombrables propos racistes) au sein de la police, dans des groupes ou sur des boucles WhatsApp, c'est-à-dire un milieu où le degré d'infiltration de l'extrême droite la plus radicale est très important. Il y a donc un impensé total quand on parle de l'antisémitisme dans le débat public, et une identification de l'antisémitisme aux Noirs et aux Arabes. L'éditorialiste de LCI, Pascal Perri, a quand même parlé d'un « iantisémitisme couscous/i »… Ça rejoint un autre point, qui est que telle qu'elle est donnée à voir, la surmédiatisation de la question de l'antisémitisme est une manière d'invisibiliser les autres formes de racisme qui prospèrent en France, et qui sont d'ailleurs, de notre point de vue, plus déterminants : l'islamophobie, la négrophobie, la romophobie. Le temps que les médias consacrent à l'expression « camper à Tel-Aviv », c'est autant de temps qu'ils ne consacrent pas à Bruno Retailleau criant « À bas le voile ! », deux semaines avant l'assassinat d'Aboubakar Cissé dans une mosquée du Gard. Le spectacle constant de ce deux poids, deux mesures est absolument délétère, également pour la lutte contre l'antisémitisme puisqu'il produit du ressentiment contre les Juifs, c'est une évidence./p
p/brstrongQuelle approche permettrait selon vous de lutter contre cette dépolitisation et de mieux traiter la question de l'antisémitisme d'un point de vue journalistique ?/strong/p
pLe plus important serait de penser et de réinscrire la question de l'antisémitisme dans la question du racisme. iA fortiori/i compte tenu du contexte qu'on évoquait, c'est-à-dire celui d'une extrême droitisation des champs politique et journalistique. Dans un tel contexte, tous les racismes croissent, les affects racistes croissent, il y a une libération de la parole et des actes racistes à tous les niveaux. Il est donc « logique » que l'antisémitisme croisse également. On ne peut pas non plus faire l'impasse sur la question du traitement de Gaza. Il est évident que le génocide commis aujourd'hui par Israël nourrit l'antisémitisme en France, puisque à longueur de médias s'exprime iin fine/i cette idée que c'est au nom des Juifs que sont commis les crimes d'Israël. C'est un discours véhiculé aussi bien par les institutions représentatives des Juifs de France que par les commentateurs mainstream, mais aussi par les Israéliens eux-mêmes : quand on passe son temps à répéter qu'Israël représente les Juifs, ça produit nécessairement de l'antisémitisme, surtout quand quelqu'un comme le grand rabbin Haïm Korsia dit sur un plateau de télévision que « itout le monde serait bien content qu'Israël finisse le boulot/i » à Gaza…/p
p/brstrongOn constate par ailleurs que ce sont toujours les mêmes organisations communautaires, comme Golem, Nous vivrons, l'UEJF ou le Crif, qui sont sollicitées dans les médias pour traiter ces questions. Comment pourrait-on faire pour changer ça ?/strong/p
pD'abord, compte tenu de l'exclusion de toute parole un tant soit peu radicale du champ médiatique mainstream, ça ne nous surprend pas que la position « acceptable » soit celle de Golem par exemple, qui est un peu l'équivalent fonctionnel du PS dans les médias, c'est-à-dire quelque chose d'assez mou qui ne remet pas en question les structures. Après, si l'on s'interroge sur le monopole de telle ou telle parole, il faut poser la question de la représentativité de cette parole au sein de ce qu'est la communauté juive aujourd'hui en France. On n'a pas d'outils statistiques sur lesquels s'appuyer et donc on ne peut avoir que des sentiments ou des intuitions, mais au vu de ce qu'on constate, la réalité, c'est que notre position est marginale au sein de la communauté juive française, il ne faut pas se raconter d'histoires./p
p/brstrongVous avez publié le 21 mai dernier un texte vraiment percutant titré a href="https://tsedek.fr/2025/05/21/diner-au-coeur-de-la-mecanique-negationniste/" class="spip_out" rel="external"« Dîner au cœur de la mécanique négationniste »/a : la description fictionnelle d'un dîner de famille juive, où les convives discutent de la situation en Israël/Palestine, mais qui aurait pu tout aussi bien être celle d'un plateau de télévision ordinaire tant le panel des points de vue représentés reflète peu ou prou celui des émissions de « débat » traditionnelles. Certains personnages incarnent d'ailleurs des toutologues et des personnalités médiatiques comme Caroline Fourest, Raphaël Enthoven, Joann Sfar et Delphine Horvilleur, dont la prise de parole, début mai, a vraisemblablement déclenché l'écriture de votre texte. Pouvez-vous nous en parler, qu'avez-vous voulu mettre en lumière à travers ce texte ?/strong/p
pSinclair, Sfar ou Horvilleur ont été présentés partout comme des grandes consciences humanistes. Pourquoi ? Parce qu'après des mois et des mois de silence sur les crimes israéliens, ils ont commencé à prendre la parole pour dénoncer la famine à Gaza notammentspan class="spip_note_ref" [a href="#nb10" class="spip_note" rel="appendix" title="Lire « Les résistants de la 25e heure au chevet de "l'âme d'Israël" », (…)" id="nh10"10/a]/span. Mais à chaque fois, pour le dénoncer au nom de leur amour d'Israël, ce qui est très significatif de notre point de vue. Comme je le disais tout à l'heure, il faut comprendre qu'à mesure que se poursuit le génocide, l'évidence des crimes israéliens est bien trop claire et pour toute une partie de la population, le soutien pur et simple et inconditionnel d'Israël n'est plus possible. Pour continuer à absoudre le sionisme de ces crimes, il faut donc pouvoir dire, d'une certaine manière, que tout est la faute de l'extrême droite israélienne, des suprémacistes, de Netanyahou, etc. C'est un discours porté par « le sionisme de gauche ». Or, la Nakba, le nettoyage ethnique de 1948, n'a pas été commis par des suprémacistes d'extrême droite, mais par la gauche travailliste. Laquelle, et c'est une constante dans l'histoire, a poursuivi la colonisation de la Palestine, elle aussi, et a commis des crimes contre les Palestiniens, elle aussi. Le problème inhérent à tous les discours pseudo humanistes, omniprésents, et très valorisés dans les médias, c'est de se draper dans une idée abstraite de « la paix », à nos yeux très dépolitisée. Tsedek, notre nom, veut dire « justice » : nous mettons beaucoup plus l'accent sur l'idée de justice que sur la question de « la paix ». « La paix » en vigueur le 6 octobre 2023 était-elle une situation acceptable ? Non./p
p/brstrongPour rester sur la question des discours négationnistes, il est tout de même stupéfiant que le fait de tenir publiquement des propos comme « iIl n'y a AUCUN journaliste palestinien. Uniquement des tueurs, des combattants ou des preneurs d'otages avec une carte de presse/i », n'ait toujours aucune incidence sur le capital médiatique de celles et ceux qui les tiennent, Raphaël Enthoven en l'occurrence, que l'on retrouve à la télé tous les quatre matins.../strong/p
pÇa rejoint un élément qui est apparu très nettement au cours des deux dernières années : toutes celles et ceux qui se targuent d'être de grandes consciences humanistes comme Enthoven sont les premiers à porter un racisme anti-palestinien furieux. Omniprésent dans les discours médiatiques, ce racisme se traduit très simplement : une vie palestinienne ne vaut pas une vie israélienne. Caroline Fourest l'a exprimé, François Hollande l'a exprimé. Et bien d'autres. Le degré d'acceptation du racisme anti-palestinien en France est saisissant. On l'aura aussi vu très clairement au moment de l'annonce de la mort des deux enfants Bibas, otages enlevés le 7 octobre 2023. La médiatisation et l'émotion suscitée ont été d'une intensité exceptionnelle, à un moment où il y avait plus de 20 000 enfants palestiniens tués, qui n'avaient droit quant à eux à aucune Une de journal, aucun nom, aucune identité propre. Ils n'étaient pas ces adorables bambins roux dont on a reproduit la photo sur les chaînes de télévision. Ils sont juste des statistiques et des corps sous les décombres. Le racisme anti-palestinien et la déshumanisation des Palestiniens ont été essentiels dans la poursuite du génocide. Et les grandes consciences dont on parle y ont participé./p
p/brstrongEst-ce que tu as connu un état des médias différent, où l'antisionisme n'était pas présenté comme de l'antisémitisme et où le soutien à la cause palestinienne n'était pas systématiquement disqualifié ?/strong/p
pJe pense qu'il y a une vraie évolution depuis les années 2000. Mais c'est perceptible aussi au sein du champ politique, c'est-à-dire que la position traditionnelle de la droite française – qui était une position gaullienne, pas antisioniste mais la ligne que peut incarner un Villepin aujourd'hui, ou qu'incarnait Chirac à l'époque – a totalement disparu, notamment suite au mandat Sarkozy qui a constitué une sorte d'alignement complet de la diplomatie française sur les positions étatsuniennes. Je pense qu'il y a eu une vraie bascule à ce moment-là et que le champ médiatique a suivi. Au moment de la guerre en Irak, le niveau d'opposition à la rhétorique du choc de civilisation était incomparablement plus élevé au sein du discours dominant qu'il ne l'est aujourd'hui, par exemple au moment de traiter le génocide à Gaza. Mais je ne pense pas qu'il y ait une spécificité du champ médiatique par rapport au champ politique de ce point de vue, les deux sont très liés. Et le niveau de racisme ayant droit de cité dans les médias mainstream est incomparable avec ce que c'était il y a vingt ans./p
p/brstrongLa couverture récente de la reconnaissance de l'État de Palestine par la France a donné lieu à moult « débats » sur les solutions politiques, dans la lignée de ce qu'on entend depuis deux ans sur le sujet. Qu'avez-vous observé de particulièrement marquant ?/strong/p
pLa première chose à dire, c'est que la priorité est d'arrêter le génocide, c'est-à-dire arrêter de vendre des armes à Israël et prendre des sanctions. Tsedek soutient en ce sens le mouvement BDS, essentiel pour faire pression sur Israël. S'agissant du discours médiatique sur les solutions politiques, il est le reflet de la position dominante au sein du champ politique français, qui défend la dite « solution à deux États ». Or, pour nous, c'est une manière de ne pas parler réellement de solution politique sur place. La manière qu'ont les médias d'aborder tous ces sujets est totalement idéaliste, en ce sens que les débats ne comportent généralement aucune réflexion sur la réalisation matérielle de telle ou telle solution politique. Qu'est-ce que signifie concrètement un État palestinien sur le terrain ? On ne sait pas. Qu'est-ce que signifie une solution à deux États qui impliquerait nécessairement des déplacements de populations ? Lorsqu'en 2005, Ariel Sharon a annoncé le retrait israélien de Gaza, il a eu le plus grand mal à faire partir les 5 000 colons qui s'y trouvaient. Il y a aujourd'hui 400 000 colons en Cisjordanie, armés, surarmés, protégés, et unis par des liens forts avec l'armée israélienne. Quand bien même un État palestinien verrait le jour, comment vont partir ces colons ? Quel média s'interroge là-dessus ? Enfin, on perd souvent de vue l'essentiel : deux populations vivent sur un même territoire, l'une subit l'oppression coloniale, et cette oppression se traduit par la colonisation, l'apartheid et le génocide. Face à cela, les débats auxquels nous assistons sont la plupart du temps stériles parce qu'ils passent à côté de la seule question qui importe, au-delà évidemment de l'urgence qu'il y a à arrêter le génocide et à porter secours aux Palestiniens : l'abolition des structures coloniales de l'État israélien et la lutte pour l'égalité des droits de chacun./p
p/brPropos recueillis par strongBlaise Magnin/strong et strongPauline Perrenot/strong/p/div
hr /
div class='rss_notes'div id="nb1"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh1" class="spip_note" title="Notes 1" rev="appendix"1/a] /spanUn collectif créé au lendemain du 7 octobre 2023, qui se définit comme un « imouvement des Juifves de gauche contre l'antisémitisme d'où qu'il vienne/i »./p
/divdiv id="nb2"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh2" class="spip_note" title="Notes 2" rev="appendix"2/a] /spanOn peut retrouver la retransmission de ce colloque sur la chaîne YouTube de Paroles d'honneur : la journée du a href="https://www.youtube.com/watch?v=b5Utu2Aprk8" class="spip_out" rel="external"25 janvier/a et celle du a href="https://www.youtube.com/watch?v=a-3V84iMHig" class="spip_out" rel="external"26 janvier/a./p
/divdiv id="nb3"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh3" class="spip_note" title="Notes 3" rev="appendix"3/a] /span« "Gaza va supplanter Auschwitz en termes de cruauté absolue" : quand des chercheurs et des assos juives réécrivent l'histoire », iMarianne/i, 28/01./p
/divdiv id="nb4"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh4" class="spip_note" title="Notes 4" rev="appendix"4/a] /span« Des juifs "innocents" ou la caution juive des antisémites, par Brigitte Stora », iL'Obs/i, 9/12/2024 et « "Il ne faut pas opposer la lutte contre l'antisémitisme et la solidarité avec les Palestiniens" », iL'Obs/i, 28/12/2024./p
/divdiv id="nb5"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh5" class="spip_note" title="Notes 5" rev="appendix"5/a] /spanLire « a href="https://www.acrimed.org/Du-Labour-de-Corbyn-a-LFI-de-Melenchon-les-medias"Du Labour de Corbyn à LFI de Mélenchon, les médias contre la gauche/a », Acrimed, 26/08/2024./p
/divdiv id="nb6"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh6" class="spip_note" title="Notes 6" rev="appendix"6/a] /spanLire « a href="https://www.acrimed.org/Israel-Palestine-Le-plus-revoltant-c-est-la"Israël-Palestine : "Le plus révoltant, c'est la différence de traitement"/a », Acrimed, 12/05/2025./p
/divdiv id="nb7"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh7" class="spip_note" title="Notes 7" rev="appendix"7/a] /spanSelon la définition qu'en donne a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Dog_whistle" class="spip_out" rel="external"Wikipédia/a, l'expression désigne « ides propos politiques qui semblent anodins au grand public mais adressent un message spécifique à un groupe ciblé pour en obtenir le soutien sans provoquer d'opposition par ailleurs/i »./p
/divdiv id="nb8"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh8" class="spip_note" title="Notes 8" rev="appendix"8/a] /spanOn se rappelle également le a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/11/20/une-diatribe-de-valeurs-actuelles-contre-l-historien-benjamin-stora-suscite-l-emotion_6019853_3212.html" class="spip_out" rel="external"pamphlet contre l'historien Benjamin Stora/a./p
/divdiv id="nb9"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh9" class="spip_note" title="Notes 9" rev="appendix"9/a] /spanVoir « Législatives : le Rassemblement national et ses candidats racistes, antisémites et complotistes », iLibération/i, 17/06/2024. Le candidat a été par la suite réhabilité. Voir « Législatives 2024 : le RN réhabilite le candidat du Morbihan désavoué après un tweet jugé antisémite », France 3 Bretagne, 23/06/2024./p
/divdiv id="nb10"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh10" class="spip_note" title="Notes 10" rev="appendix"10/a] /spanLire « a href="https://www.acrimed.org/Les-resistants-de-la-25e-heure-au-chevet-de-l-ame"Les résistants de la 25e heure au chevet de "l'âme d'Israël"/a », Acrimed, 22/09/2025./p
/div/div
mar, 2025-11-04 16:58
img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L150xH111/allemagne_1-35260.png?1762268328' class='spip_logo spip_logo_right' width='150' height='111' alt="" /
div class='rss_chapo'pDécentralisation, indépendance vis-à-vis des groupes industriels et de l'État : le paysage médiatique allemand permet, par comparaison, de montrer que la situation française n'est pas une fatalité. Mais est-ce pour autant un modèle à suivre ? On fait le point. Cette première partie tente de dresser un panorama historique et économique des médias allemands./p/div
div class='rss_texte'/br
h3 class='article_intertitres'La décentralisation des médias/h3
p/brAu sortir de la guerre de 1939-1945, l'Allemagne vaincue fut divisée en quatre zones d'occupation par l'Union soviétique, les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France. L'organisation administrative du pays est prise en main par les puissances occupantes, notamment le contrôle des médias, jusqu‘en 1949 pour la presse, et jusqu'en 1955 pour la radio et la télévision./p
pPar opposition au centralisme nazi, c'est une structuration décentralisée qui est promue, un État fédéral composé de 16 régions, les Länderspan class="spip_note_ref" [a href="#nb1" class="spip_note" rel="appendix" title="Le Land allemand correspond aux régions françaises, mais avec une autonomie (…)" id="nh1"1/a]/span. La gestion des médias audiovisuels et le contrôle de leur concentration font ainsi partie des prérogatives régionales, ce qui fait une grande différence avec le système centralisé français. Surtout lorsque l'on constate que cette gestion et ce contrôle sont exercés avec une forte représentation de la société civile./p
pPar ailleurs, de longue tradition, il n'y a pas outre-Rhin de distinction, comme en France, entre presse quotidienne nationale et presse quotidienne régionale : tout y est régional. Même les grands journaux comme la iWest Deutsche Allgemeine Zeitung/i, la iFrankfurter Allgemeine Zeitung/i ou la iSüddeutsche Zeitung/i sont des journaux régionaux, comme le rappelle leur dénomination, fabriqués dans leur région, mais qui ont une audience nationale et sont commercialisés dans tout le pays. On les appelle « supra-régionaux ». Ainsi, c'est toujours à partir d'une forte implantation régionale que la plupart des grands groupes de presse se sont constitués, comparables en cela à des groupes français régionaux comme iOuest-France/i ou iSud Ouest/i, avant de se développer plus largement. Cet ancrage local explique en grande partie la résistance de la presse allemande à la crise des dernières décennies./p
/br
h3 class='article_intertitres'Indépendance des médias vis-à-vis des groupes industriels/h3
p/brL'accaparement des médias privés par des milliardaires dont l'activité principale se déploie dans d'autres secteurs – industries de l'armement, du bâtiment, du transport, de la banque, des télécommunications, du luxe, etc. –, caractéristique du paysage médiatique français, paraît très improbable outre-Rhin. Cela notamment en raison du « tabou Hugenberg », du nom de l'industriel, président du conseil d'administration du fabricant d'armes Krupp, détenteur d'un empire médiatiquespan class="spip_note_ref" [a href="#nb2" class="spip_note" rel="appendix" title="Alfred Hugenberg, lui-même dirigeant d'un parti d'extrême droite, possédait (…)" id="nh2"2/a]/span, qui joua un rôle décisif dans l'accession du nazisme au pouvoirspan class="spip_note_ref" [a href="#nb3" class="spip_note" rel="appendix" title="Lire le chapitre qui y est consacré dans Les Irresponsables. Qui a porté (…)" id="nh3"3/a]/span. Le « tabou Hugenberg » interdit tacitement à tout industriel, et plus largement à tout investisseur étranger aux médias, d'en posséder. C'est une règle non écrite, qui a souffert quelques exceptions au cours de l'histoirespan class="spip_note_ref" [a href="#nb4" class="spip_note" rel="appendix" title="Entre 1962 et 1974, la société Bosch (électroménager) contrôlait le journal (…)" id="nh4"4/a]/span, mais qui demeure, dans l'ensemble, effective, même si Springer, le groupe dominant de la presse, s'assoit dessus à l'occasion, et n'hésiterait sans doute pas à la briser à nouveau si ses intérêts étaient en jeu./p
pSelon Valérie Robertspan class="spip_note_ref" [a href="#nb5" class="spip_note" rel="appendix" title="Autrice de La presse en France et en Allemagne. Une comparaison des (…)" id="nh5"5/a]/span, l'absence des groupes extérieurs aux médias dans l'écosystème médiatique ne découlerait pas seulement du « tabou Hugenberg », mais relèverait surtout d'une « ilogique de branche, celle d'entrepreneurs de presse qui considèrent que leur métier a ses spécificités et que le principal critère lors d'un rachat est la compétence du repreneur/i »span class="spip_note_ref" [a href="#nb6" class="spip_note" rel="appendix" title="Valérie Robert, La presse en France et en Allemagne, p. 69." id="nh6"6/a]/span./p
pToujours est-il qu'à ce jour, aucun groupe industriel ne possède de média en Allemagne, et les groupes médiatiques n'investissent pas l'industrie. Tout au plus ont-ils parfois des activités secondaires dans les services (d'enseignement, postaux, annonces, informatique) mais jamais dans l'industrie. La distinction avec la situation française, où les grands médias privés appartiennent à des industriels et sont soumis à leurs stratégies, est patente./p
/br
h3 class='article_intertitres'Indépendance des médias vis-à-vis de l'État/h3
p/brL'organisation générale du système médiatique allemand se veut également indépendante de l'influence étatique. Cette dernière est entendue ici au sens très large : influence de l'État fédéral, mais aussi celle des organes – gouvernement et parlement – des Länder, et celle des partis politiques. Elle fut définie après-guerre par une volonté de rupture totale avec le système de propagande nazi, qui avait mis à son service l'audiovisuel étatisé et centralisé et instauré la censure dans toute la presse ; et aussi en opposition, après la guerre et jusqu'à la réunification, au contrôle bureaucratique de type soviétique sur les médias est-allemands./p
pUne telle disposition, imposée par les Alliés, n'est forcément pas du goût des détenteurs du pouvoir qui durent s'y plier à plusieurs reprises. Ainsi, le chancelier Adenauer en 1961 voulut créer une chaîne de télévision contrôlée par l'État, mais la cour constitutionnelle s'y opposa, et il dut renoncer (alors qu'au même moment en France, la RTF, qui deviendra ORTF, monopole d'État, contrôlait la radio et la télévision)span class="spip_note_ref" [a href="#nb7" class="spip_note" rel="appendix" title="Lire « L'audiovisuel public allemand, entre autonomie et dépendance », La (…)" id="nh7"7/a]/span./p
pL'année suivante éclate l'affaire du iSpiegel/ispan class="spip_note_ref" [a href="#nb8" class="spip_note" rel="appendix" title="Voir « L'affaire du Spiegel », Cinq colonnes à la une, INA, 7/12/1962." id="nh8"8/a]/span, le premier magazine d'information politique, accusé par le ministre de l'Intérieur Strauss de haute trahison. Les locaux du magazine sont perquisitionnés, tandis que son directeur et plusieurs journalistes sont incarcérés. Motif : divulgation de documents « secret défense » qui révélaient la vulnérabilité militaire de l'Allemagne en cas d'offensive soviétique. L'affaire fit grand bruit en Allemagne et dans le monde. Face aux vives protestations des autres journaux, y compris la presse Springer qui aida matériellement le iSpiegel/i, et surtout celles de la population allemande qui manifesta nombreuse pour la défense de la liberté de la presse, Strauss dût démissionner. Le chancelier Adenauer, fortement discrédité par cette affaire, démissionna également quelques mois plus tard./p
pEn 2013, c'est le président de la République, Christian Wulff, qui est conduit à démissionner à la suite de la révélation d'une intervention de sa part auprès du journal iBild/i visant à étouffer une affaire de prêt immobilier douteux. Là encore, a href="https://www.arretsurimages.net/articles/allemagne-pression-presidentielle-sur-bild" class="spip_out" rel="external"les médias et l'opinion publique ont fait bloc/a contre cette atteinte à la liberté de la presse par des membres de l'État./p
pDans le même esprit, les aides directes de l'État à la presse qui sont attribuées en France aux journaux d'information politique et générale et qui contribuent largement à leur financement, d'une façon d'ailleurs a href="https://www.acrimed.org/Aides-a-la-presse-2022-le-gateau-pour-les-grands"parfaitement inégalitaire/a, n'existent pas en Allemagne et y seraient considérées comme une atteinte à l'indépendance de ces journaux, inscrite à l'article 5 de la constitution fédéralespan class="spip_note_ref" [a href="#nb9" class="spip_note" rel="appendix" title="« Liberté d'opinion : Chacun a le droit d'exprimer et de diffuser librement (…)" id="nh9"9/a]/span « iJe préfère encore les faillites des journaux à l'achat de leur indépendance au moyen des subventions/i », déclarait, en 2019, le patron de la maison d'édition Axel Springerspan class="spip_note_ref" [a href="#nb10" class="spip_note" rel="appendix" title="Le Monde, 16/12/2019." id="nh10"10/a]/span. Il existe cependant en Allemagne quelques aides à la presse comme un taux réduit de TVA et des tarifs postaux préférentiels, des remboursements de taxes, ou encore des prêts à taux réduits consentis par le ministère de l'Économie. Avec la crise de la presse et les mouvements de concentration, un débat récurrent repose la question de cette aide de l'État. Le philosophe Jürgen Habermas, par exemple, y est favorable, ainsi que le parti socialiste (SPD) et les syndicats de journalistesspan class="spip_note_ref" [a href="#nb11" class="spip_note" rel="appendix" title="Valérie Robert, op. cit., p. 30-34." id="nh11"11/a]/span, alors que les partis situés plus à droite, CDU-CSU (démocrate chrétien) et FDP (libéral) y sont hostiles. Diverses propositions émergent de ces débats, et la seule qui a été adoptée à ce jour est une subvention de 40 millions d'euros par an d'aide au portage, en 2019. Mais ces aides restent très faibles en comparaison de celles que l'État français accorde aux journaux (plusieurs centaines de millions d'euros d'aides directes chaque année, et plus d'un milliard en comptant les aides indirectes, selon le ministère de la Culture)./p
pLa volonté d'indépendance vis-à-vis de l'État et des groupes industriels est presque concomitante et rappelle le programme du Conseil national de la résistance en France à la Libération, pour des médias « indépendants de l'État et des puissances d'argent ». Le programme français était plus ambitieux, mais il a a href="https://www.acrimed.org/Petite-histoire-des-ordonnances-de-1944-sur-la"fait long feu/a. Celui de l'Allemagne s'est en partie réalisé, et il faut reconnaître qu'il est toujours vivant, même si l'indépendance des médias vis-à-vis de l'industrie ne veut pas dire indépendance vis-à-vis de toutes les puissances d'argent, comme on va le voir./p
/br
h3 class='article_intertitres'Conséquence de l'autonomie : la rentabilité obligée/h3
p/brCette double indépendance vis-à-vis des groupes industriels et de l'État, bien que certainement bénéfique sur le plan de la liberté éditoriale, a aussi une contrepartie : les médias privés allemands ne peuvent compter que sur eux-mêmes, et sur les lois du marché médiatique, pour se maintenir et se développer ; ce qu'Isabelle Bourgeois appelle leur développement par « endogamie »span class="spip_note_ref" [a href="#nb12" class="spip_note" rel="appendix" title="Isabelle Bourgeois, « Les médias dans l'Allemagne unie », in Allemagne, les (…)" id="nh12"12/a]/span. Pas de Bolloré, de Niel, d'Arnault ou d'autres « philanthropes » intéressés pour combler des déficits chroniques ; pas non plus de ces aides de l'État qui peuvent constituer pour les journaux français un soutien substantiel, et pour certains la condition de leur existence. C'est dire que la rentabilité des entreprises médiatiques allemandes sur le marché est vitale, les places chères et la concurrence féroce pour l'audience et les recettes publicitaires. Si chères que la concurrence féroce s'est parfois transformée en solidarité des acteurs nationaux installés, afin d'entraver l'entrée d'un acteur extérieur. Comme lorsque le « gratuit » norvégien i20 Minutes/i, en 1999, chercha à se lancer à Cologne : les quotidiens locaux, détenus par les patrons de presse Springer et DuMont Schauberg, éditèrent alors concomitamment deux « gratuits » concurrents, qui captèrent la plus grande partie de la publicité et contraignirent i20 Minutes/i à abandonner le terrain. Le danger écarté, les deux « gratuits » cessèrent de paraître…span class="spip_note_ref" [a href="#nb13" class="spip_note" rel="appendix" title="Valérie Robert, op. cit., p. 95." id="nh13"13/a]/span/p
pCette autonomie économique du secteur des médias se décline différemment selon qu'il s'agit de la presse, entièrement privée, ou de l'audiovisuel, où les groupes privés doivent compter avec un puissant service public./p
p/brstrongJean Pérès/strong et strongFlorian Werlé/strong/p/div
hr /
div class='rss_notes'div id="nb1"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh1" class="spip_note" title="Notes 1" rev="appendix"1/a] /spanLe Land allemand correspond aux régions françaises, mais avec une autonomie bien plus grande. Le Land dispose d'une constitution, d'une assemblée et d'un gouvernement. Il a des pouvoirs étendus en matière de police, d'éducation, de culture, y compris les médias./p
/divdiv id="nb2"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh2" class="spip_note" title="Notes 2" rev="appendix"2/a] /spanAlfred Hugenberg, lui-même dirigeant d'un parti d'extrême droite, possédait sous la république de Weimar (1918-1933) la moitié des journaux ainsi qu'une agence de presse, une agence de publicité, une maison d'édition, et une société de production./p
/divdiv id="nb3"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh3" class="spip_note" title="Notes 3" rev="appendix"3/a] /spanLire le chapitre qui y est consacré dans iLes Irresponsables. Qui a porté Hitler au pouvoir ?/i, Johann Chapoutot, Gallimard, 2025, p. 85-102./p
/divdiv id="nb4"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh4" class="spip_note" title="Notes 4" rev="appendix"4/a] /spanEntre 1962 et 1974, la société Bosch (électroménager) contrôlait le journal de Stuttgart ainsi que six journaux et quelques feuilles locales du Bade-Würtenberg. De même, la Deutsche Bank fut actionnaire à deux reprises du groupe de médias Springer. Ce sont surtout les fonds d'investissement étrangers qui ont inquiété les milieux de la presse allemande : à partir de 2005, le fonds britannique Mecum investit dans la presse allemande et constitue le 10e groupe médiatique du pays, avant de revendre ; les fonds américains Hellman Friedman et KKR furent actionnaires de Springer, même majoritaire dans le cas de KKR./p
/divdiv id="nb5"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh5" class="spip_note" title="Notes 5" rev="appendix"5/a] /spanAutrice de iLa presse en France et en Allemagne. Une comparaison des systèmes/i, Presses de la Sorbonne Nouvelle, 2011, ouvrage très complet, qui contient de nombreuses et précieuses informations sur la période antérieure à 2011./p
/divdiv id="nb6"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh6" class="spip_note" title="Notes 6" rev="appendix"6/a] /spanValérie Robert, iLa presse en France et en Allemagne/i, p. 69./p
/divdiv id="nb7"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh7" class="spip_note" title="Notes 7" rev="appendix"7/a] /spanLire « a href="https://larevuedesmedias.ina.fr/laudiovisuel-public-allemand-entre-autonomie-et-dependance" class="spip_out" rel="external"L'audiovisuel public allemand, entre autonomie et dépendance/a », La revue des médias, 6/01/2016./p
/divdiv id="nb8"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh8" class="spip_note" title="Notes 8" rev="appendix"8/a] /spanVoir « a href="https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/video/caf93014273/l-affaire-du-spiegel" class="spip_out" rel="external"L'affaire du Spiegel/a », Cinq colonnes à la une, INA, 7/12/1962./p
/divdiv id="nb9"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh9" class="spip_note" title="Notes 9" rev="appendix"9/a] /span« Liberté d'opinion : Chacun a le droit d'exprimer et de diffuser librement son opinion par la parole, par l'écrit et par l'image, et de s'informer sans entraves aux sources accessibles au public. La liberté de la presse et la liberté d'informer par la radio, la télévision et le cinéma sont garanties. Il n'y a pas de censure. »/p
/divdiv id="nb10"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh10" class="spip_note" title="Notes 10" rev="appendix"10/a] /spaniLe Monde/i, 16/12/2019./p
/divdiv id="nb11"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh11" class="spip_note" title="Notes 11" rev="appendix"11/a] /spanValérie Robert, op. cit., p. 30-34./p
/divdiv id="nb12"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh12" class="spip_note" title="Notes 12" rev="appendix"12/a] /spanIsabelle Bourgeois, « Les médias dans l'Allemagne unie », in iAllemagne, les chemins de l'unité/i, CIRAC, 2011./p
/divdiv id="nb13"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh13" class="spip_note" title="Notes 13" rev="appendix"13/a] /spanValérie Robert, op. cit., p. 95./p
/div/div
ven, 2025-10-31 09:42
img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L150xH84/zucman1-30ab2.png?1761896553' class='spip_logo spip_logo_right' width='150' height='84' alt="" /
div class='rss_chapo'pÉmission spéciale sur LCI, ce lundi 27 octobre : l'économiste star Gabriel Zucman est l'invité de Darius Rochebin, et celui-ci organise un « match » avec l'éditorialiste maison, François Lenglet. L'occasion d'en savoir plus sur la fameuse taxe dont tout le monde parle ? Pas vraiment…/p/div
div class='rss_texte'pUne musique angoissante retentit, Darius Rochebin est debout, devant un écran rouge sur lequel est inscrit le titre : « Va-t-on taxer les riches ? » Au menu, un duel au sommet entre l'économiste qui a donné son nom à un célèbre impôt plancher sur le patrimoine des ultra-riches, Gabriel Zucman, et le journaliste François Lenglet. La joute s'annonce déséquilibrée ! Elle l'est : d'un côté, l'un des économistes les plus cités dans le monde, et de l'autre, un ancien professeur de littérature reconverti depuis des années en éditorialiste télévisuel « spécialisé » éco, sans qualification particulière dans la discipline./p
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div class='spip_document_16262 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" a href='https://www.acrimed.org/IMG/png/zucman1.png' class="spip_doc_lien mediabox" type="image/png" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH281/zucman1-a56a3.png?1761839378' width='500' height='281' alt='' //a
/figure
/div
p/brAvant de lancer « il'affrontement/i », Darius Rochebin interroge Jérôme Guedj, en direct depuis l'Assemblée nationale, à propos de la « taxe Zucman light » que le Parti socialiste tente d'introduire dans le budget. « iMerci infiniment Jérôme Guedj, vous avez fait le teasing vous-même de l'émission qui suit ! Regardez le débat, vous pouvez vous installer à la buvette, regardez le débat entre François Lenglet et Gabriel Zucman/i », insiste l'animateur. Mais l'apéritif n'était pas terminé… et Darius Rochebin se tourne vers son invité : l'inénarrable Jérôme Fourquet, a href="https://www.acrimed.org/Jerome-Fourquet-faux-sociologue-mais-vrai"encore et toujours lui/a. « iVous êtes le radiographiste, on peut dire ça comme ça, le radiologue de la France. Quel titre vous voulez que je vous donne ?/i », demande gentiment Darius Rochebin. « Sondeur », répond humblement Jérôme Fourquet. « iDepuis tant d'années/i, reprend l'imperturbable animateur, qui n'a pas de mots assez forts pour proclamer son admiration, ivous analysez vraiment, vous sondez les reins et les cœurs, mais profondément la culture française, la société française/i ». Fourquet est ici pour cadrer et encadrer le débat avec les platitudes conservatrices habituelles. Et comme à son habitude, il remplit à merveille sa fonction : l'État est « iimpécunieux/i », les « iprélèvements obligatoires/i » et la « isphère publique/i » sont déjà « iénormes/i », et Fourquet regrette que certains, à gauche notamment, « is'exonèrent de pistes de réformes sur l'ampleur de la dépense publique/i ». Darius Rochebin voit lui une « iparticularité française dans cette obsession des riches/i ». Après 10 minutes sur ce ton, qui indiquent très clairement de quel côté penche le plateau, arrive enfin l'économiste star, Gabriel Zucman. Mais d'abord, la pub…/p
/br
h3 class='article_intertitres'Rochebin contre Zucman : « iVous êtes un combattant de gauche/i »/h3
p/br« iVous nous avez déjà rejoint Gabriel Zucman, bonsoir !/i » Dès son introduction, Darius Rochebin change de ton :/p
blockquote class="spip"
pstrong- Darius Rochebin :/strong Un mot sur les passions que vous suscitez. Moi, je suis frappé, je vois sur les réseaux sociaux […] à quel point votre nom même suscite des passionnés [sic], soit laudateurs soit au contraire qui vous détestent, les deux !/p
pstrong- Gabriel Zucman :/strong Moi je suis chercheur, professeur, j'aime comprendre, expliquer…/p
pstrong- Darius Rochebin :/strong Oh, attendez… Vous êtes devenu acteur politique !/p
pstrong- Gabriel Zucman :/strong … j'espère utiliser cette occasion pour expliquer le problème d'injustice fiscale, et les solutions qu'on peut y apporter./p
pstrong- Darius Rochebin :/strong Vous êtes chercheur et vous êtes militant, je crois que vous ne vous en cachez pas ! Vous avez conseillé Sanders, aux États-Unis, qui est très marqué à gauche. Vous êtes un combattant de gauche, on peut dire ça ?/p
/blockquote
pGabriel Zucman n'est en plateau que depuis 30 secondes, mais il est déjà repeint : « iacteur politique/i », « imilitant/i », « icombattant de gauche/i ». Les téléspectateurs savent à quoi s'en tenir, et la présentation tranche avec celle du « iradiographiste/i » qui « isonde les reins et les cœurs/i » du pays… Audacieux, Darius Rochebin, qui n'a pas de qualification particulière en économie, va oser quelque chose de fort : expliquer à un docteur en économie qu'il commet une confusion basique en économie ! S'abritant derrière un automatisme journalistique bien pratique – « ibeaucoup vous accusent de/i » –, le présentateur se transforme alors en professeur, le temps d'une tirade dont il ne semble pas mesurer le ridicule :/p
blockquote class="spip"
pstrongDarius Rochebin :/strong Beaucoup vous accusent de faire une confusion entre ce qui est, pour être très précis, du cash, de l'argent cash dont les riches pourraient disposer, et ce qui est des actions, ce qui est une entreprise réelle. L'exemple de LVMH a été si souvent cité… La fortune de LVMH c'est de l'économie réelle, c'est pas comme dans Picsou une piscine avec des lingots d'or, c'est des emplois, des boutiques, des stocks, etc., etc., etc./p
/blockquote
pComment est-il possible qu'un journaliste pense pouvoir apprendre cela à un docteur en économie ? Rochebin n'est pas le premier à avancer cet « argument », d'une confusion élémentaire entre « cash » et « actions », qui mettrait à bas l'idée de Zucman, cet incompétent. C'est en réalité l'élément de langage de toute l'éditocratie a href="https://www.acrimed.org/Les-medias-et-la-taxe-Zucman-hysteriser-pour"contre la taxe Zucman/a. « iNon mais là il y a une mécompréhension/i, essaye néanmoins Zucman. iIl s'agit de s'assurer que les personnes physiques, les ultra-riches, les personnes qui ont plus de 100 millions d'euros de patrimoine, payent un minimum d'impôt sur leur fortune personnelle./i »/p
pPeut-être n'est-il pas inutile, à ce stade, de rappeler que la chaine LCI appartient au groupe TF1, dont l'actionnaire principal est le groupe Bouygues, de a href="https://www.challenges.fr/classements/fortune/martin-et-olivier-bouygues-et-leur-famille_26568" class="spip_out" rel="external"la famille du même nom/a, certainement concernée par cette taxe ! Juge et partie, le présentateur insiste : « iMais c'est l'entreprise au total que vous allez taxer […]. Ces actions, c'est la réalité de l'entreprise, c'est ça que vous oubli… que vos détracteurs disent/i », rattrape sur le fil Darius Rochebin. « iVous faites erreur/i », tente à nouveau d'expliquer l'économiste. En vain : « iDonc ils vont vendre des actions, chaque année ils vont vendre 2% de leurs actions, aux Chinois, aux Saoudiens, etc./i », reprend l'intervieweur. « iOh non, il y a une mécompréhension à nouveau/i », tente une nouvelle fois Zucman, qui cache de plus en plus mal sa consternation./p
pDarius Rochebin semble ne pas entendre la réponse de son invité et s'en tient aux questions qu'il avait préparées : « iAu fond, est-ce que vous n'êtes pas dans une logique de nationalisation partielle ?/i » « iIl ne s'agit pas du tout d'une nationalisation/i », est encore obligé de déminer l'économiste, « iune nationalisation c'est quand l'État prend 100% des actions, là on parle de 2%, dans un contexte où les fortunes en question ont augmenté de 10% par an en moyenne./i » La démonstration ne perturbe pas notre intervieweur, persuadé qu'il peut « débunker » le scientifique depuis son poste de présentateur télé : il déploie alors un dernier artifice, avant de passer la main à François Lenglet. En l'occurrence, diffuser une « phrase choc » tenue la veille par Michel-Édouard Leclerc sur la même antenne :/p
blockquote class="spip"
pstrongMichel-Édouard Leclerc :/strong Taxer des riches, pour prendre leur fric et le mettre dans un seau où il y a des trous, ça résout pas les problèmes des Français… Ça fait peut-être bander la gauche et ça fait peut-être éructer la droite et le patronat, mais ça ne résout rien !/p
/blockquote
pUne déclaration « choc » qui ne comporte aucun argument, mais qui méritait bien une rediffusion ! Zucman en profite pour ignorer ce beau moment de télé et poursuit sa démonstration. Mais voilà que François Lenglet arrive…/p
/br
div class='spip_document_16261 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH281/zucman2-7d403.png?1761839378' width='500' height='281' alt='' /
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/div/br
h3 class='article_intertitres'Lenglet contre Zucman : « iVous allez tuer les boîtes/i »/h3
p/brComme Darius Rochebin et toute la presse bourgeoise avant lui, François Lenglet consacre sa première intervention à faire passer Gabriel Zucman pour un amateur. Avec une petite subtilité : cette fois-ci, Gabriel Zucman n'est pas un idiot qui confond « cash » et « actions », mais un universitaire déconnecté du monde de l'entreprise : « iVous appréhendez les choses en éminent universitaire que vous êtes/i, concède François Lenglet, imais la réalité, c'est que les contribuables [visés par cette taxe] n'attendent pas sous le marteau fiscal que vous avez préparé pour eux/i ». Fier de sa ipunchline/i, Lenglet déroule ensuite les conséquences qu'aurait selon lui une taxe Zucman, tels des automatismes : évitement fiscal des ultra-riches, effets néfastes sur l'emploi et la croissance. « iLa réponse là-dessus/i », le presse Darius Rochebin : « iEst-ce que oui ou non ça signifiera moins d'investissements, moins d'embauches, moins de ruissellement […] ?/i » « iC'est évident !/i », ponctue Lenglet. « iNon, absolument pas/i », répond calmement Zucman qui rappelle – pour la troisième fois – que son idée est un impôt sur les fortunes personnelles des personnes physiques, non « ipas sur les entreprises/i ». Pour la première fois, le présentateur admet sa confusion : « iPardonnez-moi mais les actions, c'est bien du capital ? Je ne vois pas la distinction […], les actions, c'est le capital !/i » Le dispositif, très lourdement défavorable à l'invité interrompu toutes les 20 secondes, va alors se fracasser de manière spectaculaire sur la réponse de l'économiste :/p
blockquote class="spip"
pstrongGabriel Zucman :/strong J'insiste sur le fait que ce n'est pas un impôt sur les entreprises, les entreprises ne sont pas concernées, on ne vient pas taxer leur capital […]. Le rendement moyen, pour les personnes qui ont plus de 100 millions d'euros de patrimoine, c'est 6%. C'est nettement supérieur à 2%, donc les personnes ont largement de quoi payer l'impôt avec leurs liquidités. Quand les milliardaires prétendent ne pas avoir de liquidités, c'est qu'ils organisent leur propre illiquidité, précisément pour échapper à l'impôt sur le revenu. D'accord ? C'est très important de comprendre ça./p
/blockquote
pDarius Rochebin et François Lenglet ne l'avaient semble-t-il pas compris : la réponse installe, pour la première fois, un silence de mort dans le studio. Vexé, et sans doute conscient qu'il devenait difficile de réfuter l'économiste avec des arguments valables, François Lenglet passe à l'invective : « iVous allez tuer les boîtes./i » Peu en verve, le journaliste essuie alors une série de revers de plus en plus humiliants : quand il mobilise l'exemple de Mistral AI, « il'espoir de l'intelligence artificielle française/i », pour affirmer que l'État ne sait pas gérer contrairement au privé, Zucman lui rappelle que « il'État est déjà au capital de Mistral/i » et que sa taxe ne changerait rien à cela – coup dur ; quand Lenglet pense que la proposition consiste à transférer chaque année 2% de l'entreprise à l'État, Zucman est (encore) obligé de reprendre le cancre en lui expliquant (à nouveau) que sa taxe vise les fortunes personnelles – il y a « iencore une mécompréhension/i » ; quand, enfin, le chroniqueur économique explique dans un très long raisonnement que « ivous ne pouvez pas taper les propriétaires des entreprises, sans taper indirectement les entreprises/i », Gabriel Zucman se contente, faute de temps, de lui dire que « itout cela est erroné/i ». C'est une constante tout au long de l'échange : l'économiste est obligé de commencer chacune de ses réponses en détricotant la question qui lui est adressée et les fausses évidences qui y sont repliées. « iVous faites erreur/i », « iNon, absolument pas/i », « iNon, non, pas du tout/i », « iIl y a mécompréhension/i », « iIl y a encore mécompréhension/i », « iTout cela est erroné/i », « iSur ce point également, vous faites erreur/i ». Un véritable parcours du combattant./p
pSentant son collègue en difficulté, Darius Rochebin tourne une nouvelle page de l'entretien et montre des images de Javier Milei, le président libertarien conforté par des élections intermédiaires en Argentine, érigé pour l'occasion en modèle par LCI. Le bandeau est tout en sobriété : « J. Milei : le "tronçonneur" qu'il faut à la France ? »/p
/br
div class='spip_document_16263 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" a href='https://www.acrimed.org/IMG/png/zucman3.png' class="spip_doc_lien mediabox" type="image/png" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH280/zucman3-0ec3d.png?1761839378' width='500' height='280' alt='' //a
/figure
/div
p/brDarius Rochebin pose la question de la comparaison internationale… et avoue une nouvelle fois son incompréhension (de manière involontaire) :/p
blockquote class="spip"
pstrong- Darius Rochebin :/strong Dans quel pays une taxe comparable à celle que vous ambitionnez est à l'œuvre et fonctionne ?/p
pstrong- François Lenglet :/strong Aucun !/p
pstrong- Gabriel Zucman :/strong C'est normal, elle est très jeune cette taxe, tous ces travaux de recherches, [ce sont] des savoirs nouveaux, qui ont été créés il y a 3 ou 4 ans ! […]/p
pstrong- Darius Rochebin :/strong Gabriel Zucman, je ne veux pas diminuer vos mérites, mais l'idée de taxer fortement les super-riches, c'est pas vous qui l'avez inventée…/p
pstrong- Gabriel Zucman :/strong Mais c'est justement pas la proposition que je fais !/p
pstrong- Darius Rochebin :/strong Un peu quand même…/p
pstrong- Gabriel Zucman :/strong Mais non ! Puisque c'est un impôt plancher : si vous payez déjà, en impôt sur le revenu, 2% de votre fortune, vous n'aurez rien de plus à payer ! Ce que je propose, c'est simplement que si vous payez moins de 2%, vous auriez à payer la différence pour arriver à 2%. Ceci, uniquement pour les gens qui ont plus de 100 millions de patrimoine…/p
/blockquote
pDe cet échange, François Lenglet tire une conclusion : « iSi ça n'a jamais été fait, est-ce que ce n'est pas tout simplement parce que vous voyez le monde comme un universitaire […], et que la plupart des gens qui sont aux manettes s'arrêtent au seuil de l'absurde, mais vous pas !/i » Rire gras de Rochebin… « iVous voyez une mouche sur la table, vous tapez, vous cassez la table/i », poursuit le chroniqueur, toujours aussi sûr de lui. Darius Rochebin présente alors un graphique, qui entreprend une comparaison internationale sur le thème des fameux « prélèvements obligatoires » :/p
/br
div class='spip_document_16264 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH282/zucman4-ef041.png?1761839379' width='500' height='282' alt='' /
/figure
/div
p/brProblème : le graphique de Rochebin choisit arbitrairement de ne montrer que l'Allemagne, l'Espagne, et une moyenne de l'UE, laissant de côté d'autres pays dont le niveau de « prélèvements obligatoires » est plus proche du cas français. Zucman le leur signale : « iVous avez oublié quelques pays… Il y a la Suède, le Danemark, la Norvège…/i » Lenglet l'interrompt aussitôt, voyant là une occasion de fignoler son œuvre : « iIl y a aussi Cuba, la Corée du Nord./i » Qu'aurait-été une telle émission sans une pertinente comparaison avec la Corée du Nord ?/p
/br
centerstrong***/strong/center
p/brAu total, il est peu probable que le téléspectateur ait pu se faire une idée claire à propos de la taxe Zucman avec cette « émission spéciale », tant la confusion a été entretenue par les questions des intervieweurs, qui ne semblaient certains que d'une chose : leur opposition à cette taxe. Pouvait-on s'attendre à autre chose, sur une chaîne détenue par l'un de ceux que cette taxe vise explicitement ? Probablement pas… Reste qu'à défaut d'information économique, cette émission « guet-apens » nous aura au moins informés sur le niveau de radicalisation de la presse bourgeoise face à tout ce qui se rapproche – de près, ou en l'occurrence, ici, d'assez loin – d'un horizon de justice fiscale./p
p/brstrongJérémie Younes/strong/p/div
mer, 2025-10-29 09:31
img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L150xH84/braquage-105e6.png?1761723089' class='spip_logo spip_logo_right' width='150' height='84' alt="" /
div class='rss_chapo'pLe 18 octobre 2025 dans « Quelle époque ! » (France 2), Léa Salamé recevait ses anciens collègues de France Inter. Épicé sur le papier, le cocktail fut explosif à l'écran : cascade de mondanités et déluge de flatteries. Une fois de plus, la télévision a mis en scène l'entre-soi de journalistes s'adonnant à l'autocongratulation. Un grand moment de dépolitisation médiatique !/p/div
div class='rss_texte'pComme à chaque rentrée médiatique, le gratin de France Inter se donne en spectacle hors les murs. En 2023, c'est a href="https://www.acrimed.org/France-Inter-en-promo-le-show-biz-de-l"« Quotidien » qui prenait en charge le numéro de claquettes/a, en accueillant en grande pompe la « idream team de la première matinale de France/i », Sonia Devillers, Léa Salamé et Nicolas Demorand. En 2024, c'est dans l'antre de la petite bourgeoisie décomplexée, « C à vous » (France 5), qu'eut lieu le grand déballage des stars de l'audiovisuel public, où les « moi je » tutoyèrent les platitudes pour un culte de la personnalité XXL : en l'occurrence, a href="https://www.dailymotion.com/video/x997bkw" class="spip_out" rel="external"un « reportage » dans les couloirs de la Maison de la radio/a, où les têtes d'affiche (et la patronne de France Inter) sont interrogées sur les « isecrets de l'alchimie/i » du « icouple Salamé-Demorand/i », « secrets » ensuite commentés en plateau avec les concernés et deux de leurs collègues, Sonia Devillers et Charline Vanhoenacker. Du lourd. Mais « C à vous » n'avait pas atteint le sommet./p
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h3 class='article_intertitres'« Je me consume d'amour pour moi »/h3
p/brAvec le transfert de Léa Salamé de la grand-messe matinale de France Inter à la grand-messe vespérale de France 2, le théâtre de la saison 2025 était tout trouvé : non pas au 20h, point trop n'en faut, mais dans l'émission « Quelle époque ! », dont Léa Salamé est à la fois l'animatrice et la coproductrice via sa société Marinca Prod – un attelage aussi banal que lucratif dans l'audiovisuel public. Nous sommes donc le 18 octobre sur France 2 et c'est jour de fête : l'hôtesse ne cache pas son plaisir de siéger en plateau au côté de « i[s]on ancienne famille/i », Nicolas Demorand, Sonia Devillers et l'immanquable Benjamin Duhamel. Une longue séquence s'amorce alors, où tout (ou presque) n'est que flagornerie. Meilleur du pire :/p
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centeriframe title="vimeo-player" src="https://player.vimeo.com/video/1131342032?h=8d88644b18" width="640" height="360" frameborder="0" referrerpolicy="strict-origin-when-cross-origin" allow="autoplay; fullscreen; picture-in-picture; clipboard-write; encrypted-media; web-share" allowfullscreen/iframe/center
p/brUne caméra cachée dans le salon des concernés n'aurait sans doute rien produit de différent. Et le montage est loin de trahir l'émission. Les séances d'autocongratulation à qui mieux mieux ont en effet occupé plus de la moitié du temps d'antenne (13 minutes et 30 secondes, précisément), auxquelles il faut ajouter trois épisodes de Benjamin-mania pour un total de 5 minutes et 10 secondes. Ces deux « volets » représentent à eux seuls les trois quarts de la séquence dédiée au trio de radio « le plus écouté de France » : « iJe me consume d'amour pour moi : je provoque la flamme que je porte/i », disait Narcisse de lui-mêmespan class="spip_note_ref" [a href="#nb1" class="spip_note" rel="appendix" title="Ovide, « Légendes thébaines (3) : Narcisse et Écho », Les Métamorphoses, (…)" id="nh1"1/a]/span./p
pLe reste de l'émission ? D'une part, une session de commentaires sur la rentrée politique (3 minutes), laquelle se réduit rapidement au commentaire d'un extrait d'une matinale de France Inter : un niveau d'auto-référencement à donner le tournis ! D'autre part, a href="https://www.acrimed.org/Duhamel-Melenchon-et-le-doigt-d-honneur-de"un passage obligé par le Mélenchon-bashing du moment/a (3 minutes 50 secondes), monté façon « Quotidien » pour le plus grand bonheur d'un plateau hilarespan class="spip_note_ref" [a href="#nb2" class="spip_note" rel="appendix" title="La séquence a été captée par Ulyss sur X (19/10)." id="nh2"2/a]/span. Totalement creuses sur le fond, ces séquences témoignent surtout du a href="https://www.acrimed.org/Presidentielle-2022-Soiree-mondaine-entre"rapport qu'entretiennent ces hauts-gradés des médias à la politique en général/a et au genre de l'interview politique en particulier : un faire-valoir, « iun concours d'éloquence/i », « iun jeu de rhétorique/i », bref, a href="https://www.blast-info.fr/articles/2024/cher-benjamin-duhamel-boxing-day-5-5t0yxUqzRPOWvvuerMdEHw" class="spip_out" rel="external"« iun exercice de style/i »/a. Le sujet, c'est encore (et toujours) eux./p
pLéa Salamé ne s'y trompe pas et annonce d'emblée qu'elle ne reçoit pas les trois journalistes pour qu'ils analysent la crise politique en cours, mais bien plutôt pour qu'« iils nous [disent] strongcomment ils ont vécu/strong cette crise politique/i », ce qui n'est pas tout à fait la même chose. L'émission est faite de ce bois, où tout est prétexte à l'ultra-personnalisation. « iQuand on est un intervieweur politique, on adore interviewer Jean-Luc Mélenchon parce qu'il a une culture formidable, que c'est un animal politique/i », plastronne le petit Duhamel dans le verbiage éculé du journalisme politique, lui dont la pratique du métier consiste pourtant à tout rapetisser, depuis le périmètre de la pensée autorisée jusqu'aux sujets de fond, évincés au profit de la politique politicienne. Ivres d'eux-mêmes, les journalistes vont jusqu'à se vivre comme les petits pères du peuple de France Inter : « iLes auditeurs, vous les trouvez comment en cette rentrée ?/i », demande Léa Salamé à Nicolas Demorand, qui tantôt diagnostique une « idemande d'intelligibilité/i », tantôt sent « iqu'ils veulent cogner/i ». Comment lui donner tort sur ce point ?/p
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h3 class='article_intertitres'Radio des copains, radio des puissants/h3
p/brComme en 2023 chez « Quotidien », puis chez « C à vous » en 2024, les journalistes entretiennent leur notoriété, soignent leur image de marque et cultivent cette « coolitude » que les stars de l'audiovisuel public ont en commun avec la bonne famille arrogante de « Quotidien ». Aussi rient-ils de bon cœur en se regardant eux-mêmes, ici dans des montages-photo coiffés de perruques extravagantes, là dans des archives télé, ou encore à l'antenne de France Inter, dont des extraits sont diffusés dans l'émission. La petite bourgeoisie s'amuse follement. Et elle se suffit à elle-même : « iJe pense que j'ai jamais été aussi heureuse à la radio que cette année/i », déclare Sonia Devillers. Un aveu qui ravira tous les tâcherons (invisibilisés) de cette maison comme ceux qui luttent sans relâche contre le projet de holding, et ira sans nul doute droit au cœur de ses confrères et consœurs de la cellule « Investigation » : pas plus tard qu'en juin dernier, ces derniers a href="https://blogs.mediapart.fr/l-equipe-de-la-cellule-investigation-de-radio-france/blog/260625/lemission-secrets-dinfo-menacee-le-service-public-de-la-ra" class="spip_out" rel="external"dénonçaient « ila remise en cause/i » de l'enquête sur France Inter à l'horizon de la rentrée 2025/a, notamment à travers la diffusion amputée aux trois quarts de « ila seule émission d'investigation du service public de la radio/i », c'est-à-dire « ila preuve empirique que les journalistes […] ne peuvent plus enquêter librement/i », en plus d'un a href="https://www.acrimed.org/Purge-politique-a-France-Inter"(nouvel) affaiblissement du reportage et de l'écologie/a sur la même antennespan class="spip_note_ref" [a href="#nb3" class="spip_note" rel="appendix" title="Lire par exemple « France Inter : l'investigation et d'écologie passent à la (…)" id="nh3"3/a]/span./p
pMais il faut croire que dans l'audiovisuel public comme ailleurs, le malheur des uns fait le confort des autres. L'épanouissement personnel est d'ailleurs une valeur cardinale pour Sonia Devillers, pour ne pas dire le cœur battant d'un projet journalistique, ainsi qu'elle l'explique à Léa Salamé après que cette dernière a salué son « icôté psy/i » :/p
blockquote class="spip"
pstrongSonia Devillers/strong [réagissant à la rediffusion d'un extrait de son interview de François Cluzet] strong :/strong C'est pas génial ? [François Cluzet] a 69 ans. Il a 69 ans. Il a passé son enfance à en crever que sa mère soit partie, qu'elle n'ait jamais donné signe […]. Il a frôlé la mort. Probablement que c'est dû à cette blessure. Et aujourd'hui, à 70 ans, il est capable de dire : cette femme, ma mère, voulait un orgasme, et c'était fondamental pour être heureuse. strongMoi, je trouve que ça vaut vraiment le coup de se lever le matin et de partager ça avec 2 millions de personnes/strong./p
/blockquote
pC'est en tout cas une orientation éditoriale promue de longue date par la direction de France Inter, dont la matinale (encore) élargie porte assurément la marque, laissant la part belle – après la tranche d'« actualité politique » – aux formats magazines prioritairement tournés vers les catégories sociales dont les journalistes sont les plus proches. Si le féminisme bourgeois y est assurément bien loti, il n'empêche pas la matinale 2025 d'être sévèrement critiquée pour sa division genrée du travail, où entre 7h et 9h, une majorité d'hommes se chargent de politique, de géopolitique et d'économie, là où « iles femmes, dans les deux heures qui suivent, font les sujets plus culturels et sociétaux.../i », comme l'expliquait le syndicaliste Lionel Thompson en juilletspan class="spip_note_ref" [a href="#nb4" class="spip_note" rel="appendix" title="Dans l'article de L'Humanité précédemment cité." id="nh4"4/a]/span. « iMoi j'ai besoin de chair, j'ai besoin d'humanité, je pense que les auditeurs aussi en ce moment/i », soutient Sonia Devillers, dans une profession de foi reflétant d'abord et avant tout les intérêts de sa classe : « iEt plus l'actu est dense, plus elle est chahutée, plus elle est tendue, et plus on a besoin de ces moments-là./i » Dommage que dans les faits, ce journalisme d'« incarnation » soit voué à rimer, bien souvent, avec dépolitisation./p
pC'est en tout cas sans grande surprise que nous observons depuis quelques années l'ancienne animatrice de a href="https://www.acrimed.org/Gilets-jaunes-Sonia-Devillers-defend-Radio-France"« L'instant M » (pour Médias)/a devenir l'un des piliers de a href="https://www.acrimed.org/France-Inter-dans-les-coulisses-d-une-douce"ce haut-lieu de « ila rationalisation néolibérale/i »/a qu'incarne la matinale de France Inter. Jusqu'à se féliciter de l'allongement de sa duréespan class="spip_note_ref" [a href="#nb5" class="spip_note" rel="appendix" title="« 7/9 » entre 2010 à 2022, la matinale est devenue un 7h - 9h30 jusqu'en (…)" id="nh5"5/a]/span, et donc, implicitement, de son poids et de son influence politiques croissants au sein de Radio France, avec toutes les transformations structurelles que cela implique :/p
blockquote class="spip"
pstrong- Léa Salamé :/strong Tous les matins, l'événement ! […] C'est de 7h du matin à 11h. Je me demandais si l'année prochaine vous alliez finir à midi ?!/p
pstrong- Sonia Devillers :/strong Oui. Midi, 14h, ça se discute !/p
pstrong- Nicolas Demorand :/strong […] On peut faire un 7h-19h aussi. i[Éclats de rire.]/i 12h d'info ! […]/p
pstrong- Sonia Devillers :/strong C'est très napoléonien !/p
/blockquote
pEn effet…/p
/br
h3 class='article_intertitres'Benjamin-mania : petit éditocrate deviendra grand/h3
p/brFace à une telle décomplexion, il est cocasse d'entendre Benjamin Duhamel encenser les « ibelles valeurs/i » du service public. iA fortiori/i quand la séquence se clôt sur une opération de câlinothérapie à l'endroit de cette ancienne star de BFM-TV. Assurée par Hugo Clément, chroniqueur permanent et lui aussi coproducteur de l'émission – décidément ! –, la séance succède au débrief de l'entretien « itendu/i » avec Jean-Luc Mélenchon :/p
blockquote class="spip"
pstrongHugo Clément :/strong Dans ce couloir après avoir quitté ce studio, [Jean-Luc Mélenchon] vous a fait le reproche d'être un « fils de » [...] parce que vous êtes issu d'une grande famille des médias… L'expression exacte qu'il aurait utilisée, c'est « gosse de riches ». Cette critique, est-ce que vous l'entendez ou est-ce que vous ne pouvez plus la supporter ?/p
/blockquote
pLa pudeur contraignant Hugo Clément à ne pas s'étendre sur la « grande famille » en question, rappelons tout de même que Benjamin Duhamel est le fils de Patrice Duhamel (ancien directeur général de France Télévisions) et de Nathalie Saint-Cricq (actuelle directrice des rédactions nationales de France Télévisions), le neveu d'Alain Duhamel, le cousin de l'ex-ministre Amélie Oudéa-Castéra, le conjoint de la matinalière de France Info (elle aussi ex-BFM-TV) Agathe Lambret, et que la famille Saint-Cricq est actionnaire historique de « La Nouvelle République du Centre-Ouest » (NRCO), un groupe de presse au chiffre d'affaires annuel de 70 millions d'euros./p
pL'occasion de (vraiment) parler de reproduction sociale ? Certainement pas sous la surveillance d'Hugo Clément : « iVous avez le sentiment, aujourd'hui, de devoir prouver plus que les autres ?/i » Ni sous celle de Léa Salamé : « iBenjamin, vous avez raconté "lorsque je suis arrivé dans certains médias comme à LCI, certains ont tout fait pour me mettre des bâtons dans les roues". Est-ce que c'est le cas à France Inter ?/i » Une audace rarement égalée : tout occupés à fantasmer sur les entraves qu'aurait connues la carrière du jeune Duhamel, nos deux coproducteurs ignorent les critiques légitimes (et bien réelles) que lui adressèrent des salariés du service publicspan class="spip_note_ref" [a href="#nb6" class="spip_note" rel="appendix" title="Voir par exemple ce communiqué du SNJ (4/06)." id="nh6"6/a]/span.../p
pRéagissant à ces impitoyables prises à partie, Benjamin Duhamel conçoit que « icertains Français soient exaspérés de voir des Duhamel partout/i ». C'est déjà ça ! Il poursuit en évoquant « il'ascenseur social qui ne fonctionne pas bien/i », dit entendre les « icrispations/i » que le népotisme dont il récolte les fruits peut générer, avant de conclure de but en blanc : « iVoilà, j'essaye de faire mon boulot. Et je veux juste qu'on me juge sur ce que je fais./i » L'occasion de rappeler qu'une consécration médiatique comme la sienne doit beaucoup moins au « boulot » qu'à la parfaite conformité de ce « boulot » avec les attendus du monde journalistique tel qu'il va, et que les attendus en question s'apprennent et s'intègrent beaucoup mieux quand on s'appelle Duhamel. Une telle endogamie socioprofessionnelle ne pourvoit pas uniquement en capital économique, social et culturel – celui que légitiment, tout du moins, les journalistes de sa trempe : elle transmet ce rapport bourgeois, désinvolte et badin à la politique, mais aussi les codes, les manières d'être et de « faire le journalisme » qui font précisément les « grandes » carrières… et celles des Duhamel-Saint-Cricq en particulier./p
/br
centerstrong***/strong/center
p/brC'est un braquage en règle : à travers de tels programmes, l'audiovisuel public gonfle les capitaux (symboliques et/ou financiers) de celles et ceux qui l'accaparent et le tuent à petit feu. Via sa société de production, Léa Salamé est encore une fois la grande gagnante dans cette affaire, déjà rémunérée « iaux alentours de 25 000 euros par mois/i » pour la présentation du 20h (Capital, 24/07), ce qui la classe (au moins) parmi a href="https://www.inegalites.fr/inegalites-salaires-deciles" class="spip_out" rel="external"le 1 % des salariés les mieux payés/a en France. Un tel état de fait, et l'entre-soi qui va avec, ne cessent de nuire à la défense du service public de l'information – comment justifier ce istatu quo/i ? –, au moment même où l'extrême droite milite telle une machine de guerre en faveur de sa privatisation, dopant ainsi le combat ancestral d'une large partie du champ politique et journalistique – a href="https://www.acrimed.org/Faut-il-privatiser-la-television-publique"iLibération/i inclus, fut un temps !/a – pour le mettre à terre. Las… à force de déprédation structurelle et d'usurpation du sens même du « service public », a href="https://www.acrimed.org/-Televisions-publiques-Sous-le-regne-d-Emmanuel-"le détricotage méthodique de l'audiovisuel public/a se poursuit. Encouragée de l'extérieur par trois décennies de politiques publiques au rabais et d'incessants appels à la privatisation, cette orientation est également tolérée en interne, appliquée par les directions et consentie, bon gré mal gré, par une partie de ses professionnels, au premier rang desquels les journalistes les plus en vue. Ces pressions opérant de manière dialectique pour un résultat très efficace, il est urgent de lutter sur tous les fronts à la fois, sous peine de rejoindre les (pâles) avocats de l'information publique dont le combat se réduit tantôt à a href="https://www.acrimed.org/Affaire-Thomas-Legrand-le-journalisme-politique"livrer gages sur gages à l'extrême droite/a, tantôt à faire bloc pour a href="https://www.monde-diplomatique.fr/2025/10/HALIMI/68853" class="spip_out" rel="external"« idéfendre ceux qui l'ont confisquée/i »/a./p
p/brstrongPauline Perrenot/strong/p/div
hr /
div class='rss_notes'div id="nb1"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh1" class="spip_note" title="Notes 1" rev="appendix"1/a] /spanOvide, « Légendes thébaines (3) : Narcisse et Écho », iLes Métamorphoses/i, III, 463-464./p
/divdiv id="nb2"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh2" class="spip_note" title="Notes 2" rev="appendix"2/a] /spanLa séquence a été a href="https://x.com/achabus/status/1979698435306684605" class="spip_out" rel="external"captée par Ulyss sur X (19/10)/a./p
/divdiv id="nb3"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh3" class="spip_note" title="Notes 3" rev="appendix"3/a] /spanLire par exemple « a href="https://www.humanite.fr/medias/ecologie/moins-dinvestigation-de-reportages-et-decologie-france-inter-opere-un-virage-politique-pour-la-rentree" class="spip_out" rel="external"France Inter : l'investigation et d'écologie passent à la trappe, le virage politique s'accélère avec la grille de rentrée/a », iL'Humanité/i, 4/07./p
/divdiv id="nb4"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh4" class="spip_note" title="Notes 4" rev="appendix"4/a] /spanDans l'article de iL'Humanité/i précédemment cité./p
/divdiv id="nb5"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh5" class="spip_note" title="Notes 5" rev="appendix"5/a] /span« 7/9 » entre 2010 à 2022, la matinale est devenue un 7h - 9h30 jusqu'en 2023, puis un 7/10 jusqu'en juin 2025, et désormais, depuis septembre 2025, un 7/11./p
/divdiv id="nb6"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh6" class="spip_note" title="Notes 6" rev="appendix"6/a] /spanVoir par exemple a href="https://snj-rf.fr/france-inter-ou-bfmtv-il-faut-choisir/" class="spip_out" rel="external"ce communiqué du SNJ (4/06)/a./p
/div/div
mar, 2025-10-28 14:51
img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L150xH75/fog-c03a3.png?1761655885' class='spip_logo spip_logo_right' width='150' height='75' alt="" /
div class='rss_chapo'pRTL, 24 octobre 2025./p/div
div class='rss_texte'p« iIl est une voix libre, un grand journaliste, un romancier qui accompagne notre vie politique depuis des décennies/i » l'introduit pompeusement un Thomas Sotto décidé à jouer à merveille son rôle de faire-valoir pour tournée promo. Franz-Olivier Giesbert a encore commis un livre (iVoyage dans la France d'avant/i, Gallimard, 2025), et bien sûr les micros lui sont ouverts. Nous sommes le 24 octobre, a href="https://www.youtube.com/watch?v=yycrCvjYk8k" class="spip_out" rel="external"sur RTL/a, et nous allons assister à un grand moment de radio :/p
blockquote class="spip"
pstrong- Thomas Sotto :/strong Vous avez vos têtes et vous l'assumez. Robespierre, ça ne passe pas. Sartre et Simone de Beauvoir, non plus. […] Bourdieu, ça va pas non plus…/p
pstrong- FOG :/strong Ah non Bourdieu, mais c'est ridicule !/p
pstrong- Thomas Sotto :/strong Il est pour vous une des plus grandes impostures du XXe siècle./p
pstrong- FOG :/strong Bah oui, vous savez pourquoi ? J'ai pris un livre de Bourdieu, j'en ai 3 ou 4, j'ai ouvert par hasard, j'ai cité : c'est illisible, on ne comprend rien. C'est quand même terrible !/p
pstrong- Thomas Sotto :/strong Vous ne l'aviez jamais ouvert avant ? Vous l'aviez dans votre bibliothèque ?/p
pstrong- FOG :/strong Oui j'avais… mais j'avais remarqué, sauf que là j'ai fait un test, et faites-le, faites la même chose, prenez n'importe quelle page. Pas les bouquins avec Passeron, qui sont un peu… parce qu'il a fait un livre avec quelqu'un d'autre, c'était pas mal… Enfin « c'était pas mal », c'était pas terrible ! Mais, si vous voulez, c'est une pensée incompréhensible. Et tout ça, c'était le grand chic de l'époque. Souvenez-vous ! Tout le monde lisait des livres qu'on ne comprenait pas. […] Il est considéré comme un penseur par des gens évidemment qui lisent pas de livres./p
/blockquote
pQue dire d'une telle médiocrité ? Il y a un an, presque jour pour jour, a href="https://www.acrimed.org/Franz-Olivier-Giesbert-revelateur-de-l-etat-du"nous écrivions/a que la « iposition dominante et légitime/i » occupée par Franz-Olivier Giesbert en disait long sur l'état du paysage médiatique. Il y a donc de quoi désespérer./p
p/brstrongMaxime Friot/strong et strongDenis Perais/strong/p/div
lun, 2025-10-27 11:31
img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L150xH126/alainduhamel_logo-7e892.png?1761557499' class='spip_logo spip_logo_right' width='150' height='126' alt="" /
div class='rss_chapo'p« iLa retraite, j'y songe depuis plusieurs années/i » (RTL, 3 janv. 2022) lâcha bien imprudemment Alain Duhamel un beau jour de janvier 2022. Trois ans plus tard, c'est chose faite. À moins que…/p/div
div class='rss_texte'/br
h3 class='article_intertitres'Vrai faux départ ?/h3
p/brCe 2 septembre 2024, coup de tonnerre dans le landerneau médiatique : après 60 ans de bons et loyaux services, Alain Duhamel confirme à Alain Marschall et Olivier Truchot que sa retraite est imminente. Quelques jours plus tard, c'est au tour de leur consœur Aurélie Casse de revenir sur ce tremblement de terre : « iVous l'avez annoncé ce lundi, il était 17h40/i » (« C l'hebdo », 7 sept. 2024). Qui s'empresse donc d'aller recueillir les confidences de son épouse, le tout accompagné d'un bandeau émouvant : « iLe message de France Duhamel à son mari/i ». S'ensuivent quelques confessions intimes de notre éditorialiste sur sa rencontre avec sa future femme, « icapable de plaisanteries incroyables/i » et pas avare de révélations : « iAvec nos enfants, il y a 3 ans, on a quand même été au Maroc, c'était pas si mal que ça, à Noël./i » Sans oublier l'essentiel : « iIl est perfectionniste, alors il faut que la cravate soit bien repassée, que le pantalon…/i » La présentatrice, visiblement attendrie, ne peut contenir son émotion face aux épanchements de notre couple : « iC'est beau de vous voir amoureux. J'aime bien vous entendre parler d'amour./i »/p
/br
h3 class='article_intertitres'Pape de l'éditocratie/h3
p/brReste qu'Alain Duhamel est d'abord le modèle ultime de l'éditocrate accompli : omniprésent, omniscient… et toujours impeccablement neutre. C'est un fait, le roi du commentariat n'a jamais été avare de son temps (de parole) ni de sa plume (féroce). S'il débute dans la presse écrite au journal iLe Monde/i, il se diversifie rapidement en intervenant sur la première chaîne de l'ORTF puis sur Antenne 2. Se démultipliant de façon étourdissante au fil du temps, on peut le voir, l'entendre ou le lire à peu près partout au gré des saisons, de RTL à France Télévisions, de iLibération/i à iNice Matin/i, de iL'Express/i à iTémoignage Chrétien/i en passant par iLe Point/i, BFM-TV ou encore Europe 1. La presse régionale n'est pas en reste puisqu'il gratifie aussi les lecteurs du iCourrier de l'Ouest/i, des iDernières Nouvelles d'Alsace/i, de iPresse-Océan/i, de iL'Éclair/i, du iMaine libre/i mais aussi de iVendée-Matin/i (liste non exhaustive) de ses analyses fulgurantes./p
pComment expliquer cette omniprésence ? Duhamel s'appuie sur une connaissance fine de tous les sujets ou presque, de l'Iran à la sociologie, de la politique (politicienne de préférence) à la justice et aux otages. Frotté de culture Sciences Po, il ne rechigne pas, en effet, à s'aventurer sur des terrains plus escarpés, ni même à répondre à des questions ineptes./p
/br
div class='spip_document_16252 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" a href='https://www.acrimed.org/IMG/png/alainduhamel.png' class="spip_doc_lien mediabox" type="image/png" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH699/alainduhamel-11c72.png?1761557500' width='500' height='699' alt='' //a
/figure
/div/br
h3 class='article_intertitres'Centriste en tout/h3
p/brLe centrisme acharné d'Alain Duhamel n'est sans doute pas sans rapport avec sa surface médiatique. Apparu sur les écrans aux temps bénis de l'ORTF, épousant la ligne officielle des médias d'État de l'époque et représentant depuis toujours le cercle de la raison, il sait en toutes circonstances être « iradicalement modéré/i » dixit (la moins modérée) Eugénie Bastié. Sa pensée parfaitement équilibrée, d'une neutralité et d'une tiédeur à toute épreuve, est certainement la meilleure explication de sa longévité dans les médias dominants. Rare imprudence, notre observateur avisé commit l'irréparable un jour de 2007, lors d'un débat à Sciences Po avec Marielle de Sarnez (alors leader du Modem, parti centriste), incapable qu'il fut de taire son intention de voter pour François Bayrou – il sera suspendu d'antenne par France 2 et RTL qui ne lui en tiendront pas rigueur puisqu'il reprendra du service seulement quelques mois plus tard./p
/br
h3 class='article_intertitres'Journalisme de révérence/h3
p/brNe brillant certes pas par sa pugnacité ou son impertinence, il est passé à la postérité comme « l'intervieweur de présidents ». Si les chefs d'État successifs l'ont adoubé, c'est vraisemblablement qu'ils ne craignaient pas d'être malmenés par notre éditorialiste vedette – qu'ils décorèrent d'ailleurs de la Légion d'honneur en 2005. Quand on lorgne de telles médailles, mieux vaut en effet être du côté du manche, laisser parler ses intérêts de classe et se mettre ainsi au service des puissants. Voici par exemple ce qu'il disait sur les retraites : « iL'opinion publique a évolué, on a pris conscience du fait que malheureusement, il était inéluctable d'allonger la durée de cotisations./i » (RTL, 6 nov. 2007), martelant sur les mêmes ondes que « ila réforme des retraites, c'est la plus urgente, la plus nécessaire/i » (RTL, 23 mars 2010). Comme le soulignait le regretté Michel Naudy, « ivous ne restez jamais à l'antenne impunément, jamais/i ». Imaginez-donc 60 ans durant... Alain Duhamel peut également compter sur un club de collègues admiratifs qui voient en lui « ile prince des chroniqueurs politiques/i » ; Sonia Devillers n'hésite pas à mordre dès l'entame de l'entretien qu'elle mène le 2 juillet dernier sur France Inter : « iVous qui êtes un grand éditorialiste.../i ». Même ses activités extra-médiatiques sont saluées à l'antenne : « iJe peux le dire, je vous ai vu jouer au tennis et je vous ai trouvé remarquable/i » (Apolline de Malherbe, RMC, 3 sept. 2024). Mais Alain Duhamel sait aussi renvoyer l'ascenseur, notamment à son compère Jean-Pierre Elkabbach : « iJ'admire le virtuose inégalable/i ». On a les admirations qu'on mérite…/p
/br
h3 class='article_intertitres'Dernier tour de piste médiatique ?/h3
p/brAprès 60 ans de bons et loyaux services médiatiques, on aurait pu croire qu'Alain Duhamel allait enfin passer la main, comme il l'avait annoncé et comme sa femme l'avait exigé. Las… alors qu'il était théoriquement retraité depuis 2 mois déjà, il eut droit à une interview en pleine page dans le journal vespéral de référence (iLe Monde/i, 7 sept. 2025). Mieux – ou pire – l'AFP (4 juil. 2025) nous informait au lendemain de sa retraite supposée que « idès la rentrée fin août, l'oncle de Benjamin Duhamel sera à l'antenne de la matinale de RTL tous les lundis à 09h10 pour commenter de grands thèmes d'actualité. Sur BFMTV, où il avait jusqu'à présent une émission quotidienne, il devrait intervenir le vendredi en fin d'après-midi/i ». Et les secousses politiques du moment ne sont pas de nature à nous rassurer puisque l'invité permanent des plateaux affirmait il y a quelques jours, un brin flagorneur, que « is'il se passe des choses importantes et qu'on me demande mon avis, surtout si c'est quelqu'un qui interroge bien… je vous dirai oui/i ». Tout récemment encore, il a élargi sa palette en intervenant dans l'émission « Quotidien » de Yann Barthès et semble donc plus que jamais parti pour rester. Laissons à France Duhamel le mot de la fin : « iAh oui, il a du mal à décrocher, c'est sûr… mais enfin il faudra que ça se termine, hein, vous êtes bien d'accord ?/i »/p
p/brstrongThibault Roques/strong/p/div
mer, 2025-10-22 20:02
div class='rss_chapo'pUne revue de presse si ce n'est exhaustive, du moins indicativespan class="spip_note_ref" [a href="#nb1" class="spip_note" rel="appendix" title="Précisons-le : référencer un article dans cette revue de presse ne signifie (…)" id="nh1"1/a]/span./p/div
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div class='cs_blocs'h4 class='blocs_titre blocs_click'a href='#_foo'strongSemaine du 10 novembre 2025/strong/a/h4div class='blocs_destination'
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ul class="spip" role="list"li strongMediapart, 14/11 —/strong a href="https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/141125/la-nouvelle-patronne-de-cma-media-s-installe-la-tribune-en-recyclant-la-methode-bollore" class="spip_out" rel="external"La nouvelle patronne de CMA Média s'installe à La Tribune en recyclant la méthode Bolloré/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongOrient XXI, 13/11 —/strong a href="https://orientxxi.info/magazine/la-tribune-sur-le-lendemain-de-gaza-que-le-monde-a-refusee,8656" class="spip_out" rel="external"La tribune sur le lendemain de Gaza que « Le Monde » a refusée/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLe Monde, 13/11 —/strong a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2025/11/13/a-france-televisions-l-information-traverse-une-zone-de-turbulence_6653221_3234.html" class="spip_out" rel="external"A France Télévisions, l'information traverse une zone de turbulence/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLibération, 13/11 —/strong a href="https://www.liberation.fr/economie/medias/les-journalistes-bfm-et-rmc-obtiennent-une-charte-deontologique-apres-des-tensions-avec-le-patron-rodolphe-saade-20251113_YM5SKPLYCVF33K7TCJFXFA3L3I/" class="spip_out" rel="external"Les journalistes BFM et RMC obtiennent une charte déontologique après des tensions avec le patron Rodolphe Saadé/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLe Monde, 13/11 —/strong a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2025/11/13/audiences-radio-france-inter-a-la-baisse-rtl-reprend-des-couleurs_6653241_3234.html" class="spip_out" rel="external"Audiences radio : France Inter à la baisse, RTL reprend des couleurs/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongStreetpress, 13/11 —/strong a href="https://www.streetpress.com/sujet/1763031961-recu-commission-anti-lfi-redac-chef-frontieres-jules-laurans-signe-articles-pas-ecrits-booskap-eriktegner" class="spip_out" rel="external"Reçu par la commission « anti-LFI », le rédac chef de « Frontières » accusé d'avoir signé des papiers qu'il n'a pas écrits/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongCDJM, 13/11 —/strong a href="https://cdjm.org/2025/11/13/le-cdjm-publie-sa-nouvelle-recommandation-publicite-ou-information-comment-eviter-la-confusion/" class="spip_out" rel="external"Le CDJM publie sa nouvelle recommandation : « Publicité ou information, comment éviter la confusion ? »/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongPuremédias, 12/11 —/strong a href="https://www.ozap.com/actu/aucune-intention-de-manipulation-editoriale-franceinfo-presente-ses-excuses-aux-telespectateurs-apres-une-grossiere-erreur-diffusee-a-lantenne/652426" class="spip_out" rel="external"« Aucune intention de manipulation éditoriale » : Franceinfo présente ses « excuses » aux téléspectateurs après une « grossière erreur » diffusée à l'antenne/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongSNJ-CGT, 12/11 —/strong a href="https://snjcgt.fr/2025/11/12/une-journaliste-ne-devrait-pas-dire-ca-pour-une-defense-de-la-rigueur-et-de-la-deontologie-de-laudiovisuel-public/" class="spip_out" rel="external"Une journaliste ne devrait pas dire ça : pour une défense de la rigueur et de la déontologie de l'audiovisuel public/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLibération, 12/11 —/strong a href="https://www.liberation.fr/checknews/france-info-corrige-son-visuel-inexact-sur-un-sondage-avec-un-autre-graphique-errone-20251112_FPLUOT7AA5BVLM3NLJISNNCUIY/" class="spip_out" rel="external"« France Info » corrige son visuel inexact sur un sondage… avec un autre graphique erroné/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLe Monde, 12/11 —/strong a href="https://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2025/11/11/radio-france-et-france-television-corrigent-les-propos-d-une-journaliste-sur-le-maire-de-new-york-apres-une-interview-de-manuel-bompard_6653056_3236.html" class="spip_out" rel="external"Radio France et France Télévisions corrigent les propos d'une journaliste sur le maire de New York après une interview de Manuel Bompard/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongL'informé, 12/11 —/strong a href="https://www.linforme.com/medias-culture/article/l-express-et-le-media-reclament-une-frequence-tele-au-conseil-d-etat_3389.html" class="spip_out" rel="external"L'Express et Le Média réclament une fréquence télé au Conseil d'État/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLa Lettre, 12/11 —/strong a href="https://www.lalettre.fr/fr/medias_presse-ecrite/2025/11/12/challenges--le-mot-de-la-discorde-entre-bernard-arnault-et-la-redaction-sur-la-charte-editoriale,110557777-art" class="spip_out" rel="external"Challenges : le mot de la discorde entre Bernard Arnault et la rédaction sur la charte éditoriale/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongOff investigation, 11/11 —/strong a href="https://www.off-investigation.fr/a-l-equipe-les-journalistes-engagent-un-bras-de-fer-avec-la-direction/" class="spip_out" rel="external"A L'Equipe, les journalistes engagent un bras de fer avec la direction/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongVert, 10/11 —/strong a href="https://vert.eco/articles/le-conseil-detat-confirme-la-condamnation-de-cnews-pour-desinformation-climatique-une-premiere-en-france" class="spip_out" rel="external"Le Conseil d'État confirme la condamnation de CNews pour désinformation climatique : une première en France/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongArrêt sur images, 10/11 —/strong a href="https://www.arretsurimages.net/articles/zohran-mamdani-de-cnews-a-radio-france-une-semaine-de-diabolisation" class="spip_out" rel="external"Zohran Mamdani : de Cnews à Radio France, une semaine de diabolisation/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongArrêt sur images, 10/11 —/strong a href="https://www.arretsurimages.net/emissions/arret-sans-images/podcast-quartiers-populaires-20-ans-de-desinformation-2" class="spip_out" rel="external"Quartiers populaires, 20 ans de désinformation/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongBasta, 10/11 —/strong a href="https://portail.basta.media/articles/semaine-noire-pour-la-presse-inde-ballast-et-equal-times-mettent-la-cle-sous-la" class="spip_out" rel="external"Semaine noire pour la presse indé : Ballast et Equal Times mettent la clé sous la porte/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLe Monde, 10/11 —/strong a href="https://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2025/11/10/la-bbc-s-excuse-pour-une-erreur-de-jugement-apres-un-montage-trompeur-d-un-discours-de-donald-trump_6652911_3236.html" class="spip_out" rel="external"La BBC s'excuse pour une « erreur de jugement » après un montage trompeur d'un discours de Donald Trump/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongRSF, 10/11 —/strong a href="https://rsf.org/fr/tch%C3%A9quie-le-programme-de-la-nouvelle-majorit%C3%A9-au-pouvoir-est-dangereux-pour-la-libert%C3%A9-de-la-presse" class="spip_out" rel="external"Tchéquie : le programme de la nouvelle majorité au pouvoir est dangereux pour la liberté de la presse/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongRSF, 10/11 —/strong a href="https://rsf.org/fr/b%C3%A9nin-apr%C3%A8s-l-enl%C3%A8vement-du-journaliste-sossoukp%C3%A8-par-les-autorit%C3%A9s-un-collaborateur-du-m%C3%A9dia" class="spip_out" rel="external"Bénin : après l'enlèvement du journaliste Sossoukpè par les autorités, un collaborateur du média Olofofo enfermé/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongBlog de Mortaza Behboudi, 10/11 —/strong a href="https://blogs.mediapart.fr/mortaza-behboudi/blog/101125/pourquoi-tant-de-medias-ne-protegent-ils-pas-leurs-fixeurs" class="spip_out" rel="external"Pourquoi tant de médias ne protègent-ils pas leurs fixeurs ?/a/li/ul/small
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ul class="spip" role="list"li strongArrêt sur images, 9/11 —/strong a href="https://www.arretsurimages.net/chroniques/plateau-tele/tibo-inshape-premier-youtubeur-reac-adoube-par-la-tele" class="spip_out" rel="external"Tibo Inshape, premier youtubeur réac' adoubé par la télé/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongLibération, 7/11 —/strong a href="https://www.liberation.fr/checknews/france-info-fait-elle-du-cnews-avec-sa-nouvelle-emission-le-pour-et-le-contre-20251107_QXRSH2WLQJCBZLKDH6665T6UZU/" class="spip_out" rel="external"France Info fait-elle du CNews avec sa nouvelle émission « le Pour et le Contre » ?/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongArrêt sur images, 7/11 —/strong a href="https://www.arretsurimages.net/emissions/arret-sur-images/taxe-zucman-la-grande-desinformation" class="spip_out" rel="external"Taxe Zucman : la grande désinformation/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLe Monde, 7/11 —/strong a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2025/11/07/chez-prisma-media-la-reprise-en-main-editoriale-touche-aussi-les-magazines-tele-depuis-la-fin-de-l-ete-c-est-comme-si-le-rachat-par-vivendi-venait-de-devenir-effectif_6652631_3234.html" class="spip_out" rel="external"Chez Prisma Media, la reprise en main éditoriale touche aussi les magazines télé : « Depuis la fin de l'été, c'est comme si le rachat par Vivendi venait de devenir effectif »/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongBlast, 7/11 —/strong a href="https://www.blast-info.fr/articles/2025/sanction-de-cnews-validee-par-le-conseil-detat-quand-on-haine-on-ne-compte-plus-dIZq4K7ZRTe-pKKw4H_1Mw" class="spip_out" rel="external"Sanction de CNews validée par le Conseil d'État : quand on haine, on ne compte plus/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongL'informé, 7/11 —/strong a href="https://www.linforme.com/medias-culture/article/les-ventes-numeriques-ne-progressent-pas-assez-le-parisien-va-encore-creuser-ses-pertes_3358.html" class="spip_out" rel="external"Les ventes numériques ne progressent pas assez, Le Parisien va encore creuser ses pertes/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongBlast, 7/11 —/strong a href="https://www.blast-info.fr/articles/2025/louis-sarkozy-et-bollore-a-l-assaut-de-la-belgique-francophone-I4mAcIXmTWWFQuOURo2Ugg" class="spip_out" rel="external"Louis Sarkozy et Bolloré à l'assaut de la Belgique francophone/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongSNJ-CGT, 7/11 —/strong a href="https://snjcgt.fr/2025/11/07/canard-enchaine-une-information-judiciaire-tres-selective/" class="spip_out" rel="external"« Canard Enchaîné » : une information judiciaire très sélective/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongCDJM, 7/11 —/strong a href="https://cdjm.org/2025/11/07/le-cdjm-publie-six-nouveaux-avis/" class="spip_out" rel="external"Le CDJM publie six nouveaux avis/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongMediapart, 6/11 —/strong a href="https://www.mediapart.fr/journal/politique/061125/en-france-aussi-la-peur-du-grand-mechant-mamdani" class="spip_out" rel="external"En France aussi, la peur du grand méchant Mamdani/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongArrêt sur images, 6/11 —/strong a href="https://www.arretsurimages.net/emissions/je-vous-ai-laisse-parler/voici-femme-actuelle-bollore-jette-le-masque" class="spip_out" rel="external"« Voici », « Femme Actuelle » : Bolloré jette le masque/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongSNJ-CGT, 6/11 —/strong a href="https://snjcgt.fr/2025/11/06/agression-sexuelle-dune-ancienne-journaliste-de-belfort-la-gestion-honteuse-de-la-direction-de-lest-republicain/" class="spip_out" rel="external"Agression sexuelle d'une ancienne journaliste de Belfort : la gestion honteuse de la direction de « l'Est Républicain »/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongL'Humanité, 6/11 —/strong a href="https://www.humanite.fr/medias/correcteurs/des-salaries-de-lequipe-bientot-remplaces-par-lintelligence-artificielle" class="spip_out" rel="external"Des salariés de « L'Équipe » bientôt remplacés par l'intelligence artificielle/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongArrêt sur images, 5/11 —/strong a href="https://www.arretsurimages.net/articles/meloni-mania-la-presse-de-droite-adore-le-modele-italien" class="spip_out" rel="external"« Meloni-mania » : la presse de droite adore le « modèle » italien/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongBlast, 5/11 —/strong a href="https://www.blast-info.fr/articles/2025/un-journaliste-condamne-pour-agression-sexuelle-continue-de-couvrir-les-faits-divers-a-lest-republicain-DXC3qANLQCKP2mmUkiogYg" class="spip_out" rel="external"Un journaliste condamné pour agression sexuelle continue de couvrir les faits divers à L'Est Républicain/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongSleeping Giants, 5/11 —/strong a href="https://blogs.mediapart.fr/sleeping-giants-france/blog/051125/5-raisons-pour-arreter-l-emission-face-philippe-de-villiers-partie-ii" class="spip_out" rel="external"5 raisons pour arrêter l'émission « Face à Philippe de Villiers » - Partie II/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongL'Humanité, 5/11 —/strong a href="https://www.humanite.fr/medias/extreme-droite-europeenne/avec-le-rachat-du-journal-le-plus-lu-en-hongrie-par-ses-proches-viktor-orban-consolide-son-hegemonie" class="spip_out" rel="external"Avec le rachat du journal le plus lu en Hongrie par ses proches, Viktor Orbán consolide son hégémonie/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLibération, 5/11 —/strong a href="https://www.liberation.fr/checknews/le-nouveau-maire-de-new-york-zohran-mamdani-est-il-proche-des-freres-musulmans-20251105_JVS5EX4ENBF7RPMLTPJ3KYJTMA/" class="spip_out" rel="external"Le nouveau maire de New York, Zohran Mamdani, est-il proche des Frères musulmans ?/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongArrêt sur images, 4/11 —/strong a href="https://www.arretsurimages.net/articles/la-chaine-franceinfo-est-elle-en-train-de-devenir-cnews" class="spip_out" rel="external"La chaîne franceinfo est-elle en train de « devenir CNews » ?/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongSleeping Giants, 4/11 —/strong a href="https://blogs.mediapart.fr/sleeping-giants-france/blog/041125/5-raisons-pour-arreter-l-emission-face-philippe-de-villiers-partie-i" class="spip_out" rel="external"5 raisons pour arrêter l'émission « Face à Philippe de Villiers » - Partie I/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongReporterre, 4/11 —/strong a href="https://reporterre.net/Le-milliardaire-anti-ecolo-Bernard-Arnault-rachete-Challenges-et-deux-journaux-scientifiques" class="spip_out" rel="external"Le milliardaire anti-écolo Bernard Arnault achète « Challenges » et deux journaux scientifiques/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLe Monde, 4/11 —/strong a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2025/11/04/20-minutes-le-directeur-general-quitte-le-media-gratuit-apres-plusieurs-mois-de-tensions_6651951_3234.html" class="spip_out" rel="external"« 20 Minutes » : le directeur général quitte le média gratuit après plusieurs mois de tensions/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongOff investigation, 4/11 —/strong a href="https://www.off-investigation.fr/c-a-vous-et-c-dans-lair-mediawan-vise-par-une-plainte-penale/" class="spip_out" rel="external"« C à vous » et « C dans l'air » : Mediawan visé par une plainte pénale/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLe Ch'ni, 4/11 —/strong a href="https://www.lechni.info/20251104/chez-ricciardetti-et-fagaut-la-presse-independante-interdite-dacces/" class="spip_out" rel="external"Chez Ludovic Fagaut, la presse indépendante interdite d'accès/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongVert, 4/11 —/strong a href="https://vert.eco/articles/notre-journaliste-marius-jouanny-arrete-par-larmee-israelienne-pendant-un-reportage-en-palestine-et-detenu-cinq-jours" class="spip_out" rel="external"Notre journaliste Marius Jouanny arrêté par l'armée israélienne pendant un reportage en Palestine et incarcéré avant son expulsion/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongRSF, 4/11 —/strong a href="https://rsf.org/fr/birmanie-sous-couvert-d-ouverture-la-junte-verrouille-un-peu-plus-la-couverture-m%C3%A9diatique-des" class="spip_out" rel="external"Birmanie : sous couvert d'ouverture, la junte verrouille un peu plus la couverture médiatique des élections/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongRSF, 4/11 —/strong a href="https://rsf.org/fr/afghanistan-diffusion-en-ligne-d-aveux-forc%C3%A9s-une-nouvelle-tactique-des-talibans-pour-humilier" class="spip_out" rel="external"Afghanistan : diffusion en ligne d'« aveux » forcés, une nouvelle tactique des talibans pour humilier les journalistes/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongMediapart, 3/11 —/strong a href="https://www.mediapart.fr/journal/politique/031125/actionnaire-du-media-frontieres-le-depute-gerault-verny-recrute-un-collaborateur-chez-frontieres" class="spip_out" rel="external"Actionnaire du média Frontières, le député Gérault Verny recrute un collaborateur… chez Frontières/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongArrêt sur images, 3/11 —/strong a href="https://www.arretsurimages.net/emissions/arret-sans-images/podcast-quartiers-populaires-20-ans-de-desinformation-1" class="spip_out" rel="external"Quartiers populaires, 20 ans de désinformation/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongArrêt sur images, 3/11 —/strong a href="https://www.arretsurimages.net/articles/les-nouveaux-antisemites-lobsession-rima-hassan-3-3" class="spip_out" rel="external"« Les nouveaux antisémites » : l'obsession Rima Hassan (3/3)/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongOff investigation, 3/11 —/strong a href="https://www.off-investigation.fr/lea-salame-accident-industriel-de-audiovisuel-public/" class="spip_out" rel="external"Léa Salamé, l'accident industriel de l'audiovisuel public/a/li/ul/small
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psmall/br/p
ul class="spip" role="list"li strongÀ la télévision sur ma télévision, 2/11 —/strong a href="https://alatvsurmatv.wordpress.com/2025/11/02/de-zyed-et-bouna-a-nahel-bonus-la-province-lislam-carrefour-michel-et-theo/" class="spip_out" rel="external"De Zyed et Bouna à Nahel – Bonus : La Province, l'Islam, Carrefour, Michel et Théo/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongBlast, 2/11 —/strong a href="https://www.youtube.com/watch?v=_OkGQhxXtH0" class="spip_out" rel="external"La « France éternelle » : une France qui sent le pâté/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongBlast, 1/11 —/strong a href="https://www.blast-info.fr/articles/2025/cher-franz-olivier-giesbert-boxing-day-54-eWPd1gmCRnqYPDpOfdunQw" class="spip_out" rel="external"Cher Franz-Olivier Giesbert/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLibération, 1/11 —/strong a href="https://www.liberation.fr/idees-et-debats/opinions/chaines-dinfo-en-continu-tchao-les-faits-par-daniel-schneidermann-20251101_6IHNM2B53JFSTJQAPBHGB635KA/" class="spip_out" rel="external"Chaînes d'info en continu : tchao les faits ! par Daniel Schneidermann/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLe Bondy Blog, 1/11 —/strong a href="https://www.bondyblog.fr/societe/celia-chirol-sil-ny-avait-pas-eu-de-revoltes-aurait-on-parle-de-la-mort-de-zyed-et-bouna/" class="spip_out" rel="external"Célia Chirol : « S'il n'y avait pas eu de révoltes, aurait-on parlé de la mort de Zyed et Bouna ? »/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongTélérama, 31/10 —/strong a href="https://www.telerama.fr/television/complotisme-et-grand-remplacement-quand-un-debat-de-franceinfo-parodie-cnews-7028078.php" class="spip_out" rel="external"Complotisme et grand remplacement : quand un débat de Franceinfo parodie CNews/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongVert, 31/10 —/strong a href="https://vert.eco/articles/les-milliardaires-mettent-le-feu-a-nos-medias-et-a-la-democratie" class="spip_out" rel="external"Les milliardaires mettent le feu à nos médias et à la démocratie/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongArrêt sur images, 31/10 —/strong a href="https://www.arretsurimages.net/chroniques/initiales-ds/techno-fascisme-controverse-immobile-chez-rissouli" class="spip_out" rel="external"Techno-fascisme : controverse immobile chez Rissouli/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongBlast, 31/10 —/strong a href="https://www.blast-info.fr/articles/2025/victoire-judiciaire-pour-blast-contre-le-youtubeur-dextreme-droite-le-raptor-S6FottdASlaPeH6-vuKtlw" class="spip_out" rel="external"Victoire judiciaire pour Blast contre le youtubeur d'extrême droite « Le Raptor »/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLa Lettre, 31/10 —/strong a href="https://www.lalettre.fr/fr/medias_presse-ecrite/2025/10/31/bernard-arnault-donne-son-feu-vert-a-une-recapitalisation-du-parisien,110543295-art" class="spip_out" rel="external"Bernard Arnault donne son feu vert à une recapitalisation du Parisien/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongLibération, 30/10 —/strong a href="https://www.liberation.fr/checknews/publicite-et-journalisme-le-melange-des-genres-dhugo-clement-sur-youtube-20251030_GW2FYGFPGVHHLELRLSEV2NPVN4/" class="spip_out" rel="external"Publicité et journalisme : le mélange des genres d'Hugo Clément sur YouTube/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongL'Humanité, 30/10 —/strong a href="https://www.humanite.fr/medias/audiovisuel-public/pour-stopper-loffensive-brune-redonner-des-couleurs-a-laudiovisuel-public" class="spip_out" rel="external"Pour stopper l'offensive brune, redonner des couleurs à l'audiovisuel public/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongL'Humanité, 30/10 —/strong a href="https://www.humanite.fr/medias/arcom/face-a-la-privatisation-qui-menace-radio-france-et-france-televisions-les-salaries-sinquietent" class="spip_out" rel="external"Face à la privatisation qui menace Radio France et France Télévisions, les salariés s'inquiètent/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongArrêt sur images, 30/10 —/strong a href="https://www.arretsurimages.net/articles/les-nouveaux-antisemites-des-recits-contestes-par-les-protagonistes-2-3" class="spip_out" rel="external"« Les nouveaux antisémites » : des récits contestés par les protagonistes (2/3)/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongSNJ, 30/10 —/strong a href="https://www.snj.fr/la-direction-du-figaro-prefere-les-paillettes-linformation/2508" class="spip_out" rel="external"La direction du Figaro préfère les paillettes à l'information/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongBlog de Léonard Vincent, 30/10 —/strong a href="https://leonardvincent.net/2025/10/30/pourquoi-jabandonne-le-journalisme/" class="spip_out" rel="external"Pourquoi j'abandonne le journalisme/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongLe Monde, 29/10 —/strong a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2025/10/29/l-observatoire-de-l-immigration-et-de-la-demographie-un-think-tank-qui-fabrique-de-la-peur_6650105_3232.html" class="spip_out" rel="external"L'Observatoire de l'immigration et de la démographie, un think tank qui fabrique de la peur/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongArrêt sur images, 29/10 —/strong a href="https://www.arretsurimages.net/articles/les-nouveaux-antisemites-un-livre-aux-conclusions-jamais-demontrees-1-3" class="spip_out" rel="external"« Les nouveaux antisémites » : le livre à la thèse jamais démontrée (1/3)/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLes mots sont importants, 29/10 —/strong a href="https://lmsi.net/Dominique-Strauss-Kahn-et-Nicolas-Sarkozy-des-justiciables-pas-comme-les-autres" class="spip_out" rel="external"Dominique Strauss-Kahn et Nicolas Sarkozy, des « justiciables pas comme les autres »/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongPolitis, 29/10 —/strong a href="https://www.politis.fr/articles/2025/10/entretien-aurelien-mondon-extreme-droite-les-medias-amplifient-des-peurs-irrationnelles/" class="spip_out" rel="external"Extrême droite : « Les médias amplifient des peurs irrationnelles »/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongL'Humanité, 29/10 —/strong a href="https://www.humanite.fr/monde/armee-israelienne/genocide-a-gaza-comment-israel-tue-les-journalistes-palestiniens-a-leur-domicile" class="spip_out" rel="external"Génocide à Gaza : comment Israël cible les journalistes palestiniens à leur domicile/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLe Parisien, 29/10 —/strong a href="https://www.leparisien.fr/culture-loisirs/tv/coupes-budgetaires-a-france-televisions-plus-de-110-comediens-de-fictions-montent-au-creneau-29-10-2025-JKSMTIFSFNCBFMYF3YK5TGIMI4.php" class="spip_out" rel="external"Coupes budgétaires à France Télévisions : plus de 110 comédiens de fictions montent au créneau/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLibération, 29/10 —/strong a href="https://www.liberation.fr/economie/medias/bernard-arnault-se-bollorise-a-fond-a-challenges-une-cession-a-lvmh-sur-fond-de-tensions-autour-de-lindependance-du-titre-20251029_OLMZF3KDP5CMTAR4RIHYOR553A/" class="spip_out" rel="external"« Bernard Arnault se bollorise à fond » : à « Challenges », une cession à LVMH sur fond de tensions autour de l'indépendance du titre/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLa revue des médias, 29/10 —/strong a href="https://larevuedesmedias.ina.fr/inondations-2024-espagne-valence-medias-catastrophes-climatiques" class="spip_out" rel="external"En Espagne, les médias ont revu leur traitement des catastrophes climatiques après les inondations dévastatrices de 2024/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongRSF, 29/10 —/strong a href="https://rsf.org/fr/interpellation-de-deux-journalistes-au-s%C3%A9n%C3%A9gal-suspension-momentan%C3%A9e-de-deux-cha%C3%AEnes-rsf-d%C3%A9plore" class="spip_out" rel="external"Interpellation de deux journalistes au Sénégal, suspension momentanée de deux chaînes : RSF déplore des mesures disproportionnées inquiétantes/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongRSF, 29/10 —/strong a href="https://rsf.org/fr/manifestations-en-serbie-au-moins-89-agressions-de-journalistes-recens%C3%A9es-par-rsf-en-un" class="spip_out" rel="external"Manifestations en Serbie : au moins 89 agressions de journalistes recensées par RSF en un an/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongLa Lettre, 28/10 —/strong a href="https://www.lalettre.fr/fr/medias_presse-ecrite/2025/10/28/challenges--l-emissaire-de-lvmh-nicolas-beytout-durcit-le-ton-pour-la-cession-a-bernard-arnault,110541159-art" class="spip_out" rel="external"Challenges : l'émissaire de LVMH Nicolas Beytout durcit le ton pour la cession à Bernard Arnault/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLe Monde diplomatique, 28/10 —/strong a href="https://www.monde-diplomatique.fr/2025/11/HALIMI/68924" class="spip_out" rel="external"Et mon nombril, tu l'aimes mon nombril ?/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongArrêt sur images, 28/10 —/strong a href="https://www.arretsurimages.net/chroniques/source-police/fait-divers-sur-tiktok-et-instagram-cnews-sans-aucun-filtre" class="spip_out" rel="external"Fait-divers : sur TikTok et Instagram, CNews sans (aucun) filtre/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongBlast, 28/10 —/strong a href="https://www.blast-info.fr/articles/2025/bhl-contre-lantisemitisme-une-vigilance-intermittente-bWoVX4xgQlaaGTRIHHxusw" class="spip_out" rel="external"BHL contre l'antisémitisme : une vigilance intermittente/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongBlog de Sophie Tregan, 28/10 —/strong a href="https://blogs.mediapart.fr/sophie-tregan/blog/281025/france-info-le-nouveau-cnews-du-service-public" class="spip_out" rel="external"France info : le nouveau Cnews du service public/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongArrêt sur images, 27/10 —/strong a href="https://www.arretsurimages.net/emissions/arret-sans-images/podcast-quartiers-populaires-20-ans-de-desinformation" class="spip_out" rel="external"Quartiers populaires, 20 ans de désinformation/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongÀ la télévision sur ma télévision, 27/10 —/strong a href="https://alatvsurmatv.wordpress.com/2025/10/27/de-zyed-et-bouna-a-nahel-conclusion-20-ans-de-20h-orientes/" class="spip_out" rel="external"De Zyed et Bouna à Nahel – Conclusion : 20 ans de 20h orientés/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongL'Humanité, 27/10 —/strong a href="https://www.humanite.fr/medias/meteo-france/quand-un-service-public-tente-de-faire-les-poches-dun-autre-quel-naufrage-faute-de-budget-radio-france-sacrifie-la-meteo-au-detriment-de-linformation-publique" class="spip_out" rel="external"« Quand un service public tente de faire les poches d'un autre : quel naufrage ! » : faute de budget, Radio France sacrifie la météo au détriment de l'information publique/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongMarsactu, 27/10 —/strong a href="https://marsactu.fr/bfm-marseille-invite-une-ex-candidate-dextreme-droite-sans-mentionner-son-etiquette/" class="spip_out" rel="external"BFM Marseille invite une ex-candidate d'extrême droite sans mentionner son étiquette/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongRSF, 27/10 —/strong a href="https://blogs.mediapart.fr/rsf/blog/271025/audiovisuel-ne-renoncons-pas-au-pluralisme" class="spip_out" rel="external"Audiovisuel : ne renonçons pas au pluralisme/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongPuremédias, 27/10 —/strong a href="https://www.ozap.com/actu/presidence-de-cstar-gerald-brice-viret-remplace-franck-appietto-et-impose-une-nouvelle-couverture-a-la-redaction-de-tele-loisirs/652202" class="spip_out" rel="external"Présidence de CStar : Gérald-Brice Viret remplace Franck Appietto et impose une nouvelle couverture à la rédaction de « Télé-Loisirs »/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongRSF, 27/10 —/strong a href="https://rsf.org/fr/trente-journalistes-entrav%C3%A9s-dans-le-monde-pour-leur-travail-sur-des-sujets-environnementaux" class="spip_out" rel="external"Trente journalistes entravés dans le monde pour leur travail sur des sujets environnementaux/a/li/ul/small
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ul class="spip" role="list"li strongArrêt sur images, 26/10 —/strong a href="https://www.arretsurimages.net/chroniques/plateau-tele/sarkozy-incarcere-ses-amis-partout-a-la-tele" class="spip_out" rel="external"Sarkozy incarcéré, ses amis partout à la télé/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongÀ la télévision sur ma télévision, 26/10 —/strong a href="https://alatvsurmatv.wordpress.com/2025/10/26/de-zyed-et-bouna-a-nahel-partie-3-les-bons-les-brutes-et-les-truands/" class="spip_out" rel="external"De Zyed et Bouna à Nahel – Partie 3 : Les bons, les brutes et les truands/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongBlast, 25/10 —/strong a href="https://www.blast-info.fr/articles/2025/cher-patrice-romedenne-boxing-day-53-NfnVsCZ6QCGalQrNDsQxQw" class="spip_out" rel="external"Cher Patrice Romedenne/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLe Monde, 25/10 —/strong a href="https://www.lemonde.fr/societe/article/2025/10/25/serge-nedjar-homme-orchestre-des-medias-bollore_6649501_3224.html" class="spip_out" rel="external"Serge Nedjar, l'homme qui gouverne, et surveille, les médias de Vincent Bolloré/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongÀ la télévision sur ma télévision, 24/10 —/strong a href="https://alatvsurmatv.wordpress.com/2025/10/24/de-zyed-et-bouna-a-nahel-partie-2-victimes-nulle-part/" class="spip_out" rel="external"De Zyed et Bouna à Nahel – Partie 2 : …victimes nulle part/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongTélérama, 24/10 —/strong a href="https://www.telerama.fr/television/sur-les-chaines-info-le-chemin-de-croix-de-nicolas-sarkozy-vers-la-prison-7027984.php" class="spip_out" rel="external"Sur les chaînes info, le chemin de croix de Nicolas Sarkozy vers la prison/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongTélérama, 24/10 —/strong a href="https://www.telerama.fr/television/le-banquet-sur-lcp-avec-anna-cabana-et-gerard-holtz-un-talk-show-culturel-vraiment_cri-7041209.php" class="spip_out" rel="external"« Le banquet », sur LCP avec Anna Cabana et Gérard Holtz : un talk-show culturel, vraiment ?/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLibération, 24/10 —/strong a href="https://www.liberation.fr/societe/police-justice/ariane-lavrilleux-le-parquet-general-fait-appel-du-non-lieu-en-faveur-de-la-journaliste-20251024_HG2VXYU65VGXFEHA63YWTWUN7E/" class="spip_out" rel="external"Ariane Lavrilleux : le parquet général fait appel du non-lieu en faveur de la journaliste/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongFonds pour une presse libre, 23/10 —/strong a href="https://fondspresselibre.org/a-perpignan-le-super-flic-de-louis-aliot-sacharne-contre-les-medias" class="spip_out" rel="external"À Perpignan, le super-flic de Louis Aliot s'acharne contre les médias/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongArrêt sur images, 23/10 —/strong a href="https://www.arretsurimages.net/articles/vol-au-louvre-les-personnels-du-musee-grands-oublies-des-teles" class="spip_out" rel="external"Vol au Louvre : les personnels du musée, grands oubliés des télés/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongOff investigation, 23/10 —/strong a href="https://www.off-investigation.fr/relaxe-des-anciens-dirigeants-du-canard-le-parquet-fait-appel/" class="spip_out" rel="external"Relaxe des anciens dirigeants du Canard : le parquet fait appel/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongBlast, 23/10 —/strong a href="https://www.blast-info.fr/articles/2025/souffrance-au-travail-le-rapport-qui-accable-france-televisions-nUjW-FMSSIGNXTWgYj3DTg" class="spip_out" rel="external"Souffrance au travail : le rapport qui accable France Télévisions/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongRSF, 23/10 —/strong a href="https://rsf.org/fr/la-presse-ind%C3%A9pendante-assi%C3%A9g%C3%A9e-au-salvador-pers%C3%A9cutions-violences-et-%C3%A9tranglement-financier" class="spip_out" rel="external"La presse indépendante assiégée au Salvador : persécutions, violences et étranglement financier contraignent les journalistes à l'exil/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongReporterre, 22/10 —/strong a href="https://reporterre.net/Desinformation-massive-comment-les-medias-prives-aggravent-la-crise-climatique" class="spip_out" rel="external"Désinformation massive : comment les médias privés aggravent la crise climatique/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongVert, 22/10 —/strong a href="https://vert.eco/articles/dans-les-coulisses-de-sud-radio-championne-de-la-desinformation-climatique-ils-ont-pris-ce-creneau-parce-que-ca-attirait-des-auditeurs" class="spip_out" rel="external"Dans les coulisses de Sud Radio, championne de la désinformation climatique : « Ils ont pris ce créneau parce que ça attirait des auditeurs »/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongL'informé, 22/10 —/strong a href="https://www.linforme.com/medias-culture/article/nouvelles-ecoutes-mais-vieilles-ficelles-le-grand-ecart-du-roi-du-podcast-engage_3328.html" class="spip_out" rel="external"Nouvelles Écoutes mais vieilles ficelles : le grand écart du roi du podcast engagé/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongÀ la télévision sur ma télévision, 22/10 —/strong a href="https://alatvsurmatv.wordpress.com/2025/10/22/de-zyed-et-bouna-a-nahel-au-20h-partie-1-violence-partout/" class="spip_out" rel="external"De Zyed et Bouna à Nahel au 20H – Partie 1 : Violence partout…/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongMarsactu, 22/10 —/strong a href="https://marsactu.fr/bref/relaxe-pour-le-media-dextreme-droite-frontieres-qui-a-expose-les-noms-davocats-marseillais/" class="spip_out" rel="external"Relaxe pour le média d'extrême droite Frontières qui a exposé les noms d'avocats marseillais/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLe Média, 22/10 —/strong a href="https://www.lemediatv.fr/emissions/2025/gaza-pas-de-treve-pour-les-editorialistes-de-la-haine-Zby0l1ttRmCt9-8Rgb_tCg" class="spip_out" rel="external"Gaza : pas de trêve pour les éditorialistes de la haine/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongLibération, 21/10 —/strong a href="https://www.liberation.fr/checknews/deux-ans-de-manipulations-sur-gaza-que-valent-les-arguments-avances-par-caroline-fourest-sur-lci-20251021_IVOISE6BEJEBBBSGSTVO2XSLQA/?" class="spip_out" rel="external"« Deux ans de manipulations » sur Gaza : que valent les arguments avancés par Caroline Fourest sur LCI ?/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongMediapart, 21/10 —/strong a href="https://www.mediapart.fr/journal/france/211025/incarceration-de-sarkozy-les-plateaux-tele-se-muent-en-comite-de-soutien" class="spip_out" rel="external"Incarcération de Sarkozy : les plateaux télé se muent en comité de soutien/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongFrance Inter, 21/10 —/strong a href="https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/affaires-sensibles/affaires-sensibles-du-mardi-21-octobre-2025-7289980" class="spip_out" rel="external"Robert Hersant, le collabo devenu empereur de presse/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongRSF, 21/10 —/strong a href="https://rsf.org/fr/isra%C3%ABl-rsf-conteste-devant-la-cour-supr%C3%AAme-le-black-out-m%C3%A9diatique-impos%C3%A9-%C3%A0-gaza" class="spip_out" rel="external"Israël : RSF conteste devant la Cour suprême le black-out médiatique imposé à Gaza/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongLa revue des médias, 21/10 —/strong a href="https://larevuedesmedias.ina.fr/feminisation-commentateur-sportif-journaliste-femme" class="spip_out" rel="external"« Je me disais que ce n'était pas pour moi » : la difficile féminisation du poste de commentateur sportif/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongFracas, 21/10 —/strong a href="https://fracas.media/2025/10/21/finkielkraut-onfray-bruckner-ces-philosophes-qui-arment-la-pensee-anti-ecologie/" class="spip_out" rel="external"Finkielkraut, Onfray, Bruckner… Ces philosophes qui arment la pensée anti-écologie/a/li/ulhr class="spip" /ul class="spip" role="list"li strongBlast, 20/10 —/strong a href="https://www.blast-info.fr/articles/2025/avis-de-tempete-sur-lafp-6cQx5h-nRXGniqGyEEo70w" class="spip_out" rel="external"Avis de tempête sur l'AFP/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongArrêt sur images, 20/10 —/strong a href="https://www.arretsurimages.net/articles/lecornu-gagne-en-popularite-trois-sondages-presentes-de-maniere-biaisee" class="spip_out" rel="external"« Lecornu gagne en popularité » : trois sondages présentés de manière biaisée/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongL'Humanité, 20/10 —/strong a href="https://www.humanite.fr/medias/la-tribune/non-remplacement-baisse-des-piges-les-journalistes-de-la-tribune-et-la-tribune-dimanche-votent-une-motion-de-defiance-contre-leur-direction" class="spip_out" rel="external"Non remplacement, baisse des piges... Les journalistes de la Tribune et la Tribune Dimanche votent une motion de défiance contre leur direction/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongOrient XXI, 20/10 —/strong a href="https://orientxxi.info/lu-vu-entendu/les-complices-du-mal-ou-les-nouveaux-islamophobes,8586" class="spip_out" rel="external"« Les complices du mal », ou les nouveaux islamophobes/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongÀ la télévision sur ma télévision, 20/10 —/strong a href="https://alatvsurmatv.wordpress.com/2025/10/20/de-zyed-et-bouna-a-nahel-20-ans-dimpunite-policiere-et-mediatique/" class="spip_out" rel="external"De Zyed et Bouna À Nahel : 20 ans d'impunité policière et médiatique/a/li/ulul class="spip" role="list"li strongRue89 Bordeaux —/strong a href="https://rue89bordeaux.com/2025/10/municipales-2026-linfo-locale-detournee-comme-outil-dingerence-etrangere-en-nouvelle-aquitaine/" class="spip_out" rel="external"Municipales 2026 : l'info locale détournée comme outil d'ingérence étrangère en Nouvelle-Aquitaine/a/li/ul/small
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div class='rss_notes'div id="nb1"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh1" class="spip_note" title="Notes 1" rev="appendix"1/a] /spanPrécisons-le : référencer un article dans cette revue de presse ne signifie pas forcément que nous y souscrivons sans réserve./p
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mer, 2025-10-22 11:55
img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L150xH83/doigt-b19a1.png?1761127044' class='spip_logo spip_logo_right' width='150' height='83' alt="" /
div class='rss_chapo'pUn interrogatoire habituel sur France Inter… qui vire à la polémique politico-médiatique./p/div
div class='rss_texte'pLundi 13 octobre, Jean-Luc Mélenchon est l'invité de la « Grande Matinale » de France Inter. Le jour est spécial : les derniers Israéliens détenus par le Hamas ont été libérés le matin même, des Palestiniens sont relâchés par Israël et Donald Trump est à la Knesset pour présenter son dit « plan de paix »./p
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h3 class='article_intertitres'Acte 1 : L'interrogatoire/h3
p/brLancé par Nicolas Demorand sur le gouvernement « Lecornu II », Mélenchon préfère commencer par un mot de « ibonheur/i » en solidarité avec les familles des Israéliens et des Palestiniens libérés. Mais Benjamin Duhamel ne semble pas trop croire à son émotion : « i[…] Sauf que quand on a lu et vu un certain nombre de vos réactions […]. Vous avez par exemple écrit sur X, Jean-Luc Mélenchon : "Une fois de plus les Palestiniens devront subir un nouvel ordre politique étranger"/i », le tance l'intervieweur, en citant (à moitié) un tweet posté quatre jours plus tôtspan class="spip_note_ref" [a href="#nb1" class="spip_note" rel="appendix" title="« Après tant de morts et de mois de génocide, un cessez-le-feu est à l'ordre (…)" id="nh1"1/a]/span. « iL'eurodéputée insoumise Rima Hassan a parlé d'un plan de paix à la dimension "néocoloniale" et "néolibérale" !/i », poursuit Duhamel, qui semble découvrir l'existence de ces mots à l'antenne. Avant la banderille finale : « iOn entend ce que vous dites ce matin sur ce bonheur de voir les otages israéliens libérés… Est-ce pour autant difficile de reconnaître le succès diplomatique qui permet cette libération des otages ?/i » Au fur et à mesure de sa très longue question, on voit l'angle de Benjamin Duhamel se resserrer sur ce qui l'intéresse vraiment, qui n'est ni le cessez-le-feu, ni les otages israéliens… et encore moins les Palestiniens : faire avouer à Mélenchon que Trump avait raison ! « iPour les congratulations, on compte sur vous/i », le rabroue son invité./p
pL'échange se tend et Duhamel embraye sur son second angle : « iJean-Luc Mélenchon, une question très précise… [...] C'est une question qu'on a souvent posée aux insoumis, avec parfois des réponses assez floues : est-ce que vous êtes favorable à la démilitarisation du Hamas ?/i » La question est en effet souvent adressée aux responsables de gauche, et fait en cela figure d'exception au regard d'une longue liste de questions qui, a href="https://www.acrimed.org/Dans-les-medias-la-reconnaissance-de-la-Palestine"elles, ne se posent jamais/a. Pas satisfait par la première réponse, Duhamel reprend : « i[...] La dernière fois qu'il y a eu des élections, c'était en 2006, le Hamas a été élu à Gaza./i » « iJe viens de vous répondre/i », répète Jean-Luc Mélenchon. Mais Duhamel n'est toujours pas rassasié : « iDonc le Hamas n'est pas disqualifié ? Puisque vous dites "ça dépendra du résultat des élections"…/i » Avant d'y revenir une quatrième et dernière fois : « iJe constate qu'à la question "Le Hamas doit-il déposer les armes", qui est une question assez simple, vous n'y répondez pas./i »/p
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h3 class='article_intertitres'Acte 2 : Le doigt d'honneur/h3
p/brÀ la fin de l'interrogatoire, qui s'est prolongé autour de la question des retraites et de la censure du gouvernement Lecornu, Jean-Luc Mélenchon se lève en adressant un geste d'humeur de la main aux intervieweurs. Le soir-même, « Quotidien » (TMC) s'empare de la séquence comme d'une bombe. Le magazine de Yann Barthès diffuse des rushs de France Inter, sur lesquels on voit Mélenchon quitter le studio : « iEt voici la fin de l'interview/i, décrit Barthès. iEt la classe LFI, c'est des doigts menaçants [sic] et… un doigt ! Un doigt d'honneur aux journalistes du service public, c'est ça la classe LFI […] !/i » Les images montrées par « Quotidien » ne sont pas très convaincantes, aussi l'animateur insiste-t-il – « iAlors, après vérification, ceci est bien un doigt./i » – en les rediffusant zoomées et ralenties… sans toutefois que les images ne soient plus concluantes./p
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div class='spip_document_16249 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" a href='https://www.acrimed.org/IMG/png/doigt.png' class="spip_doc_lien mediabox" type="image/png" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH278/doigt-758e6.png?1761127044' width='500' height='278' alt='' //a
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p/brPeu importe ! « Quotidien » semble sûr de son coup, et la séquence devient virale avec les tweets (simultanés et identiques) des chroniqueurs Jean-Michel Aphatie et Julien Bellver : « iAvez-vous vu ce doigt d'honneur ?/i »./p
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div class='spip_document_16248 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" a href='https://www.acrimed.org/IMG/png/simultanes.png' class="spip_doc_lien mediabox" type="image/png" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH265/simultanes-783c2.png?1761127044' width='500' height='265' alt='' //a
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pLa machine est lancée. Le lendemain, sur France Inter, Sophia Aram revient sur l'émission et assure, en présence de Benjamin Duhamel, que l'échange s'est « iterminé par un doigt d'honneur/i ». Sur RMC, dans les « Grandes Gueules », on s'interroge : « iLe doigt d'honneur de Jean-Luc Mélenchon au journaliste Benjamin Duhamel : honteux ?/i » Les chroniqueurs s'indignent et comparent cela à une « imenace contre la presse/i »./p
pSur Europe 1, c'est un festival, et Christine Kelly s'émeut : « iQuel exemple pour nos jeunes, quel exemple pour la France !/i » Dans le même studio, Erik Tegnér va plus loin : « iLe service public a créé un monstre et ne le contrôle plus./i » Le soir-même sur BFM-TV, c'est Marc Fauvelle qui affirme que « iJean-Luc Mélenchon est ressorti extrêmement fâché, hier, du studio de la matinale de France Inter [...] en faisant un doigt d'honneur/i ». « Mélenchon fait un doigt d'honneur », titrent deux journaux d'extrême droite, iValeurs Actuelles/i et le iJDD/i. Sud Radio se délecte aussi de la séquence et titre une chronique de Périco Légasse : « Jean-Luc Mélenchon quitte le plateau en faisant un doigt d'honneur » – le titre ne reflète en rien la chronique, qui ne porte pas spécialement sur le doigt d'honneur… mais c'était le mot-clef du jour ! L'info intéresse aussi la presse people : « Jean-Luc Mélenchon exaspéré par Benjamin Duhamel : son doigt d'honneur n'est pas passé inaperçu… » (iGala/i, 14/10). Sur TF1, face à Manuel Bompard, Bruce Toussaint rebondit aussi à sa manière sur l'actualité du jour : « iVous allez me faire un doigt d'honneur en sortant du studio ?/i » Et la polémique ne pouvait échapper à « C à vous » (France 5, 16/10). Un « igeste dont tout le monde parle/i », résume Anne-Élisabeth Lemoine, et qui a beaucoup choqué Bruce Toussaint, invité à commenter une scène « iinadmissible/i ». Bref, la quasi-totalité de la presse a vu la même chose et le conditionnel n'est pas de rigueur. Il n'y a guère que iLe Figaro/i – une fois n'est pas coutume – pour prendre à revers le torrent éditorial, y voyant « iune polémique ridicule sur un supposé doigt d'honneur (qui n'en était pas un)/i » (16/10)./p
pComme souvent, le ridicule va culminer dans l'émission « Quelle Époque ! » de Léa Salamé sur France 2. La présentatrice du 20h a invité ses anciens collègues de France Inter, Nicolas Demorand, Benjamin Duhamel et Sonia Devillers à refaire le film. Ensemble, la petite bande de copains débriefe notamment « l'altercation » avec Jean-Luc Mélenchon. Le chroniqueur (et co-producteur de l'émission) Hugo Clément demande alors aux principaux intéressés, Demorand et Duhamel : « iVous, vous l'avez vu, ce doigt d'honneur ?/i » La séquence tourne en boucle depuis une semaine et c'est la première fois que la question leur est directement posée : « iNon ! Non, non, non/i, répond sans hésitation Benjamin Duhamel, ini Nicolas ni moi ne voyons ce qui se passe en sortant du studio/i ». De son côté, Jean-Luc Mélenchon réagit le 18 octobre, dans son émission « Allo Mélenchon », sur sa propre chaîne Youtube : « iJe vais décevoir tout le monde ce soir, non, ce n'était pas un doigt d'honneur…/i »/p
pRésumons : l'image utilisée par « Quotidien » n'est pas concluante, les témoins de la scène disent n'avoir rien vu, et le principal intéressé dément. Le faisceau d'éléments est bien faible, c'est le moins que l'on puisse dire. Mais saturer l'espace médiatique d'une nouvelle polémique absurde contre la gauche ne se refuse sous aucun prétexte : pas même celui du journalisme./p
p/brstrongJérémie Younes/strong et strongMathias Reymond/strong/p/div
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div class='rss_notes'div id="nb1"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh1" class="spip_note" title="Notes 1" rev="appendix"1/a] /span« iAprès tant de morts et de mois de génocide, un cessez-le-feu est à l'ordre du jour à Gaza. Comment ne pas s'en réjouir. Comment ne pas s'associer à la joie et à l'espérance des familles de tous les otages et prisonniers. Mais une fois de plus, les Palestiniens devront subir un nouvel ordre politique étranger. Et qui peut croire à la parole de Trump ? Depuis notre continent, venons en appui lucide et vigilant au cessez-le-feu en restant attentifs et mobilisés./i » (X, 9/10)./p
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mar, 2025-10-21 19:20
img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L150xH96/otages1-19b1c.png?1761067222' class='spip_logo spip_logo_right' width='150' height='96' alt="" /
div class='rss_chapo'pLe 13 octobre, conformément à l'une des premières étapes du dit « plan Trump », des libérations d'Israéliens et de Palestiniens ont eu lieu. Mais a href="https://www.acrimed.org/Cessez-le-feu-a-Gaza-les-oeilleres-et-les-partis"comme en janvier 2025/a, dans les grands médias, un seul de ces deux événements a réellement existé./p/div
div class='rss_texte'pUne allégorie. C'est ainsi que peut se lire la double page « Événement » de iLibération/i le 13 octobre. Une allégorie du traitement médiatique dominant, marqué par un double standard structurel, constant, n'ayant de cesse de signifier sur tous les tons possibles et toutes les formes imaginables qu'une vie israélienne est supérieure à une vie palestinienne./p
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div class='spip_document_16243 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" a href='https://www.acrimed.org/IMG/png/otages1.png' class="spip_doc_lien mediabox" type="image/png" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH322/otages1-51b5f.png?1761061526' width='500' height='322' alt='' //a
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p/brSur la forme, d'abord : relégués en queue de peloton, les prisonniers palestiniens tiennent dans deux colonnes, presque à la marge. Le titre les dit « ibientôt libres/i », mais la mise en scène les enferme sur un sixième de double page. Et cette cruelle disproportion parle d'elle-même, où, par contraste, les visages des uns disent la non-humanité des autres, les noms et les âges lisibles des uns disent l'inexistence des autres, les biographies des uns disent que les autres ne sont rien. Le journal donne aussi la mesure d'une architecture inversement proportionnelle : « i20 otages/i » d'un côté, « i2 000 prisonniers/i » de l'autre ; un rapport de 1 à 100 dans le réel et un rapport inverse de 1 à 6… dans la couverture journalistique./p
pSur le fond, nulle surprise non plus : iLibération/i dit des prisonniers ce qu'Israël veut bien en dire et reprend par conséquent ses catégories, tout en recopiant quelques éléments présents dans « ila liste publiée par le ministère israélien de la Justice/i », la seule et unique source. Ceci expliquant cela, les Palestiniens ne sont que des chiffres : ici « i250 condamnés à perpétuité/i », là « i1 700 gazaouis emprisonnés depuis le 7 octobre mais considérés comme "non terroristes"/i », « i22 mineurs/i », « i221 originaires de Cisjordanie/i », etc. Les quatre noms présents, assortis des crimes commis, suffisent à estampiller le groupe entier : « suspects », « danger ». La Une du quotidien avait du reste donné le ton. Sur la photo : deux jeunes femmes israéliennes, émues, mobilisées pour les otages, alors que flottent en arrière-plan les drapeaux israélien et américain. Et ce gros titre : « Israël-Gaza. La fin des calvaires ? » Le faux équilibre, dans toute sa splendeur./p
pLa récolte ne sera guère meilleure le lendemain. Si iLibération/i informe ia minima/i sur les conditions d'arrestation et de détention des Palestiniensspan class="spip_note_ref" [a href="#nb1" class="spip_note" rel="appendix" title="Via l'interview de l'ancienne directrice d'Addameer, une ONG palestinienne (…)" id="nh1"1/a]/span, toujours aucun reportage sur leur libération, alors que la Cisjordanie est accessible… et que la double page d'ouverture affiche un reportage XXL à Tel-Aviv. La partie israélienne fait d'ailleurs de nouveau la Une – « L'otage israélien Omri Miran, lors des retrouvailles avec sa femme » – sous le gros titre « Le premier jour d'après »./p
pCe coup de projecteur sur iLibération/i révèle des biais présents partout ailleurs. Le 14 octobre, aucun lecteur de PQR en France n'aura par exemple vu de Palestiniens à la Unespan class="spip_note_ref" [a href="#nb2" class="spip_note" rel="appendix" title="La Une de La Dépêche, découpée en deux photos distinctes, capture une scène (…)" id="nh2"2/a]/span. Idem en couverture d'une large partie de la presse quotidienne nationale./p
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div class='spip_document_16245 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" a href='https://www.acrimed.org/IMG/jpg/liberations.jpg' class="spip_doc_lien mediabox" type="image/jpeg" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH491/liberations-e7a26.jpg?1761067222' width='500' height='491' alt='' //a
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p/brDans le reste de la PQR, les titres en manchette prennent le relais de ce deux poids, deux mesures. « Israël-Gaza : otages libérés, enfin le jour d'après », titre iSud Ouest/i. « Otages libérés : vers une paix durable pour Gaza ? » s'interroge iL'Écho républicain/i, sans visiblement mesurer la dissonance (et l'incongruité) à l'œuvre dans ce titre. Même tonalité, mêmes œillères en Une de iL'Est éclair/i, sur un mode cette fois affirmatif : « Les 20 derniers otages israéliens libérés, l'espoir de paix renaît à Gaza ». Entre-soi au carré à iLa Charente Libre/i : « Israël et Trump célèbrent le retour des otages après 738 jours de captivité ». Et cette mention spéciale pour iLa Provence/i qui, sous le titre « Vingt otages vivants de retour en Israël », se fend de cet entrefilet : « iLes vingt derniers otages vivants retenus par le Hamas ont été remis hier à Israël. Reportage avec la communauté juive de Marseille./i » Un épisode anecdotique quoique significatif du lien effectué par les chefferies éditoriales entre Israéliens et « icommunauté juive/i » en France. Le point commun à tous ces titres ? Les Palestiniens n'y figurent pas. Ils ne sont pas un « événement ». Ils ne font pas partie de l'équation. Et ce ne sont pas les pages intérieures qui comblent le vide, où l'on comprend aisément, à la seule lecture des titres, où se porte l'attention journalistique. Comme dans le cas de iLibération/i, les Palestiniens font au mieux l'objet de quelques lignes. Au pire, ce qui est plus souvent le cas, ils ne sont nulle part./p
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centerstrong***/strong/center
p/brDans les médias, qu'il s'agisse de la presse écrite ou de l'audiovisuelspan class="spip_note_ref" [a href="#nb3" class="spip_note" rel="appendix" title="Voir par exemple la critique de LCI par Arrêt sur images (17/10)." id="nh3"3/a]/span, le traitement de l'information invisibilise les Palestiniens tout en mettant en avant des gros titres liant la libération des otages israéliens à « la paix », comme si cette dernière se résumait au sort des Israéliens. Ce raccourci s'inscrit dans la continuité du discours dominant depuis le « plan Trump », qui entretient une confusion entre « cessez-le-feu » et « paix », un concept que l'écrivain palestinien Jadd Hilal qualifie de « iperformatif/i », occultant moult enjeux relatifs à l'autodétermination des Palestiniens, et notamment « il'idée de justice/i »span class="spip_note_ref" [a href="#nb4" class="spip_note" rel="appendix" title="« Plan Trump pour Gaza : "Au mieux de la pensée magique, au pire une (…)" id="nh4"4/a]/span./p
p/brstrongPauline Perrenot/strong/p/div
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div class='rss_notes'div id="nb1"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh1" class="spip_note" title="Notes 1" rev="appendix"1/a] /spanVia l'interview de l'ancienne directrice d'Addameer, une ONG palestinienne de soutien aux prisonniers et de défense des droits humains./p
/divdiv id="nb2"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh2" class="spip_note" title="Notes 2" rev="appendix"2/a] /spanLa Une de iLa Dépêche/i, découpée en deux photos distinctes, capture une scène qui semble se dérouler à Ramallah, en Cisjordanie. Mais contrairement à la photo du dessus, où l'on distingue clairement un otage israélien, aucun Palestinien libéré n'est identifié en tant que tel./p
/divdiv id="nb3"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh3" class="spip_note" title="Notes 3" rev="appendix"3/a] /spanVoir par exemple a href="https://www.arretsurimages.net/articles/comment-les-teles-ont-parle-du-plan-de-trump-pour-gaza" class="spip_out" rel="external"la critique de LCI par Arrêt sur images/a (17/10)./p
/divdiv id="nb4"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh4" class="spip_note" title="Notes 4" rev="appendix"4/a] /span« Plan Trump pour Gaza : "Au mieux de la pensée magique, au pire une planification cynique" », a href="https://www.mediapart.fr/journal/international/091025/plan-trump-pour-gaza-au-mieux-de-la-pensee-magique-au-pire-une-planification-cynique" class="spip_out" rel="external"Mediapart, 9/10/a./p
/div/div
lun, 2025-10-20 17:07
img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L150xH80/fourquet-90b67.png?1760972845' class='spip_logo spip_logo_right' width='150' height='80' alt="" /
div class='rss_chapo'pQue la question porte sur les débats budgétaires, l'insécurité, les goûts culinaires des Français ou la musique country, les médias aiment s'entourer de sondeurs qui leur permettent, prétendent-ils, d'objectiver « ce que pensent les Français ». Portrait de l'un des plus éminents d'entre eux, le sondologue de l'Ifop Jérôme Fourquet./p/div
div class='rss_texte'p« iQui est vraiment Jérôme Fourquet ?/i » C'est la question que se pose iLe Figaro/i, en 2023. Ni sociologue ni économiste, pas tout à fait géographe et encore moins urbaniste, Jérôme Fourquet est ce qu'on appelle dans le jargon médiatique un « toutologue ». Et pas n'importe lequel ! Polyvalent, Jérôme Fourquet peut s'exprimer le matin sur l'implantation d'un McDonald's dans les Yvelinesspan class="spip_note_ref" [a href="#nb1" class="spip_note" rel="appendix" title="« "Une alternative aux kebabs" : comment McDo s'est emparé d'un petit (…)" id="nh1"1/a]/span et le soir sur les « intentions de vote des Français ». Depuis sa position de directeur du département « Opinion et stratégie d'entreprises » de l'institut de sondage et de marketing Ifop, il est devenu au fil des années un client incontournable des médias… et une référence intellectuelle pour toutes les droites./p
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h3 class='article_intertitres'Omniprésence médiatique/h3
p/brSe lancer dans un comptage des passages télé ou radio de Jérôme Fourquet est un travail fastidieux : rien que sur la dernière année, entre le 1er octobre 2024 et le 1er octobre 2025, les archives de l'INA recensent pas moins de 85 apparitions dans l'audiovisuel français. Presque deux fois par semaine, souvent sur le service public : France Inter, France Info, France Culture, RTL, CNews, France 5, BFM-TV, France 2, Paris Première, Europe 1, LCI, Radio Classique… Fourquet est absolument partout pour commenter, en vrac, faits divers, questions politiques et pratiques de consommation : la taxe Zucman, le meurtre de Philippine, le narcotrafic, la mort des boulangeries artisanales, l'inéligibilité de Marine Le Pen, le site Vinted, la « guerre des clochers », etc. « iUn jour d'élection, alors que je lui demande ce qu'il va raconter le soir à la télé, il me répond joyeusement : "Comme dans 'Top Chef', je vais faire avec les légumes du marché."/i », raconte au iNouvel Obs/i (5/10/23) son co-auteur Jean-Laurent Cassely. Même succès dans la presse écrite, où son nom est mentionné dans un nombre incalculable d'articles, sur des thèmes aussi variés que Charlie Kirk ou les paroles des chansons d'Orelsan. Les « titres » sous lesquels le sondeur est présenté par les médias varient en fonction des publications : parfois « iessayiste/i », parfois « ipolitologue/i », parfois même « igéographe de territoires redessinés […], économiste d'une France dont le moteur est passé de la production à la consommation/i » (iLes Échos/i, 5/12/24). Bien souvent, Jerôme Fourquet, qui est aussi « iethnologue/i » selon certains (iLe Figaro/i, 12/10/21), est invité à présenter les résultats de sa dernière « étude d'opinion », dont les sujets varient puisqu'ils dépendent des désirs du client – des entreprises, comme Engie, Enedis ou Fiducial ; des médias, de CNews à iL'Humanité/i ; ou des institutions, comme la fondation Jean-Jaurès, la CGT ou le Parti socialiste./p
pJérôme Fourquet est aussi l'auteur de plusieurs « ibest-sellers/i ». « Prix du livre politique » en 2019, « prix du livre d'économie » en 2021, ses « tournées promo » ont peu d'équivalent. Pour son dernier livre, iLa France d'après/i (Seuil, 2023), le sondologue a fait presque toutes les matinales (France Inter, France Culture, Europe 1, RTL, Sud Radio, BFM-TV, France 2, CNews…) et la plupart des magazines de grande audience (« Quotidien », « C à vous »…), a eu le droit à des recensions dithyrambiques et à des entretiens en majesté dans la presse écrite. Le lancement de Yann Barthès dans l'émission « Quotidien » (12/10/23) dit tout de la place qu'il occupe dans le paysage médiatique : « iJérôme Fourquet continue d'autopsier notre pays en mille morceaux… le grand spécialiste du sondage d'opinion nous connaît mieux que personne, voici Jérôme Fourquet !/i » En dehors de son activité de sondeur ou d'essayiste, Jérôme Fourquet est aussi régulièrement invité comme simple « témoin de l'actualité », que l'on discute des élections européennes, de la réforme des retraites, des Gilets jaunes, ou bien de Gaza. Il participe en outre plus directement à certaines productions médiatiques, comme dans la a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/france-culture-va-plus-loin-l-invite-e-des-matins/les-mots-de-la-republique-archipel-une-france-de-plus-en-plus-fragmentee-8067225" class="spip_out" rel="external"série d'été « Les mots de la République »/a sur France Culture – qui lui valut trois passages dans « Les Matins » en juin 2024 ! –, où il est invité à expliciter les « concepts » qu'il forge dans ses ouvrages. Jusqu'à des mises en scène au carré : « "La série montre le réel à ceux qui ne veulent pas le voir" : on a vu "La Fièvre" avec Jérôme Fourquet », titre par exemple iMarianne/i (9/04/24). Le but ? Commenter avec Jérôme Fourquet cette série de Canal +, que beaucoup de commentateurs avaient auparavant décrite comme une adaptation des « thèses »… de Jérôme Fourquet. « Merde, on tourne en rond ! », comme dirait l'autre./p
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h3 class='article_intertitres'Sujets variés, mais opinion constante/h3
p/brQue dit au juste cet expert de la France et des Français pour constituer un recours si systématique pour les médias ? Si les sujets qu'il aborde varient du tout au tout, une chose est constante : les opinions déguisées en analyses de Jérôme Fourquet coïncident presque toujours avec le prêt-à-penser médiatique, en particulier celui de la presse réactionnaire. Sur CNews (5/05/24), Fourquet s'appuie par exemple sur une « a href="https://www.la-croix.com/Religion/Presidentielle-2022-pourquoi-electeurs-musulmans-plebiscite-Jean-Luc-Melenchon-2022-04-11-1201209823" class="spip_out" rel="external"étude exclusive/a » commandée par le journal iLa Croix/i pour affirmer que « ile développement de l'islamogauchisme a des motivations électorales en France/i ». Dans l'émission « C à vous » (France 5, 2/02), il s'appuie sur des études de l'Ifop « ide 2006, 2011, 2017 et 2021/i » pour dire que « i7 Français sur 10 souhaitent que la majorité pénale soit abaissée à 16 ans, pour que ce soit plus facile d'emprisonner des mineurs de 16 ou 17 ans/i ». Dans iLes Échos/i (19/12/22), il affirme que, compte tenu de la démographie, il y a « isans doute nécessité à terme de réformer les retraites/i ». Au 20h de Léa Salamé (France 2, 8/09), invité à commenter la chute de François Bayrou, Fourquet estime que « ideux sentiments dominent/i » chez les-Français, « il'inquiétude, chez les chefs d'entreprise, mais également chez les Français moyens/i » et puis « ila colère/i » vis-à-vis de « il'instabilité politique/i ». Sur France Culture, il constate, bien désolé, que la majorité des Français a « iune réaction viscérale/i » quand on parle d'augmenter les impôts, même ceux des plus riches. Il explique aussi en long et en large que la société « ise fracture/i » sur des thèmes « iethnoculturels/i ». Dans son essai iL'Archipel français/i (Seuil, 2019) par exemple, Fourquet calcule, à partir des prénoms donnés aux bébés nés en France, que « ila part de la population issue des mondes arabo-musulmans représentera mécaniquement, du fait du renouvellement des générations, un habitant sur cinq, voire sur quatre, si la tendance haussière […] se poursuit./i » Dans l'opus suivant, iLa France d'après/i, le sondeur compare l'implantation des permanences du parti communiste avec celle des mosquées en Seine-Saint-Denis, « ilaissant le lecteur s'imaginer que Marx est en quelque sorte (grand-)remplacé par Mahomet en Seine-Saint-Denis/i »span class="spip_note_ref" [a href="#nb2" class="spip_note" rel="appendix" title="« Un récit anxiogène adossé à une géographie inventive », Jean Rivière, (…)" id="nh2"2/a]/span./p
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div class='spip_document_16240 spip_document spip_documents spip_document_image spip_documents_center spip_document_center'
figure class="spip_doc_inner" a href='https://www.acrimed.org/IMG/png/marxetmahomet.png' class="spip_doc_lien mediabox" type="image/png" img src='https://www.acrimed.org/local/cache-vignettes/L500xH334/marxetmahomet-1f792.png?1760972030' width='500' height='334' alt='' //a
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centerJérôme Fourquet, iLa France d'après/i, Seuil, 2023, p. 49.
pReproduit dans Jean Rivière, a href="https://metropolitiques.eu/Un-recit-anxiogene-adosse-a-une-geographie-inventive.html" class="spip_out" rel="external"« Un récit anxiogène adossé à une géographie inventive », iMétropolitiques/i/a, 18/01/24./p
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p/brIl arrive aussi à Jérôme Fourquet de faire fructifier son capital médiatique, en participant comme invité d'honneur à de grands événements, comme lorsqu'il a ouvert le forum « Viva ! », tenu a href="https://www.arretsurimages.net/chroniques/une-famille-en-or/forum-viva-le-joli-coup-de-com-des-anti-ivg" class="spip_out" rel="external"sous l'impulsion de plusieurs associations anti-IVG/a, aux côtés de l'ancien président de la Manif pour Tous. « iOn devine chez lui un léger tropisme droitier/i », lance timidement Eugénie Bastié (iLe Figaro/i, 12/10/21), dans un panégyrique beaucoup moins timide à propos de son œuvre. Nous le décelons aussi : « iIslamogauchisme/i », durcissement de la répression pénale, inquiétude des chefs d'entreprise, nostalgie de « ila France d'avant/i », désir de stabilité politique, crainte de « idébordements démographiques/i » : en somme, quel que soit le sujet, Jérôme Fourquet n'exprime que de banales opinions conservatrices, pour ne pas dire réactionnaires, souvent recouvertes, par un « abus de science »span class="spip_note_ref" [a href="#nb3" class="spip_note" rel="appendix" title="Expression empruntée au sociologue Pierre Bourdieu." id="nh3"3/a]/span, du vernis de « l'étude d'opinion ». Dans un portrait qui lui était consacré en 2023, iLe Nouvel Obs/i le qualifiait ainsi « id'oracle des déclinistes/i » (3/10/23)./p
pAuréolé du statut de meilleur analyste de la société française, l'oracle Fourquet voit souvent sa parole être mise en avant pour contrebalancer celle… de véritables scientifiques. C'est même une habitude sur le service public : en octobre 2023, la matinale de France Inter place Fourquet face à l'économiste Thomas Piketty. Rebelote en mai 2024, quand le sondeur et le journaliste Nicolas Beytout (iL'Opinion/i) sont opposés à l'économiste Michaël Zemmour. France Culture ne déroge pas à la règle : face à l'économiste Gabriel Zucman, le grand invité (10/09/25), la présence de Jérôme Fourquet a été jugée inévitable afin de bien rappeler que « iles-Français/i » subissent déjà une forte « ipression fiscale/i »… L'illustration la plus spectaculaire de ce dispositif et de la dynamique qu'on y observe est probablement le passage de Vincent Tiberj à la matinale de France Inter (3/09/24), flanqué, une nouvelle fois, de l'immanquable Fourquet. Le sociologue vient présenter son travail (iDroitisation, mythes et réalités/i, PUF, 2024), qui, à l'inverse des constats de Fourquet, conteste l'antienne médiatique d'une « idroitisation générale/i » de la société. Mais l'on sent bien, dès le début de l'entretien, à laquelle des deux thèses Nicolas Demorand accorde le plus de crédit : « iVincent Tiberj, ce qui dit Jérôme Fourquet sur le "régalien"/i [immigration et sécurité, NDLR]i, est-ce que ça vient limiter la portée de votre thèse ?/i » ; « iVenons-en aux européennes, le total "gauche", 31%, et le total "droite/extrême droite", 44% […], est-ce que ça c'est atmosphérique, Vincent Tiberj ?/i » ; « iMais quand le RN recueille 31% des suffrages aux européennes, puis dans la foulée un nombre record de députés à l'Assemblée, est-ce que votre analyse, elle est pas un peu légère, là, Vincent Tiberj ?/i ». En face, les questions adressées à Jérôme Fourquet sont beaucoup plus amènes et l'invitent, en quelque sorte, à endosser le rôle d'arbitre des débats : « iComment recevez-vous l'analyse de Vincent Tiberj, Jérôme Fourquet ?/i » Le dispositif a donc un double effet : d'un côté, le temps de parole d'un sociologue qu'on entend rarement est divisé par deux, au bénéfice du temps de parole d'un sondologue qu'on entend tout le temps ; et de l'autre, le dispositif décrédibilise la recherche en sciences sociales, au profit d'une vision sondagière du « réel » qui, on le sent bien, a les faveurs du présentateur./p
pLes sentences prononcées par Jérôme Fourquet ont l'autre avantage, pour les journalistes, de receler une vision du monde extrêmement simpliste, qui tient parfaitement dans une interview de 4 minutes : « iLe propos est clair et net, sans afféteries dandys, ni prétentions universitaires/i », s'enthousiasme ainsi Luc Le Vaillant dans iLibération/i (03/05/19). À cet égard, Fourquet est le spécialiste pour lancer à la volée dans le débat public des concepts-en-deux-mots ou des problématiques faciles à digérer : « iculture yankee/i », « iindice de boboïsation/i », « iFrance Triple A/i » contre « iFrance backstage/i », « ila France du barbecue et celle du quinoa/i », « icivilisation périurbaine/i », « ikebab contre blanquette de veau/i », « ila France des Kevin et celle des Mohamed/i », « iFrance hydroponique/i »... C'est avec ce genre de hochets « attrape-journaliste » que Fourquet « idonn[e] le "la" de l'interprétation de la société française/i »span class="spip_note_ref" [a href="#nb4" class="spip_note" rel="appendix" title="« Les moutons de Monsieur Fourquet », La Grande Conversation, 25/04/23." id="nh4"4/a]/span : « iMoi, je dis ce que je vois, je le nomme, et après cela ne m'appartient plus/i », expliquait-il sérieusement au iNouvel Obs/i (5/10/23)./p
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h3 class='article_intertitres'Une référence intellectuelle des droites/h3
p/brAu fil de ses passages médiatiques, le presque sociologue et pas tout à fait géographe est en tout cas devenu une référence intellectuelle, du « cercle de la raison » à l'extrême droite, d'Emmanuel Macron à Renaud Camus. Il suffit pour s'en convaincre de jeter un œil à l'accueil de ses ouvrages acclamés par toutes les nuances de la presse bourgeoise, depuis des années. « iAussi captivant que rigoureux/i » (iLe Figaro/i, 18/11/21), Fourquet « iausculte la France et ses fractures/i » (iLa Dépêche/i, 8/10/23), dresse un tableau « iaussi passionnant qu'inquiétant/i » (iLe Figaro/i, 18/11/21), « iexceptionnel de lucidité et de clarté/i », « iquasi anthropologique/i » (iLes Échos/i, 8/10/21) et « iconfirme son statut de meilleur observateur de la France contemporaine/i » (iOuest-France/i, 19/10/23), rien que ça :/p
blockquote class="spip"
pIl semble connaître le bar-tabac de Marly-Gomont aussi bien que les Carrefour de la banlieue lyonnaise. On l'imagine avoir testé quelques pas de danse country dans le Béarn et dévoré des kébabs dans l'Est. À force d'analyser la France en tous sens, Jérôme Fourquet réussit à nous en rendre familier chaque recoin. On attend donc avec impatience chacune de ses cartes postales./p
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pDes « cartes postales » encensées comme il se doit au iFigaro/i, puisque Fourquet parle de « la France qui n'est plus la France » à cause de la « idéchristianisation/i », de l'« iimmigration/i », ou encore de l'« iaméricanisation/i » (iLe Figaro/i, 23/10/24). Des thèmes qui inspirent des élans particulièrement lyriques au directeur délégué de la rédaction, Vincent Trémolet de Villers (5/12/24) :/p
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pC'est un étrange talent que celui de Jérôme Fourquet. Voilà des années qu'il décrit les métamorphoses françaises et, avec elles, la disparition du pays de notre enfance. Adieu les bouilleurs de cru, bonjour les dealers de coke. Fini la blanquette de veau, l'heure est aux tacos. Oublié la variété qui, en un refrain, faisait l'unité de tout un peuple, « y'a pas moyen Djadja », quand la Garde républicaine se dandine avec Aya Nakamura. Effacé les jeunes filles au prénom de Marie et, avec elles, l'ombre de la croix qui donnait à notre société son cadre et sa matrice. Tout change, nous dit Jérôme Fourquet./p
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pMais Jérôme Fourquet ne plaît pas qu'aux têtes pensantes du journalisme, parmi lesquelles les catholiques conservateurs du iFigaro/i. Son omniprésence médiatique, et la capacité de ses sondages et de ses livres à rythmer le débat politico-médiatique, ont fait de lui quelqu'un que le pouvoir écoute. Son concept d'« iarchipelisation/i », par exemple, a fait florès dans la classe politique, de Laurent Wauquiez à Marion Maréchal, en passant par le président de la République. La société serait « disloquée » en catégories dont les intérêts sont antagonistes – jusqu'ici tout va bien – mais « iil ne s'agit plus de classes sociales […], mais de ruraux, d'urbains, de péri-urbains, boomers et milleniums et – nous y voilà – de Français de souche et d'immigrés, de chrétiens ou de musulmans/i », relève Thomas Legrand (France Inter, 4/04/22). Où se dévoile un autre avantage du « fourquettisme », qui explique probablement l'attrait du monde médiatique pour ses « thèses » : l'effacement des classes sociales au profit des habitudes de consommation. En septembre 2023, a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/05/26/emmanuel-macron-les-sociologues-et-les-classes-moyennes-recit-d-un-dejeuner-confidentiel-a-l-elysee_6174904_823448.html" class="spip_out" rel="external"iLe Monde/i relate/a un autre épisode témoignant de l'insertion du sondologue dans les cercles de pouvoir : un déjeuner confidentiel à l'Elysée baptisé « idéjeuner des sociologues/i », où, sur les 4 convives, un seul était vraiment sociologue – et ce n'était pas Fourquet ! C'est au cours de ce déjeuner, agissant « icomme le conseiller occulte de Macron/i », que Fourquet va, selon iLe Monde/i, souffler au président le terme de « idécivilisation/i », que celui-ci réemploiera quelques mois plus tard. Le sondeur prétend emprunter ce terme au sociologue allemand Norbert Eliasspan class="spip_note_ref" [a href="#nb5" class="spip_note" rel="appendix" title="Dans Libération, le docteur en science politique Christophe Majastre (…)" id="nh5"5/a]/span, mais on le retrouve beaucoup plus sûrement – et de façon beaucoup plus cohérente avec le reste des écrits de Fourquet – dans les livres du théoricien d'extrême droite Renaud Camus, ou dans la bouche de Philippe de Villiers./p
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centerstrong***/strong/center
p/brJérôme Fourquet a pris en quelques années une place prépondérante dans le débat public français. Non pas grâce à la solidité de ses travaux ou aux extraordinaires découvertes qu'il y ferait, mais grâce, au contraire, à la parfaite conformité des thèses qu'il présente avec les attendus journalistiques. Les problèmes posés par la centralité et les usages médiatiques des sondages (et des sondeurs) sont a href="https://www.acrimed.org/Les-sondologues-piliers-de-l-editocratie"nombreux et documentés/a depuis de longues années. Jerôme Fourquet n'en est que l'une des incarnations modernes et participe, comme toutes les autres avant lui, bien plus de la fabrication de l'opinion que de sa mesure. En étroite collaboration avec le monde médiatique, contre les sciences sociales, et au profit de toutes les droites./p
p/brstrongJérémie Younes/strong/p/div
hr /
div class='rss_notes'div id="nb1"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh1" class="spip_note" title="Notes 1" rev="appendix"1/a] /span« "Une alternative aux kebabs" : comment McDo s'est emparé d'un petit village des Yvelines », iLe Figaro/i, 28/09/25./p
/divdiv id="nb2"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh2" class="spip_note" title="Notes 2" rev="appendix"2/a] /span« Un récit anxiogène adossé à une géographie inventive », Jean Rivière, iMétropolitiques/i, janvier 2024./p
/divdiv id="nb3"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh3" class="spip_note" title="Notes 3" rev="appendix"3/a] /spanExpression a href="https://pierrebourdieuunhommage.blogspot.com/2021/03/videos-pierre-bourdieu-sur-les-sondages.html" class="spip_out" rel="external"empruntée au sociologue Pierre Bourdieu/a./p
/divdiv id="nb4"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh4" class="spip_note" title="Notes 4" rev="appendix"4/a] /span« Les moutons de Monsieur Fourquet », La Grande Conversation, 25/04/23./p
/divdiv id="nb5"
pspan class="spip_note_ref"[a href="#nh5" class="spip_note" title="Notes 5" rev="appendix"5/a] /spanDans iLibération/i, le docteur en science politique Christophe Majastre expliquera que Norbert Elias s'exprimait de son vivant « icontre l'usage politique de sa théorie pour donner une caution scientifique au vague sentiment de dissolution des mœurs/i » (26/05/23)./p
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