le voyageur de Nietzsche

En effet, j'aurais pu le mettre cet aphorisme, il me plaît bien... mais je ne connais pas suffisament bien l'oeuvre de Nietzsche pour cela... Alors je préfère  vous laisser nous les faire découvrir au fil de l'eau.

Fidèle à l'esprit de poch', qui ne fait jamais ce qu'on lui dit de faire, ou qui se complait dans certains aspects du désordre, ou qui se méfie de la "pensée unique" :), je mettrais tout de même mon brin de sel dans ce vaste programme mais à une condition : celle de pouvoir citer des aphorismes d'autres penseurs ou de poch' que Nietzsche. Cela nous permettra de diversifier nos sources de pensée poétique ou philosophique, et notre livre de poch n'en sera que plus riche. Qu'en pensez-vous ?

"Aucun oiseau ne s'élève trop haut s'il vole de ses propres ailes"
"Si les portes de la perception étaient nettoyées, toute chose apparaîtrait à l'homme telle qu'elle est, infinie."
"L’imagination n’est pas un état ; c’est l’existence humaine toute entière." William Blake [10]

C'est pas par hasard que j'ai choisis quelques aphorismes du cléèbre William Blake, mais parce qu'elle m'évoque le magnifique film de Jim Jarmush [11] "Dead Man [12] ". 

Tout commence par un voyage, un train qui emmène William Blake, jeune comptable de Cleveland jusqu’à Machine, ville à la frontière de l’ouest américain, où un poste lui a été promis. [..] Arrivé en ville avec qq jours de retard, il apprend que le poste est déjà pourvu, se réconforte dans les bras de la jolie Thel, est pris dans une fusillade avec l’ex de Thel- accessoirement le fils de son déjà ex-patron et baron de la ville-, le tue, prend une balle, s’enfuit tant bien que mal, est recherché pour meurtre…

Jusque là, le film se tient encore, mais ca ne va pas durer. A demi mort, William Blake est trouvé et soigné par Nobody, un indien rejeté par les siens. Dans sa jeunesse, Nobody a été capturé par les anglais et instruit tel un animal de foire. C’est à cette occasion q’il découvre les écrits libertaires et visionnaires de William Blake. Nobody est persuadé d’avoir rencontré le fantôme perdu du poète qu’il doit donc ramener dans le royaumes des morts, là où la séparation de la mer et de la terre disparaît. Le voyage commence…

A partir de là, Dead man n’est plus racontable, ou plutôt le récit des faits devient sans intérêt. Il cesse d’etre un film pour devenir une véritable expérience cinématographique qui ne trouve écho que dans la sensibilité et la subjectivité (d’aucun diront que c’est le début du grand n’importe quoi et d’un auteurisme au mieux acharné, au pire futile). Dead man est un voyage à travers différents mondes. Un voyage sans queue ni tête, opaque, décousu, terriblement charnel. Un voyage mystique et philosophique sur l’appartenance au monde et sur la réalité. Un voyage à travers l’Amérique, brutale et primitive, industrielle, rongée par le vice, le goût du profit et le gaspillage. Les trappeurs tirent sur les bisons comme ils s’exerceraient aux fléchettes, les rôdeurs dégainent leurs jouets métalliques pour ruiner toute diplomatie. La civilisation excelle dans l’infamie et se distingue par une absence notoire de civilité. Aride et gangrenée, l’amour est une impasse. Une Amérique où les exclus, les indiens, vivent en marge comme ils le peuvent. Un voyage qui prend à rebours tous les codes du genre. Ici, point de héros, de bravoure, de morale, de gentils sauvages stéréotypés… Juste le chemin initiatique de 2 hommes vers la mort. En un sens, deux hommes déjà morts, deux fantômes qui s’en retournent vers leur domaine.[...]

Le voyage est rythmé par la poésie de Blake et les accords détachés improvisés, lancinants et hypnotiques de Neil Young, par une BO qui respecte le montage et ses silences, écrite sur mesure, comme un commentaire du musicien sur le film.

• http://www.mouton-rebelle.com/Dead-man.html [13]
• http://www.filmdeculte.com/culte/culte.php?id=119 [12]

Nobody, le guide est un indien solitaire, renié par les siens. Nobody se présente comme celui qui parle pour ne rien dire. En effet, il parle beaucoup, récite des poèmes, des proverbes. Il est solitaire, parle beaucoup sans qu'on ne le comprenne, retranché au fond de la forêt, se sont autant de signe qui nous permettent de penser que cet indien n'est autre que la conscience de Blake. "Celui qui parle pour ne rien dire", c'est directement la description que celui qui ne sait pas écouter sa conscience pourrait faire 

On pourrait aussi s'attarder sur les poèmes et aphorismes de son autre film "Ghost Dog" qui respecte à la lettre les préceptes de l'Hagakure, Le livre du samouraï. [14] (Dans un prochain billet...)

"Je vois les poètes comme des visionnaires hors-la-loi". Jim Jarmush [11]

En conclusion, je passe le relai à une  autre poch' avec cet aphorisme :

"Pourquoi se donnerait-on tant de peine à agir pour acquérir de la renommée s'il ne fallait que s'amuser à parler pour l'obtenir". Serge Gainsbourg

Borniol